Sujet de thèse Conception de tissages 3D pour l`amélioration des

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Sujet de thèse Conception de tissages 3D pour l`amélioration des
Sujet de thèse
Conception de tissages 3D pour l’amélioration des
propriétés d’amortissement et d’impact des matériaux composites
Jean-François Ganghoffer Professeur, LEMTA, UMR CNRS 7563, Université de
Lorraine.
Artan SINOIMERI Professeur, LPMT (Laboratoire de Mécanique et Physique Textile).
Université de Haute-Alsace, Mulhouse, France.
Collaborateurs :
Institute for High-Speed Dynamics, Ernst-Mach-Institute (EMI), Freiburg-in-Breisgau,
Allemagne.
Problématique générale
Les structures tissées présentent des potentialités intéressantes pour des applications
où l’on recherche des propriétés mécaniques élevées à faible poids ; en raison de leur
faible résistance en cisaillement, les tissés ont une déformabilité hors plan très
importante. La modélisation des tissages est de façon générale une tâche ardue en
raison de la forte anisotropie et des non linéarités géométriques et matériau présentes,
qui sont liées à la résistance mécanique spécifique des fils constitutifs (fibre de verre ou
de carbone), la nature visqueuse des fibres et des fils, et aux fortes interactions entre
fils à l’échelle mésoscopique de l’armure.
Les tissages 3D : une rupture technologique
Les renforts des composites fibreux sont des assemblages de mèches de fibres à
hautes performances (telles que fibres de carbone ou de verre) obtenus par tissage.
Les tissages 2.5D sont obtenus en imbriquant plusieurs épaisseurs de chaîne avec
plusieurs épaisseurs de trame. Le procédé de tissage 2.5D permet d’obtenir des tissés
très épais (plusieurs dizaines de cm) qui ne posent pas les problèmes
d’endommagement par délaminage des empilements de renforts 2D ou de plis
unidirectionnels. Dans les tissages 3D, une troisième direction de mèches est ajoutée
dans l’épaisseur du renfort. La structure complexe et multiéchelles du renfort
conditionne une grande partie du comportement mécanique du composite à renfort
tissé. La connaissance du comportement du renfort fibreux aux différentes échelles est
nécessaire pour prédire la géométrie du renfort à la fin du procédé de mise en forme et
d’imprégnation. Un ensemble de renforts de composites à géométrie 3D a été
développé pour éviter certains problèmes liés à l'empilement de couches, ce qui est le
cas des composites stratifiés : ils sont en particulier sensibles au délaminage et
présentent une faible résistance à l'impact. Le tissage angle interlock ou multilayer
interlock crée une liaison entre les couches par le tissage des fils chaine (fig. 1).
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Figure 1 : Tissage interlock couche à couche et zoom sur la mésostructure d’un interlock 3D
(Snecma)
Ce mode de tissage apporte un compromis intéressant entre propriétés mécaniques du
composite et formabilité du renfort. Les tissages 3D ont des propriétés dans l’épaisseur
et inter laminaires qui leur confèrent une résistance à l’impact balistique nettement
supérieure à celle des tissages et des stratifiés 2D (Ha-Minh et al., 2011) ; en particulier,
la présence de fibres dans la direction transverse diminue fortement les phénomènes
de délamination et de rupture. De plus, des fibres à hautes performances (verre,
carbone, aramide, céramique, polyéthylène) peuvent être tissées dans ces
configurations 3D. Ces composites ont des applications potentiellement intéressantes en
aéronautique et plus généralement pour les véhicules à grande vitesse , en raison d’un
rapport résistance sur poids élevé et de la possibilité de réaliser des préformes
complexes. Les tissages 3D d’apparition relativement récente offrent des propriétés en
compression importantes susceptibles d’en faire de bons candidats à la résistance au choc et à
l’impact.
Le comportement du renfort à l'échelle mésoscopique (comportement de la maille
élémentaire) est spécifique, complexe compte tenu de la géométrie et encore assez
peu connu et modélisé. Les assemblages successifs de fibres en mèches, puis de
mèches en tissus, font du renfort tissé un matériau fondamentalement multiéchelles : le
comportement mécanique macroscopique du tissu est directement hérité de son
comportement aux échelles inférieures. Trois échelles d’observation du renfort sont
identifiées (Fig. 2), soit l’échelle microscopique de la fibre, l’échelle mésoscopique de la
mèche, et l’échelle macroscopique ou structurale de la pièce complète.
