La condition de la femme en Europe et dans la région de la

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La condition de la femme en Europe et dans la région de la
La condition de la femme en Europe et dans la région de la Méditerranée
Rapporteur: Donatina Persichetti
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L'Europe connait une conjoncture très difficile qui demande instamment une réflexion sérieuse sur les
progrès de la cohésion européenne et sur la nécessité d'une force capable d'ouvrir la voie du changement et
d'offrir développement et démocratie à tous les pays qui y adhèrent.
Ce tournant nouveau et inédit dans l'histoire appelle des choix hardis en vue d'un projet politique qui
vise à renforcer l'union politique européenne et la compétitivité économique en affirmant le caractère essentiel
de l'éthique et de la responsabilité sociale des marchés financiers ainsi que l'importance de replacer l'être
humain et les droits de l'homme au centre des politiques.
Pour donner du crédit à l'Europe, il convient de sortir les populations de leur désarroi et de regagner,
à travers des mesures concrètes, la confiance des citoyennes et des citoyens en commençant par écouter
leurs différents besoins et, enfin, de réaffirmer les valeurs de la démocratie, de la liberté, de l'égalité, de la
solidarité et de la justice.
L'euroscepticisme trouve son origine précisément dans la distance qui sépare les Institutions
européennes de la réalité de millions de personnes qui ont du mal à appréhender non pas l'avenir mais le
présent.
Les inégalités s'accroissent, le chômage augmente et les coupes dans les dépenses publiques ne
permettent pas d'apporter un soutien sérieux à la précarité sociale et économique des familles et des
entreprises.
Les femmes, qui sont les premières à souffrir des difficultés et discriminations les plus graves, ont
bien compris cette phase difficile de déstabilisation et elles entendent assumer leurs responsabilités pour
participer à la relance d'un modèle politique et culturel européen capable de relever les défis du changement
et de la modernité.
La crise économique, sociale et culturelle que nous vivons peut et doit être une occasion pour
reconsidérer le modèle actuel de la société et entreprendre des grands changements pour une nouvelle
civilisation.
Le PDE, force politique européenne qui puise ses racines dans le réformisme, doit être capable
d’imprimer des changements profonds dans un continent qui peine à se renouveler et doit affirmer les droits
de citoyenneté des hommes et des femmes, sans distinction, en sachant que la poussée nécessaire peut et
doit être puisée dans les talents et le compétences des femmes.
Le véritable obstacle à la réalisation d’une société moderne et dynamique, dans laquelle chacun
interagit avec ses capacités au bien-être collectif en reconnaissant la diversité des besoins et des droits, est à
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attribuer à une culture encore attachée à un vieux stéréotype selon lequel l'homme détient les pouvoirs du
commandement politique, laissant à la femme la « gestion de la famille ».
En Europe, la discrimination entre hommes et femmes se présente sous plusieurs formes. Les pays
nordiques sont caractérisés par une culture avancée de l'égalité des chances et un réseau bien développé de
services d'aides aux citoyens et aux familles, mais de nombreux autres pays affichent un inquiétant et grave
déficit de démocratie paritaire.
Aujourd'hui, à l'ère des grandes transformations et de la mondialisation, cette culture myope et
restrictive, incapable de voir plus loin alors que le monde change à une vitesse incroyable, risque d'enrayer le
processus de civilisation et de développement européen dans la mesure où elle est incapable de valoriser la
force et les compétences féminines.
Dans les pays où la croissance économique pousse, d’importants bouleversements démocratiques
ont vu les femmes être des protagonistes majeurs du changement.
La réussite des femmes dans le domaine de l'éducation et dans le monde du travail, ainsi que
l'importante contribution qu'elles ont apportée jusqu'à présent à la croissance économique et culturelle, peut et
doit servir de levier au changement et de moteur à la croissance.
Pourtant, les données statistiques nous disent que moins de la moitié des femmes ont un emploi et
que la crise a aggravé une nouvelle fois ce problème en diminuant encore le taux d'activité féminin.
Le nombre d’emplois qualifiés diminue, à l'inverse des emplois non qualifiés. L'inégalité des salaires
entre les hommes et les femmes équivaut à un tiers du salaire complet. Le chômage des femmes est
équivalent au chômage des hommes, mais le découragement de ne pas trouver d'emploi augmente. (Voir les
fiches en annexe).
En cas de grossesse ou de nécessité d’apporter aide et soutien à des parents âgés ou handicapés,
les femmes sont trop souvent contraintes d'abandonner leur emploi. Il leur est en effet trop souvent
impossibilité d’accéder à un réseau approprié de services permettant de concilier entre temps de vie et temps
de travail et elles rencontrent ensuite des difficultés à se réinsérer dans le monde du travail.
Dans leur grande majorité, les femmes occupent des postes précaires qui ont une incidence négative
sur l'évolution de leur carrière, les possibilités de formation, les droits à la retraite et les allocations de
chômage.
