Nouveautés sur le métabolisme du calcium et de

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Nouveautés sur le métabolisme du calcium et de
Professeur Jean Pierre SALLES,
Endocrinologie, Maladies Osseuses, Génétique et Gynécologie,
Hôpital des Enfants, et INSERM Unité 563, CHU de Toulouse
Centre de Référence des Maladies Rares du Métabolisme du Calcium et du Phosphore
Nouveautés sur le métabolisme du calcium t de la vitamine D chez
l’enfant
Le rôle de la vitamine D à partir de l’observation des souris et des hommes
Presque un siècle a été nécessaire pour comprendre le métabolisme de la vitamine D à
travers ses métabolites et une hormone clé, la 1-25 (OH)2 D. Celle-ci agit comme ligand pour
un facteur de transcription nucléaire, le récepteur de la vitamine D (VDR). Le VDR, de même
que d’autres récepteurs nucléaires, régule la transcription de gènes et les fonctions cellulaires.
La vitamine D active (1-25 (OH)2 D) produite au niveau du rein joue, par sa concentration
systémique, un rôle hormonal. Cependant, l’expression du VDR et des enzymes qui régulent
la concentration de 1-25 (OH)2 D (la 1-hydroxylase ou CYP 27 B1 qui l’augmente, et la 24hydroxylase ou CYP 24 A1 qui la diminue) est ubiquitaire. De plus, la 1-25 (OH)2 D régule à
peu près 30 % du génome de la souris et de l’homme. Ceci suggère que les formes extrarénales produites dans les tissus par la 1-hydroxylase jouent aussi un rôle local paracrine. Ceci
est vrai au niveau de la peau, du muscle, du système immunitaire et du métabolisme du
glucose.
Les effets systémiques de la vitamine D sont majeurs sur le métabolisme
ostéocalcique. Les souris déficientes en VDR ou en 1 hydroxylase se développent
normalement in utero mais présentent, ensuite, progressivement des signes de rachitisme avec
un retard de croissance, une hypertrophie des cartilages de croissance et une anomalie de la
minéralisation au niveau des points d’ossification avec une masse osseuse insuffisamment
minéralisée.
Elles
présentent
une
hypocalcémie,
une
hypophosphatémie,
un
hyperparathyroïdie et une diminution de la concentration de FGF23 (Fibroblast Growth
Factor 23), hormone phosp^haturiante. Ces souris ont à terme une mortalité accrue.
On peut rapprocher ce phénotype de celui des enfants présentant des mutations
inactivatrices du VDR ou de 1-hydroxylase, qui ont un déficit majeur en 1-25 (OH)2 D. Un
apport en calcium élevé avec un rapport calcium/phosphore approprié peut corriger
l’homéostasie du calcium et de l’os chez la souris et chez l’homme lors d’anomalie du VDR
(résistance à la 1-25 (OH)2 D). La restauration du VDR au niveau de l’intestin montre qu’un
récepteur fonctionnel à ce niveau est nécessaire et suffisant pour restaurer cette homéostasie.
Il existe des effets plus modérés du simple déficit en vitamine D sur l’os, mieux
connus chez l’homme que chez les rongeurs. On note une diminution de l’absorption
intestinale du calcium, un hyperparathyroïdisme secondaire, une diminution de la densité
minérale osseuse (DMO) et une augmentation du risque de fractures. Plusieurs études
transversales ont montré une hyperparathyroïdie modérée chez les sujets présentant un
apport insuffisant en vitamine D. Des études d’intervention montrent que les taux de PTH
diminuent lors de supplémentation en vitamine D lorsque le taux de 25 OH D initial est
inférieur à 20 ng/ml. Des valeurs de densité minérale osseuse diminuées sont associées à ces
valeurs basses de 25 OH D dans plusieurs études transversales avec un seuil de 25 OH D de
12 à 30 ng/ml.
Une étude large, menée chez plus de 13.000 individus, étude NHANES 3, conclut à
des valeurs accrues de DMO chez les sujets ayant les valeurs les plus élevées de 25 OH D.
L’incidence des fractures est aussi accrue chez les patients présentant des valeurs basses
inférieures à 20 ng/ml. Le bénéfice d’un apport en vitamine D sur l’incidence des fractures a
pu être précisé dans des études randomisées. Globalement une supplémentation en vitamine D
de l’ordre de 700 UI avec un apport en calcium supérieur à 1 g par jour réduit le risque de
fractures du col fémoral de 20 % dans les populations de sujets âgés alors que la
supplémentation en calcium seule est inefficace. L’effet systémique optimal de la vitamine D
est lié à une disponibilité suffisante de la 25 OHD pour produire la 1-25 (OH)2 D. Un
consensus parait être de maintenir un taux de 25 OH D supérieur à 25 ng/ml.
