des femmes qui ont œuvré pour la promotion de la santé au sein
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des femmes qui ont œuvré pour la promotion de la santé au sein
DES FEMMES QUI ONT ŒUVRÉ POUR LA PROMOTION DE LA SANTÉ AU SEIN DES COMMUNAUTÉS INTRODUCTION Les femmes se sont efforcées par de nombreux moyens à créer des communautés en santé. En occupant des postes de soignante, de médecin, de sage-femme et d’infirmière, ainsi qu’en exerçant d’autres fonctions paramédicales, à titre officiel ou non officiel, beaucoup d’entre elles ont contribué de façon significative à la santé de leurs familles, de leurs patients et de l’ensemble de la communauté. Beaucoup de femmes ont participé au développement des soins de santé au Manitoba et un grand nombre de Manitobaines ont été reconnues au-delà de nos frontières pour leurs idées novatrices, leur esprit d’initiative et leur engagement à l’excellence. Bien qu’un grand nombre des femmes dont les exploits figurent dans ce document aient choisi de poursuivre une carrière comme médecin ou infirmière, d’autres ont contribué à la promotion de la santé dans leur communauté à titre d’éducatrices, de religieuses, de scientifiques ou d’animatrices sociales. Dans le cadre du Mois de l’histoire des femmes 2001, ce document brosse le portrait de plusieurs d’entre elles afin d’illustrer la diversité de la contribution des femmes locales à la création de communautés en santé. MÉDECINS Au fil de l’histoire, les femmes n’ont pas toujours profité de la même liberté que les hommes en matière de choix de carrière. L’accès à la médecine leur était particulièrement difficile au cours du dix-neuvième siècle. Même lorsqu’elles réussissaient à devenir médecin, les femmes découvraient que leurs possibilités étaient limitées quant à l’exercice de leur profession. Elles pouvaient devenir missionnaires, pionnières ou s’occuper des femmes et des enfants. Les femmes pouvaient également devenir inspectrices des écoles, car les médecins de sexe masculin avaient tendance à éviter ce type de poste, tout en le trouvant parfaitement adapté aux femmes. Plusieurs femmes se sont distinguées en faisant preuve de leadership dans la pratique de la médecine à une époque où l’on s’attendait à ce que la majorité des médecins soient des hommes. Les exploits de femmes telles que Mme Charlotte Ross, Mme Amelia Yeomans, Mme Elizabeth Matheson, Mme Margaret Douglass et Mme Elinor Black font souvent surface dans les annales de l’histoire de la médecine au Manitoba. Le caractère remarquable des réalisations de chacune de ses femmes a mérité la reconnaissance et le respect de ses collègues de sexe masculin, ainsi que des historiens. Bien qu’il ait fallu attendre l’année 1892 pour voir la première femme médecin obtenir son diplôme de l’Université du Manitoba, les soignantes exerçaient déjà leur métier dans la province depuis une décennie. Celles qui provenaient de milieux plus fortunés pouvaient fréquenter des écoles de médecine comme le Women’s Medical College à Philadelphie ou l’Université du Michigan à Ann Arbor, et y obtenir un diplôme. À l’époque, les Canadiennes qui obtenaient un diplôme à l’extérieur du pays étaient tenues de faire une année supplémentaire d’études dans une école médicale au Canada avant de pouvoir demander une licence pour pratiquer la médecine. Par la suite, un bon nombre d’écoles pour femmes ont été établies au Canada pour répondre à la demande croissante, dont le Toronto Women’s Medical College et le Women’s Medical College de Kingston. 1 L’école de médecine du Manitoba a été fondée en 1883 et M. James Kerr en fut le premier doyen. Il semblerait que cette école ait été mixte dès le début. Le document de constitution de l’école fait allusion à des « personnes » plutôt qu’à des hommes ou à des femmes. Un article découpé d’un journal du 20 décembre 1894 décrit ainsi le deuxième dîner annuel de la Manitoba Medical Students Association : « Le toast porté par les dames fut accueilli par des applaudissements. M. Jones, pour sa part, s'est dit tout à fait d'accord avec l'admission de femmes aux études de médecine. » [traduction libre]1 Bien que les femmes aient été admises à l’école de médecine à partir de 1883, il a fallu attendre 1892 avant que Mme Harriet Foxton Clarke y obtienne son diplôme. Après avoir terminé ses deux premières années d’études au Toronto Women’s Medical College,2 elle déménagea à Winnipeg et y fut diplômée en 1892. Deux ans plus tard, elle épousa M. Andrew Clarke de Detroit, au Michigan, et y pratiqua la médecine jusqu’à son déménagement à Billings, au Montana. Bien que leur nombre fût restreint dans un premier temps, les femmes admises à l’école de médecine étaient des étudiantes hors pair. La plupart d’entre elles, en plus de leur diplôme, se méritèrent la médaille d’or du doyen et autres distinctions prestigieuses, et ce, alors même qu’elles n’étaient que deux dans la classe. L’obtention d’un diplôme de l’école médicale ne mettait pas fin au combat que devaient mener les femmes. Pour pratiquer la médicine en toute légalité il leur fallait également obtenir une licence, ce qui impliquait se soumettre à des examens administrés par un jury d’évaluation composé à l’époque exclusivement d’hommes. Un certain nombre d’entre elles durent exercer la médecine pendant quelques années avant de pouvoir obtenir de licence et une des femmes médecins les plus reconnues au Manitoba, Mme Charlotte Ross, pratiqua la médecine toute sa vie sans licence. Une autre femme, Mme Elizabeth Matheson, se vit refuser sa demande de licence à plusieurs reprises. Après le dernier refus en 1904, son mari, John Matheson, s’emporta et lui fit un chèque pour couvrir les droits d’inscription et dit à sa femme de le retourner au Registraire du Manitoba. À son grand étonnement, sa demande fut acceptée. La seule explication pour ce soudain revirement était que « le nom de John Matheson figurait sur le chèque, le nom d'un homme qui était désormais reconnu dans l'ensemble du Nord-Ouest. Elizabeth ne comptait donc plus parmi la horde de femmes difficiles. Elle était l'épouse du fameux missionnaire, John Matheson ». [traduction libre]3 Il était évident que le nom de son mari avait plus de poids aux yeux de la collectivité médicale que ses deux diplômes de l’école de médecine. Au début du vingtième siècle, un plus grand nombre d’écoles de médecine commencèrent à permettre aux femmes de s’inscrire. Cependant, les femmes demeuraient plutôt « tolérées » que « bienvenues ». Cette attitude changea petit à petit avec l’avènement de la révolution sociale dans les années 1960, qui fut suivie par le « mouvement de libération des femmes » des années 1970. De nos jours, les femmes comptent pour environ la moitié des étudiantes inscrites aux cours de médecine de l’Université du Manitoba. MME CHARLOTTE WHITEHEAD ROSS (1843-1916) Mme Charlotte Ross était une femme en avance sur son époque. De nos jours, beaucoup de femmes qui travaillent à l’extérieur du foyer croient faire partie de la première génération à se lancer dans une carrière professionnelle en plus d’assumer l’emploi à temps plein que constitue le fait d’être mère et épouse. Elles seraient très surprises de constater que Mme Charlotte Ross a réussi à la fois à être fille, mère, médecin, chirurgienne et enseignante de classe de religion du dimanche, et ce, il y a cent vingt-six ans. À une époque où l’admission aux écoles de médecine était interdite aux femmes au Canada, elle décida, encouragée par son 2 mari, de s’inscrire à une école de médecine aux États-Unis après la naissance de son troisième enfant. Charlotte Whitehead Ross devint la première femme médecin de Montréal et ensuite du Manitoba. Elle naquit en Angleterre en 1843, fille de Joseph Whitehead, mécanicien de chemins de fer, et fut emmenée à Montréal, au Canada, à l’âge de cinq ans. Charlotte fréquenta l’école à Clinton, en Ontario, avant d’être envoyée à l’école de maintien du Couvent des Sœurs du Sacré-Cœur à Montréal.4 À l’âge de dix-huit ans, elle épousa David Ross, l’associé de son père dans le domaine de la construction de voies ferrées. Son intérêt pour la médecine prit naissance lorsqu’elle dut s’occuper de sa sœur aînée, Mary Anne, qui était atteinte d’une maladie chronique et finit par mourir de phtisie.5 Le médecin de famille de Charlotte, le docteur Hingston, qui lui avait prêté des livres de médecine pendant qu’elle prodiguait des soins à sa sœur, l’encouragea à s’inscrire à l’école de médecine. Son père, toutefois, s’y opposa, car il prétendait l’avoir élevée pour des choses plus importantes que s’occuper des malades. En 1870, les écoles de médecine du Canada n’admettaient pas les femmes, alors Charlotte décida d’étudier au Women’s Medical College de Philadelphie. Il lui fallut cinq ans d’études 6 pour obtenir son diplôme. Elle dut interrompre ses études à deux reprises en raison d’une fausse couche et de la naissance de sa fille. Elle reçut son diplôme en 1875 et établit un cabinet médical prospère à Montréal. En 1878, elle abandonna son cabinet à Montréal pour rejoindre son mari et son père qui travaillaient à la construction