mars 1987 - Association des familles KIROUAC
Transcription
mars 1987 - Association des familles KIROUAC
Quelle est ta route? C'est la route du saint, la route du fou, la route d'arr.-ell-ciel. la route idiote C'est Ulle route de n'importe où pour n'importe qui n'importe comment yol. 1 Bulletin du Club Jack Kérouac no 1 Club - JACK KEROUAC MARS 1987 129, Côte de la Montagne, Québec, Qc, G1K 4E6. . Téléphone : (418) 692-5177 "Que l que chose de bon va ven i r de toutes choses. heur éternel m'attend. Nul besoin de dire un mot de plus." Et un bon- Origine de toute écriture, à quoi elle puise et se renouvelle, le silence en traduit aussi l'accomplissement, comme abandon, reconnaissance contemplative de la plénitude de ce qui est, de son impossible représentation. Mais Jack Kérouac écrivit encore après Big Sur. Si sa lecture nous reconduit en nous-même, à la vanité de cette vie, elle affirme aussi, et célèbre sans mesure, l'Autre comme condition lyrique du salut, Dean Moriarty, Maggie Cassidy, et le Monde comme fascination aimantée, sa beauté première retrouvée, dans la candeur et l'étonnement extatique de celui qui aime; la nécessité de le dire, de tout dire et tout de suite, en prose de néon convulsif jazzé, en fioretti franciscains séraphiques. Après quelques années de lectures recluses, de voeux télépathiques, nous partageons. Le texte, dans ses interstices, parle en sous-entendus, propose des questionnements, suscite des réponses. Il faut mettre au jour ce dialogue intime, divers et multiple. Cette invitation, le premier numéro du Bulletin du Club Jack Kérouac la formule pour de vrai, pour de bon. Comme amorces, mais plus encore car non négligeables, des comptes rendus, des informations, des rêves et des réalités. Rémi Ferland 3. KÉROUAC À QUÉBEC LES 1, 2, 3 ET 4 OCTOBRE PROCHAIN! C'est confirmé! Il y aura une grande Rencontre internationale Jack Kérouac à Québec en octobre prochain. Le projet longuement mûri par les divers membres du Club, a été inspiré à l'origine par la constatation que le côté franco-américain (et donc québécois) de Jack avait été mal compris par ses biographes, même par ses compagnons de route, et par ses " aficionados" en général ... et qu'il fallait en discuter. Toutefois, la Rencontre, telle qu'elle est conçue aujourd'hui, déborde de loin cette préoccupation pour s'adresser à toute la vie et l'oeuvre de l'écrivain et à son impact sur la culture occidentale de l'Après-Guerre. À vrai dire, c'est un remarquable concours de circonstances qui nous a amenés à entreprendre cette grande aventure: visionnement de la fameuse entrevue avec Jack au Sel de la Semaine (Radio-Canada) en 1967, la rencontre de deu x membres du Club avec Allen Ginsberg au Naropa Institute l'été dernier, la création très rapide d'un réseau d'au delà d'une centaine de membres du Club, au Québec, au Canada anglais, aux États-Unis, en France, en Angleterre, en Allemagne et même en Inde, sans oublier l'encouragement constant du Secrétariat permanent des peuples francophones. En chantier depuis l'été dernier, les grandes lignes de l a Rencontre sont déjà cl ai rement étab lies . Il Y aura, d' abord, un colloque littéraire comprenant une brochette de grands conférenciers (Victor Lévy-Beaul ieu, Roger Brunelle et le Père Morissette, Allen Ginsberg, John Clellon Holmes, Gérald Nicosia, François Ricard, Pierre Vallières, ... ) ainsi qu'une série de tables rondes animées par des écrivains et des chercheurs d'ici et d'ailleurs (Bernard Agostini, Pierre Bouillon et Gilles Farcet, Luci en Francoeur, Louise Péloquin, Robert Perreault, Josée Yvon, Denis Vanier, Joy Walsh ... ). Ensuite, il Y aura des présentations de films et de vidéos sur Kérouac et l es Beats. Robert Fran k nous a assuré de sa présence, et une partie de son oeuvre photographique sera présentée en collaboration avec la Galerie Vu. La Rencontre servira, fort probablement, de tremplin pour lancer le nouveau film de Herménégilde Chiasson. Intitulé "Le grand Jack", ce film est actuellement à l' étape de montage à l'Office national du film (Montréal). 5. Et tout cela sans oublier la fameuse entrevue Jack Kérouac/Fernand Séguin, le diaporama de Robert Perreault intitulé "Au delà de la route: le côté franco-américain de Jack Kérouac" et un vidéo de Denis Vanier. Plusieurs autres expositions sont projetées: des photograph i es d'Allen Gi nsberg, des documents inédits de Joy Walsh (Moody Street Irregulars), une présentation de livres et d'autres documents organisée autour du thème des "Lowell books" de Rod Anstee et de Dave Moore (The Kerouac Connection), des photographies de Georges Durette de Manchester (New Hampshire) et , peutêtre, une exposition d'art contemporain montée en collaboration avec le Musée du Québec. Finalement, il est question de plusieurs manifestations artistiques dont une nouvelle pièce de théâtre de l'écrivain québéco i s Marc Chabot - présentée en primeur, bi en sûr - et une soirée de poésie et jazz avec la participation de Herménégilde Chiasson, Patrice Desbiens, Lucien Francoeur, Allen Ginsberg, Alan Lord, Denis Vanier, Joy Walsh, Josée Yvon et bien d' au tres. De plus, certains auteurs-compos iteurs-i nterprètes , do nt Youenn Gwernig, Sylvain Lelièvre et Richard Séguin, ont manifesté leur intérêt à participer à un grand spectacle ... Un dossier à suivre! Pour réaliser ce grand événement le Comité organisateur compte déjà sur le concours d'un éventail d'organismes; le Secrétariat permanent des peuples francophones, bi en sûr, mais également le Conseil des Arts du Canada, le Ministère des Relations internationales du Québec, l'Université Laval et la SIDAC du Vi eux-Québec, sans mentionner un grand nombre de coll ab orateurs enthousiastes - et bénévoles - d'ici et d'ailleurs. Il reste que la Rencontre est née de l'imagination et de l'enthousiasme de l'ensemble des membres du Club et, à mesure que la date fatidique approche le Comité organisateur aura besoin de votre collaboration. Évidemment, on compte sur votre présence en octobre, les membres en règle du Club auront droit à un escompte de 10,00$ sur les frais d'inscription. Mais d'ici là on aimerait connaître vos idées et vos propositions sur le contenu de On aura besoi n de bénévoles et on aimerait bien l a Rencontre. proposer l' hébergement chez l es membres québécoi s du Club aux participants venant de . l'extérieur de la ville. N'hésitez pas à faire part de vos idées et de vos disponibilités en appelant ou en écri vant au Comité organ i sateur au 129, Côte de l a Montagne, Québec (Québec) G1K 4E6 - Téléphone: (418) 692-5177. Éri c Wadde 11 Comité organisateur RENCONTRE INTERNATIONALE Québec, 1-2-3-4 octobre 1987 7. Bertrand Marotte, journaliste au Globe and Mail, signait dans l'édition du 21 octobre dernier, un article intitulé «Pilgrims trek to the land of Kérouac». Il nous donne ici un autre compte rendu de cette mémorable expédition du Club Jack Kérouac à Lowell. Pour accompagner son propos, un extrait de l'allocution du Père Morissette au Club des Citoyens américains, à paraître en entier dans un numéro prochain des Avant-dIre,et le poème, fable historique aussi bien, que lut Roger Brunelle lors de notre hommage à Kérouac au cimetière Edson. R.F. UNE EXCURSION A LDWELL Le vendredi matin 17 octobre, bien installés dans leur mini-bus volant, les treize pé1erins explorent l'univers kérouackien. Sur la grand-route, en passant par Saint-Georgesde-Beauce vers la frontière, des échanges d'anecdotes et de faits divers. Louis Dupont, étudiant à l'Université d'Ottawa, parle du monde imaginaire, d'un Canada français mythique qu'habitait la mère de Jack. Rémi Ferland, étudiant à l'Université Laval, mentionne que le hors-d'oeuvre préféré de Jack était les asperges avec mayonnaise et olives noires. Son dessert préféré: un morceau de tarte aux pommes avec une boule de crème glacée. Passage aux douanes à Jaclanan, au Maine. Un petit douanier avec le grand sens de l'humour ironise quand on lui dit que nous sommes du Club Jack Kérouac: «Oh, ça explique tout.» Gros sourire. On l'informe que Jack Kérouac fut un grand écrivain. «Au Canada, cependant», dit-iL «Non, aux Etats-Unis.» Connaît pas. Il rentre au bureau montrer une copie de On the Road à ses confrères. Haussement d'épaules collectif. Dans le bus, c'est le rire fou. Au jeune universitaire de la Louisiane, John Landry, un concitoyen américain qui étudie le français à Trois-Rivières, il demande: «Comment tu t'es mêlé de tout ça?» Et hop, il lance un dernier essai de comprendre le but de notre pélerinage: «O.K. Vous descendez (aux E.U.) voir quelqu'un qui est mort.» Dans le Maine, juste en dehors du village de Sl1owhegan: une vieille maison de ferme, grise et abandonnée. En plein milieu de la cour, une luisante roulotte trailmobile. Bienvenue aux glorieux Etats-Unis, l'autre pays mythique de Jack. On pointe du doigt les noms canadiens-français qui apparaissent sur les commerces: Plourde, Benoît, Bowden, corruption de Beaudoin. M. Jacques Kirouac, administrateur à l'Université Laval, se fait une joie de remarquer les traces du peuple québécois dans ce monstrueux melting pot. Enfin, c'est Lowell Mass., en banlieue de Boston. De l'autoroute, on aperçoit ses anciennes usines de textile en briques rouges, quelques-unes mises à neuf, mais aussi un panorama de vitres cassées et de panneaux-réclames sur les toits de ces «factories» abandonnées où, il n'y a pas si longtemps que ça, des milliers de Canadiens français gagnèrent leur petite croûte de pain quotidien ... La rivière Merrimack, et ce qui reste, pas grand-chose, du «Petit Canada». . A l'hôtel, dans l'ombre de la manufacture d'ordinateurs Wang, deux hôtes incomparables, Roger Brunelle et Réginald Ouellette, nous reçoivent comme des cousines et cousins retrouvés après une longue, trop longue absence. «Je suis Franco-Américain de deuxième génération» (ses grands-parents sont nés au Québec), nous raconte M. Brunelle après nous avoir présenté un diaporama sur les coins canadiens-français de Lowell. «Je suis Québécois de première génération» (il est arrivé ici en 1961), dit fièrement Eric Waddell. «Mes grands-parents ont perdu la moitié de leurs enfants aux Etats-Unis», affIrme Yvan Fortin, fonctionnaire au gouvernement du Québec. Après le dîner, une visite au Centralville Social Club, en plein dans le coeur de la Kérouacité. Un bar qui n'a pas changé depuis la guerre. Table de pool, jeux de cartes. Yeux de bière. Sur le t-shirt d'un des habitués: STOLEN FROM MABEL'S WHOREHOUSE, LAS VEGAS. Des vétérans de la guerre du Vietnam qui trébuchent à travers un français caricatural. Y a Francis Dalphond et Robert Mousseau. Y a de la tristesse, y a du fun. Et on fête, l'esprit de Jack tout près. Le lendemain, M. Brunelle et M. Ouellette nous mènent à travers les rues et les quartiers qu'a connus le jeune Kérouac: Lily Street, «la matière première de ses rêves pour son Book