137 Personnel Navigant Et Dumping Social En Europe

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137 Personnel Navigant Et Dumping Social En Europe
Personnel Navigant Et Dumping
Social En Europe
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Dr. Par Laurent Gamet,
Enseignant-chercheur, Paris Sorbonne Cité
Avocat à la Cour de Paris, associé du cabinet Flichy Grangé Avocats
Airline companies have developed strategies to exlude their
employees from the most restrictive labor laws in Europe (specifically
French law) and submit them to other less restrictive labor laws
(particularly British and Irish law). These strategies take advantage of the
fact that private international law and European law seem maladjusted
to aircrew personnel. However judges and public authorities in Europe
are now reacting and preventing social dumping.
1. - A plusieurs reprises ces dernières années, la justice française a
eu à connaître de la situation de compagnies aériennes employant sur le
territoire français du personnel navigant soumis au droit social d’un autre
pays européen, moins favorable pour les salariés que le droit social
français. EasyJet a comparu pour « travail dissimulé, entraves aux
organes de représentation du personnel et défaut d'immatriculation »
pour ne pas avoir soumis au droit français, entre juin 2003 et décembre
2006, 170 de ses salariés employés à son escale à l’aéroport de Paris
(Orly). Par jugement du 9 avril 2010, le Tribunal correctionnel de Créteil a
condamné la compagnie aérienne à une amende de 150.000 euros, ainsi
qu’au paiement de sommes importantes aux organismes sociaux et à
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deux syndicats parties civiles, le Syndicat national du personnel navigant
commercial (SNPNC) et l'Union des navigants de l'aviation civile (UNAC).
La compagnie irlandaise Ryanair a également été mise en examen en
septembre 2010, la justice française lui reprochant d'avoir déclaré en
Irlande 120 salariés travaillant à Marseille. Il est reproché à la compagnie
du travail dissimulé, un prêt illicite de main d'œuvre, l'entrave au
fonctionnement du comité d'entreprise, aux fonctions de délégué du
personnel ainsi qu'à l'exercice du droit syndical et au fonctionnement du
Comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail. Et en février
2012, la presse se faisait l’écho de ce que la compagnie Air Méditerranée
avait créé une filiale grecque, dénommée Hermès Airlines, assurant une
partie des liaisons au départ de la France ; des reclassements étaient
proposés dans cette filiale aux salariés d’ Air Méditerranée employés en
France menacés de licenciement pour motif économique.
Les compagnies aériennes ont ainsi développé des stratégies
destinées à faire échapper leurs salariés employés en Europe aux
législations sociales jugées les plus contraignantes ou les plus coûteuses
(notamment la législation française), pour les soumettre à d’autres droits,
moins contraignants et moins coûteux (notamment les droits britanniques
et irlandais). Ces stratégies tirent parti d’interstices du droit international
privé du travail et du droit européen, qui peuvent parfois paraître
inadaptés aux spécificités du personnel navigant. Reste que les juges et
les pouvoirs publics, en Europe, ont réagi pour mettre fin à ces stratégies
de dumping social.
2. - Lorsque le personnel est amené à naviguer d’un pays à l’autre,
se posent classiquement la question de la juridiction compétente et celle
de la loi applicable. Qu’il s’agisse de régler le conflit de juridictions ou le
conflit de lois, le droit européen fait du « lieu d’exécution habituel » de la
prestation de travail, un élément cardinal 1. En matière de conflit de lois,
précisément, le Règlement n° 593/2008 du 17 juin 2008, qui reprend
l’essentiel des règles de la Convention de Rome du 19 juin 1980, retient
le principe du libre choix par les parties de la loi applicable au contrat
(article 8.1 du Règlement). Cette liberté de choix de la loi applicable « ne
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peut toutefois avoir pour résultat de priver le travailleur de la protection
que lui assurent les dispositions impératives (…) en vertu de la loi qui, à
défaut de choix, aurait été applicable »2, étant précisé qu’en application
de l’article 8.2 du Règlement, « à défaut de choix exercé par les parties,
le contrat individuel de travail est régi par la loi du pays dans lequel ou, à
défaut, à partir duquel le travailleur, en exécution de son contrat de
travail, accomplit habituellement son travail »3.