de la section 15 du Canadien Pacifique, dont la base était à Whitemouth, au Manitoba.7 Whitemouth était un centre ferroviaire entouré de camps de bûcherons. Son isolement au Manitoba rural permit à Mme Ross d’exercer une médecine globale qui dépassait les accouchements et le traitement de maladies touchant les femmes, soit le genre de travail réservé à la plupart des femmes médecins à l’époque. Elle était probablement la seule à avoir une clientèle majoritairement masculine. Ses compétences en chirurgie lui servaient souvent lorsqu’il s’agissait d’amputer des membres, de suturer des plaies et de plâtrer des os cassés, car la plupart des accidents dans la communauté se résumaient à des blessures causées par des coups de hache aux pieds et aux jambes. Un jour, il lui arriva de devoir aider à pomper un wagon plat des chemins de fer pour voler au secours d’un colon rural blessé par un arbre tombé. Elle lui amputa la jambe sur la table de cuisine avec une scie à main. Mme Ross était infatigable et très dévouée à son métier. De nombreux récits attestent que, après avoir aidé une femme à accoucher, elle lavait ensuite le plancher, faisait la lessive et préparait de quoi manger pour plusieurs jours. Elle faisait cela afin de permettre à la nouvelle mère de prendre au moins quelques jours de repos. On dit aussi qu’elle apportait aux nouvelles mères un bouquet de roses blanches cueillies dans son jardin. Le récit le plus émouvant qui rend témoignage de son dévouement envers ses patients raconte la fois où elle laissa son fils mourant aux soins de son mari pour se rendre à un accouchement. Elle avait traité son fils et savait qu’elle ne pouvait plus rien pour lui. Sa patiente, en revanche, avait besoin des soins médicaux qu’elle était seule à pouvoir fournir. Même si elle était pionnière dans son domaine, elle était beaucoup plus avancée que certains de ses contemporains en ce qui concerne la pratique de la médecine. Elle observait des normes très strictes quant aux méthodes antiseptiques et à la stérilisation, et elle réussit à convaincre les habitants de Whitemouth de se faire vacciner contre la variole, et ce, à une époque où même les citoyens de grandes villes comme Montréal n’avaient pas le droit de se faire immuniser. Mme Ross a exercé la médecine pendant vingt-sept ans sans licence. Elle a présenté des demandes à Montréal et à Winnipeg, mais la licence lui fut refusée dans les deux villes, en 3 raison de son refus de retourner aux études médicales au Canada et de subir l’examen administré par le jury composé exclusivement d’hommes du Collège des médecins et chirurgiens du Manitoba. Elle continua à exercer la médecine, sachant bien qu’elle pouvait faire l’objet d’accusations et être emprisonnée. Elle put éviter les poursuites à Montréal, car elle travaillait sous les auspices du docteur Hingston, son premier guide, qui allait par la suite devenir maire de Montréal. Elle ne fut jamais accusée au Manitoba, car son cabinet se situait en milieu rural et qu’elle était le seul médecin à Whitemouth. Mme Ross a finalement obtenu sa licence à titre posthume en novembre 1993, lorsque la députée libérale Sharon Carstairs déposa une résolution à cet effet devant l’Assemblée législative du Manitoba. Mme Carstairs, maintenant sénatrice, a rendu hommage à « cette figure de proue courageuse et dévouée, ainsi qu'à d'autres femmes de son genre, qui n'ont jamais reçu d'éloges dignes du rôle qu'elles ont joué dans la construction de ce pays ». [traduction libre]8 L’Assemblée législative du Manitoba adopta la résolution à l’unanimité. MME AMELIA YEOMANS (1842-1913) Mme Amelia Yeomans et sa fille Lillian furent les premières femmes médecins de Winnipeg. Amelia était issue d’une famille huguenote qui se distinguait par son amour de la connaissance et de l’indépendance. Elle naquit à Montréal le 29 mars 1842 et épousa M. Augustus Yeomans à l’âge de dix-huit ans. Lorsqu’il décéda en 1878, Amelia ne se remaria pas mais décida plutôt de rejoindre sa fille Lillian à l’Université du Michigan, à Ann Arbor, afin de poursuivre des études en médecine. À cette époque, les écoles de médecine étaient encore interdites aux femmes au Canada. Lillian obtint son diplôme en 1882 ainsi que sa licence pour exercer au Manitoba le 22 septembre 1882. Amelia reçut son diplôme en médecine au Michigan en 1883 et fut inscrite au Manitoba le 23 février 1885. Mme Amelia Yeomans ne laissa aucun indice permettant d’expliquer pourquoi elle a tant tardé avant de se laisser inscrire. Cependant, puisqu’elle défendait avec ferveur le droit des femmes au vote, on peut normalement assumer qu’elle refusa de subir l’examen pour l’obtention de la licence en raison de l’hostilité envers les femmes que l’on connaissait à l’époque aux hommes qui composaient les jurys d’évaluation. Les deux femmes médecins se spécialisèrent dans la profession de sage-femme et dans le traitement des maladies touchant les femmes et les enfants. Il ne manquait pas de travail pour elles à Winnipeg. Pendant les années 1880, Winnipeg se transformait de ville frontalière en métropole trépidante. Cette croissance accélérée entraîna dans son sillage de nombreux effets néfastes au niveau social dont, plus particulièrement, « le surpeuplement du quartier nord de la ville, la pauvreté, le chômage, la prostitution, l'état inadéquat des réseaux d'égouts, des conditions de logement et des établissements de soins de santé ; et ceux-ci ne constituaient que quelques-uns des problèmes qui affligeaient la nouvelle capitale provinciale ». [traduction libre]9 Mme Amelia Yeomans ne pouvait pas demeurer impassible devant toute cette misère qui s’abattait sur les femmes et, en particulier, sur les femmes immigrées. Sa réaction fut de se rendre dans les quartiers défavorisés de la ville, de visiter les usines et les prisons, de dispenser des soins aux démunis et aux déshérités, et d’exposer leur condition au reste de la société. Son travail parmi les pauvres et les démunis lui fit comprendre la nécessité d’apporter des réformes. Mme Yeomans commença à faire campagne en faveur de l’interdiction de vendre de l’alcool, car elle voyait dans l’ivrognerie la cause du chômage, des mauvais traitements envers les enfants et de la criminalité. Elle devint membre de la Women’s Christian Temperance Union, y occupa le poste de présidente provinciale de 1896 à 1897 et prononça de 4 nombreux discours partout au Manitoba en faveur de la prohibition. Elle travailla aussi avec diligence afin d’éradiquer la prostitution et les maisons closes. Pour ce faire, elle prononça de nombreux discours dans lesquels elle exposa les risques posés par la prostitution et les conséquences des maladies vénériennes. Ses discours eurent un double effet. D’une part, ils dérangèrent les honnêtes citoyens de Winnipeg, car on était en pleine époque victorienne et il y avait certaines choses dont on ne discutait simplement pas en bonne société. D’autre part, ses discours lui permirent de s’assurer le concours d’un grand nombre de politiciens, de ministres du culte et de dirigeants communautaires favorables aux causes qu’elle défendait. Il paraît qu’elle était une excellente oratrice fougueuse qui savait garder ses auditeurs cloués à leur siège pendant ses discours pour ensuite les motiver à l’action. Mme Amelia Yeomans était d’avis que l’octroi du droit de vote aux femmes constituerait une solution supplémentaire pour remédier aux inégalités sociales. Ce sujet n’était pas très populaire à l’époque. Non seulement la majorité des hommes étaient-ils tout à fait opposés au droit de vote des femmes, mais ils étaient également convaincus qu’une telle démarche entraînerait la désintégration de la famille. Elle avait un autre obstacle à surmonter, notamment le fait que la majorité des femmes étaient soit indifférentes, soit hostiles par rapport à l’idée. Ceci ne découragea pas Mme Yeomans. Ayant observé les problèmes sociaux qui l’entouraient, elle en conclut que « les femmes étaient les plus farouches défenseurs de la morale, de la pureté et de la justice dans la communauté et que leurs votes iraient dans ce sens. Leur participation au processus politique augmenterait leur capacité d'influer sur leurs enfants et inspirerait un plus grand respect du côté de leurs maris, de leurs fils et de leurs filles ». [traduction libre]10 Elle travailla sans relâche à cette fin, notamment en fondant une association provinciale en faveur du droit de vote des femmes. En dépit de tous ses efforts, les femmes ne réussirent pas à obtenir le droit de vote de son vivant et la prohibition ne fut imposée par la loi qu’en 1916. Dans les deux cas, cependant, ses démarches ont pavé la voie. Lorsqu’elle se retira de la vie active en 1906, Winnipeg n’était plus la ville malfamée qui l’avait accueillie au début. Lorsqu’elle décéda en 1913, plus de deux cents femmes étaient déjà diplômées d’une école de médecine au Canada. La Ville de Winnipeg a rendu hommage au rôle important qu’elle a occupé dans notre histoire en érigeant une plaque commémorative en son honneur sur la plate-bande de l’avenue Broadway à la hauteur de la rue Hargrave. MME