of Dreams». Le 9 Lupine Street, où il y a possibilité de transformer la maison en Musée Kérouac, de dire M . Brunelle. La maison sur Burnaby Street, et le 320 Hildreth A venue, quelques-unes parmi tant. Devant chaque habitation, nos deux guides nous lisent des morceaux choisis des souvenirs lowellois dans l'oeuvre de Kérouac. Avec quelle joie M. Brunelle nous transmet l'effet libérateur des mots intoxicants de Kérouac! On se rend voir l'horloge devant le Lowell High School, où le jeune Jack attendait Pauline Cole, dans Maggie Cassidy. Et on fait le tour des stations du chemin de croix, dans la cour de l'ancien orphelinat franco-américain. Ce sont ces scènes lugubres, qu'il croyait voir bouger, baignées dans leur lumière, qui ont tant marqué le jeune Jack. Plus tard, nous nous retrouvons au Club des Citoyens américains dans un secteur très pauvre de Lowell. Inscrit sur une plaque avec image de castor et d'aigle; «Fraternité, Unité, Charité». Sur un mur extérieur, une peinture murale d'une ville de Québec féerique, arc-en-ciel inclus. A l'intérieur, un repas-rencontre avec les gens du coin. Le Père Armand Morissette, le fameux «Spike» qui encouragea un jeune Jack incertain à persévérer dans la vocation difficile qu'est l'écriture. Il nous présente sa carte: «Absolution facile pour seulement 1,98$», dit-il. «Funérailles gratuites.» Une soirée littéraire consacrée à Kérouac, commanditée par la «Corporation for the Celebration of Jack Kerouac». Claire Quintal, directrice de l'Institut français au Collège Assumption à Worcester, raconte que «les Jack Kérouacs muets sont nombreux ici en Nouvelle-Angleterre. Il faudrait étudier ces individus pour apprendre d'eux ce que vous auriez pu être si vous aviez vécu entre l'usine et l'église, et vouliez vivre "on the road" .» Un poète local, Normand Dubé, évoque un Québec «plus frère que père, plus soeur que mère». Dans son allocution de remerciement, M . Waddell propose Kérouac comme «l'archétype pan-américain». Auparavant dans la journée, il y eut, bien sûr la visite à la sépulture de Kérouac. Une petite cérémonie pas trop solennelle. Jack riait avec nous . Bertrand Marotte 9. EXTRAIT DE L'ALLOCUTION DU PERE ARMAND «SPIKE » MORISSETIE AU CLUB DES CITOYENS AMERICAINS Je l'ai rencontré la première fois, il était au lycée, Lowell High School, et il était découragé, vraiment désemparé. Alors je lui ai demandé qu'est-ce qu'il voulait, je connaissais ses parents, puis son oncle, sa tante, mais lui, je le connaissais pas. «Tout le monde risent de ~!», il parlait comme ça. «Pourquoi?» «Parce que j'écris des poèmes. Pis parce que je veux être un écrivain. Pis je veux écrire des livres!» Bien je lui dis: «C'est pas drôle, qu'est-ce qu'ils ont de rire? C'est une bonne affaire.» Il dit: «Vous riez pas?» «Non, je vais t'encourager, c'est beau écrire, mais tu feras pas de l'argent du jour au lendemain, tu feras pas fortune avec ça, faut que tu gagnes ta vie, et aussi que tu aies une bonne éducation.» Je lui ai expliqué qu'il lui fallait aller à l'Université probablement, à New York surtout. <<Le monde risent de moé! Pis ils disent que je suis un fifi! Parce que je veux écrire. Je vais leur montrer que je suis pas un fifi. Je joue au football. Pis je vais gagner au football!» De fait, il a gagné et il a obtenu une bourse scolaire à Columbia University pour ça. Son premier livre, The Town and the City, est un très beau livre, très bien écrit, mais trop gentil. Je lui avais dit à ce moment-là: «Oh! félicitations!» «Je vous l'avais dit que j'écrirais un livre!» «Tu feras pas fortune avec ce livre-là! Il faut que tu mettes un peu plus d'épices dans tes livres, si tu veux écrire.» De fait, il a mis de l'épice!! /rires de l'auditoire/ il me disait: «Faut que je commette le péché pour faire du bien!» /rires du Père Morissette et de l'auditoire/ Il a toujours été très religieux. Il était absolument convaincu des choses spirituelles, et il aimait beaucoup Jésus-Christ. Il était sincère. Il voulait imiter JésusChrist, dans le sens d'aimer tout le monde, de faire du bien à tout le monde, dans le sens des Béatitudes. Il voulait la libération, et toute sa philosophie, c'était la libération de l'individu. C'est ça qu'il voulait exprimer. La Mémoire et l'Imprimeur Que d'histoires détaillées et nombreuses, Que d'anecdotes délicieuses et malicieuses, Que de petites révélations que nul autre ne sait, Que de renseignement innombrables, Peut-on gratter, creuser et arracher De la mémoire-esprit non-machine! Et dans le cas de la Madame-Mémoire, TI faudrait insister très fermement Qu'elle veuille bien nous raconter des faits Bien fondés sur la précision de la réalité Et de résister fortement aux tantales D'une imagination loyale et féroce. TI s'agit d'un gros bonhomme farouche qui parle souvent mal et surtout fort: TI s'appelle Léo et c'est un imprimeur Qui a suivi les étoiles de ses ambitions En quittant Lacoshua pour Galloway Afm de faire tourner les machines à papier Quel travail de muscles et de brute; Pas besoin de penser, de réfléchir, de créer: Alors, pourquoi Léo veut-il plus d'argent, Même à l'occasion d'une fête anniversaire? Le patron dit: «Je t'envoie une louange écrite, Mais tu ne pourras pas la toucher comme chèque.» Alors, après cinq ans comme pressier-vendeur De réclames pour un journal franco-gallowais, TI fonda son propre tabloïde luminaire Pour imprimer ses propres annonces: Pour plus de vingt ans où il fut son maître à lui, TI ne fléchit le genou aux étoiles que deux ans. Mais que d'histoires pourrait-on apprendre Des années où Léo a bossé comme un fou Lorsqu'il engueulait souvent les patrons! Mais laissons tomber le désir des révélations Qui ne seraient sûrement que des commérages Issus de l'imagination, putain de la mémoire. Un cinéaste a dit que bien des mots ont changé: Oui, il ne reste que de légers souffles gaulois Et de très faibles notes aux muses françaises De la langue de mon père et ma mère! Mais l'esprit y sera encore très longtemps Car l'âme, les racines, le soi profond: ça ne meurt pas! Si la mémoire refuse de parler en détails Des temps où Léo a travaillé à la machine TI faut lui faire comprendre une fois pour toutes Que le garçon de Léo est notre étoile littéraire Et qu'il est infanticide de le considérer bâtard, Car les éclats français de son oeuvre sont très légitimes! Roger Brunelle NOTE: Les photos (de Jacques Nadeau) en pages 11 et 14 sont encore disponibles sur papier glacé, en impression beaucoup moins foncée et mieux contrastée. On peut les obtenir au prix de dix (10,00$) l'unité en s'adressant à Madame Nicole Paquin au Secrétariat permanent des peuples francophones. KEROUAC SUR LES iCHANS MONTR~ALA1S Octobre 1986. Pendant oue queloues chanceux étaient sur les traces dE Ti-Jean dans son pays natal, il restait un prix de consolation pour ceux Qui étaient encore au Québec: les traces filmiques de Kérouac réunies dans trois documents présentés dans le cadre du Festival du nouveau cinéma et de la vidéo de Montréal. Dans le volet "hommage spécial à Kérouac" du Festival, les films "What Happened to Kerouac", "Pull my Daisy", et la copie vidéo de l'entrevue du "Sel de la semaine" avec Fernand Séguin étaient ~ l'affiche. J'y étais et, pas de doute, ça valait le voyage. "What Happened to KeroUac" est un documentaire réalisé en 1985 par Richard Lerner et Lewis MacAdams. Ce film touffu d'au-delà de deux heurps nous propose une multitude de témoignages qui reflètent de nombreuses facettes du puzzle Kérouac. Gregory Corso, Allen Ginsberg, William Burroughs, Gary Snyder, Ann Charters, Joyce Glassman, sa fille Jan reviennent par intermittences et ~squissent les grandeurs et mis~res de l'écrivain selon divers angles d'attaque. C'est Corso qui semble avoir la vision la plus personnelle de l'homme, mais sa diction plut6t rel§chée nuit à la bonne compréhension de son témoignage. A cela s'ajoutent les rares apparitions de Kérouac à la télé américaine, soit l'émission "Steve Allen Show" où il lit, accompagnement musical à l'appui, des extraits de "On the Road": Kérouac à son meilleur. L'autre extrait vient du "Firing Line" animé par l'exécrable William Buckley o~ 15. Kérouac, bouffi et balbutiant, déverse son amertume sur Ginsberg, les hippies, les communistes et tutti ouanti. Quant ~ "Pull mY Daisy" (tourné en I959) de Robert Frank, C'est un documentaire qualifié de "spontané", un film-entrecopains Qui saisit sur le vif les joyeuses insolences des Ginsberg, Corso, Orlovsky et cie. Si Kérouac y est à peu près invisible, on entend sa voix (la bande sonore ayant été enregistrée séparément) par la "voie" d'un commentaire lyrique, très près du "rap", dont ie propos ne colle que par moments aux images. Peu importe, ça s'écoute aussi les yeux fermés ..• Si le contenu de l'émission du "Sel de la semaine" est familier ~ la plupart des membres du Club, le plus grand intérêt (lire: plaisir) de ce document d'archives a été,' pour moi, auditif (encore une fois). Authentiouement bâtarde, tendrement bourrue, la langue de Kérouac est à la fois toute proche et ~ des années-lumière des questions de Séguin et des gloussements du public. Cette langue erratique et vraie éclaire Kérouac sous un jour nouveau, révèle de lui tout un pan oui était occult~ par l'image de l'"écrivain américain à succès". Les sons et images de Lowell intégrés aux vingt-trois minutes nous le montrent là-bas tel ou'en studio, incapable de jouer devant la caméra un autre rôle Que le sien •.