Figure 2 : les différentes échelles d'un renfort tissé
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Les propriétés élastiques de la pièce composite dépendent au premier ordre de
l'orientation locale des renforts. La technologie de tissage 3D utilisée pour réaliser les
préformes vise à créer une pièce d'épaisseur variable, à partir de plusieurs couches de
trame et chaîne, en liant les différentes couches de manière à assurer la cohésion
mécanique de l'ensemble et à assurer en particulier de bonnes performances quant à la
résistance aux chocs. La structure complexe et multiéchelles du renfort conditionne une
grande partie du comportement mécanique du composite à renfort tissé ; les
performances de la pièce sont largement contrôlées par la manière dont les différents
renforts peuvent être disposés dans l'espace pour former le squelette de la pièce, selon
ce qu'on appelle l'armure du tissage, qui décrit le positionnement relatif des différentes
mèches.
Comportement multiéchelles des tissages 3D : un verrou scientifique
En dépit du grand nombre de travaux de la littérature et de stratégies de modélisation
aux trois échelles mentionnées, la transition entre les échelles reste un verrou
scientifique (Hamila et Boisse, 2008). La simulation du comportement mécanique du
renfort et de sa perméabilité permettent d’éviter une phase d’essai-erreur très onéreuse
lors de la conception de pièces en composites à renforts tissés. Un effort de recherche
important est donc actuellement consacré au comportement du renfort sec et à la
simulation de sa déformation. L’objectif est de prédire les caractéristiques géométriques
et mécaniques, soit :
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



La position des mèches et fibres après déformation (échelle microscopique et
mésoscopique).
Les caractéristiques mécaniques du renfort déformé (toutes échelles).
Les mécanismes locaux d’endommagement dans des situations d’impact et
d’explosion, les énergies mises en jeu et les effets de vitesse de déformation liés
à la rhéologie des fibres et de la matrice.
L’impact de la géométrie des renforts déformés sur la perméabilité.
Les propriétés effectives de l’ensemble renfort / matrice, ce en statique (basses
fréquences) et en dynamique (moyennes et hautes fréquences).
Des études ont déjà été menées concernant ces ‘matériaux’, en particulier par des
laboratoires de recherche universitaires, de l'ONERA et de SNECMA dans le cadre des
programmes Maia et PRC composites. Si la technologie de tissage de ces tissus
complexes est relativement bien connue et maîtrisée, il est encore très difficile (i) de
bien caractériser et modéliser géométriquement ces architectures ordonnées, 3D et
multi-échelles et (ii) d’observer, de comprendre, puis de modéliser leurs
micro/méso/macro mécanismes de déformation au cours des étapes de mise en forme
et lors de sollicitations tant statiques que dynamiques, à l’état sec ou humide. Les
difficultés actuelles se rencontrent à différents ordres, expérimentaux, théoriques et
numériques. Elles sont telles que les architectures induites au cours des étapes de
mise en forme sont très mal maîtrisées : il est ainsi ardu d’anticiper taux, orientations,
positions et déformation des fibres et des contacts fibres-fibres au sein des mèches,
des mèches et des contacts mèche-mèche au sein des tissus et présentent souvent
des défauts fâcheux et préjudiciables. Si ces méconnaissances des architectures
induites ont des conséquences importantes sur les propriétés des pièces produites,
elles touchent d’abord d’autres propriétés capitales de mise en forme, comme la
perméabilité, grandeur clé dans les étapes d’imprégnation des renforts par le polymère
(procédé RTM).
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Les tissages 3D constituent une solution technologique relativement nouvelle et en
rupture avec l’existant ; ceci allié à la complexité de leur architecture interne explique
que les études consacrées aux mécanismes d’endommagement et à la rupture de ces
structures sous sollicitations dynamiques soient encore relativement peu nombreuses,
et très souvent restreintes à des architectures ou des fibres très spécifiques. Il n’existe
ainsi pas d’approche de modélisation prédictive apte à rendre compte du comportement
de tissages 3D en fonction de l’architecture interne et des caractéristiques rhéologiques
des fils et de la matrice.
L’objectif principal de la thèse est alors de proposer un panel d’outils de caractérisation
et de méthodes de modélisation pour anticiper et optimiser la genèse des architectures
fibreuses tissées 3D et prédire leur comportement mécanique statique et dynamique.
Ces travaux permettront une bien meilleure compréhension des mécanismes de
déformation de ces milieux aux différentes échelles, ainsi qu’une optimisation de leurs
propriétés en service pour des applications militaires, en termes d’architecture et de
propriétés rhéologiques des fils et de la matrice.
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