ELIZABETH BECKETT MATHESON (1866-1958) La vie de Mme Elizabeth Matheson ressemble en divers aspects à celle M Charlotte Ross. Sa formation médicale s’échelonna sur de longues années d’études, interrompues par de multiples naissances. Elle était l’égal de son mari à titre de missionnaire, d’enseignante et de médecin, et il appuya sa décision de s’inscrire à l’école de médecine. Elle eut beaucoup de mal à obtenir sa licence et fut contrainte d’exercer plusieurs années sans en détenir une. En effet, elle se retrouva dans une situation étrange lorsqu’elle fut nommée médecin du gouvernement et inspecteur de la santé, alors que le Collège des médecins et chirurgiens refusait toujours de lui délivrer une licence. Tout comme Charlotte Ross, elle ne fit jamais l’objet de poursuites, car elle exerçait son métier dans une région éloignée des centres où les capacités comptaient plus que les diplômes. me Mme Elizabeth Matheson est née de parents écossais en 1866 à Burnbrae (près de Campbellford) dans le Haut-Canada et déménagea à Morris, au Manitoba, en 1878, où son père avait décidé de devenir agriculteur. Elle obtint son immatriculation et suivit une formation d’enseignante à Winnipeg, puis exerça ce métier à Cook’s Creek jusqu’en 1886. En 1887, elle 5 se porta bénévole pour venir en aide à Ellen Bilbrough au foyer Marchmont pour orphelins et orphelines à Belleville, en Ontario. Ellen Bilbrough sut reconnaître son potentiel et finança ses études au Women’s Medical College de Kingston pendant un an de 1887 à 1888. Elizabeth retourna à l’enseignement au Manitoba pour financer ses études. Suivit un séjour en Inde comme missionnaire entre 1888 et 1891, année où elle retourna au Manitoba après avoir contracté le paludisme. Elle épousa ensuite John Richard Matheson et le couple déménagea à Onion Lake, une réserve de la nation crie éloignée, où son mari avait accepté de servir à titre de missionnaire anglican. Ils y construisirent une école pour leurs neuf enfants, pour leurs enfants adoptés d’origine autochtone et métisse, ainsi que pour les quatre-vingts autres enfants qui s’étaient inscrits. Encouragée par son mari, Elizabeth entama sa deuxième année d’études au Manitoba Medical College en septembre 1895 et obtint un diplôme du Toronto Women’s College en 1898, soit onze ans après avoir débuté sa formation en médecine. Elle retourna à Onion Lake, où l’exercice de sa profession s’étendait sur un rayon de cent milles. Ses débuts furent difficiles, car les colons de race blanche préféraient se soigner eux-mêmes où parcourir les cent milles pour se rendre à Battleford. Dans leurs têtes, elle demeurait la femme du missionnaire. Pour leur part, les Autochtones préféraient consulter leurs chamans traditionnels. L’incident qui confirma son dévouement et finit par lui gagner le respect des habitants de la communauté survint lorsqu’un jeune homme se cassa la jambe et eut besoin de soins. Afin de pouvoir le traiter, elle parcourut soixante-dix milles avec son bébé de trois mois dans une charrette de bûcheron sur sol gelé pour se rendre où il se trouvait et lui poser un plâtre. Mme Matheson exerça sa profession jusqu’en 1903, année où elle s’inscrit à l’école de médecine de l’Université du Manitoba pour terminer sa dernière année d’études sous forme de cours de recyclage avant de tenter l’examen pour l’obtention de sa licence. Elle fut diplômée pour la deuxième fois en 1904. En 1908, son mari lui construisit un hôpital en rondins de trois étages. Il comprenait quatre salles communes et une salle d’opération. Elle y traita des cas d’épidémie et des victimes d’accidents, et y effectua des interventions chirurgicales. Cependant, puisque les Autochtones se méfiaient encore des hôpitaux, elle continua de leur dispenser des soins à domicile. Pour ce faire, il fallait voyager dans la fondrerie de mousse sur des chemins en rondins, camper dans la neige en hiver ou dans la chaleur en été, dormir dans des baraques de trappeurs, venir en aide à des victimes d’accidents, faire face à des situations de meurtre ou de suicide, traiter des cas d’épidémie et procéder à des accouchements dans des régions éloignées. Elle s’acquittait seule des déplacements de courte distance, alors que pour les trajets de plus longue haleine, elle se faisait accompagner par un Autochtone.11 Elle pratiqua la médecine à Onion Lake jusqu’en 1917, soit un an après le décès de son mari. Elle déménagea à Winnipeg en 1918, où elle s’associa à Mme Mary Crawford à titre de médecin inspecteur adjoint. C’était le poste idéale pour elle, car son travail à Onion Lake avait consisté en grande partie à soigner les enfants démunis. Elle pouvait donc détecter très facilement les signes de malnutrition et de maladie chez les enfants. En 1948, elle se vit décerner un doctorat honoris causa en médecine de la University of Toronto, qui voulait ainsi rendre hommage à ses cinquante ans de pratique médicale depuis l’obtention de son premier diplôme. MME MARGARET ELLEN DOUGLASS (1878-1950) Mme Margaret Ellen Douglass naquit au Nouveau-Brunswick et étudia la médecine à la University of Toronto. Après l’obtention de son diplôme, elle suivit une formation postdoctorale 6 en Angleterre et aux États-Unis. Elle commença à pratiquer la médecine à Saint John, au Nouveau-Brunswick, puis déménagea à Winnipeg en 1909, où elle poursuivit le reste de sa carrière, à l’exception des années de guerre. En 1914, elle mit sur pied le Winnipeg Women’s Volunteer Reserve. Pendant la Première Guerre mondiale, elle se distingua en devenant officier dans le Royal Army Medical Corps (R.A.M.C.) et en se joignant au Women’s Auxiliary Army Corps. Elle servit en France avec le R.A.M.C., détenant le grade de majeur, et se vit décerner la Médaille des alliés ainsi que la Médaille de guerre britannique pour ses services. Elle était une oratrice douée et mit ce talent à profit dans le cadre de ses nombreuses activités de relations publiques. En 1927, elle fit le tour du monde afin de visiter des centres médicaux dans des pays comme l’Inde et la Chine et d’y enseigner de meilleures méthodes pour offrir des soins aux femmes. De son vivant, elle occupa bon nombre de postes dans des organisations féminines. Elle fut présidente de la Fédération canadienne des clubs de femmes de carrières libérales et commerciales ainsi que du Cercle canadien des femmes de Winnipeg. Elle se mérita de nombreuses distinctions, dont la nomination à vie à titre de membre de l’Association des femmes diplômées des universités en 1950 et l’élection au rang de présidente honoraire de la Fédération des femmes médicales du Canada en 1946. En 1948, elle se vit décerner le titre de Sœur commandante de l’Ordre de Saint-Jean-de-Jérusalem par la Brigade de l’Ambulance Saint-Jean en reconnaissance de ses services. Elle décéda chez elle à Winnipeg en 1950. MME FRANCES GERTRUDE MCGILL (1877-1959) Mme Frances McGill grandit dans une ferme à Minnedosa, au Manitoba, et exerça le métier d’enseignante pendant plusieurs années afin de financer ses études. Elle commença par des études en droit puis décida finalement de se lancer en médecine. Elle était exceptionnellement intelligente et se distingua à l’école médicale. Elle se mérita une bourse d’études, le Isbister First Year Scholarship, et lorsqu’elle obtint son diplôme en 1915 à l’âge de trente-sept ans, elle se vit décerner le prix du doyen, la médaille d’or Hutchison et le prix Surgical Case Report Prize. Une fois diplômée, elle débuta une carrière au Laboratoire provincial du Manitoba puis accepta un poste de bactériologiste au sein du ministère de la Santé de la Saskatchewan, où elle devint ensuite pathologiste de la province et directrice de laboratoire. Elle fut nommée chirurgienne honoraire au laboratoire de la GRC à Regina et devint conférencière en médecine légale à la Division dépôt de la GRC. C’est dans cette fonction qu’elle trouva sa véritable vocation. Elle mit à profit ses connaissances en droit et en médecine, ce qui lui permit de se classer parmi les criminologues les plus réputés au Canada. Elle analysa des prélèvements, effectua des autopsies judiciaires et contribua à résoudre des centaines d’enquêtes relatives à des meurtres. Elle faisait son travail méticuleusement et contestait toujours la preuve, même lorsque celle-ci semblait ne faire aucun doute. Sa motivation était de découvrir la vérité et « elle semble avoir libéré autant d'innocents qu'elle n'a inculpé de coupables ». [traduction libre]12 Dans un de ces cas, elle réussit à prouver qu’un homme s’était bel et bien suicidé et n’avait pas été abattu par l’agriculteur d’à côté dont le manteau était pourtant maculé de sang. Pour ce faire, elle fit exhumer le corps et son examen approfondi et exhaustif lui permit de confirmer que seule la victime pouvait avoir tiré le coup de feu puisque la balle était entrée sous le menton pour ensuite sortir du crâne. Parmi les autres cas célèbres qu’elle a résolus, mentionnons le cas du muffin au son, où une femme tenta d’empoisonner son père mais réussit plutôt à tuer ses grands-parents, le cas d’Elsie Burden, où un garçon du coin (et non un