• Jean Poulin VU Rt~CEl\'iJvIENT A MONTRÉAL: "Kerouac, the Hovif,tt de John Antonelli. Ce do cu-drame de soixante-treize minutes recoupe en partie le contenu de "What Happened to Kerouac". Les témoignages sont toutefois plus clairsemés et le r~alisateur a cru bon d'y juxtaposer des reconstitutions historioues des principaux moments de la vie de Kérouac jouées par des acteurs simili-ressemblants. Ce ttjeu tt documentairejdocumenteur a une pertinence discutable et m'est apparu comme un fade ersatz cinématographique. La principale qualité du film réside dans les nombreux passages de livres lus par Peter Coyote dont le grain de voix est très près de celui de Kérouac. Les extraits télévises déjà mentionnés sont intégrés au montage et l'émi$sion du ttSteve Allen Show tt termine le film en beauté. Voilà, il ne reste ou'à espérer que tous ces films (et les ouelques autres qui ne se sont pas encore rendus au Québec) seront au rendez-vous en octobre 1987 ••• Jean Poulin 17. Qn s'était arrêté à un restaurant routier de la Beauce, ce vendredi matin 17 octobre. Lowell hypothétique et encore imaginaire nous aiguillonnait, point invisible dans l'azur, et le soleil chaste et impérieux d'automne, trompettes de Jéricho après un sommeil trop court, concourait à notre fébrilité quasi juvénile, bien kérouackienne en tout cas. Louis Dupont devisait sur l'usage de l'apomorphine dans The Soft Machine de Burroughs et proposait d'inviter Madonna à la Rencontre internationale Jack Kérouac, comme fille de Canadienne française. Quoique plus pondéré, Yvan Fortin avait cependant retenu notre attention à tous en affirmant avoir vu aux Archives nationales à Québec la description d'un legs littéraire contenant des lettres d'écrivains plus ou moins connus, parmi qui Jean-Louis Kérouac. L'énigme pourtant en resta là. En janvier, Francine Adam prit enfin connaissance de ce fonds mystérieux, celui de l'écrivain Alice Lemieux-Lévesque, conjointe de Rosaire DionLévesque, et y trouva cette lettre inédite de Kérouac que nous reproduisons ici. Rosaire Dion-Lévesque, peut-être le plus connu des poètes franco-américains (En égrenant le chapelet des ;ours,Vita, Solitudes, Quête), signait à l'époque une chronique hebdomadaire, «Silhouettesfranco-américaines», dans La Patrie. Edition dominicale, une lithographie religieuse d'une pleine page, la Crucifuion ou l'Ascension, quelque scène du calendrier liturgique. Des commerciaux conventionnés et normatifs, angoissants à l'extrême pour qui se dit que le même code social agit encore, mais autre, imperceptible, parce que, déterminés par lui, nous ne nous en différencions pas. A travers tout cela, des figures franco-américaines tout àfait obscures défilent, huissiers, médecins, institutrices, membres de la Société de tempérance ou de la ligue du Sacré-Coeur, un passé vraiment défini, révolu, figé à jamais sur le microfilm comme une mouche dans l'ambre. Puis tout à coup un jeune romancier, Jean-Louis Kérouac. Kérouac venait de publier The Town and the City. Ce /ivre a souvent été mis à part dans la légende des Duluoz. Certes, c'est véritablement le seul roman qu'ait écrit Kérouac; les suivants ne seront rien de moins que des chroniques, au sens où Froissart et Commynes, au Moyen Age, écrivaient des chroniques. Déjà pourtant, les thèmes spécifique de la geste kérouackienne apparaissent: l'impossible identité (<<he does not know who he is, where he camefrom, what he is doing here»l;«He was no one - hefelt his arms and legs, looked at himseljïn the mirror, looked out the window in the dark Maine night, and he was no one»2 J , l'enfance dorée (<<the who le broad world of daylight and skies and trees and woods and fields and The River were just waiting to be had»3 J , la souffrance inéluctable (<<Men suIfer because they are builtfor suIfering»4J, la mère omnisciente et providentielle (<<She knew ail the things and yet there was no wonder in her heart, but peace, blissful contemplative womanly peace, knowing plainly the purpose of knowledge»5). Davantage, plusieurs passages semblent comme les croquis des romans futurs, les points de départ de spirales narratives qui iront ensuite en s'amplifiant, The Town and the City, éd. HarvestlHBJ (1983 J, p. 14. 2 Ibid., pp. 126-127. 3 Ibid., p. 27. 4 Ibid., p. 40. 5 lb.i.d.., p. 71. 1 Jack Kérouac, 19 isolément: on reconnaît ainsi Maggie Cassidy (<<One spring gloomy young Francis Martin discovered that he was in love. ( ... ) Her name was Mary and she was an Irish beauty with black tumbling hair.»6), Doctor Sax (<<a secret mysterious clubhouse somewhere along the dump shacks by the river, with secret doors and hideouts, (. .. ) all the necessary lOols and garb of dark and disguised espionage»7), les récits de footba1l8 , de marine9 et d'hôpitai psychiatrique10 de Vanity ofDuluoz, même la liberté de la route (<<Drive through the desert, through Texas, Arizona, stop off for a drink now and then, pick up the broads, go swimming, drive on out to the coast!»111 et l'extase de vivre (<<He was amazed because of life, because of sheer human presence on the earth»12 de On the Road, pourtant étranger à ce qu'il est convenu d'appeler le cycle 10welloisLinéaments embryonnaires sans doute, mais déjà irrécusables. L'écriture reste sage, mais sensuelle, capiteuse, d'une volupté contenue. On sent inévitable l'éclatement de ces patientes et puissantes volutes, leur dispersion en couleurs de l'alphabet, en syllabes saxophoniques; laforce comme à regret canalisée va s'épandre en méandres tortueux, éclabousser et dévaster, tout embrasser et tout ressasser dans son débordement. Herbert Huncke, dans Kérouac de Antonelli, affirme voir cette orientation future à la transition décisive qui sefait, dans une description de The Town and the City , d'un monde régulier et policé à un monde marginal et nouveau. Le point de vue du personnage, Peter, à un moment en effet glisse de l'arrière-plan de son époque, le Times Square des touristes et des amoureux, à un avant-plan jusqu'alors caché, baroque, monstrueux, les bars décadents de «hipsters» et de «hoodlums». 13 D'un contexte jusqu'alors plat et totalisant, peu à peu se sont détachés certains personnages, à l'exclusion de tous les autres. Kérouac a isolé ce qui deviendra sa spécialité, les individus à la suite desquels il se mettra désormais, ceux pour qui «la folie constitue la seule clef à un bonheur sans limites et sans fin» (<<madness was the only key to uninterrupted, unobstructed happiness»14); tendance ici encore implicite, mais qui s'affirmera dans On the Road comme le célèbre principe que l'on sait: «the only people for me are the mad ones, the ones who are mad ta live, mad to talk, mad to be saved»15 . Pour écrire sa chronique de lA Patrie. Rosaire Dion-Lévesque avait, semble-t-il, demandé à Kérouac quelques renseignements d'ordre biographique. Nous n'avons pas trouvé copie de cette lettre, mais l'essentiel est bien sûr que nous possédions la réponse de Kérouac. Nous publions aussi l'article de Rosaire-Dion Lévesque. Quelques incorrections, biographiques, grammaticales, peut-être simplement typographiques, le parsèment çà et là, mais nous n'avons pas cru bon les relever par de méprisants ~. Pour compléter ce dossier The Town and the City. nous donnons une critique d'Yvonne Lemaître parue, peu après la publication, dans Le Travailleur de Worcester, et une lettre de Kérouac à l'auteur. 6 Ibid., p. 45. 7 Ibid., p. 99; cf. p. 120, p. 178, p. 188. 8 Ibid., p. 55. 9 Ibid., p. 296. 10 Ibid., p. 313. 11 Ibid., p. 92. 12 Ibid., p. 251. 13 Ibid., pp. 354-364. 14 Ibid., p. 322. 15li1., On the Road, éd. Signet (1982), p. 9. Rémi Ferland 94-31 l34th St. Ri ohmond Hill, N. Y • D6o.38,f50 R.Dion-LevoBEiue Lund Road Naahua, N.H. Dear Mr. L·eveaque, l'm vory glad and honorad that you wish to write an article about me for La Patrle, eapepially as i twill be wri tton by a man whose name ia the Bane 8.B my· motherfa maiden name and who.oomes from the town of my alloeBtors. It' 6 somewhat sad and unfortunate that.l. oan l t aay all this to you in Frenoh---but l roally oannot spell or write oorrootly in Frenoh. Publio schoole in ~well and aoon l forgot how to write Frenoh, although l etil.l. spoak the patoi.!l with my t;lothor, Gabriolle.LeVesque (born in St.Pacombe.) ··8he sende you her warmeat wiahea and also ta your little Jean who muet be a eweet chl1d. Ta fit thia ~loeey ph9to into an envelope l out it eom~hat with the aoiasore; hope it will be satiafaotory. Haroourt,Braco aent me a braoe of tuem; they too are pleaaed. For the sake of what might be necoaaary for the record, the photographer waa ARNI, aa l took oare to note in ink. (The pioture ie not.a realiatio one and l've never liked lt, but we Uso lt beoauee lt'e on the jacket of the booJc# ~lke ~ emblom.) The publiehlng date wae M&roh 2, ~950. l don' t know wba t tind of short bi ography you need, but here goea. My father waa :Leô ~rouao of Naahua (born in 8t.Hubert and of the RivlereduLoup KeroWl08 way baok.) He was a '.printer and publieher in Lowell---the old~T LITE theatrl cal paper, ·and J.ater other perio.d1oalQ and .ree;ular p~i'nti~. l wae bom March l.2, 1922; 1'1'ent to St·.·Loù1.a parbohial achonl and la ter St. Joseph paroohial for boya. Nos o&118e8 ••• 8t.LoUis, Ste.Jeanno d'Aic. Then l went to publio Qchoola and Lowell Hi, where l be~an playing football; won a eoholarQhi"p to Oolumbia U., ,. first a year in prep school, Horaoe Mann School for Boya in K. Y. Then l ser-ved in the Merohant Marine dur1ng the wa~; was . on tho f8t!loua S.S.Dorcheeter the tr1p before 1 t sank wl th the !amoua ohaplaina 1n the North Atlantio 1943. (Why dG l eay this1) l doo' tlc:now OX8.otly what you oo~ use. l bogan "ri ting The Town & tho City in 1946 and finished lt 1949. It's not my own family, but a fam11y oreatsd out of tho compoeite of friends and poople (includin~ my owo parents)- l knelf and loved mOet. There ie no att~pt to cover the Frenoh-Canadian etory in America; thie l am now doing in my 2nd book. 10 my' ohildhood l took mo tripo to 1{ontr~al.,wi th the folks, aa all tho New England French do, eaoh t1me on the Fourth of July; ln an old '29 Ford, tho wholo fe.nily (one eiater,Carolino.) My lifo haa beon ~eneral1y a lot of wandering ••• not only st sea, ·but hitah-hiking eeyeral timee around U.S.A. (47 statos.) l worked nt al1 kinds of jobs, and have bean writ1ng ainoo l wae elovon, when l wroto my fir8t little book in a nickel notobook on the epur of reading Huokl~berry Finn. At 19 1 was writing aSaroyan n short etories in Hartford, Conn. and working in a • ~arae4j at 22 l wae in Manhattan reading Rimbaud & haunting the ço1~bia campus; at 24 l was in 'Friseo writlng Carlyle-llke eesaya. Nothing l di,duft do. My ahief inf1uono~l3 are LoUia Ferdinand. Celine, the great oontemporary Frenoh noy;oliat now 1n eXilo in Derunarlej Dostoev.ak Y · James Joyoe and of course Melvill~ and Thomae Wolfe. l ~ae marriod on i y 8. month a~o, Nov. 17, to Joan HaYorty of Albany, N.Y If you ean make anything out of thia. .or if yeu oan't, please lot me know and 1'11 try tQ sond you ~xactly what you nood. < • 21 l hopo l ha ven' t bden to verb08~ 3.nd u8dle 8S. } hope to m'jet you soroeday. Do you h~PPen to kno~ a ~~e.Louiae Michaud in Naahua7---aho ls my aunt l my father' ssieter, a droeslDaker of many yearsJ and my favori te and ~ost lovod aunt. To my aurpri~e l learned 90v~ral years a~o, in a· talk w1tn ner, that ahe had read everything---not only Rimbaud but Stendhal, not only Villon but LaRochofoucauld l eto. She'a my laat contaot with the lifd l knew in Franco-Americana ••• l~ vie Franco-Americain? It wae intdre8tin~ to me to learn that you tranalatod Leavoa of Grass' Whitman waa my·firet real influence; it wae on the epur of reading Whitm~n that l deoidad to oroas the oountry. There ia 80mething in Whitman that brings togetl}.dx al1 the oontendi ng old:!len'ta and na t1 ona11 t1 ea in U.S.A.; something too that beapeaka the vaat·trded~m of Canada, the St.Lawrenoe, the West IOf Canada, the Gaapo. The taot t-œt you made no money doesn' t aurpri s~ mo. 1 made no money ei the!:' :on my nove~ and expoct never to make anything writin~, oepeoially·if l write exaotly what 1 neod to ",rite, whioh ta the truth about what l kno~." Thie hae to be. · J l hope yeu canmake a few bucka with your ploee. If you write storios you ehould get youraelf an a{;ont in N.Y. l.have a: ver;/" good agent called Henry Volkannin~, 522 Fifth Avo. Thele ehould bc)· a tromondous amount,of matérial you have about French Cana~iana; why don't you try a seriee of etories about Now England Canad1ane. Hoping al1 gOde weIl, and that you Bond me the article boforé i t pub li Bhed# if yeu evor do it, 1 remain youre ainoerely, Un compatriote, f 8 Rosaire Dion-Lévesque, «Jean-Louis Kérouac - romancier», dans La Patrie, Il février 1951, p. 26. A 28 ans, ce jeune homme, épris de wanderlust, s'est créé d'emblée une niche enviable parmi les romanciers américains avec son premier livre, «The Town and the City». - Né de parents originaires de St-Pac.