La détermination du lieu du travail est également importante pour la
mise en œuvre des lois de police, entendues comme étant « une
disposition impérative dont le respect est jugé crucial par un pays pour la
sauvegarde de ses intérêts publics, tels que son organisation politique,
sociale ou économique, au point d’en exiger l’application à toute situation
entrant dans son champ d’application, quelle que soit par ailleurs la loi
applicable au contrat» (article 9 du Règlement du 17 juin 2008). En
France, le Conseil d’État a jugé que les dispositions françaises
réglementant les relations collectives sont des lois de police. Selon le
Conseil d’Etat, « la circonstance qu’une entreprise, employant en France
plus de cinquante salariés, a son siège social à l’étranger ne saurait la
faire échapper à l’application de la législation sur les comités d’entreprises
(…) ». (CE, 29 juin 1973, Syndicat Général du personnel de la Compagnie
des wagons-lits c/ la Compagnie des wagons-lits, Lebon p.458). La Cour
de cassation adopte la même position en qualifiant de lois de police, les
lois françaises relatives à la représentation des salariés et à la défense de
leurs droits et intérêts ; ces lois s’imposent à toutes les entreprises et aux
organismes assimilés exerçant leur activité en France (Cass. soc. 3 mars
1988, n°86-60.507). La Cour de cassation a précisé que ces lois
s’imposent même si la loi applicable au contrat de travail du salarié
travaillant en France est une loi étrangère (Cass. Ass. Plén., 10 juillet
1992, n°88-40.672). Et peu important que la société étrangère n’ait ni
établissement, ni succursale, ni locaux en France (Cass. soc. 14 février
2001, n°99-60.355), c’est l’exercice en France de l’activité du salarié qui
est déterminant.
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3. - A l’évidence, il existe une réelle difficulté à définir le lieu de
travail du personnel navigant. Si ce n’est durant le temps de préparation
du vol, des phases d’embarquement et de débarquement, le personnel
navigant exécute son travail en mouvement, à plusieurs milliers de
mètres d’un quelconque rattachement géographique terrestre, et parfois
même au-dessus de plusieurs Etats ou de mers.
A s’en tenir à une première impression, la situation particulière du
personnel navigant prive de la possibilité de dégager un quelconque lieu
de travail, critère d’application des règles précédemment rappelées des
règles de conflits de lois et des lois de police. C’est en ce sens que se
sont prononcés les juges français, saisis de l’application des règles de
droit international privé du travail au personnel navigant. La Cour de
cassation a ainsi considéré que ce personnel exécutait son travail « en
dehors de tout établissement » (Cass. soc. 23 mai 1973 n°72-40310),
solution également retenues par des juges du fond (CA Lyon, 3 mars
2008, RG n°07/03601 ; CA Paris 15 mars 2007, RG n°S05/03496).
Faute de pouvoir caractériser un lieu d’exécution habituel de la
prestation de travail du personnel navigant, c’est la loi du lieu
d'établissement d'embauche qui devrait s’appliquer au contrat de travail
international du personnel navigant, a fortiori lorsque son application
aura été stipulée dans le contrat de travail. L’enjeu serait alors de fixer ce
lieu d’embauche dans un pays où le droit social est moins contraignant,
ce que certaines compagnies aériennes semblent pratiquer.
Cette stratégie se heurte cependant à plusieurs obstacles. Le
premier tient à l’article 8.4 du Règlement du 17 juin 2008, aux termes
duquel si le contrat de travail « présente des liens plus étroits » avec un
autre pays, « la loi de cet autre pays trouve à s’appliquer ». Le juge
pourrait considérer, si le salarié est affecté à une base où le plus souvent
il embarque et débarque, que c’est la loi du pays où cette base est située
qui doit être retenue, parce que le contrat de travail présente des liens
plus étroits avec ledit pays. Le second tient à l’évolution de la
jurisprudence concernant les salariés mobiles : la Cour de Justice de
l’Union Européenne (CJUE) retient aujourd’hui comme lieu d’exécution
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habituel du travail, « celui où à partir duquel le travailleur s'acquitte
principalement de ses obligations envers son employeur » (CJUE, 13
juillet 1993, C – 125/92) ou bien encore « celui où le travailleur a établi le
centre effectif de ses activités professionnelles » (CJUE, 9 janvier 1997,
C-383/95). Pour la détermination de ce lieu, il convient, selon la Cour, de
« prendre en considération la circonstance que le travailleur accomplit la
majeure partie de son temps de travail dans un des États contractants où
il a un bureau à partir duquel il organise ses activités pour le compte de
son employeur et où il retourne après chaque voyage professionnel à
l'étranger ». La jurisprudence française reprend cette solution (Cass. soc.
31 mars 2009, n° 08-40.347). Ni les juges européens, ni les juges
français, n’ont eu à notre connaissance, à trancher l’application au
personnel navigant de cette jurisprudence propre aux travailleurs
mobiles. On voit mal cependant quelle particularité justifierait que les
solutions dégagées pour les travailleurs mobiles, et notamment les
chauffeurs routiers (Cass. soc. 20 septembre 2006, n°05-40.491), ne
s’appliquent pas au personnel navigant4. D’ailleurs, dans le droit fil de la
jurisprudence européenne, le Règlement du 17 juin 2008
vise
aujourd’hui « la loi du pays dans lequel ou, à défaut, à partir duquel le
travailleur, en exécution de son contrat de travail, accomplit
habituellement son travail » ; selon la Commission Européenne, une telle
modification « permet par exemple d'appliquer la règle au personnel
travaillant à bord d'avions s'il existe une base fixe à partir de laquelle le
travail est organisé et où ce personnel exerce d'autres obligations vis-àvis de l'employeur (enregistrement, contrôle de sécurité »)5.