travailleur migrant) fut reconnu coupable, et le cas South Polar, où il n’était pas question de meurtre, la victime ayant 7 succombé à une crise cardiaque. Ses sorties en salle d’audience étaient impressionnantes et elle jouissait toujours du statut de témoin expert pendant les procès. Elle répondait toujours de façon professionnelle aux questions que lui posaient les avocats et aucun subterfuge ne pouvait l’amener à dire ce qu’elle ne croyait pas. Elle était respectée par ses collègues de sexe masculin de la GRC qui la considéraient comme une « vraie dame », mais aussi comme « un des copains » en raison de sa capacité à surmonter les difficultés et la fatigue associées à son métier. Parfois, ils parcouraient ensemble des milliers de kilomètres en attelage de chiens, en motoneige ou dans un vieil hydravion à flotteurs pour se rendre dans les régions les plus éloignées de la province. Elle était aussi une cavalière passionnée, ce qui la rendait encore plus chère aux membres de la police montée. Lorsqu’elle décéda à l’âge de quatre-vingt-un ans, la province de la Saskatchewan décida de lui rendre hommage en renommant officiellement lac McGill un lac situé au nord du lac Athabasca. MME ELINOR FRANCES ELIZABETH BLACK (1905-1982) Mme Elinor Frances Black naquit à Nelson, en Colombie-Britannique, en 1907. Elle fréquenta l’école à Calgary et à Winnipeg (Kelvin High School). En grandissant, elle devint une femme dotée d’une volonté ferme, de prestance et de charisme qui ne laissait pas les obstacles l’empêcher d’avancer. Elle voulait devenir médecin et malgré la désapprobation de son frère, lui-même médecin, elle décida de s’inscrire à l’école de médecine, car selon elle, « il n'existait de situation plus tragique que celle d'une personne forcée à exercer un métier qu'elle déteste pour des raisons pécuniaires ». [traduction libre]13 Elle obtint son diplôme avec distinction de la faculté de médecine de l’Université du Manitoba. Après un stage à l’Hôpital général de Winnipeg, Mme Black poursuivit ses études dans des hôpitaux de Londres, en Angleterre, et retourna à Winnipeg en 1931 pour y établir son propre cabinet. En 1933, elle fut nommée préparatrice au département de l’obstétrique et de la gynécologie. Elle retourna à Londres entre 1937 et 1938 pour y poursuivre d’autres études postdoctorales et, en 1938, elle devint la première Canadienne à être admise au Royal College of Obstetricians and Gynecologists de Londres. Elle était extrêmement fière de cette dernière réalisation et affirma que son statut de membre était le fruit de « ses propres efforts, de son travail ardu et de ses résultats aux examens ». [traduction libre]14 Mme Elinor Black se vit décerner de nombreuses distinctions pendant sa vie et, dans la plupart des cas, il s’agissait d’une première pour une femme. En 1949, elle fut nommée ad enudem gradum Associée du Collège royal des médecins et chirurgiens du Canada et, en 1950, elle fut élevée au rang d’Associée du Royal College of Obstetricians and Gynecologists de Londres. En 1951, elle fut nommée chef du département de l’obstétrique et de la gynécologie de l’Université du Manitoba, devenant ainsi la première femme au Canada à diriger un département médical. Elle maintint ce poste pendant treize ans. Elle eut également l’honneur de se voir nommer « Femme de l'année » de Winnipeg en 1951, et en 1960, elle devint la première présidente de la prestigieuse Société des obstétriciens et des gynécologues du Canada. De nos jours, alors que les femmes qui pratiquent la médecine ne sont plus limitées en raison de leur sexe, il est difficile d’apprécier ses exploits à leur juste titre. Les multiples combats et les nombreuses victoires de Mme Elinor Black ont permis aux femmes de se tailler une place solide. Elle résume, mieux que toute autre, ses exploits dans une lettre qu’elle a écrite au sujet des articles de journaux qui parlaient d’elle. Elle y souligne que les articles « visent à faire de vous une pionnière du féminisme et une femme de renommée, plutôt 8 que de mettre l'accent sur le fait que vous êtes une obstétricienne et une gynécologue hors pair et une personnalité éminente, et ce, sans égard à votre sexe ». [traduction libre]15 Tard dans sa vie, Mme Black constata qu’elle ne s’entendait pas avec les femmes. Ceci peut être attribué au fait qu’elle fut contrainte, afin d’être acceptée comme médecin dans les années 1920, de s’incorporer complètement et, en somme, de devenir invisible en tant que femme, simplement pour pouvoir être médecin. À cette époque, « les femmes étaient des femmes et les hommes étaient des hommes et, en l'occurrence, tous les médecins étaient des hommes ». [traduction libre]16 Pour assurer sa survie, elle ne se limita pas à égaler les performances des hommes, mais aussi à les dépasser. Sa réussite était telle que ses collègues avaient du mal à voir d’emblée en elle une femme. Une des blagues internes en vogue à l’Hôpital général racontait qu’Elinor était le seul médecin du département d’obstétrique et de gynécologie à ne pas être une femme âgée. Pas surprenant : pendant vingt-sept ans, elle fut la seule femme dans son groupe professionnel ! Mme Black attribuait une grande partie de sa réussite à son travail ardu. Lorsqu’elle quitta son poste de chef du département de l’obstétrique et de la gynécologie, elle savait bien qu’elle avait travaillé plus fort que son prédécesseur de sexe masculin et avait reçu moins de soutien que le médecin qui lui succéda. Lorsqu’elle se retira du monde universitaire, elle refusa le prestigieux titre de professeure émérite de manière à pouvoir continuer de se consacrer à l’université et au département de l’hôpital. Elle travailla jusqu’à deux jours avant son décès, le 30 janvier 1982. PHYLLIS JEAN MCALPINE, PH.D., F.C.C.C.G (1942-1998) Mme Phyllis McAlpine naquit et grandit dans le sud de l’Ontario. Elle obtint son baccalauréat ès sciences (avec distinction) de la University of Western Ontario, où elle se mérita également la médaille d’or en zoologie. Elle possédait une maîtrise en génétique humaine de la University of Toronto pour ses travaux sur la dystrophie musculaire ainsi qu’un doctorat du laboratoire Galton, du University College de Londres. Mme McAlpine se sentait prédestinée à étudier la génétique. Elle voulait d’abord devenir zoologiste, mais une tempête de neige qui s’abattait alors sur le sud de l’Ontario en 1964, changea ses plans de carrière. Dans une interview accordée au journal Winnipeg Free Press elle déclara : « J'ai raté le rendez-vous à cause de la tempête de neige et lorsque j'y suis finalement arrivée, j'ai rencontré un autre professeur qui me parla d'un autre poste vacant en génétique. Donc, au lieu de devenir une zoologiste qui s'ennuie ferme à examiner des cellules animales au microscope, j'ai fini par étudier les gènes humains. Je crois que mon destin était de devenir généticienne ». [traduction libre]17 Mme McAlpine fut nommée attachée de recherche à la Section de la génétique du département de santé pédiatrique et de l’enfant de l’Université du Manitoba en 1972 et, en 1993, elle devint chef du département de la génétique. Elle fut toujours un peu en avance sur son époque et effectua d’importantes recherches sur la cartographie des gènes humains, et ce, bien avant que ce type de recherche ne devienne à la mode et que le projet du génome humain ne voie le jour. Elle était une chercheuse très prolifique de grande renommée et publia une centaine de travaux pendant sa carrière. Elle fut un des membres fondateurs des Ateliers de cartographie sur les gènes humains et la vice-présidente de 1977 à 1991. De 1992 à 1996, elle présida le comité sur la nomenclature des Réunions annuelles de coordination de la cartographie génétique des chromosomes humains. Elle consacra des heures innombrables et 9 une énergie folle à élaborer des lignes directrices et à nommer les gènes selon leur description. C’est sous son égide que la nomenclature de la génétique humaine devint une seule langue plutôt qu’un groupe de dialectes.18 Mme McAlpine travaillait en moyenne six jours et demi par semaine, mais il lui restait encore du temps à consacrer à d’autres activités telles que l’opéra et la culture de fleurs. Elle se consacrait tellement à son travail que lorsqu’elle quitta le comité de la nomenclature en 1996, il fallut embaucher trois personnes à temps plein pour la remplacer. Certaines femmes très éminentes avaient guidé Mme McAlpine pendant ses études. Elle avait donc pris l’engagement de venir en aide tout particulièrement aux femmes œuvrant dans le domaine des sciences où il était souvent difficile de se faire reconnaître en tant que femme. Elle fut une enseignante enthousiaste pour de nombreuses étudiantes en médecine et milita en faveur d’une participation accrue des femmes dans les sciences. Elle fit une fois la remarque suivante : « Être une scientifique présente encore des désavantages. Nous sommes toujours minoritaires dans beaucoup de secteurs. Les femmes n’ont pas été des stagiaires guidées par des hommes. Nous avons dû apprendre le fonctionnement du système de notre propre chef ». [traduction libre]19 Une de ses étudiantes, Armansa Glojo, a gardé un tendre souvenir d’elle : « Mme McAlpine a beaucoup transformé ma vie. Elle était mon ami et ma conseillère, et elle prenait cette responsabilité très sérieusement. Elle nous a appris à ne jamais avoir peur de poser des questions et nous a motivées à entretenir notre passion pour les sciences ». [traduction libre]20 Mme McAlpine a été présidente de l’Association canadienne des femmes en sciences, Division du Manitoba, de 1993 à 1994. En 1998, le Collège canadien des généticiens médicaux lui a remis le Prix des fondateurs « afin de souligner ses insignes contributions et son exceptionnel engagement dans le domaine de la génétique médicale au Canada et à l'étranger ». [traduction libre]21 INFIRMIÈRES, PROMOTRICES DES SOINS DE SANTÉ ET FIGURES DE PROUE DES COMMUNAUTÉS Bien qu’il soit vrai que, du point de vue historique, les hommes ont toujours dominé en médecine, les femmes ont, pour leur part, fait preuve d’initiative et d’engagement en ce qui concerne la prestation des soins de santé. Elles se sont toujours aidées les unes les autres au moment des accouchements et lorsqu’il fallait prendre soin des membres de la famille. Les gens qui habitaient dans les régions rurales dépendaient fortement sur les services des sages-femmes et des soignantes. Comme le dit Eva McKay, aînée des Sioux du Dakota : « Il y avait des sages-femmes, des femmes qui aidaient d’autres femmes, au moment des accouchements. Les femmes avaient une responsabilité : "Si je peux t’aider à ce moment là, je le ferai." Nous n’étions pas choisies, nous étions censées être là pour tout le monde. Nous avons appris à force d’observer. Les mères ont la responsabilité de transmettre les connaissances à leurs filles ». [traduction libre]22 Ainsi, on se fiait aux femmes pour prendre soin d’autres femmes et de leurs familles. Les femmes ont eu recours à beaucoup de moyens différents pour contribuer à la création de communautés en santé. Les récits ci-dessous illustrent ces moyens utilisés par les femmes pour promouvoir la santé dans leurs communautés et témoignent de l’esprit d’initiative, d’innovation et de collaboration dont elles ont fait preuve. 10 LES SŒURS GRISES Mère supérieure Marie Louise Valade, 35 ans Sœur Marie Margaret Eulalie Lagrave, 36 ans Sœur Marie Hedwidge Lafrance, 26 ans Sœur Gertrude Coutlée (Sœur Saint-Joseph), 24 ans Le premier groupe de Sœurs grises (Sœurs Valade, Lagrave, Coutlée et Lafrance) firent le trajet de Montréal à Saint-Boniface en canot et y arrivèrent le 21 juin 1844. À la demande de monseigneur Joseph Norbert Provencher, ces quatre religieuses s’étaient portées bénévoles pour quitter la maison mère des Sœurs de la Charité et se rendre à la colonie de la rivière Rouge afin d’y offrir des services d’éducation et d’encadrement religieux. L’Ordre des Sœurs de la Charité, affectueusement connu sous l’appellation Sœurs grises, avait été fondé à Montréal par Mme Marie-Marguerite d’Youville dans les années 1700. Les Sœurs étaient connues depuis longtemps pour leurs œuvres caritatives auprès des pauvres et avaient construit l'Hôpital général de Montréal, un endroit où elles pouvaient s’occuper des malades, des pauvres et des parias de la société. Fidèles à la mission caritative de l’Ordre, les quatre religieuses qui avaient accepté volontairement de faire le long et périlleux voyage vers Saint-Boniface s’étaient engagées à offrir des services éducatifs et médicaux aux habitants de la région. Sœur Lagrave, qui possédait déjà une formation d’infirmière, était chargée de la prestation des soins médicaux et de la coordination de toute augmentation des services de santé requis. Sœur Lagrave commença à s’occuper des besoins des malades en effectuant des visites à domicile en charrette de la rivière Rouge ou en traîneau tiré par des chevaux. Si l’on entend parler que quelqu’un souffre d’un rhume, même si cette personne habite à l’autre extrémité de la paroisse, les sœurs sont tenues de vous apporter de la moutarde pour le soin des pieds et de préparer un fort bouillon pour les reins, et ce, en de quantités telles que les quelques centaines de poules que possède Monseigneur ne suffiraient pas à pondre le nombre d’œufs nécessaires à la préparation de cette délicieuse potion. Le plaisir que les bonnes sœurs prennent à prodiguer des soins est tel qu’il les réjouit tout en leur donnant l’occasion de nous guérir. [traduction libre]23 Les quatre premières religieuses ont fourni des services et des soins à domicile pendant de nombreuses années. Au cours de la première année de leur mission, elles ont effectué 6 000 visites auprès de malades, peu importe où ceux-ci se trouvaient. Elles ont également fourni avec compassion des soins et offert un refuge aux personnes dans le besoin qui se présentaient à leur couvent de Saint-Boniface (qui abrite maintenant le Musée de Saint-Boniface). Avec l’aide d’autres religieuses venues les rejoindre, les Sœurs grises de Saint-Boniface fondèrent le premier hôpital de la région en 1871, et l’agrandirent en 1877 et de nouveau en 1907. En 1931, l’Ordre fonda le Sanatorium de Saint-Boniface, qui fut ensuite rebaptisé Centre Saint-Amant. De nos jours, les Sœurs grises demeurent fidèles à leur engagement à venir en aide à leur prochain en offrant leurs services avec compassion dans les domaines de la santé, de l’éducation, des services sociaux et des services de pastorale. 11 MARGARET SCOTT (1855-1931) L’ange des quartiers défavorisés : Sainte Margaret de Winnipeg Margaret Scott fonda la Margaret Scott Nursing Mission, un organisme établi en 1904 dans le d’offrir des soins infirmiers aux pauvres de Winnipeg. Née Margaret Ruttan Boucher, le 28 juillet 1855 à Colborne, en Ontario, elle était guidée par une solide foi chrétienne qui l’amena à consacrer de nombreuses années de sa vie à venir en aide aux plus démunis. Au début de la vingtaine, elle épousa William Scott, mais elle était déjà veuve et sans revenus à l’âge de vingt-cinq ans. Margaret Scott dut subvenir seule à ses besoins pendant de nombreuses années et souffrait d’accès de maladie récurrents. Après un accès qui l’avait particulièrement fragilisée, « on lui conseilla de tenter de se refaire une santé dans le climat revigorant de l’Ouest canadien ; alors elle déménagea à Winnipeg, où le destin voulut qu’elle passe le reste de sa vie ». [traduction libre]24 Arrivée en 1886, elle travailla pendant un certain temps au Bureau des terres fédérales et quitta finalement son emploi rémunéré pour se consacrer corps et âme aux pauvres. Elle décida d’abandonner son destin aux soins de Dieu et de placer toute sa confiance en Lui. Elle visita des femmes incarcérées dans la prison municipale pour leur offrir de l’amitié, de l’appui et de l’aide. Beaucoup de ses contemporaines, qui suivaient le courant qui mena à la création du mouvement évangélique social, ouvrirent le Winnipeg Lodging and Coffee House de la rue Lombard, un lieu où les itinérants pouvaient manger un repas à peu de frais, être hébergés, trouver de l’aide pour chercher un emploi ou obtenir des soins en cas de maladie. Le Coffee House offrit une chambre à Margaret Scott et elle choisit d’y rester pendant plusieurs années, afin d’être près des plus démunis. Jour après jour, Margaret Scott parcourait les rues de Winnipeg, s’arrêtant aux demeures des pauvres et leur venant en aide par tous les moyens possibles. Elle devint très bien connue pour son dévouement de longue date aux besoins des autres et elle fut secondée dans sa démarche par des mécènes du secteur privé qui lui fournirent de la nourriture, des vêtements, de l’argent pour acheter des médicaments, un poney et une charrette pour ses visites à domicile et, plus tard, un salaire d’infirmière. La pauvreté et la maladie étaient présentes partout où elle passait ; elle s’efforça donc d’apprendre, de façon autodidacte, autant de compétences infirmières que possible. Dans cette ville de Winnipeg en plein essor du début du XXe siècle, Margaret Scott fournissait des services d’aide individuelle et réclamait des services de santé publique pour répondre aux besoins des familles d’immigrés et des nouveaux arrivants qui habitaient souvent des maisons surpeuplées dans les quartiers les plus défavorisés de Winnipeg. La Margaret Scott Nursing Mission, fondée en 1904, allait devenir la résidence centrale pour la formation et le soutien des infirmières de quartier. Il s’agissait, en principe, de s’assurer que les soins que Margaret Scott avait commencé à offrir aux malades en 1886 continueraient d’être prodigués avec compassion. En 1904, elle obtint les fonds nécessaires pour payer les services d’une infirmière pendant trois mois. L’année suivante, deux infirmières furent embauchées pour offrir des services et effectuèrent en moyenne environ 1 000 visites à domicile par mois. Dès 1906, la Mission put embaucher quatre infirmières et deux infirmières-stagiaires grâce à une aide financière fournie par la Ville. La réputation des œuvres de la Mission se répandit et, au cours des années qui suivirent, des demandes arrivèrent de personnes de l’extérieur de Winnipeg qui désiraient mettre en place des programmes de formation des infirmières de quartier. 