ôme et de la Rivière-du-Loup, il habite maintenant New York où il est à écrire un second roman dont le thème sera «Le fait franco-américain». *** Très peu de nos compatriotes se sont imposés dans les lettres anglo-américaines. Pour la majorité de nos écrivains férus presque exclusivement de langue française, la langue américaine est un instrument peu flexible et trop étranger à leur mentalité latine. D'autres qui possédaient l'anglais suffisarrirnent pour pouvoir se l'assujettir, ont hésité à l'employer croyant sans doute être accusés de transfuges par leurs confrères. Nos concitoyens américains nous demandent souvent pourquoi les francoaméricains n'écrivent pas davantage en anglais, la langue naturelle qui les entoure comme un fleuve? Je répondrais par une autre question: Est-il possible de posséder le génie de deuX' langues? Les polyglottes peuvent s'exprimer facilement en plusieurs langues, mais seulement dans leur langue maternelle seront-ils à l'aise et donneront-ils leur pleine m~sure et la sensation du naturel. TI est facile, par exemple, pour un écrivain français de traduire un texte anglais dans sa langue maternelle. Mais qu'il tente le procédé contraire et sa transposition aura perdu spontanéité et naturel. Il y manquera ce quelque chose d'indéfinissable par lequel se ·révèle la création authentique. Jadis M. Burton·· Ledoux se créa une enviable réputation de journaliste et de polémiste, voir même d'historien, à New York. Il y a aussi eu quelques livres publiés en anglais par M. Edouard Fecteau, M. le juge Eno,M. le professeur Alexandre Goulet, Mlle Liane Tétreault, etc. Mais ces publications d'essence purement documentaire n'entrent pas dalls le domaine de la création littéraire. Nous avons bien le cas flamboyant de Will DURANT, cet extraordinaire philosophe-historien de North Adams, Massachussetts, dont les livres «The Story of . Philosophy», «The Story of Civilization», «Our oriental Heritage», «The Life of Greece», «Ceasar and Chris!», et le récent volume «The Age of Faith», passeront sûrement à l'immortalité. Mais Will DURANT n'est pas généralement connu en qualité de francoaméricain bien qu'étant «une des plus grandes gloires de la race française en Amérique». li y a quelques années un autre compatriote, M. Jacques Ducharme, d'Holyoke, Massachusetts, fit passer un frisson esthétique dans les lettres américaines par la publication de son roman «The Delusson Family» - histoire romancée de sa famille. Ce livre fut suivi d'un documentaire trop hâtivement écrit, élémentaire et incomplet, intitulé «The Shadow of the Trees» qu'il échafauda à la faveur d'une bourseGug~enheim~Mais à part ces rares exemples, peu des nôtres ont fait des incursions dans les lettres américaines . . L'an dernier cependant, se révélait un autre jeune talent de grande promesse, dans la personne de Jean-Louis Kérouac, de Lowell, Massachusetts, dont le premier roman «The Town aÏld the City» fut louangé par les grands critiques du New York Times et du New 23_ York Herald-Tribune, et signalé avec non moins d'enthousiasme par notre argus francoaméricaine, Mlle Yvonne Lemaître, critique littéraire du «Travailleur» de Worcester, Mass. Comme le fit.M. Jacques Ducharme,. M. Jean Louis Kérouaé s'est inspiré, en partie, de l'histoire et des avatars de sa propre famille pour éc1iÏre son livre. Cependant, l,a situation franco-américaine y fut maintenue à l'arrière-plan, pour des raisons personnelles de l'auteur. M. Kérouac qui est à écrire un deuxième livre, me dit: «The Town and the City» fut écrit de 1946 à 1949. Ce n'est pas exclusivement l'histoire de ma famille, mais un composé des traits caractéristiques de nombreuses familles de mon entourage et de personnes qui m'étaient chères». «Je n'ai pas tenté d'y élaborer «le fait francoaméricain» ... chos~<iue je ferai cependant dans mon roman en préparation». Jean-Louis Kérouac est le fils de Léo Kérouac, de Nashua, New Hampshire et de Gabrielle Lévesque, de St-Pacôme, Canada. Les ancêtres du père étaient originaires de la Rivière-du-Loup. Le jeune Louis naquit à St-Hubert, au Canada, le 12 mars, 1922. Sa famille étant venue se fixer à Nashua, il fit ses études primaires en l'école Saint-Louis-deGonzague de cette ville, pour passer ensuite en l'école St Joseph de Lowell, Massachusetts où sa famille s'installa par la suite. Au Lowell High School il se distingua en qualité d'athlète, étant membre de l'équipe de football. Il obtint alors une bourse qui lui permit de poursuivre ses études au Horace Mann School for Boys, et en l'Université Columbia de New York. Durant la dernière guerre mondiale, il s'enrôla dans la Marine Marchande du pays et fit partie 'de l'équipage du vaisseau S. S. Dorchester. Le d,estin voulut qu'il ne fut à bord de ce vaisseau lorsque ce dernier sombra dans les eaux de lYl.tJantiqœ .du Nord engloutissant avec lui les cinq chapelains catholiques; tragédie maintenant passée à l'histoire. Son père était imprimeur, à Lowell, Mass. li était aussi éditeur de plusieurs périodiques de l'endroit C'est sans doute dans l'atelier de son père que le jeune Jean-Louis acquit le goût «des écritures», fasciné qu'il dut être par la magie de la page imprimée sortant toute sanglante encore des presses. Jean-Louis Kérouac a connu jusqu'ici une vie pleine d'aventures et de vagabondages. Il raconte comment deux voyages au Canada, durant deux années, consécutives, à l'occasion du congé du Quatre Juillet, lui sont restés bien vivants dans la mémoire. Les voyages se lrrent dans un vieux Ford 1939, où toute la famille, comprenant le père et la mère et une soeur, Caroline, et Jean-Louis, prenait place parmi les bagages. Depuis il me semble avoir cessé de répondre aux appels du wanderlust. Il a visité quarante-sept Etats du pays, souvent «sur le pouce». Il a travaillé à une multitude de besognes pour gagner son pain tout en voyageant et en amassant des impressions sur le vif pour ses romans futurs. Il écrit depuis l'âge de onze ans, nous dit-il. A cet âge, sur un carnet de cinq sous, acheté au «five-and-ten», il écrivait des aventures inspirées de Huckleberry Finn. A 19 ans, nous le retrouvons à Hartford, Connecticut, où il écrit, pour lui seul, des nouvelles à la «Saroyan», alors qu'il est garagiste en cette dernière ville . . A 22 ans, il est à Manhattan, en l'Université Columbia, faisant la découverte pleine d'illuminations du grand Rimbaud, cet enfant terrible de la poésie française et mauvais ange du grand Verlaine. A 24 ans, il est à San. Francisco où, déjà mûri par de multiples expériences il délaisse les «enfantillages littéraires» pour composer des essais inspirés par l'Anglais Carlyle. Rentré à New-York depuis quatre ans, où habite encore sa famille, le jeune écrivain consacra tout son temps au parachèvement de son premier roman «The Town and the City». Il mit trois ans à l'écrire, soit de 1946 à 1949. Dans ce roman qui fut publié par Harcourt Brace, le 2 mars 1950, le jeune romancier trace 1'histoire de la famille imaginaire Martin - famille franco-américaine, comptant cinq garçons et trois filles. La ville de Lowell devient la ville des «moulins à coton» de Galloway qu'on ne trouve pas sur la carte géographique et où les enfants grandissent avant que les garçons ne partent pour la guerre. A ce temps, les parents et les fillettes déménagent à New-Yorle. La guerre terminée, la mort du père réunit la famille dans son village natal du New Hampshire. Il Y a dans ce livre des scènes de grand réalisme. L'intrigue tourne autour des efforts constants du père Georges martin pÔur s'entendre avec son fils, Peter. Ces deux personnages dominent le récit Mais le jeune romancier a su insuffler aussi beaucoup de vie et de réalismê à d'autres personnages moins importants de son livre: Joe Martin, le vagabond; Francis, 1'intellectuel; Alex Panos, le poète; Kenny Wood, «le maudit»; Liz Martin, 1'épouse amère, et Léon Levinsky~ le «hipstef». Voici ce que dit de ce livre un critique de New-York: «Un style puissant allié à une grande précision de la langue, un dialogue vivant, un sens dramatique des détails sont quelques-unes des qualités de ce livre. Il sera évident, à la lecture de «The Town and the City» que Jean-Louis Kérouac a des idées bien personnelles». Nous avons demandé à M. Kérouac quels étaient ses auteurs préférés. Il nous a répondu qu'il avait fortement subi l'influence de Louis Ferdinand Céline, 1'auteur de ce gigantesque cauchemar apocalyptique qu'èst «Un voyage au bout de la Nuit», de James Joyce, de Melville et de Thomas Wolfe, et de Dostoièvsky. Il nous déclare aussi avoir une grande admiration pour 1'auteur de «Brins d'Herbe», WaltWhitman. De fait, Whitman, ce vagabond mystique, fut 1'être qui incita Jean-Lo'lis Kérouac au Wanderlust et le décida à faire cette randonnée à travers tous les Etats-Unis. n dit de Whitman: «Il y a en lui quelque .chose qui réunit, qui cimente, tous les éléments et les nationalités de notre pays ... quelque chose qui fait penser·aux vastes étendues du C~ada, du gigantesque saint-Laurent, des plaines de 1'ouest, de la Gaspésie». En novembre dernier, soit le 1.7, Jean-Louis Kérouac épousait Mlle Joan Haverty, d'Alb.any, N.Y. Ses connaissances du français ayant été succinctement acquises en quelques années d'école paroissiale, à Nashua et à Lowell, il n'est pas surprenant que notre jeune compatriote ne puisse s'exprimer aussi facilement qu'il désirerait le faire dans la langue de ses ancêtres. Ayant presque toujours évolué dans une atmosphère exclusivement anglo-saxonne, il dit déplorer ne pouvoir écrire parfaitement le français, mais il lit encore tous les auteurs français dans le texte. Une de ses joies présentes est celle de causer en français avec sa mère, Gabrielle Uvesque, avec laquelle il s'entretient encore de ses «voyages au Canada». Et quoique s'exprimant presqu'exclusivement dans la langue de Shakespeare, il a gardé pour les beautés supérieures de la langue de Molière, une grande et sincère admiration. Tel que, Jean-Louis Kérouac nous fait grandement honneur. Il était juste que nous 1'honorions. 