De ce fait, les femmes sont exposées à un risque de pauvreté plus grand que les hommes, soit par le
manque d’un revenu adéquat, soit par la carence de services de soutien aux fragilités physiologiques et
pathologiques de la vieillesse. Il faut en effet noter que les femmes ont une plus grande longévité que les
hommes mais elle sont aussi plus sujettes aux pathologies, à cause d’un style de vie qu’elles ont adopté en se
dédiant plutôt aux soins des autres qu’à elles-mêmes.
À ce problème s'ajoute l'anomalie structurelle de l'assistance sociale dans la plupart des pays
européens, qui ne répond pas aux nouveaux besoins sociaux et abandonne à elles-mêmes les femmes et les
familles, les privant ainsi du droit inaliénable à la santé et à la dignité humaine. Il est nécessaire dans cette
situation de crise tellement grave de savoir traiter les difficultés et donner des réponses concrètes aux
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besoins, en remettant au centre des politique la personne et non la finance, pour ne pas laisser de côté aucun
individu.
La culture de l'égalité des chances, le travail, la santé, la conciliation des différents rôles, la formation
et l'éducation, l'assistance sociale, l'image de la femme dans les médias, la représentation dans les
institutions, la lutte contre la violence sur les femmes, la création de réseaux féminins: tels sont les domaines
où le bât blesse et les priorités sur lesquelles les femmes veulent attirer l'attention de la politique et des
institutions en devenant les protagonistes d'une nouvelle vague de progrès.
S'agissant de ces priorités, il est utile que le PDE propose ses propres stratégies politiques, lors de la
rédaction du programme électoral pour 2014, afin de consolider et relancer les processus de démocratisation,
le respect et l'exercice des droits de l'homme en prenant en considération l'autonomisation et l'intégration de
la dimension de genre.
L'accomplissement d'une véritable démocratie, dans laquelle les hommes et les femmes jouissent des
mêmes droits, parallèlement à l'exercice de leurs devoirs, n'est possible que si les institutions et les partis
politiques prennent conscience du retard culturel qui fait obstacle au processus de développement et
s’acheminent sur des nouveaux parcours de changement.
En particulier, l'UE peut jouer un rôle de promotion de l'affirmation des droits en publiant des
directives incisives aux États membres doublées de programmes et de ressources économiques, en
fonction du niveau d'engagement politique et du résultat obtenu dans chaque pays. L’objectif est d’arriver
rapidement à mettre en œuvre les principes directeurs où il est explicitement question d’améliorer la condition
de la femme, sans distinction de nationalité, de race, de langue ou de religion (article 1, paragraphe 3, de la
Charte de Nations Unies. Traduction par: E/281/Rev.1, 25 février 1947).
PROPOSITIONS
Il est indispensable que l'Europe témoigne de sa volonté d'investir dans le renforcement des droits, au
lieu de revoir à la baisse les stratégies conduites et de rogner sur les investissements consentis, car la rigueur
à elle seule ne crée pas la croissance et ce sont les femmes, les jeunes et les groupes vulnérables qui
pâtissent le plus des conséquences de la crise. Il incombera donc au PDE d'insérer dans son programme
électoral une action politique incisive qui vise à affirmer les droits inaliénables des femmes, chaque élu(e) au
Parlement européen prenant l'engagement de les défendre durant son mandat.
En particulier, il est proposé:
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De confier à l'Institut européen pour l'égalité entre les hommes et les femmes, en collaboration avec
Eurostat, le suivi de l'application des directives adoptées à l'adresse des États membres, la conduite
d'activités de conseil, la communication d'informations et la promotion des meilleures pratiques;
D’engager les États membres à adopter des lois électorales assorties de dispositions propres à faire
élire plus de femmes dans les assemblées élues;
De programmer l'allocation de fonds structurels en faveur de projets ciblés à :
a. prévoir et financer des cours de formation sur la direction politique et la gestion pour les femmes;
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b. élaborer des plans de lutte contre la pauvreté;
c. soutenir l'emploi décent des femmes, réduire les emplois précaires et favoriser les emplois
stables, en offrant notamment des incitations aux entreprises;
d. soutenir l'accès au travail et le maintien de l'emploi pour les personnes handicapées;
e. encourager la création, la réussite et l'expansion d'entreprises féminines, en prévoyant
notamment des systèmes d'accès au crédit, la formation à la gestion et l'accompagnement des
entreprises;
f. proposer une assistance sociale innovante qui promeut la place centrale du citoyen et
accompagne ce dernier dans chaque aspect de sa vie, et aussi bien soutien la conciliation entre
les temps de vie et les temps de travail des femmes ;
g. mettre en œuvre des stratégies politiques visant à soutenir le rôle de la famille avec une attention
particulière pour les jeunes, et améliorer l'offre de services dans les domaines de l'enfance,
l’adolescence, du soutien aux parents, et de l'assistance aux personnes âgées;
h. mettre en œuvre des stratégies politiques visant à accroître la culture des diversités, du respect
de la dignité humaine, la lutte contre les intolérances de race, de genre et de religion ;
i. promouvoir des campagnes publicitaires adéquates et la réalisation de projets ciblés destinés à
favoriser le sens civique et la culture de l'accueil, de l'inclusion et de la solidarité, à partir des
nouvelles générations.
