sucres rapides s rapides , sucres lents , index glycémique que croire

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sucres rapides s rapides , sucres lents , index glycémique que croire
«SUCRES
UCRES RAPIDES, SUCRES LENTS, INDEX GLYCÉMIQUE :
QUE CROIRE
?»
PR MARTINE LAVILLE
Les glucides sont un des constituants essentiels de notre apport énergétique puisqu’ils
doivent nous donner environ 50% de notre apport calorique total. La qualité des glucides est
cependant souvent mis en cause avec un souhait de diminuer les sucres rapide de notre
alimentation et une polémique sur sucre rapide et sucres lents. Ces dernières années ont été
marquées par le souhait de contrôler les variations métaboliques survenant dans la phase
post prandiale afin d’éviter des excursions trop importantes de la glycémie, de l’insulinémie,
des triglycérides, dont l’augmentation chronique
est délétère sur le plan cardio-vasculaire. L’exemple le plus remarquable concerne sans
doute l’évolution de la glycémie post prandiale avec le développement du concept d’index
glycémique
(Jenkins, 1981). Celui-ci consiste à classer les aliments en fonction de l’aire sous courbe de
la glycémie obtenue dans les deux heures après l’ingestion de 50 g équivalent glucose du
produit (en comparaison avec la référence glucose ou pain blanc). Ceci conduit à des tables
de classement complexes et à des dérives déplorables : étiquetage feu rouge, feu vert en
fonction du niveau d’Index Glycémique, quelque soit le produit. Que faut-il donc croire ?
Pour éclairer le débat, je souhaiterais apporter quelques éléments issus de nos travaux :
- l’hyperglycémie chronique a bien montré son caractère délétère notamment chez les
diabétiques. Récemment, H Vidal et R Rhabasa-Lohret (Montréal) ont pu montrer que, chez
des
sujets sains, 3 h d’hyperglycémie (10 mM en clamp hyperglycémique) étaient responsables
d’une diminution d’expression d’un très grand nombre de gènes dans le muscle et le tissu
adipeux, seuls les gènes du stress étant augmentés. L’hyperglycémie apparaît donc délétère
même en aigu chez des sujets sains.
- l’étude des événements métaboliques de la phase post prandiale après ingestion de
glucose ou de céréales, montre que ceux-ci sont loin d’être limités à 2 heures après
ingestion, ni aux simples valeurs de glycémie. Nous avons pu ainsi montrer qu’après
ingestion de glucose seul, la glycémie et l’insulinémie reviennent aux valeurs basales après
3 h, alors que l’apparition du glucose venu de l’alimentation se poursuit jusqu'à 6 heures
avec une persistance de l’inhibition de la production endogène de glucose.
Lorsqu’on s’intéresse à des aliments d’index glycémique bas comme les pâtes, la glycémie
et l’insulinémie ne s’élèvent que peu, mais ne retournent aux valeurs basales que très
tardivement
(Normand, 2001). L’ajout d’huile aux pâtes, abaisse encore la glycémie et l’insulinémie
postprandiales précoces, mais la poursuite de l’étude sur 420 min montre une réponse
biphasique
et les aires sous courbe totales de la glycémie et l’insulinémie sont identiques. L’étude de
l’apparition du glucose venu des pâtes met bien en évidence ce retard d’apparition induit par
l’huile, probablement par retard de la vidange gastrique.
La physiologie ne saurait donc se contenter de l’index glycémique !
Sucres rapides, sucres lents, index glycémique : Que croire ? – M. Laville
Chaire Danone ▪ Institut Danone ▪ 09/11/2009 ▪1
Le pic postprandial du glucose peut être modulé par l’ajout de fibres. Ainsi l’ajout de fibres de
bêtaglucan à de la polenta est responsable d’une légère diminution du pic de glycémie et
d’insulinémie, avec une apparition du glucose exogène retardée.
Le pic postprandial du glucose peut être modulé de différentes manières. L’index glycémique
est réducteur car il n’est qu’un reflet à très court terme et ne prend pas en compte l’ensemble
des évènements de la phase postprandiale, et surtout ne préjuge pas des moyens ayant
conduit à sa modulation, l’ajout de lipides étant un des moyens les plus efficaces pour
réduire l’index glycémique
mais certainement pas le plus recommandable. Enfin, on ne consomme pas des aliments
mais des repas, les interactions entre aliments vont moduler la réponse métabolique.
La nécessité de réduire le pic post prandial de glucose et d’insuline ne se discute pas, on
peut cependant se poser la question de la nécessité d’évoluer vers un état de plateau sans
pic, état
stable sans sensation de réplétion et satiété, ni de vide et de faim. La physiologie de la
nutrition passe par une alternance entre l’état de jeûne et l’état nourri. D’importantes
variations des flux métaboliques, des sécrétions hormonales, des activités enzymatiques,
des expressions de gènes suivent ces changements d’état.
Il apparaît donc que les recommandations nutritionnelles doivent être étayées par des
études de physiologie nutritionnelle, qui elles-mêmes doivent être prolongées par des études
d’intervention à moyen et long terme pour s’assurer des conséquences santé. Le besoin de
simplification qu’imposent
les recommandations ne doit cependant pas être réducteur car on prendrait le risque
d’interprétations fausses voire délétères.
Ceci justifie une collaboration très en amont entre chercheurs et industriels de l’agroalimentaire tant pour orienter les recherches sur les modifications technologiques des
aliments, que pour étudier les répercussions physiologiques de ces modifications.
Sucres rapides, sucres lents, index glycémique : Que croire ? – M. Laville
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