12 En plus des milliers de visites effectuées par les infirmières de quartier, Margaret Scott poursuivait, dans la mesure du possible, ses rondes quotidiennes, et ce, malgré un grave accès de typhoïde. Un groupe auxiliaire fut également mis en place pour appuyer la mission. Les bénévoles auxiliaires confectionnaient des articles d’étoffe, des vêtements et des bandages à l’intention des patients. Elles aidaient également Margaret Scott à faire les visites à domicile, à lire des livres aux malades, aux personnes âgées et aux aveugles, ainsi qu’à les réconforter, et à distribuer des paniers de Noël aux démunis. Margaret Scott provoqua un effet déclencheur qui permit de rassembler les ressources des habitants de Winnipeg qui avaient les moyens de venir en aide à leurs concitoyennes et concitoyens moins fortunés. Tout au long de sa mission de bienveillance auprès des pauvres, qui dura presque un demi-siècle, elle n’eut d’autre appui que sa foi en Dieu et la bonté des autres. Après le décès de Margaret Scott en 1931, les œuvres de la Mission se poursuivirent pendant de longues années. En 1942, avec l’arrivée des Infirmières de l’Ordre de Victoria du Canada, la Margaret Scott Nursing Mission se retira du domaine des soins infirmiers de quartier afin d’éviter la double prestation des services. Margaret Scott était une source d’inspiration pour les gens qui l’entouraient et des milliers d’habitants de Winnipeg ont conservé un doux souvenir d’elle longtemps après sa mort. Un monument fut érigé en sa mémoire au cimetière St. John’s et, en 1932, elle se vit décerner, à titre posthume, la International Cosmopolitan Service Medal. Son nom fut donné à une école, ainsi qu’à une salle commune de l’Hôpital général de Winnipeg. La bourse Margaret Scott Nursing Mission Scholarship est encore décernée chaque année à une ou plusieurs étudiantes de la faculté des sciences infirmières de l’Université du Manitoba. MARY SPEECHLY (1873-1968) Mary Speechly défendit les droits des Manitobaines pendant plus de soixante ans et fonda la Winnipeg Birth Control Society, dont le but était de fournir des renseignements sur la contraception aux femmes victimes de la pauvreté. Née Mary Barrett en 1873, à Londres, en Angleterre, elle avait fait des études en humanités et était photographe professionnelle. En 1902, après avoir émigré au Canada, elle s’installa à Pilot Mound, où son mari était le médecin du village. Lorsqu’elle accompagnait son mari pour aider des femmes à accoucher, Mary remarquait souvent le surpeuplement des maisons et les conséquences physiques et socioéconomiques de ces grossesses successives sur les femmes et leurs familles. En 1912, elle devint présidente du chapitre local de la Home Economics Society (Société d’économie domestique), un regroupement dont l’objectif était de faire progresser des dossiers tels que l’amélioration de l’éducation et des soins de santé des femmes, ainsi que le droit au vote. Ces sociétés étaient les précurseurs des Instituts féminins et offraient aux femmes une tribune pour partager des renseignements et des expériences entre elles et réclamer des changements dans des domaines qui les touchaient. En 1916, Mary Speechly déménagea à Winnipeg avec ses trois enfants pendant que son mari était stationné outre-mer comme médecin militaire pendant la Première Guerre mondiale. Elle fut bénévole pendant de nombreuses années auprès de la Croix-Rouge, des Instituts féminins, du Conseil des sociétés de bienfaisance, du Cercle canadien des femmes, de 13 la Fédération des œuvres et campagnes collectives et du Bureau des bénévoles. Sa démarche la plus audacieuse et stimulante, toutefois, fut la fondation de la Winnipeg Birth Control Society en 1934, soit exactement trente-cinq ans avant qu’il ne devienne légal au Canada pour quiconque de fournir des renseignements sur la contraception ou des dispositifs la rendant possible. La Birth Control Society, qui allait ensuite devenir la Family Planning Association of Winnipeg, offrait de l’aide financière, de l’encouragement et des services éducatifs aux femmes les plus démunies qui cherchaient de l’information sur la contraception, et les orientait vers des médecins. Les femmes qui s’adressaient à la Society pour obtenir de l’aide vivaient généralement dans le dénuement avec plusieurs enfants. Les infirmières embauchées par la Society fournissaient les dispositifs nécessaires et orientaient la femme vers son obstétricien personnel ou vers un autre médecin qualifié et bien disposé à l’égard des besoins médicaux d’une femme en matière de reproduction. La Society assumait également les frais. Au sujet des premières années de la Society, Mary Speechly écrivit : « […] au cours des seize premières années, nous comptions soixante-dix patients, des mères très démunies et en fort mauvaise santé, avec des familles nombreuses comprenant de jeunes bébés. À la fin de la première année, l’amélioration de la santé des femmes et de la condition des foyers se révéla étonnante ». [traduction libre]25 La première réunion annuelle de la Birth Control Society eut effectivement lieu dans le Palais législatif du Manitoba. Une réunion préliminaire fut toutefois interrompue par un groupe de personnes opposées à la mission de la Society et, par la suite, les réunions se tinrent clandestinement dans des demeures privées. Ne sachant que trop bien qu’elles couraient le risque d’être arrêtées pour leurs activités en faveur de la Society, Mary Speechly et d’autres bénévoles travaillaient dans l’ombre pour offrir des services aux femmes qui en avaient le plus besoin et jeter les bases qui permettraient la venue de changements. Mary Speechly vit clairement que la santé et le bien-être d’un grand nombre de mères et de leurs enfants passaient par la capacité de la femme à contrôler le nombre de grossesses. Elle avait rencontré beaucoup trop de femmes dont la santé déjà fragile était menacée davantage par des grossesses et des accouchements. À cette époque, les associations de planification familiale bénéficiaient également de l’appui d’un grand nombre de partisans du mouvement eugénique, dont le but était d’encourager les femmes à avoir recours à la contraception pour réduire le nombre d’enfants naissant « avec une déficience mentale ». Les partisans de la Winnipeg Birth Control Society ne faisaient pas exception à la règle. Bien que beaucoup de partisans de la Society se soient succédé au fil des années, il y eut également un mouvement d’opposition de taille auquel s’ajoutait la menace de poursuites et d’emprisonnement, sans oublier le financement ridiculement insuffisant. Les demandes d’aide financière adressées aux fondations se virent immanquablement opposer une fin de non-recevoir et aucun gouvernement ni organisme ne pouvait prêter son appui aux pratiques illégales de la Society. Malgré tout, l’inlassable Mary Speechly tint bon, année après année, étirant au maximum les ressources pour répondre aux besoins. ANNE G. ROSS (1911-1998) En 1948, Anne Ross fut embauchée à titre d’infirmière-chef de la clinique Mount Carmel de Winnipeg et s’attela à la tâche de renforcer et d’élargir les services offerts par la clinique à une communauté en pleine évolution. La clinique, fondée en 1926, avait soigné les immigrants d’origine juive venus des pays de l’Europe de l’Est qui s’étaient installés dans le quartier nord 14 de Winnipeg. Dès 1948, l’occasion se présenta de modifier le rôle de la clinique en adaptant ses programmes aux besoins des habitants des quartiers avoisinants. La compassion dont fit preuve Anne Ross à l’égard des habitants du North End, ainsi que ses idées novatrices et sa détermination inébranlable, sont à la base de la réussite des projets d’expansion de la clinique. Anne Ross fut à la fois interpellée et inspirée par certaines personnes qu’elle apercevait dans le quartier : celles qui manquaient de nourriture ou d’un revenu stable, ou de compétences parentales, et celles qui vivaient des situations de violence et de négligence familiales. Non seulement se rendit-elle compte que les carences sanitaires des enfants étaient aggravées par les besoins socioéconomiques de leurs parents démunis, mais elle réussit également à se mériter la confiance de ces derniers. Les visites à domicile devinrent le moyen utilisé par Mme Ross et d’autres membres du personnel pour évaluer les conditions de vie globale d’une famille, pour repérer les besoins et pour trouver des façons de combler les carences, et ce, dans l’ultime but de venir en aide à la famille dans son ensemble. Le programme d’hôpital de jour fut mis sur pied afin d’offrir des soins aux enfants dans un environnement sain et valorisant. Ce programme et d’autres du même genre visaient à répondre aux besoins affectifs et physiques des enfants et de leurs parents. Dans chacun des cas, les soins de santé intégrés étaient à la base des services rendus. Chaque programme offert par la clinique Mount Carmel était élaboré en réponse à un besoin détecté dans la communauté. Des soins