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D'adopter une directive européenne pour lutter contre toutes les formes de violences faites aux
femmes, visant à l'adoption de plans nationaux et à la collecte de données sur le phénomène de la
violence, qui puissent être comparées avec celles d'autres pays européens, et tendant à définir des
normes en matière de prévention et de services ainsi qu'à assurer la diffusion des meilleures
pratiques;
De promouvoir le dialogue entre les médias, au niveau européen, en vue de l'adoption d'un code de
bonnes pratiques concernant les femmes et les médias, avec la mise en place d'un comité ad hoc qui
en surveille l'application effective (directive 2010/13/CE);
D'investir dans le rôle des femmes dans le contexte de l'économie verte, en incitant les États
membres à adopter des projets spécifiques pour l'évaluation de l'impact de l'environnement sur les
familles et sur les femmes;
D'adopter au niveau européen un budget prenant en compte la dimension de genre et d'élaborer une
directive dans ce sens à l'intention des États membres;
D'élaborer une recommandation qui vise à faire en sorte que les services de santé et la recherche
scientifique tiennent compte de l'impact différent que les pathologies et les traitements
pharmacologiques ont sur les hommes et sur les femmes, ainsi que des exigences différentes en
matière d'accès aux services de santé.
Politique de Partenariat Euroméditerranéen
Ce sont les femmes vivant près de nous, sur l'autre rive de la Méditerranée, qui sont les forces qui
soutiennent la protection sociale, la natalité et l'économie des pays européens, mais aussi le changement
nécessaire pour consolider la démocratie dans leur propre pays. Elles ont joué un rôle de premier plan dans le
Printemps arabe et il est indéniable que ni le réveil des démocraties, ni la force de conjuguer développement,
droits et gouvernance responsable n'auraient été possibles sans la ténacité dont elles ont fait preuve, au prix
de violences atroces. Aujourd'hui, cet élan en faveur de la démocratie risque de s'essouffler: c'est à l'Europe
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qu'il appartient d'exhorter à agir et d'œuvrer pour accompagner le processus de changement en faveur d'une
nouvelle civilisation, dans le cadre de la politique de voisinage et des programmes bilatéraux mis en place par
l'Union européenne.
Il appartient donc à l'Union européenne et au PDE de chercher à renforcer la présence des femmes
dans les processus décisionnels dans le cadre de la politique extérieure européenne et dans les relations
bilatérales avec les pays tiers, compte tenu du rôle stratégique des femmes dans la nouvelle politique de
partenariat euroméditerranéen et, plus particulièrement, dans les relations avec l'Afrique du Nord.
À cet effet, nous jugeons utile de conduire des politiques actives, pour la paix et l'affirmation des droits
des femmes dans l'espace méditerranéen, et ce moyennant:
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l'annonce d'initiatives visant à permettre des échanges entre les organisations de femmes d'Europe et
d'Afrique du Nord, aux fins du partage d'expériences et de bonnes pratiques;
la promotion de projets en matière de formation et de tutorat axés sur le travail des femmes dans les
pays d'origine, l'organisation de stages et les échanges d'expériences entre l'Europe et les pays
d'Afrique du Nord;
des actions tendant à favoriser la connaissance des droits des femmes et, en particulier, l'importance
sociale et culturelle que revêt la préservation de leur intégrité physique et psychologique.
CONCLUSIONS
À la lumière des considérations qui précèdent, les représentantes des partis politiques
membres du PDE estiment que le processus de démocratie paritaire doit également valoir à l'intérieur
des partis présents au sein du PDE, moyennant l'adoption de mesures visant à garantir une
représentation équilibrée des hommes et des femmes dans toutes les instances internes dont les
membres sont élus ou désignés.
Nous sommes convaincus que des femmes compétentes peuvent collaborer avec des hommes
compétents pour réaliser ensemble des objectifs communs, au sein d'un parti politique qui respecte et
applique les principes de démocratie, d'inclusion et de participation.
En outre, nous estimons nécessaire, dans la perspective des prochaines élections européennes
de 2014, que le PDE fasse siennes les propositions avancées dans le présent document et envoie un signe
significatif de changement en direction de la démocratie paritaire, en veillant à ce que les listes de tous ses
partis membres assurent une représentation équilibrée entre les femmes et les hommes.
Il est à noter que la désaffection des électeurs est principalement imputable à la conduite d'une
politique qui est perçue comme étant distante des problèmes réels auxquels les femmes sont en butte au
quotidien.
Ce n'est qu'en redonnant sens et éthique à la politique qu'il sera possible de promouvoir la
participation des femmes, notamment dans le cadre des élections, et de permettre au PDE d'être un acteur du
changement pour le progrès en Europe.
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L'attention du Conseil général du PDE est attirée sur le fait que le présent document a été élaboré et
adopté conjointement avec les déléguées des partis membres du PDE chargées des questions de genre.
Donatina Persichetti
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