Il n’existe pas de consensus établi chez l’enfant chez qui l’effet de la vitamine D
durant la croissance et l’acquisition du pic de masse osseuse est majeur. Cependant
l’existence fréquente d’un déficit en 25 OH D, en particulier dans la période pubertaire, est
établi dans la plupart des populations, en particulier française. Ce déficit est aussi présent dans
certaines populations exposées, en particulier, les enfants qui présentent un degré de
malabsorption, comme cela est le cas lors de la mucoviscidose où des recommandations dans
ce cadre ont pu être définies récemment. On s’accorde, de plus en plus, à conseiller un taux
cible de 25 OH D de l’ordre de 30 ng/ml qui paraît nécessaire pour éviter la stimulation
parathyroïdienne.
En parallèle, la question se pose de savoir si les effets de la vitamine D observés dans
les cas de déficit sévère chez l’homme et chez la souris sur le système immunitaire, cardiovasculaire, le muscle et la prolifération cellulaire se retrouvent chez l’homme dans le cas de
déficits moins sévères. Les études épidémiologiques suggèrent qu’un statut faible en vitamine
D augmente le risque de certaines affections. Le rôle positif de la vitamine D vis-à-vis du
cancer du colon, a été évoqué.
Des essais contrôlés sont encore nécessaires pour définir le statut optimal de vitamine
D en termes de santé globale. On peut supposer que les recommandations qui sont établies
vis-à-vis du métabolisme calcique et osseux quant à la disponibilité de la 25 OH D et à sa
concentration plasmatique peuvent s’appliquer aux autres fonctions.
L’activité physique: une clé pour améliorer le statut osseux chez l’enfant et
l’adolescent
On a récemment remis en avant l’importance de l’activité physique pour promouvoir
la qualité de l’os chez l’enfant. On insiste dans ce contexte sur l’acquisition d’une masse
osseuse optimale pour prévenir l’ostéoporose ultérieure. En 2008, les résultats de plusieurs
essais contrôlés dans des populations pédiatriques utilisant l’activité physique comme facteur
d’intervention suggèrent que celle-ci est essentielle pour la prévention d’ostéoporose chez
l’adulte. Des avancées aux moyens de nouvelles techniques dans l’analyse de l’os, notamment
par pQCT, suggèrent que des études fondées exclusivement sur l’analyse par densitométrie
ont sous-estimé l’impact de l’activité physique pour le développement du pic de masse
osseuse chez l’enfant.
Un niveau de preuve élevé suggère que les enfants faisant davantage d’activité
physique améliorent leur masse osseuse en comparaison des sujets contrôles. Une étude
réalisées en Colombie britannique, avec un exercice relativement modéré de 10 à 12 minutes,
trois fois par semaine, chez des enfants en âge scolaire, démontrent un gain de 5 % de la
création osseuse après 20 mois d’intervention. L’expansion endocorticale est améliorée chez
les filles, de même que la position périostée chez les garçons. L’exercice produit un effet
supplémentaire chez les enfants qui ont une supplémentation en calcium.
Pour conclure, un article publié en 2007 dans la prestigieuse revue Cell par l’équipe de
G. Karsenty, démontre l’existence tout à fait originale d’une relation entre l’activité osseuse et
la sensibilité à l’insuline. Une molécule connue du métabolisme osseux, l’ostéocalcine,
améliore la sensibilité à l’insuline et diminue l’obésité chez la souris. L’exercice et la lutte
contre la sédentarité est donc favorable dans plusieurs domaines en stimulant le métabolisme
osseux, les mécanismes moléculaires également en témoignent. Cette étude positionne en
outre ce tissu, déjà identifié pour sécréter le FGF 23 cité plus haut, hormone qui contrôle la
phosphatémie, comme un véritable tissu endocrine.
Régulation du métabolisme du calcium et du phosphore
foie
intestin
+
Vitamine D
Pi
Ca2+
os
RANKL
1,25(OH)2 D
Ca2+
Ca2+
Ca2+
Pi
+
+
CaR
+
CaR
-
rein
Ca2+
+
25-OH D
CaR
Pi
+
AMPc
FGF23
-
PTH
Le FGF23, facteur phosphaturiant récemment découvert, diminue la
réabosprption du phophore au niveau réanl et inhibe la 1-hydoxylation de la
vitamine D, contribuant à l’hypophosphatémie