1 Les artistes du Moyen Âge

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1 Les artistes du Moyen Âge
Reg’ARTS croisés : Coup de théâtre au Château de Tiffauges
Les arts vivants au Moyen Âge
Les artistes du Moyen Âge
1 Jongleur : comédien, musicien ou danseur ?
Le jugleor, « celui qui faisait profession de divertir les gens »,
est le plus souvent considéré comme un marginal, en dehors
de la société médiévale.
Mal aimés de l’Eglise, les jongleurs symbolisaient le vice et
leurs acrobaties étaient qualifiées d’« infâmes sauts et infâmes
gestes » (« turpes saltus, turpes gestus »). On retrouve ainsi
des jongleurs sculptés sur les éléments architecturaux de lieux
de culte, afin d’illustrer la condamnation de l’Eglise.
A l’inverse, la dimension récréative de la jonglerie pouvait être
mise au service du culte religieux, comme en témoigne
certaines sources (chapiteaux sculptés de l’abbaye de Cluny,
tropaire*
tropaire* d’Auch).
Artistes pluridisciplinaires, des représentations illustrent les
différentes spécialités des jongleurs et jongleresses du Moyen
Âge : danseuse aux cymbales, jongleur de balles et de
couteaux, musicien dansant avec ses instruments, montreur
d’animaux, funambule ou « danseur de corde », jongleur aux
assiettes, conteur de fabliau *,
* acrobate réalisant le pont après
s’être mis en équilibre sur les mains… Le jongleur se
caractérise par ses figures spectaculaires et l’aspect
« désordonné » de ses mouvements, alors que le « geste
mesuré » est considéré comme le signe de la maîtrise des
passions par le clergé.
Sculpture, église de Bourges, XIIe siècle,
Lyon, Musée des Beaux-Arts
détail du jongleur à la balle
L’expression « payer en monnaie de singe », provient de l’habitude laissée par les jongleurs
montreurs de singe qui pouvaient s’acquitter des péages appliqués à l’entrée des villes, en faisant un numéro.
Sur la place du marché, les jours de foire, les jongleurs se produisent, contant, mimant et chantant des
légendes populaires, des histoires de chevaliers et de saints, des chansons de geste comme la
Chanson de Roland.
A partir du XIVe siècle, les jongleurs se spécialisent, se sédentarisent et reçoivent un salaire en
échange de leurs prestations, obtenant ainsi un statut social plus stable et reconnu.
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Reg’ARTS croisés : Coup de théâtre au Château de Tiffauges
Des acteurs laïcs s’organisent en « Puys* » ou « Confré
Confréries* ». La musique devient l’affaire des
ménétriers ou ménestrels * et la danse celle des maître à danser.
Le jongleur est un artiste exclusivement médiéval, qui disparait après avoir donné naissance à
plusieurs catégories d’artistes.
2 Célébrités médiévales ?
Parmi les trouvè
trouvères* dont les œuvres nous sont parvenues, Adam de la Halle, dit « le Bossu » est
sans doute le plus connu de la fin du XIIIe siècle. Né vers 1235-1237, sa vie est assez bien
documentée, même si plusieurs points de sa biographie restent obscurs ou controversés. Il était clerc,
et se présentait comme « maître ès arts ». Il a sans doute fait ses études à Paris. Son père Henri de la
Halle était employé à l’échevinage d’Arras.
Lié à la puissante Confré
Confrérie * des jongleurs et bourgeois d’Arras, qui regroupe hommes d’affaires et
hommes de droit, Adam de la Halle écrit pour elle le Jeu de la feuillée en 1276. Vers 1280, il entre à la
cour du seigneur d’Arras, Robert II, comte d’Artois, neveu de Saint Louis. Le comte est en effet connu
pour s’être entouré de musiciens et jongleurs. Adam suit Robert II d’Artois en Italie, et rejoint la cour de
Charles d’Anjou, pour lequel il écrit la Chanson du roi de Sicile. Entre 1283 et 1285, il compose le
célèbre Jeu de Robin et Marion.
Au Moyen Âge, on ne peut pas vraiment parler de « comédien » ou
d’« acteur », car on ne voit que très rarement la même troupe jouer de façon
régulière sur une scène fixe dans une ville, avant le XVe siècle. Les
personnages des jeux de théâtre sont le plus souvent la population locale
ou des inconnus payés par les princes ou les villes et regroupés en
associations, des artisans, des bourgeois, des écoliers, des confrères, des
clercs de justice, des chanteurs de geste…
Cependant, au XIVe siècle, des mystères (voir « L’art du théâtre religieux ») et
des farces* sont joués à la cour des princes, à l’Hôtel d’Orléans, à l’Hôtel de
Nesle, au Louvre, des registres de comptes attestant la rétribution de ces
acteurs appelés joueurs de farce.
Jongleur
Source inconnue
On ne peut évoquer les joueurs de farces de la fin du Moyen Âge sans citer
le légendaire auteur et acteur Triboulet, ou plus exactement les Triboulet, qui
ont fait couler beaucoup d’encre. Triboulet fut le nom ou le sobriquet d’un
acteur, mais surtout le nom des fous de René d’Anjou, de Louis XI, de Louis
XII et de François Ier.
A la fin du Moyen Âge, les fous sont généralement représentés avec un capuchon (ou coqueluchon)
muni d’oreilles d’ânes garnies de grelots, un long vêtement vert et jaune, couleurs de la folie, avec des pans
découpés en pointe, pour représenter l’instabilité. Dans sa ceinture, une épée en bois et une baquette munie
d’une vessie de porc remplie de pois secs pour symboliser la tête vide du fou. Et dans sa main, une marotte,
sorte de sceptre surmonté d’une figure grotesque, à l’imitation des rois, pour symboliser un contre-pouvoir.
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Reg’ARTS croisés : Coup de théâtre au Château de Tiffauges
Quelques trouvè
trouvères* des XIIe et XIIIe siècles
BLONDEL DE NESLE : sans doute un seigneur du nord de la France. Il écrivit 24 chansons courtoises
entre 1175 et 1210.
CONON DE BETHUNE : Actif entre 1180 et 1220. Grand seigneur du nord de la France. Il est nommé
Régent de l'Empire de Constantinople à l'issu de la IVe Croisade.
ETIENNE DE MEAUX : Trouvère du XIIIe siècle dont il nous reste deux chansons.
GACE BRULE : Chevalier champenois de la deuxième partie du XIIe siècle. Il nous reste de lui près
d'une centaine de chansons.
GILLEBERT de BERNEVILLE : Deuxième partie du XIIIe siècle. Actif à Arras et à la Cour de Brabant.
GUIOT DE DIJON : Trouvère bourguignon de la première moitié du XIIIe siècle dont il reste six
chansons.
JEAN BODEL : Trouvère actif à Arras entre 1180 et 1210. Il nous reste de son abondante production
cinq pastourelles.
MONIOT DE PARIS : Fin du XIIIe siècle. Ancien moine. Actif à Paris.
PERRIN D'ANGINCOURT : Milieu du XIIIe siècle. Actif à Arras et à la Cour de Brabant. Il en reste une
trentaine de chansons.
RICHART DE SEMILLI : Début du XIIIe siècle. Sans doute un clerc résidant à Paris.
THIBAUT DE CHAMPAGNE (1201 – 1253) : Grand seigneur qui joue un rôle de premier plan dans son
époque. Il nous en reste plus de 70 chansons.
Matfre Ermengaud, Bréviaire d’Amour, XIVe siècle, Madrid, Bibliothèque royale de l’Escurial
détail des jongleurs
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