primaires y étaient offerts et on y pratiquait la médecine préventive. Nommée directrice exécutive en 1964, Anne Ross réussit à mettre en œuvre un grand nombre de ses idées concernant l’expansion des programmes et à exercer des pressions efficaces afin d’obtenir le financement nécessaire des secteurs privé et public. Son approche holistique commença à se manifester avec l’intégration de services adaptés aux besoins du patient et offerts par une équipe de spécialistes embauchés par la clinique. L’hôpital et la garderie de jour constituaient un milieu bienveillant pour les enfants, tout en permettant aussi bien aux parents qu’aux enfants d’acquérir des aptitudes à la vie quotidienne. Des programmes de nutrition et de soins à la mère furent mis au point, ainsi que des programmes de formation au rôle de parent, des programmes de soins dentaires, des programmes destinés aux adolescents, des services de consultation et des services sociaux. Répondre avec compassion et de façon universelle aux besoins des gens constituait un élément essentiel des soins intégrés tels qu’envisagés par Mme Ross. Elle ne tolérait aucune dérogation à ce principe lorsqu’il s’agissait de la nécessité pour les femmes d’avoir accès à des renseignements concernant les méthodes contraceptives. Anne Ross ne voyait aucune autre solution que de fournir des renseignements médicaux exacts et précis aux femmes, et ce, à une époque où il était illégal au Canada de distribuer des dispositifs de contraception ou de l’information sur la question. En 1969, le gouvernement fédéral adopta finalement un projet de loi légalisant la contraception et modifia la loi relative à l’avortement, rendant ainsi les avortements thérapeutiques légaux lorsque jugés nécessaires pour la protection de la santé d’une femme. En vertu de la nouvelle loi, le droit de subir un avortement se décidait au cas par cas, chaque décision dépendant des recommandations du comité d’examen de l’hôpital. En réponse à la nouvelle loi, la clinique Mount Carmel mit en place le Pregnancy Counselling Service (Service de consultation en matière de grossesse). Ce service fut offert aux nombreuses femmes qui désiraient subir un avortement, permettant à chacune d’elles d’obtenir des renseignements exacts et précis concernant toutes les différentes possibilités, ainsi que de l’information sur les 15 méthodes de contraception et les services de suivi, et ce, peu importe si la patiente décidait de mener sa grossesse à terme ou de l’interrompre. Lorsqu’une femme décidait d’interrompre sa grossesse, la clinique la renvoyait à l’Hôpital général de Winnipeg, afin que son dossier puisse être examiné par le comité chargé compétent en la matière. En raison de l’accumulation des demandes d’avortement thérapeutique, certaines patientes furent aussi renvoyées vers des cliniques américaines. Même si beaucoup de femmes dépendaient du Pregnancy Counselling Service de la clinique et que ce service bénéficiait de l’appui d’un grand nombre d’organisations communautaires et de professionnels des soins de la santé, l’aide offerte par la clinique aux femmes n’était pas sans susciter la controverse. Mme Ross et d’autres membres du personnel de la clinique reçurent des menaces personnelles et une campagne visant le retrait des fonds publics fut entamée, sans toutefois obtenir les résultats escomptés. On peut dire, de façon générale, qu’un grand nombre des programmes élaborés à la clinique Mount Carmel étaient novateurs et suscitaient un vaste intérêt, mais il restait toujours ce besoin continuel de faire pression pour obtenir des fonds publics et privés. À une époque où l’assurance-maladie n’existait pas et que les patients étaient censés payer tout service médical directement de leur poche, les services de la clinique étaient offerts gratuitement à quiconque en avait besoin. La détermination dont Anne Ross fit inlassablement preuve porta fruit et lui permit de continuer à élaborer de nouveaux programmes pour la clinique et à agrandir les installations. Fidèle à sa philosophie, elle milita également en faveur de changements socioéconomiques directement liés à des nécessités de la vie quotidienne, comme le logement et le lait à prix abordables. Même si elle prit officiellement sa retraite en 1985, elle continua à faire pression en faveur du changement social et d’autres causes qui lui tenaient à coeur, en plus d’écrire le livre Clinic with a Heart: The Story of Mount Carmel Clinic et de fonder AGR Health Services for Seniors. Son engagement de longue date envers sa communauté prit fin avec son décès en 1998, mais sa mémoire se propage dans les vies des femmes que la clinique a aidées ou d’autres femmes qui, de quelque façon que ce soit, ont bénéficié de la campagne de défense des droits menée inlassablement par Anne Ross pendant quarante ans. MME HELEN GLASS (1917- ) Mme Helen Glass est une infirmière reconnue à l’échelle internationale pour son rôle de chef de file dans les domaines de l’éducation et de la recherche en sciences infirmières. Sa carrière en enseignement débuta après l’obtention de son diplôme de l’École des sciences infirmières de l’Hôpital Royal Victoria de Montréal en 1939. Elle se mérita ensuite un baccalauréat ès sciences (Columbia University, département de formation en sciences infirmières, 1960), une maîtrise en arts (1961), puis une maîtrise et un doctorat en sciences infirmières (Columbia University). En 1962, elle devint professeure à l’École des sciences infirmières de l’Université du Manitoba et en fut nommée la directrice dix ans plus tard. Elle joua également un rôle de premier plan dans la création d’un programme de troisième cycle en sciences infirmières à l’université et fonda aussi le Manitoba Nursing Research Institute. 16 Mme Helen Glass fut ensuite nommée présidente de l’Association des infirmières et infirmiers du Canada, et exerça une grande influence sur la formulation et la portée de la Loi canadienne sur la santé (1984) afin de faire en sorte que celle-ci reconnaisse le personnel infirmier et paramédical au même titre que les médecins en matière de soins primaires. À mesure que le virage ambulatoire abandonne l’approche axée sur les soins en établissement pour adopter des stratégies communautaires de promotion de la santé, elle est invitée à siéger à de nombreux comités et conseils consultatifs pour mettre ses compétences à profit et participer à l’élaboration de nouvelles politiques. Son engagement et son expérience dans les domaines de l’élaboration de politiques relatives aux soins de santé, ainsi que de l’enseignement et de la recherche en sciences infirmières, sont de renommée internationale. Mme Helen Glass se mérita un grand nombre de prix et de distinctions au cours de sa carrière, dont la Médaille commémorative du règne de la Reine (1977), le Prix de femme de l’année en éducation du YWCA (1979), le titre de membre de l’Ordre de la chasse au bison (1987), la Récompense pour services rendus à la communauté de la Ville de Winnipeg pour son apport exceptionnel à la ville et le titre d’Officier de l’Ordre du Canada (1989). Elle s’est également vu décerner cinq doctorats honoris causa et se mérita le Prix Jeanne-Mance, la distinction la plus prestigieuse de l’Association des infirmières et infirmiers du Canada (1992), en reconnaissance de son apport à la discipline des sciences infirmières. En 1999, l’Université du Manitoba reconnut « le remarquable esprit d’initiative dont fit preuve Helen Glass dans le domaine des sciences infirmières » [traduction libre]26 en donnant son nom à la nouvelle faculté de sciences infirmières. Sa vaste expérience et son immense savoir en matière de soins de santé lui ont permis de comprendre et de mettre en œuvre son approche holistique de la santé. « Il ne faut pas s’en tenir au simple fait que quelqu’un a attrapé une maladie mais il faut prendre en considération tous les aspects de son environnement. Les facteurs sociaux, économiques et écologiques, ainsi que la culture et la religion du malade, sont tous des déterminants de la santé ». [traduction libre]27 Elle a sans cesse plaidé en faveur de la reconnaissance et du soutien des infirmières dans le rôle qu’elles occupent au premier rang du mouvement visant à développer les systèmes communautaires de santé. À titre d’enseignante, d’infirmière et de défenseur des droits des femmes, Mme Glass a été une source d’inspiration pour beaucoup d’infirmières du Manitoba. Son engagement passionné envers sa profession et envers la promotion de communautés en santé l’ont amenée à se mériter beaucoup de succès et de reconnaissance pendant sa carrière. GRACE EASTER, KA OKEMOWI-NEPAWIT-EQUA (1955-1986) Grace Easter est née à Chemawawin, une communauté de la Première Nation crie de Cedar Lake en 1955. Lorsque Grace avait huit ans, sa famille et la communauté entière furent déplacées vers une autre localité près d’Easterville, à 400 milles au nord-ouest de Winnipeg. La raison du déplacement était l’inondation des terres ancestrales de la communauté pour permettre la construction de la centrale hydroélectrique de Grand Rapids. Bien que Grace ait grandi dans