25 , ë:.c pool.l~ 19S, WOf'COItu 1. Mauach,-<u ------------------ -- Vt&. Xl. No 12 ' The Town and the City" lA IIINI6&tion Iit~rair~ da jour dan.... "la M~rrima~'k" , :', 1..(1\\ .. 1\ ' • ~ pour son portrait ~t ~ parle plus d'aulr~ ch~ , , , DQlat solide d'un ~~ romanck-r (ra.nco-amirkain dans It"s ' ~ ~rica.iM8 ••• Et UM cu~use lacullt" anc~tral(' . par Yt,IOMe LE MAITRE '.TM Tou," and tIuJ City. ,al , . . t;.~"uac - _ .~ _ .---- Un livre curieux, '. En ce sens.. Qu'il plante un arbre rnhll",t., t'f ~lIl1t de !lève. san..:; lui preter de radn<'S ni parll'r de !l'm.' nourrid<-n.', John Kerouac est un ,animateur dt, pn'mi':'rP fom': il Bail J!C'lIPI{'r un milieu d'une vie agissante, trépidante. f["{·mi!'· . sanœ et drue, C'est là le Cort d'un talent comàciiorable. qlli attd_nl déjà Ct1 re premier essai une couleur et un reli('f peu ordinail'(~. Le jrune auteur de The Tou'1l and tJu: City. dont ("~t il :27 an" 1(' premier roman, a réussi l'exploit de faire \;VIT' il l~ f"n"t am"ri· caiœ un arbre vigoureux répandant autour de lui tlTlt' S;'\"· (''\1:1 ...·•• rante, bI!!lS nous parler une fois du· vielL~ sang où Cl'! ;l rh l'.' ;t ;'u i",', . vie ct YÎgUe\lr, Réalisme fort acclL-;ë dans tout.' I""t'll\l'(,. !'i \'OII!' \'oulC'Z, mais auquel s'accroche toutefois unt:> certaine m<,>,ul'l' d'i,· rœ.lItl>. Au sol initial, l'hurilUs ethniqll.~ Jl1ultipll' ('t rii\'\'r,.; où croit f,(ln arbre, qûi est Lowell. John Kerouac !l'a pa" pIanI:' rie racint.'S .. . humaines, Pen..<;('Z à: un Hamkt où ma:l,pwr;lil 1.' ~: ••,', . tI'!'duJ.'('TC . .. Cè!l!'rntion spontanée, donc, QUI' ('t' l.ù\\'t,]! , !~:a.";";.· tIl:!!, W:I:, ' dont nt.' surgit avec un \'L....,ge il ~i au, 'UI1 d"..; d.··nl,'nt:- q\!: <In: cm', ('('{te masse. Et pourtant. p?uJ:tant I.o\\·l'lI ('st tnllt ... \.!",/" ù' l'tmiformité et la fusion. Lowell - G,llh!lnlll .'..:t 11' n"m 1)11., porte la \;lIe dans l'ouvrage - est le mdtill!l J,(lf où den r.'~t l'no eon' parfaitement fondu: Lowell est je Canada français du Qu ...·t ..'l'. le C..anada anglais des Pro\'Ïnœs Maritim<'S: J'Irlar.di'. r.'\m:l"'I'IT~' t't 1'Eœ&se: le PortugaJ et les Açores: l'Itillie. la Sui>cie. la :--':OI"\'':'!:I', la Grt>œ, l'Arménie, la Syrie et le Liban: la PologJlt' {'t la Lithll;j. nie, Israël et quoi encore~ Je Il(? fais qu'('fncun'r les -17 \·,1r!,··!';" et leurs ~7 sun;vances, . • M. Kerouac ,voulut-il sciemment é\'it('r 1(' g('nn' 1 l'Op culti\·..· du TOI'1la'H immigrant.? Ne pas donIl(?r dans le roman italo-om,;rieilin où résonnent 0 Sole mio et Per Bacco.' à chaque clli1ll;r~c de mille!;· tr'Ofle a\'alée à chaque ligne? Ou dans le roman [::l'Imano-améri· cain où le Ke7men Sie e.in Eiscnbau7ll, Ei.~<'7Ibau1ll, Eisnll>a11ll11 de l'éœle de chant tudesque rivalise ê.\' C 1('$ .4('11.' Sd,.X'n! q~1Ï ;;'1luent 'chaque tour gymnastique au '.J ((l"lIl'1'f11I1t De i'ao""'lICl' Illlaj~ dt' œt1e ca.melote, de son évasion de la banalité {'nfant ine C't de la pn'(ffidue couleur de nombreuses phra,;{'S ét ram:i'l'I'o' dans un te,,\(' angIai'i, à tout prendre félicitons· le, Et pourtant . et lXl\1l1ant les gens de LoweJl~GalJo\\'ay savent que l'klip'''-' lo!;!lc du \'it'lI' temps n'('St pas tout à fait cela: qUf' l'omul'(' tenace de J';tnc(ot l't' enseveli hante toujours les \;{'ux logb-. Quand .lohn K,'rou:1C 1l1!· même appel1e l'Enfant-Dieu the Lit tic .!o<l(s. ;(w(' d,';: mot,; angl~li" il parle encore français, • • Dans tout l'ouvrage, une seule phrasi de fran,'ais, et pronon· ~ par un .. , Viennois! Cet oiseau de pa:;.sage à Lowell·Gal1o\\ay. e\lde~erlt peu ferré sur la Nouwlle-Angleterre, voit un jt:>une ~.()wellOlS - M, Kerouac même, n'en doutez point - se choisir d('$ ..comment: On lit le français dans les petites pro\;nœs des Etats·L'nis? . . ,Un seul livre français - Les faUJ: momuzyeurs d'André Gide - figure dans The Town and the City. et cela non comme lecture plausl,b1e ~hez un Franro-Antéricain, mais comme lecture propre ' a un etudiant d'Harvard soignant ses cJasses, D'où œtte irréalité . toute particulière - l'absence d'affiliation ethnique - qui hante le fond de l'ouvrage malgré sOn réalisme expert d'autre part. Car The Town and the City est clairement autobiographique, basé sur l'histoire de la nombreuse fanùlle de J'auteur même, et les Kerouac de Lowell sOnt non œ génération spontanée américaine mais dé· finitivement francos. livre:> français à la bibliothèque publique et s'exclame: .. .. .. , John Kerouac habite maintenant New York, ainsi que sa me~, Mme Gabrielle Kerouac, mais plusieurs membres du clan habitent toujourn Lowell. D'origine purement française, bretonne comme le nom l'indique, ce sont des SUTvit'antsprononcés, parlant français comme des bons, et le jeune romancier lui·même parle ~ français châtié. TI fréquenta l'école paroissiale Sainte-J~anne d avant ses cours au Lowell High School et à l'Université C0lumbIa. Une tante, Mme Léontine Kerouac, est l'un des piliers de l'Association Educatrice Franco-Américaine, plus connue sous l~ ~ œ Danles Educatrices, groupe féminin qui se dévouait par- . ticuI.ierement autrefois à la naturalisation des Canadiens français et s'occupe enéore-activernent de l'avancement politique des Franco-AmériCains., Des .cousins de l'auteur, Hervé et Armand Kehabitent Lowell et sont affiliés à ses groupements francos: SoLon pere, ~ Kerouac, longtemps propriétaire d'une imprimerie à weU. émigra à New York après des revers de fortune et la ~ de son atelier \ID peu avant la dernière guerre, et y mourut, Son fils quitta l'université Colwnbia avant d'v finir ses cours et ·.1IeIVit durant la guerre dans la marinè marchande, Toute la trame i:.~_Town aM the City est autobiographique, et la chaleur ~Yl1Ilte <liffuse en ces pages qui disent la vie affective d'une famiDe Pl'Ofuodément unie a pour source le vivace souvenir des siens qui hante John Kerouac, et l'amour qu'il leur porte toujours, An: rouac.. • • • Un seul intennède où l'auteur puise au pot pourri ethnique de seule conœssion aux nombreuses survivances là.cJedans: c'est sa comPrehension, son amitié Pour un jeune poète grec. ~ PCl1t08, tué pluS tard à la guerre, et dont l'éthos, le ~_ beIIénlque particulier à lui et sa famille méditerranéenne ~~ l'écrivain. Mais aucune caractérisation' raciale de œ genre ~ effleure même . en passant \ID personnage franco-américain de l~, TI ne faudra donc pour personne chercher dans The ~ aM the City un croman franco-américain. â cause de l'orien de l'auteur. L'QtlVI"8'ge n'a rien d'un roman franco-américain. Lowen, une g1 . .. . C'est ~nc un portrait social et topographique et non ethnique que nous dessine John Kerouac œ sa ville natale, bien·aimée même s'ilIa ~.provindaIe et arlérée au point de v:ue intellectuek D'un lWen! de main, 1.1 écarte le Lowell fumeux des filatures, pour retnluver intacte la poésie d'un site doué de grâce par la nature, les envfroœ du Oreater Lowei:l dont les eaux et les arbres,les grandes ~~ les ~~ munnurent de doux chants à so? âme de ~te, ~'.~..ont . ~ œs pages trop idylliques, trop bien œ~==~'\<N=e-=~~~ . . souffle puissant d'authenticité, c'est la vie sur la terre des homo mes. • • • ''The Town and the City" (SUTT'E os LA Un PAOE) cherche simplement à exprimer en beauté ce qui est ressenti comme telle, • • • il n'y a pas d'intrigue proprement dite à Tlze Tou'?l and tlze City,. C'est la saga d'une famille nombreuse, affectueuse et unie aUtoUr d'une mère aimable, bienfaisante et gaie comme un beau jour, toute amour, dévouement et droiture. Ma se tire l'hor'OScope et cvoit tout dans les cartes., mais sourit doucement sans se fâcher quand on veut rire qe sa petite manie; elle est faite comme ça. Sa nichée la contemple avec adoration, chacun pensaht à part 8Oi: lia, ]JQU are wondertul.· De ~ëme toonderful est Pa, aimable et bon comme Ma, même si certains défauts, l'amour du jeu, des courses, de l'akool, amène peu à peu la déchéance économique, la perte de l'atelier de maitre-imprimeur, l'abandon forçé de la vieille et vaste demeure si confortable, le déménagement au piètre apparteinent à Brooklyn, OÙ le père vieilli George Martin tombe au rang d'ouvrier imprimeur, rongé d'ennui et de regrets, Décadence. dissolution, dispersion du vieux nid. .. La guerre est venue, semant aux quatre vents cette fanùlle où battait autrefois un seul coeur pour tous, à la fois grave et doux. Des sept enfants de GeOrge et Marguerite Martin, cinq sont partis, trois fils aux ar· mées, deux filles dans les WACS. Et pour tous ces Martin jeunes et vieux, autrefois si heureux, s'est levé un spectre dissolvant, aussi malfaisant, sous son traître aspect d'inertie, de néant et d'absen· ce, qu'\metnitranleuse en plein jeu: l'ennui, . The TOWK mcd tke City n'est pas à proprement dire un roman, avec tntroduction. bain d'catmosphère>, intrigue, épisodes, péripé· lies, analyses et dénouement bien amenés et agencés, chacun bien enclos en son petit tiroir, comme ça s'écrit suivant les règles, C'est de la vie, de la vie enfiévrée, pressante et imprévisible telle que John Kerouac la sentit en soi-même, chez ses parents, ses frères et 8OeW'S, ses amis, ses C3.Q18.1"8des d'école, de collège, de travail, de service à la guerre, de pàrtout, de tout temps. La fécondité, l'aboodanœ, la richesse, l'étendue du tableau, que Kerouac par une périétra.tloo aiguë et \me grande fidélité de dialogue anIme d'un Et il y a l'ennui, l'ennui mortel à l'homme, et par soi si dur à tuer. L'ennui du vieux père à Brooklyn . . . l'ennui de la jeunesse masculine étouffant en une atmosphère de petite ....ille où ne bouillonne plus la promesse d'avenir . . . Mais plus : l'ennui sinistre de la jeunes..<;.e de guerre, ennui qui renouvelle celui de la génération perdue de The Sun Also Ri3cs du roman d'Hemingway après la premiére grande gu€ITt' , eL pathétique ennui des jeUnes, qui ne sont pas faits pour J'ennui: qui les saisit et les aœable partout, au ser.;ce même loin de tout pour commencer, mais plus ironiquement en .congé N les poches pleines d'argent mais seuls. seuls dans la grand'\;ll(' inconnue. ou encore plus trist('ment, seuls à Lowell. où, mornes et inquiets, ils parcourent les rues sans retrouver fi· gure d'runis ou de camarades d'autrefois. partis ou morts sous Di~ sait quels Climats ignon's. l'ne solitude qu'eux ;;('ul;; auront çonnue . . • • • .. La période lowflloise <Th. TOlcn) dt' l'ouvrage e:-t plus attachante que 1(' ~jour à New York (The City) . La !ost ynu'mtùm d'anciens soldat, et marins débauch(.'