une communauté isolée et éloignée des établissements d’enseignement postsecondaire, elle travailla très fort pour devenir infirmière. Elle se concentra sur des projets visant à répondre aux besoins en soins de santé des peuples des Premières Nations. Elle devint conseillère auprès de la Confédération des Quatre-Nations et siégea à la 17 Commission de la santé de l’Association des Premières nations. Elle travailla aussi très activement à la mise sur pied d’associations pour regrouper les infirmières d’origine autochtone du Canada. Elle présida à la fois la Manitoba Indian Nurses Association et l’Association des infirmières et infirmiers autochtones du Canada. Grace croyait ferme aux idéaux des associations et de l’accent qu’elles plaçaient sur la nécessité pour les Autochtones d’exercer le contrôle sur les besoins en matière de santé de leurs peuples. L’Association des infirmières et infirmiers autochtones du Canada avait été créée en 1975 dans le but de servir d’organisme de soutien pour les prestataires de soins autochtones. Grace Easter, Jean Goodwill et d’autres infirmières ont joué un rôle clé dans la création de l’Association des infirmières et infirmiers autochtones du Canada (AIIAC). Les premières années de l’Association furent chargées de défis à surmonter pour les fondateurs et les membres, et ce, à plusieurs niveaux : trouver des fonds, mettre en place des activités de couloir, forger des alliances et façonner le profil de l’organisation professionnelle. Au moment où il semblait que l’organisation était au plus près de l’effondrement, elle fut sauvée par les infirmières autochtones du Manitoba et placée sous l’égide de leur association provinciale. En 1978, Grace Easter, membre de la Manitoba Indian Nurses Association assuma la présidence de l’organisation nationale et le premier bureau national fut établi à Winnipeg. Puis, en 1982, le bureau principal de l’Association, dont la vitalité avait été restaurée, fut déménagé à Ottawa où ses membres pouvaient jouir d’un meilleur accès aux ministères du gouvernement et aux autres organismes nationaux.28 Grace Easter a également joué un rôle important dans la création du centre KeKiNan (notre foyer). « Fondé par la Manitoba Indian Nurses Association et par le Indian and Metis Senior Citizens Group de Winnipeg, il s’agit du premier foyer pour personnes âgées d’origine autochtone en milieu urbain au Canada ». [traduction libre]29 Le centre KeKiNan a été décrit comme « un exemple de l’esprit d’initiative des femmes autochtones en ce qui concerne l’élaboration d’approches intégrées visant à améliorer la qualité de la vie des Autochtones ». [traduction libre]30 Grace Easter, à titre de présidente de la Manitoba Indian Nurses Association, réalisa sa vision d’un centre destiné à répondre aux besoins des aînés en matière de logements avec services de soutien. Elle ajouta son expérience de soignante et de planificatrice communautaire au noyau de membres de la communauté et de professionnels engagés qui étudiaient les besoins des aînés et la faisabilité du projet de construction à Winnipeg d’un centre gériatrique pour personnes âgées d’origine autochtone. Malheureusement, Grace Easter décéda avant que la construction du centre KeKiNan ne soit terminée et que les premiers locataires ne s’y installent le 1er décembre 1991. Il a fallu beaucoup d’années pour que le centre KeKiNan atteigne ce point culminant et Grace comptait parmi les visionnaires qui en ont jeté les bases requises, et ce, bien avant que les personnes âgées ne puissent en mesurer les bienfaits. Dans la préface à l’étude de faisabilité soumise en novembre 1985, Grace écrit ce qui suit au nom de la Manitoba Indian Nurses Association : « Le présent rapport, ainsi que notre participation continue au sein du centre KeKiNan, sont dédiés aux personnes âgées autochtones de Winnipeg et du Manitoba, et ce, avec une gratitude qui ne peut s’exprimer autrement que par notre engagement à notre tâche et par notre détermination à rester fidèles aux idéaux les plus élevés en ce qui concerne les méthodes de guérison traditionnelles de nos peuples et à exercer notre profession ». [traduction libre]31 Le travail accompli par Grace au sein des associations professionnelles d’infirmières et sa participation à la création du centre KeKiNan sont importants de par les résultats atteints ainsi que parce qu’ils 18 servent à illustrer toutes les différentes ressources uniques engendrées par des initiatives prises à l’échelle communautaire par des personnes intéressées, dévouées et bienveillantes. Son récit ne constitue qu’un volet de l’histoire complète, mais il ne s’agit pas du tout du seul récit. Il sert plutôt à illustrer comment chaque personne peut jouer un rôle important dans la création de quelque chose de nouveau en travaillant en collaboration avec d’autres pour atteindre un objectif commun. Bien qu’il soit très triste que Grace Easter n’ait pas pu être présente le jour où les premiers locataires sont arrivés au centre KeKiNan, son travail ne fut pas en vain pour autant, puisque d’autres membres de la communauté ont pu poursuivre la réalisation de son rêve. Grace Easter s’est méritée son nom cri, Ka Okemowi-Nepawit-Equa, dans l’exercice de sa profession. On pourrait rendre ce nom en français comme « femme debout au milieu des chefs ». Beaucoup l’appelait la « princesse qui se tient debout ». Avant sa mort à l’âge de 30 ans, on lui décerna le Prix Jean Goodwill qui récompense les personnes ayant contribué de façon exceptionnelle à l’amélioration de la santé des Autochtones. CONCLUSION Les Manitobaines ont participé de manière significative à la prestation des soins de santé tout au long de l’histoire de la province. Les femmes dont nous brossons le portrait dans le présent document ont fait preuve d’un leadership exceptionnel et, dans de nombreux cas, ont dû lutter pour atteindre leurs objectifs. Elles n’ont pas seulement œuvré pour la promotion de la santé au sein des communautés ; elles ont également préparé la voie pour celles qui allaient leur succéder. De nos jours, les femmes ont plus d’occasions que jamais de travailler à améliorer la santé dans les communautés. De façon globale, la plupart des services de soins de santé et de soutien au Canada sont dispensés par des femmes, que ce soit à titre d’infirmières ou de professionnelles dans des domaines connexes qui relèvent de la santé. À l’heure actuelle, les femmes peuvent choisir une carrière de physiothérapeute, de technologue médical, d’orthophoniste, de diététicienne, de dentiste ou d’hygiéniste dentaire, et de médecin. Alors qu’il fut une époque où il était difficile pour une femme de poursuivre une carrière en médecine au Canada et presque impossible pour elle de se voir attribuer une licence, de nos jours les possibilités sont illimitées pour les femmes qui désirent devenir médecin ou spécialiste. À l’heure actuelle, presque la moitié des diplômés en médecine au Manitoba sont des femmes. Elles participent à la santé des communautés à titre de médecins de famille, de chirurgiennes, de spécialistes, de chercheuses, d’administratrices et d’éducatrices. En 1987, trois femmes autochtones (Judith Bartlett, Marilyn Cook et Catherine Cook) reçurent leur diplôme de la faculté de médecine de l’Université du Manitoba et sont maintenant reconnues comme chefs de file dans le domaine de la santé des Autochtones au Manitoba. Alors que nous rendons hommage aux femmes, qui tout au long de notre histoire commune, ont réalisé le rêve d’aider d’autres à mener une vie plus saine, nous pouvons également accueillir avec joie les nouvelles possibilités et les nouveaux défis qui s’offrent à nous dans nos propres communautés. De nombreuses orientations nous sont actuellement proposées et nous pouvons, de diverses façons, puiser dans nos propres rêves, passions et énergies de quoi faire profiter les gens qui nous entourent. 19 1 Lettre de Jean Currie, archiviste de la bibliothèque médicale de l’Université du Manitoba, adressée à Mme Carlota Lemieux, 20 novembre 1974. 2 Hacker, Carlotta. The Indomitable Lady Doctors. Toronto, Clarke Irwin, 1974, p.133. 3 Hacker, Carlotta, ibid, p.136. 4 Hacker, Carlotta, ibid, p .79. 5 Edge, Fred. The Iron Rose; The Extraordinary Life of Charlotte Ross, M.D. Winnipeg, University of Manitoba Press, 1992, p. 4. 6 Edge, Fred, ibid, p. 112. 7 Douglass, Ellen M. A Pioneer Woman Doctor of Western Canada - Dr. Charlotte Ross. University of Manitoba Medical Journal, vol. 18, n° 1, 1946, p.14. 8 Communiqué de presse. University of Manitoba Press, 8 novembre 1993. 9 Dr. Amelia Yeomans. Culture, Patrimoine et Loisirs Manitoba, Direction des ressources historiques, Winnipeg, 1985, p. 2. 10 Dr. Amelia Yeomans, op.cit., p. 6. 11 Kesserling, Margaret. She Prescribed for the Aboriginals More Than Half a Century Ago. The Leader Post, Regina, mercredi 6 septembre 1952. 12 Hacker, Carlotta, op.cit., p. 203. 13 The Winnipeg Tribune, 12 janvier 1957. 14 Journal non nommé. Samedi 29 décembre 1951. 15 Vandervoort, Julie. Tell the Driver: A Biography of Elinor F.E. 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