>s aux prises avec la métropole monstmelLc;e d'apft?s-gueITt' inspire maints tableaux. rt>p;'titifs t't ('(lngén ('~, que le:- \'iellx de la vieil1e de ""ew York estiment out~ et d'lm démonisme naif. l':lIn deS· fils ~tartin tombe là en une équh'oque socit;t!; de ~'gre ou de demi-p(>gre. en une Casba de morphinoman('S et de vendeurs de dope, homose;o.;uels, dévoyés, dés..1.x~ et déséquilibrés de tout poil. voire de voyous avoués en quête du -bon coup.. de la bonne job en ce qu'ils appellent travailler. Bu\"€urs à J'excès. ils \'ont, mâles et femelles. de bar en bar, de soûlerie en soûlerie, comme si tout le secret. le mystère, la clef de la \;e résidait dans le seul alcool. pour retrouver vaille que vaille, ivres morts, leur couchette à l'aube. Et recommencer le lendemain, en même triste bande, leurs mêmes mornes excursions nocturnes. Ces scènes new-yorkaLc:es \'OliS semblent bien exagérées. Je le confie à tme jeune femme qui avait trois frères aux armées dont deux seuls re\;nrelit. Elle secoue la tête a\'ec énergie, .Mais c'était comme ça~ •. me dit-elle. .C'était bien comme ça. Cela prit des mois à mes frères à revenir à une \;e normale. Les fil1('S, le jeu, la boisson, c'était tout~ Chaque nuit, c'était la ronde des bu\~ettes. Pour oublier, toujours pour oublier. Et ils revenaient chaque fois plus tristes et plus abrutis.. .. . Tous les Martin, déracinés à jamais de leur \ielLX Lowell. dispersés maintenant de New York à la Californie, se retrouvent encore une fois en d'éphémères contacts, alLX funérailles du père dans le New Hampshire, d'où il était venu à Lowell. Là, Joe Martin., le plus errant des fils, en face de la dignité, de la fidélité des vieux fermiers qui avaient connu et estimé son père, se prend d'amour pour la terre. Il y re\iendra , il en sera, il veut des ra~ cines. Il s'achètera une ferme au moyen d'un G-I Loan, système de prêts aux vétérans. Mais le fils intellectuel reprend le train pour New York, pour aller y terminer The Tou:n imd ,the City, sa chronique des Martin sur lesquels sont passés le temps, la guerre, la \;e en les moulant, les poussant sans relâche à des fins imprévues. Yoonne LE MAITRE 27. le fAROG forum, m~t<lin 1964 P.ge 15 l'l\PPORT fRANCO-AMERICAIN Une lettre inédite de Jack KerQuac Il 'A 11 my knowledge rests ln my 'French-Canadianness' and nowhere else." -Jack Kerouac , The Town and the City, le premier de ses livreS à ètre publié. C'est dans le fonds Wilfrid-8eaulieu conservé à la Nul mieux que Jack Kerouac n'a su exprimer cette' Boston Public Library que (ai dé<ouvert le document d'où est extraite cette phrase capitale. Il s'agit de la copie profonde identité franco·américaine qui subsiste d'une lettre que Kerouac a adressée à la journaliste semble-t-il, en dépit de l'abandon de la langue française. franco·américaine Yvonne le Maître (1876·1954) pour la Bien qu'il é<rivi\ en anglais, il mettait dans ses livres son coeur de Canadien au sens traditionnel du terme, éest-à- , remercier d'avoir fait, le 12 juin 1950 dans le Travailleur <:le Worcester (Massachusetts), la critique de son roman dire de des<endant des pionniers de la Nouvelle-France. A la fin du texte, le jeune auteur de vingt-huit ans "AIl my knowledge, dé<lare-il, reslS in my Frenchmentionne le R.P. ...,rmand Morrisette, OM.I., dont û~dianness" .nd nowheie else." l'amitié lui était chère. Ce religieux. né comme lui dans le "petit Canada" de Lowell, a é<rit en 1977 des souvenirs intitulés A Catholic's View of Kerouac Gerard Nicosia s'en est inspiré en partie pour rédiger une ' pré<ieuse biographie qui fait ressortir les racine canadiennes de l'écrivain (Memory Babe, New York, Crove Press, 1983), ' Voici donc la teneur de cette lettre qu'il me fait plaisir de communiquer au FAROG Forum, voix émouvante de la jeune génération franco-américaine: time 1 will; in another medium, another level. In Lowell 1 never acted like a f rancis. 1 was always with the gang. My solitudes were romantic -like the solitudes of Panos and not misanthropie. 1 defend m~lf strongly on this point because 1 want you to like me. Francis was my villain. few personal dues 1 wanted ta establish. 6ecause 1 wanted a universal American story, 1couiC! not make the who le family Catholie. It was an American story. As 1 say, the French-<:anadian story l've yet to attempL But you were absolutely right in your few complaints on this score. Isn't it true chat French-<:anadians everywhere tend to hide their real sources. They can dQ it because they look Anglo-Saxon, when the lews, the ltalians, the othetl cannoL .. the other -minority" races. Be~eve me, l'II never hide it again; as once 1 did, say in high school, when 1 first begàn "Englishizing m~1f' to coin i. term (Me (aire un Anglais), My mother laughed and enjoye<! and loved your review tao, 1 think you were wonderful. prkenution p,u Michel upierre Sept. 8 '50 94-21 134th Street Richmond Hill, NY Dear Miss (Mrs.l) le Maitre ... ·Excuse me for writing in English, when it would be so much better to address you in French; but 1 have no proficiency at ail in my native language, and chat is the lame truth, What amazed me most about your review - which 1 read and reread in Mexico City ail sommer - is the beautiful and elegant French tone chat made it ~m as though a very aun! of mine had reviewed my book. 1felt No review touched me more !han )'Qurs. 1 think it humble. Your mention of my mother and father was the best review of them ail. There Wele some in warmed my heart. Because 1 cannot write my native Newsweek a~ The Times and The Friseo (hronicle language and have no native home any more, and am chat appredated and understood the book. but .youtl amazed by chat horrible homelessness ail Frenchunderstood me too (except for one point 111 brins up)- Cânadians abroad in 1'.mefi6have - weil, well;1 was and more !han chat, 1 liked the tone and the scope, moved. Someday, Madame, 1 $hall write a FrenchCanadian nove l, with the setting in New England, in 1 am no! Francis Martin (1). 1 never was anything lil:.e French (3). It will have to be the simplest and most Francis Martin. Francis Martin is a caricature of sorne of rudimentary French. If anybody ~ants to publish it, 1 the friends 1 have had who were typic:al intellectual m~an Harcourt, Brace or anybody, they11 have to QytcasJ..:..!Y~, -çfeqde<J( [ypes, frgm whçIm J aQmit 1 translate, iL Ali my knowled~e {('SIS in my "frenchlearned a lot but not everything - andïlôtthe most Canadaanness" and nowhere e se. Thë1Ï1gl:sll1angüage important things. Just to prove it: look doser, when you is a tool 'lately found ... so late Q oever spoke English have lime, and you11 flfld chat "Will Dennison"(2) the before 1 was ~ix or seven). At 21 1 was still 5Omewha't dope addict in the "City" part of the book is the exact awkward and illiterate-sounding in my speech and prototype of Francis. In the original me, this wou Id have writings. What a mixup. The reason 1 handle English been more manifest. but we eut it. Francis is, in lact, the words 50 easily is because it is not my own language. 1 prototype of the man Will Dennison was drawn from- a re-fashioo it to fit French images. Do )'Qu ~ chatl wealthy Middlewestern Harvard esthete who became a Incidentally, 1 called the family Martin because that drug addict. Francis is the weakest character in the book. because 1 never dared draining him out full. Next can also be a French name ... Norman. It was one of the (1) En fait. c'est plutôt Peter Martin, le frère de Francis, qui ressemblerait à Kerouac.· Comme l'auteur, ce personnage de The Town ' ~nd the City $e distingue dans le sport, entre à l'université grace à une bourse, abandonne ses études, travaille dans la marine marchande et choque ses parents en menant une vie de bohème, My book has not sold at ail. It is not even discovered, What can 1 say, except chat the world is no good anyway and we ail I:.now it. People are ail right, though. 1 blame the stupid channels of 'advertising and hooroosh chat mix bad things with good - for l'II tell yoo, my book did not sell only becau$e it was drowned in a flood of other books, most of which were dishwater (rinsure du pot) and . nk. It is a decade starting off lOausplClouS y III m IOCII war. 0 n (> O'"mN",' about il. l, persooally, {eel ail the reward 1 really need when someone lil:.e vou answers a good wprd. Hoping you11 write, and give my best to Father MorTÎsette, Yours, Jack Kerouac (2) l'écrivain William Burroughs aurait servi de modèle à Kerouac pour le personnage de Will Oennisoo. tard (/kmory awe pp. 425 - 426). le biographe ne pré<ise pas si le manuscrit a été conservé. (3) ~Ion Nicosia, Kerouac a effectement écrit une oeuvre en français en l'espace de cinq jours au mois de dé<embre 1952, mais il s'agirait d'une nouvelle plutôt que d'un roman. Il l'a traduite en anglais un peu plus Michel Lapierre est candidat au doctorat en lettres. Il a consacré sa thèse de maîtrise à Rosaire Oiorrlévesque', 29. POUR QUOI JE SUIS ICI ET INSTAMlftENT AILLEURS . Je suis un individualiste e nragé. C'est un e affirmation vr a iment pas gratuite m@me s i elle ne signifie qu~ ce Que ch a cun veut bien en supposer. Je m'exerce assez dangereusement à provo~uer l'ecart par refus visct::ral de tout ce oui est convenu socialement, normatif et sclérosant à même le confort apparent. Je me cabre dans l'instant, je regArde presque directement le soleil oui crible l'espace entier, et je ressens l'impulsion urgente de partir, d'avancer comme un forcené parce nue la vie ne s'accomplit que de brûler et ne se renouvelle que par bouleversement. Il n'y a rien d'abstrait. Les mots se ré pe rcutent en leurs vibrations parfois distordues alors oue le sens semble confiner à l'absurde. Tout se découvre dans l'instant, ~ force d ' être evoqué plus ou moins impérativement. La littérature doit prétendre atteindre l'absolu, sinon elle se dilue frileusement dans le divertissement. C'est à ce niveau ~ ue je revendi~ue l'influence de Jack Kérouac, l'invention de soi plus mythioue encore oue légendaire, oui se vérifie par la tentative radicale de parvenir à une fusion de sa vie et de son oeuvre. J'écris tout ceci qui ne remplace pas le silence, je n'elabore 0;ue ce oui me concerne directement, j'ai seulement fait allu~ion à Kérouac de biais, je connais son oeuvre de façon incompl~te et à travers la distorsion pris~atioue de ma pensee, je comprends tout, je ne comprends rien, à la limite je s u is un idiot. Pourtant c'est toujours la vie intégrale dont il est ouestion, alors oue Gu oi que ce soit répond de tout puisque rien n'est indissociable dAns la ramification indéfinie des choses élémentaires. Alain Quimper 31. RENCONTRE AVEC ALLEN GINSBERG Allen Ginsberg. vous connaissez? Un peu, pas du tout, vous en avez entendu parler! Pour ma part, en juillet dernier, je le connaissais très peu, sinon que mon ami et compère. de voyage, Louis Dupont, mien avait touché quelques mots à l'occasion d'un voyage à Boulder, Colorado. Il m'avait situé Ginsberg surtout en rapport avec ses prises de posi ti on et son engagement contre l a guerre du Vi etnam. De plus, Louis me l'avait décrit comme étant, avec Burroughs, Corso et Kerouac, l es poètes maudi ts de 11 Améri que des années 50-60 ainsi que les pères de la "beat generation". Plus personnellement, je voudrais vous parler de Ginsberg; l'homme, et non pas de son oeuvre en tant que telle et essayer, par ces lignes, de vous communiq~er les émotions, le "feeling" que nous avons ressenti lors de nos rencontres avec Allen. Allen Ginsberg est avant tout un homme de coeur, sensible et ouvert aux autres. Je me souviens de notre première rencontre au Naropa Institute où, très gentiment il avait accepté de nous rencontrer sans rendez-vous et de façon très informelle, mais avec une certaine retenue et un tant soit peu de scepticisme. Il avait commencé par nous laisser nous présenter, ensuite il avait attentivement écouté Louis lui expliquer le but de notre vi site. Pui s, au moment préci s où Loui s 1 ui parl a de Jack Kerouac, les yeux de Ginsberg slilluminèrent, son visage se détendit et nous sentîmes comme un souffle paisible planer sur nous; clétait gagné, la confiance était installée et Allen se mi t à nous parl er de Kerouac avec beaucoup dl enthousi asme et dlamitié. Cette première rencontre eut 11 effet de nous plonger dans une sorte de bonheur indescriptible. Nous nous sentions très tthigh tt et avions la certitude intérieure de vivre à Boulder des moments dlune grande intensité. Il faut toutefois préciser que nous nlavions formulé aucune attente précise face à Ginsberg et que de ce fait, nous étions très ouverts à cette rencontre. Notre attitude était de laisser Allen nous donner ce qulil voulait, sans compromis; clétait peut-être un gros risque, mais ce comportement nous servit. Ginsberg fut très généreux, très acces- sible, très près de nous. 33. On dit souvent de Ginsberg qu'il est un mystique, un adepte des civilisations et philosophies orientales. Pourtant, il reste en lui quelque chose de très américain comme une emprise culturelle -- ou contre-culturelle dans son cas --- qui se traduit chez lui sous la forme d'une très grande attention et sensibilisation aux choses de l'humanité . citoyen du monde. Cela fait de lui un universaliste, un C'est cette facette de sa personnalité qu'il me fi t découvri r lors d'une autre rencontre . Alors que Loui s était en entretien avec William Burroughs, Allen Ginsberg m'invita à assister à une de ses méditations. Très gentiment il m'installa confortablement dans un des coins de la pièce ou était installé son petit autel boudhiste et il se mit à psalmodier des mantras et à chanter un texte anglais et tibétain. Sa voix était douce et pleine. Je ne puis vous dire si d'avoir pu assister à ce rituel était une faveur exceptionnelle, mais en tous les cas, je puis vous assurer que j'avais pleinement apprécié le geste, d'autant plus qu'après la cérémonie, Ginsberg me fit deux cadeaux. Le premier était le texte intégral de la cérémonie et le deuxième était un autre texte, sorte de recueil de pensées et maximes, qu'il avait rédigé la nuit précédente à l'intention d'amis intimes vivant outre le Rideau de fer. Ce manuscrit, Allen avait pris la peine de nous le dédicacer et surtout de m'en faire une longue explication philosophique . C'était, je crois, pouvoir le dire, sa façon à lui de nous signi fier qu'il nOlis appréciait. Suite à cela, je vous laisse imaginer mon excitation, car je crois qu'il me serait difficile d'en exprimer la pleine mesure par des mots. Depui s ces brèves rencontres, pl usi eurs semai nes se sont écou1 ées et je sui s encore sous 11 i nfl uence du magnéti sme que Gi nsberg nous prodi gua. De ces moments privilégiés, jlen ai surtout retenu la très grande disponibilité de l 1 homme, sa simplicité, sa constance dans ses idéaux. retour du Colorado, plusieurs J'ai lu, depuis mon biographies qui lui sont consacrées et je mesure dans plusieurs cas, meme après 20 ans, à quel point l'homme est resté convaincu et conséquent dans ses idéaux de fraterni té envers 1 es hommes . Allen Ginsberg est toujours un homme attachant, indulgent, respectueux des idées et des tendances de chacun. Merci monsieur Ginsberg. Vous mlavez beaucoup appris. Serge Wicht Suggestions de lecture GINSBERG, Jane Kramer, éd. 10-18. BEAT, HIPPIE, YIPPIE, Fernanda Pivano, éd. Christian Bourgois o OM ... ENTRETIENS ET TÉMOIGNAGES (1963-1978), Alain Jaubert et Susan Sacks, éd . Du Seuil. 35. UNE CONSTANTE PAR SOUPLESSE A travers son oeuvre, Jack Kérouac fait preuve sans ostentation d'une qualité humaine rare, la générosit~, une capacité d'accepter autrui en ce qu'il a d'original, d'unique, d'irréductible. Kérouac ne préjuge pas de la valeur de quelqu'un selon une bizarrerie d'apparence ou de comportement. Il cherche plut6t ~ déceler la dimension spirituelle de l'expérience de vie qu'il poursuit, quelle que soit sa route, celle du "fou", celle du "saint", celle de l'idiot m@me, l'idiot pouvant @tre quelou'un accul~ ~ la stupeur parce que trop honn@te pour en remettre dans les attitudes expectées par son entourage. Kérouac revendique son individualité en toutes circonstances (sauf pendant ses méditations intensives imprégnées de bouddhisme), refuse de piétiner comme un pion engoncé dans le carcan des normalités sociales et des technicalités légales. "Les Clochards célestes" et "Les Anges vagabonds" foisonnent de critiques . d'une société qui instaure l'uniformisation autant dans les loisirs que dans le travail. Kérouac ne se tro·uve à l'aise que seul ou dans les groupes les plus hétéroclites. Un tel individualisme se confond parfois, pas si paradoxalement qU'on pourrait croire, avec une conscience universaliste, une vraie générosité justement, englobant les expériences les plus variées, les sentiments religieux souvent synchrétiques àans le cas de Kérouac. Au-del~ des pseudo-impératifs politico-flico-économiques et àes tendances fascisantes qU'ils autorisent, Kérouac appréhende l'@tre humain. Ainsi, en pleine guerre, en pleine Mer du Nord, il éprouve de la compassion pour le cuistot d'un névire allemand qu'il imagine en train de sombrer. Je trouve très révélatrice la narration de cet épisode dans llVanité de Duluozl! (écrit en 1968) parce que je retrouve un Jack Kérouac familier, l'individu fondamentalement anti-fasciste. Les déclarations réactionnaires qU'on lui reproche à cette âpoque relèvent, selon moi, d'une propension à la boutade de ouelou'un abruti par l!alcool et surtout de la volonté èésesp~rée démarquer radicalement d'un courant social (les de se épigon~s de la Beat Generation) oui l'a grugé inconsidérément. Le fait qu'il se soit exprimé de façon brouillonne sur des Questions politiques prouve simplement qu'il était trop honn@te et trop spontané pour articuler sa pensée dans un système. Je n'ai évidemment pas connu Jack Kérouac mais j'aime lire et relire son oeuvre. Le meilleur de ce que je suis et que je m'efforce sans cesse de développer m'incite à penser ~ue j'aurais pu être un de ses véritables amis. En affirmant cela, je suis à la fois réaliste et très exigeant envers moi. Alain Quimper 37. {)JAND ~ PENSE À TOI J: SAIS QUE IW{S CI RCULE LA r-ôE f'{)N FRÈRE NOS VEINES PISSE OOE NOUS PI SSOOS LE r-Êf.E SANG J' Y SENS C<H1:: LE COURS D' EAU DE NOlRE Cll...1URE, L'OŒUR DU VIN BLANC, LA COULEUR DES COINS DE RUES; .E SAIS MON 'FRÈRE QUE POUR NOUS C'EST CCH-E SI NOUS ÉJACULIONS DE LA VIE. SERGE HICHT tTÉ 1986 - -- - - - - - - ----------- Québec, vendredi 1er février 1985. UN VENDREDI SOIR CO~~E LES AUTRES ••• ou Deux instantanés d'une certaine realité québécoise. 8hpm- Rue du Sault-au-Matelot; une vieille maison historique, avec l'avancée du Vieux Séminaire de Québec sur la falaise à pic, en face (ça me rappelle Gilles Vigneault). Ambiance mi-"décontract", mi-"culturelle" de bon ton. L'hôte, Maurice, prof. d'espagnol (chez les jésuites), spécialiste des Catalans, est une ancienne connaissance du Chantauteuil-Biarritz il y a une douzaine d'années, et connaît bien la Bretagne. Il y a là également deux Americaines du Minnesota, un grand Américain "relax", et une Québécoise. La soirée s'étire après le souper, excellent par ailleurs, arrosé de "gwin-ruz". No more houblon ... Malédiction! On splitte les oueloues bières survivantes à deux ou trois. je reste un peu sur ma soif, ce qui est rare! Rencontré en sortant sur la rue, près du Saint-Malo fermé, Bertrand le "Bougnat". Je lui demande: "as-tu soif?". Il me réplique qu'il se ramasse chez-eux, mais il m'indique les coordonnées d'un bar à promiscuité des lieux. Et c'est alors oue ma soirée bascule. Une heure du matin, Café "L' Acropole tt , rue Saint-Paul: pas de Grecs à l'horizon, tables de billard, serveuses ---~ affriolantes, ambiance typique mi-prolos, mi-chômeurs. Ca "fume" en crime! Un copain de Jon"ui~re, Robin est l~. On jase quelques minutes. Apr~s son départ, je m'assois ~ une table, o~ se tient un Amérindien assez jeune, grand et bilingue, peut-être un Cri. L'Amérindien engage la conversation moitié anglais-français, sympathise avec moi et se met ~ me payer traite sur traite. A un moment donné, j'ai devant moi un cognac, deux doubles scotches et une grosse Miller. J'hallucine quasiment. Je ne sais par quel bout co~nencer. Pour remercier le Grand Chef, je lui refile ma vieille pipe "Triskell" en cadeau (mieux vaut un autochtone emboucanné 0ue saoul, me dis-je in petto). Il la met dans sa poche arrière sans piper mot. Finalempnt, mon ami d'un soir s'écroule ivre-mort sur la banQuette, vers les trois heures, dans l'indifférence générale. Je finis mes verres, et sors avec la Miller (C'est l'heure d'y aller!). Rentré ~ pied, vers mon vieux Limoilou, et failli m'écarter sur la rivi~re Saint-Charles gelée. Une belle soirée .•• Mais quelle "petite Vie"! Moralité(s): "On est toujours l'Indien de quelqU'un". L'Indien est-il notre mauvaise conscience ou notre double? Louis Briand tbmICITÉ I-brft:.: .x 00 tt>RD, TE VOIS cOURBÉ SUR LES MISÈRES 00 ~, TU VouœAIS CHANGER LE NoRD POUR LE Sun, TU VOUOOAI S REFONffiE L'ESPACE ET LE "f81>S, ~TOOC~S~,~SPffiŒ PAR CE FROID GLACIM.. QUI PÉNÈTRE TES VEINES, LES FAISANT CU\QUER C<H1: LE FOOET DES TRAÎNEAUX. LEs CHIENS HURLENT TA PEINE QUE TA VOIX EXTÉNlÉE DE FATIGUE NE PEUT PLUS CRlffi, CRIER TON ESPOIR, CRIER TA · FAIM DE JUSTICE, CRIER TON BESOIN n'ÊTRE BIEN, AU Sun, Noon, AU À L'EsT ET L' CÀJEST • SERGE HICHT ËTÉ 1986 41. (28-IO-86) (une note de journal) En fin de nuit, il y a les coulées chaudes du sax ténor de David S. Ware doublées subtilement par la trompette de Ted Daniel ("Fate" sur l'album "Celebration" de Andrew Cyrille) et même une égratignure très perceptible n'altère pas la fascination oue j'éprouve, encore que je maintipnne comme toujours une distance critique par rapport ~ toute r~alité, ce qui n'est pas incompatible, je sais ce oui se passe ~ tous les niveaux en adoptant une telle démarche, et maintenant ç a devient plus syncopé, plus criard, plus rébarbatif à toute harmonie, c'est la lutte qui s'exalte en fracas télescopés mais non adverses par antithèse destructrice, alors oue soudain le calme survient dans la cascade lente des notes de piano de Donald Smith, puis Ware et Daniel reprennent le thème initial avec toujours autant de souplesse, et ça chuinte sans heurt et ça palpite généreusement comme l'évidence la plus irradiante quand vivre brûle vraiment-Alain Quimper ***** Amateurs, fervents ou passionnés de jazz, Quelle que soit l'activit~ à laquelle il vous incite, vous pouvez écouter WNEW (am eleven-three-o). L'animation y est meilleure qu'excellente. Ca provient de New York, ce qui occasionne parfois une réception complètement brouill~e, ça ne peut que galvaniser le sens de l'espace entier. A. ~. AVIS DIVERS Le Club Jack Kérouac met à la disp osit ion de ses membres les livres dont l a nomenclature est établie à la page suivante. Il suffit de fair e prendre en note le prêt par Nicole Paquin ou par toute autre personne responsable au Secrétariat permanent des peuples francophones. Parution récente: Jack Kérouac, Maggie Cassidy (traduction de Béatrice Gartenberg), coll. "Points-Roman", édition du Seuil. Dave Christy, temps prochain dans l'esprit Adresse: 5110, de Montréal, nous informe de la parution au prind'une revue de création littéraire, Beat Soup, de la beat eneration et des années soixantes . rue Adam, Montréal Québec) H1V 1W8 43. CLUB JACK KEROUAC CENTRE DE DOCUMENTATION BURROUGHS, William S. (1966) Naked Lunch. CHASSE, Paul P. (1976) Anthologie de la poésie franco-américaine de la Nouvelle-Angleterre. FERLINGHETTI, Lawrence (1976) Who are we now? GIFFORD, Barry (1977) Kerouac's town. JARVIS, Charles E. (1974)Vlslons of Kerouac. KEROUAC-HARVEY, Raymonde (1980) L'album: Pensées des descendants de Maurice-Louis-Alexandre le Brice de Kéroack depuls 1730. KEROUAC, Jack (1966) Blq Sur. KEROUAC, Jack (1966) Desolation Angels. KEROUAC, Jack (1962) Docteur Sax. KEROUAC, Jack (1977) Heaven &Other Poems. KEROUAC, Jack (1968) Les arges vagabonds. KEROUAC, Jack (1963) Les clochards célestes. KEROUAC, Jack (1969) Lonesome Traveller. KEROUAC, Jack (1978) Maggle Cassidy. KEROUAC, Jack (1976) Mexico Clty blues/1. KEROUAC, Jack (1984) Pull My Dalsy. KEROUAC, Jack (1971) Satorl à Paris. KEROUAC, Jack (1960) '$Lw la route. KEROUAC, Jack (1978) The Town and the City. KEROUAC, Jack (1983) Trlstessa. KEROUAC, Jack (1979) Vanlté de Dùluoz. KEROUAC, Jack (1976) Vlslons of Gerard. KEROUAC, Jan (1981) Baby Drlver. McNALLY, Dennis (1980) Desolate Angel. Jack Kerouac, the Beat Generation, and America. MONTGOMERY, John et al (1982) The Kerouac we knew. MOODY STREET IRREGULARS, a Jack Kerouac Newletter: Numéros 6/7, 9, 10, Il, 12, 13, 15, 16 &17. NICOSIA, Gerald (1983) Memory Babe: A critical biography of Jack Kerouac. ODIER, Daniel (1969) Entretlens avec Wllllam Burroughs. PELIEU, Claude (1972) Jukeboxes. PELIEU, Claude (1973) Tatouages mentholés et Cartouches d'Aube. PLANtTE PLUS (1971) "Bob Dylan et la Beat Generation, changer la vie. SRrPARD, Sam (1978) Bob Dylan starring in Rolling Thunder Logbook. STARER, Jacqueline (1977) Chronologie des écrivains Beats Jusqu'en 1969. THE KEROUAC CONNECTION: numéros 7, 8, 9, 10, Il, 12. WALSH, Joy (1984) Jack Kerouac: Statement in brown. Franco-American litcralUre: writers and their lVritings La littérature franco-américaine écrivains et écritures PROGRAMME VEl'DREDI, 13 MARS SAMEDI, 14 MARS CAMPUS CE:-iTER CAMPUS CO,TER tns{'riplion / R~gistra(ion 1:30 p.rn . I:JO p.m. Présiden!: Eric Waddell. UnÎversité Laval. Or~anis.ateur de la Rencontre internationa.le Jack Kerouac Inscription/R~giJtra(ion 9:00 a.m . 1:00 p.m. 9:30 a.m. Bicn\'C:nuC' : Lou is· F. Dion. a.a., VicC'-("h3.ncclicr. Collc~(' de r A~somrli0n C!Jirc QUin131. DifC\."tr;('C' . In st itut français Bienyenue: Joseph H . Hagan. President of Assumption Collc:ge :":aming 9:45 a.m. 1:15 p.m. Prcsidmt: rierre Anet il. In~litut Quebecois de recherche sur la cuhurc Louis Dont'" ('1 /(os hrh'ains frcnco·amhicoins. Garon. a.a., ancien professeur à rUni\'c:rsitt La\"al Ll.'s Fronco·Amhicains ('f l'institution fiuhoirt' )'\'('$ David Plante. author of the Francoeur trilogy: Th~ Famil)'. Th~ Woods. The Country. Born in Providcnce, Rhode Island, he now lives in London. ft- ('n~ dc Htmf rr,·mhh.JY. Ré:~is Normandc3u, Un;\'crsité du QU(l;!cc à !\10ntréal Pause caf< 3:45 p.m. Gérard Robichaud. author of The App/l.' of his Eye, rcading an c,;crrpt from his ncw novd. A Pearl of G,{'Cf Pria. 3:00 p.rn. ~1ichad Truc, Assumption College JacQuie Gi~n FuUer, Dative of Lcwiston. Main<:, readjng (rom a work in progress. Franco-Amerù:an Lill'rCful"( Se"'" England - Holyoke. Ernest-B. Guillet. Ph.D. Id('as of Order in Little Canada. Wil( Jaml.'s. nt Err:cst Du/ouft: romancù:r du Far- Pau$< cdi Présidmte: Charlone Bordes LeBlanc. Boston Colkge Cornille Lessard-Bisson.nettl' .. . à la rechl'rchl' d'un jtminisml' franco·am/ricain.. J3n(1 Shideler. Uni\"enity of ~1assachul.Ctts al Amherst Bill Tremblay, editor of the Colorado Revic'W. Born in Southbridge, MassachuSC"tts, he is Chair of the Creative Writing Program at Colorado Slalc UniverS"ity. He ....ill read from his rCC(ntly published volume of poet!)' entitled: Duhamel; in. a Lütll' Canada of J.fa.ssach~{(J. Discussion Oiscussion OU('Sf. of Discussion 10:30 a.m. Moderator: Ca~ J:JS p.rn. Discu ss ion Discussion Translation of ~/f: The a5 0 Jock };erouoc. ~1aurîce PotC"Ct. Uni\ersité du Qud)ec 3 :-'1onlrta.! Pr6idcnle: Oaire Quinlal. Directrice de l' lmtitut français qll(I"~cui...{': 3:30 p.m. Slide -tape show. Bl'yond thl' Rocd: The FrancoAmerican Side of Jock A·aouoc. Roben Pc:rreault. Manch~ter. Ne .... Ha~pshire Florence Tormey Dlouin. CEGeP SI-Laurenl. ~1onlréal Richard L. BelaÎr, author or Double rcading rrom a worle in progress. Tak~. 11:15 a.m. Pause caf< CHAPELLE DU SAI:-iT-ESPRlT II:JO a.m. Présiden;: Armand-B. Chartitr. Uni\'enÎlé du Rhode Island Rosoire Dion-Lb'('squ~ amtricaÎne. ~( l';d~n.lill L 1"Slil ,1( !n'''(tlu /~C rr"l'f'r<J'~' lk /0"'('1 ln ('0""""""1111/011'. On ('O(I#f"J ,....,0'" 4!cJ:'n~,,1>ks ~ l''u ,.,od.qt..f' qo..,,~, YI"#'! _fl~ k P, ... " d, ", ","",", /_,.., d·,",..,.".",...,", ",..d4"1 J.-J ('Q"/t","~rl PAVILlO:-; TAYLOR Du~, auteur de plusieurs fecuCÙS de lisant ~ poèmes. Il:30 p.m. homëlislc : \\ïlfrid-J. Dufault. a.a. C1 7:00 p.m. Normand ~sic, Mt"Sse Cé!tbranl Conctlëbrants: Richard · P. Brunellc. a .a. Louis·F. Dion. a .a . franco- Michel Lapierre. Université de Montrézl ~t>II"qlH' . 5:30 p . rn. O<jeun<rILunch Dina-gala en l'honneur de Claire Quintal. directrice de l'Instilut français. sous la pr6idencc de ~1. William-E. Aubuchon. flh. OI("\o·a.1icr de !v1alte. Vice:pre$idC'nt du Conscil de l'ln$I;IUI françaü. .\:ous ror.(r(wns \'i\'cmcnl /('s gou\'rrn('men{s de la Frana n du Canada. la ~lIga{ion du QU(~ ~n .......ou\·~IIe-·Angln~rr(. oirui quc le Conse;I dc la \·ù: fran(ais~ ~n AmhiQuC'. d~ kur glnlrositl d nOlr~ Ixard. FORMULAIRE d'INSCRIPTION Registratien Ferm Tous remeignemena sur l'htt;.crgement e:t le tramport seronl fournis sur demande. I:lsctiption COII/rrt:flu /~ 'd~jnlna Information "garding lodging and transportation Gl'ailabl( upon rt'çuNt. {TAY . PkO VtNC"t VllLf Mt1o.t Th~ rfT~<h .n <ht"("u ply.bk 10: InltllutclAutlftlptloft Je suis membre de: rrnstitut. _ _ Oui _ _ Non- CoII~,~ SOO Selhbuf")" StC"T(:t WOf"t"nl~r. T"~ph(J~ roOE P'OSTAl Noms ct adresses suprltment&ircs: MA 0160'9-1296 (617) 152·561:5. ut. inclus/ Soll.lrdoy 11.lf1(h i"rll.ld~) _SIS.OO Otna-Gala/ Testimonial Dinncr _tlS.OO J( UlU:fa. mats ~ d6iu: r.ire un don " l'Institut (r&l)Ç1il. 1 cm uflDbk 10 IIff~d. bvt wUll fI( p<"ulo p&$ IQ C"Of1I";bu/~ to IJ.~ Frrnd! IfUtitlltr. ~I~ Toul ·Voir le formulaÎfc d·.dhésion d( membre .u ~ rrW"r~ Inr /«rmbuJhip af>pli~alloll . ~$O. _SIl.}() r UNIVERSITE DU MAINE ~ 1ais<.1f1 CENTRE I· RAN CO· A\ltRICAIN FAROe ct Lt- F.A.R .O .G. FORUM T':kphollc : (2<l7) 5S 1- FROG Colloque KéroU6c à Orol1o FraIKtl-AI11ér ic J. i n<..~ 12<13'·enucdll Co lkgc rOllo. fi. 1 E O~4 <19 o April 2-3 • 1987 "OesolBtion Angel": JBck K érouB c Bnd the Fra nco-Am erican Iraditio n Co-sponsored by the Oepartment of English and The Franco-American Center of the Uniuersity of Maine April 2, 1987 11 :00 Arriual of guests (Presenters,Panelists,Modemtors)) a t the Fmnco-American Center 126 College Auenue lunch/tour of Performing Arts Center 12:00 Welcome by President licl< and Prof. Burton 2:00 Hatlen 1ntroduction of Presenter Roger Brunelle of lowell, Ma. by Prof. Kail "The Birth Place," North Bangor lounge, Memorial Union 1ntroduction of Or. Claire Quintal, Assumption College, 2:30 Worcester by Prof. Kail "Kérouac: A Bibliographical History/His Place in Ethnic literature" North Bangor lounge, Memorial Union Panel discussion introduced/moderated by Prof. Bishop 3:30 "Sources of Creatiuity: Kérouac and Franco-American Au thors Today" Oiscussants: ....... , ......... , ......... , ............ , , ...... . North Bangor lounge, Memorial Union 7:30 April 3, 1 9 87 9:00 1:30 3:00 4:30 Readings-I ntroduced by Prof. Bishop Uniuersity Club, Memorial Union Video tapes/films/slide productions introduced by Prof. Waddell of Uniuersity laual, Québec North Bangor lounge, Memorial Union Class uisits by authors arranged through English Oepartment Introduction of Presenter Prof. Eric Waddell by Prof. Claire Quintal "Kérouac: The Uniuersal Man" North Bangor lounge, Memorial Union Panel discussion introduced by Prof. Kai! and moderated by M. Paul Paré ,EHecutiue Oirector of ActFANE (Action for Franco-Americans in the North East) "The Place of Franco-American Authors in American litcraturc" Oiscussants: Professors Waddell, Quintal , Bishop •..... .. . , Closurc-Profcssor Burton Hattcn, Chfiirpcrson of Uniuersity of Mfiine Oepfirtmcnt of English MERC 1 À TOUS UNE PRECISION ET UN HAPPEL Le titre du bulletin et le sous-titre qui l ' encadre consistent en une citation de "Sur la route" (selon la traduction de Jacques Houbard, Folio, Gallimard, p . 356) qui résume symboliquement la vie de Kérouac en faisant implicitement allusion à ses diverses évolutions (ou régressions) ulterieures. Cela sugg~re aussi la dimension ouverte du Club, en ce sens que n'importe qui manifestant un intérêt pour Kérouac peut s'intégrer au groupe assez hétéroclite oui le compose. Ce premier numéro substantiel constitue un témoignage , probant par sa diversité même, de la vitalité du Club. Considérant de plus l'effet concentré de tremplin du collo0ue international et l'éventualité de collaborations prestigieuses, on peut envisager, avec un enthousiasme de bon aloi présentement, de conférer à ce bulletin l'envergure et la qualité matérielle d'une revue. C'est pourquoi tous les membres du Club sont plus que jamais sollicités à y participer, les prochains numéros (paraissant sur une base ouadrimestrielle) n'excluant surtout pas l'inaliénable voix au chapitre du lecteur. Alain Quimper 47. N(IMPORTE QUELLE ROUTE BULLETIN DU CLUB JACK KÉROUAC Comité de rédaction: Louis Briand Rém i Fer l and Jea n Po ulin Alain Quimper Ont également collaboré: Roger Brunelle Bertrand Marotte Jacques Nadeau, photographe Ér i c I-Jadde 11 Serge Wicht