4. - L’alternative tentée par les compagnies aériennes pour
appliquer un droit du travail moins contraignant que celui résultant de
l’application des règles de conflit de lois, est de considérer que le
personnel navigant est employé dans un Etat (le préalable est alors de
considérer qu’il existe un lieu habituel de travail6) et détaché dans un
autre Etat.
Selon la directive n° 96/71/CE du 16 décembre 1996, le salarié
détaché est celui « qui, pendant une période limitée, exécute son travail
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sur le territoire d'un État membre autre que l’État sur le territoire duquel
il travaille habituellement ». Selon la directive, s’applique alors au contrat
de travail du salarié détaché, la loi du lieu habituel d’exécution du travail,
sous réserve de l’application de certaines dispositions de la loi du pays où
le salarié est détaché. Ces dispositions sont fixées par chaque législation
nationale ; le droit français en dresse la liste à l’article L. 1262-4 du Code
du travail7.
Dans le droit fil de la jurisprudence de la CJUE, l’article L.1262-3 du
Code du travail français prévoit qu’« un employeur ne peut se prévaloir
des dispositions applicables au détachement de salariés lorsque son
activité est entièrement orientée vers le territoire français ou lorsqu’elle
est réalisée dans des locaux ou avec des infrastructures à partir desquels
elle est exercée de façon habituelle, stable et continue, notamment par la
recherche et la prospection d’une clientèle ou le recrutement de salariés
sur ce territoire». L’employeur est alors « assujetti aux dispositions du
Code du travail applicables aux entreprises établies sur le territoire
français ».
Le décret n° 2006-1425 du 21 novembre 2006 fait une application
particulière de l’article L.1262-3 du Code du travail à l'aviation civile, dans
l’objectif de lutter contre la pratique évoquée des compagnies aériennes
consistant à recourir au détachement en France de personnel relevant
d’un droit du travail étranger8. Codifié à l’article R. 330-2 du Code de
l’aviation civile, le texte prévoit que l’article L. 1262-3 du Code du travail
est applicable aux entreprises de transports aériens « au titre de leurs
bases d'exploitation sur le territoire français ». La base d’exploitation est
« un ensemble de locaux ou d’infrastructures à partir desquels une
entreprise exerce de façon stable, habituelle et continue une activité de
transport aérien avec des salariés qui y ont le centre effectif de leur
activité professionnelle ». Défini par l’article R. 330-2 du Code de
l’aviation civile, le centre effectif de l’activité professionnelle est le « lieu
où de façon habituelle, [le salarié] travaille ou celui où il prend son
service et retourne après l’accomplissement de sa mission ». La définition
du « centre effectif de l’activité professionnelle » est ainsi voisine de celle
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retenue par la CJUE, lorsqu’il s’agit de définir le lieu d’exécution habituel
de la prestation de travail des salariés mobiles.
Ainsi, la compagnie dont le personnel navigant prend son service et
revient après chaque vol dans des locaux ou infrastructures dans lesquels
la compagnie exerce en France une activité stable, habituelle et durable,
ne peut se prévaloir des règles propres au détachement. Le droit du
travail français doit s’appliquer.
5. - Les compagnies Easy Jet et Ryan Air ont formé un recours en
nullité contre le décret du 21 novembre 2006. Saisi d’un référé
suspension (CE, ord. réf., 15 janvier 2007 n° 299788), puis au fond (CE,
11 juillet 2007, n° 299787 et 30011), le Conseil d’Etat a rejeté
l’argumentation des requérantes.
Celles-ci invoquaient tout d’abord une violation de l’article L.1262- 3
du Code du travail, au motif que le décret en aurait modifié la portée. Le
Conseil d’Etat a jugé que l’article R.320-2 du Code de l’aviation civile ne
faisait qu’expliciter la portée de l’article L.1262-3 du Code du travail dans
le secteur aérien, sans y ajouter. Les compagnies aériennes prétendaient
ensuite que l’article R.320-2 du Code de l’aviation civile était contraire
aux articles 43 et 49 du Traité de l’Union Européenne consacrant la
liberté d’établissement et la liberté de prestation de services. Selon elles,
cet article du Code de l’aviation civile ferait obstacle à tout détachement
de salariés dès lors que l’entreprise disposerait d’un établissement stable.
Le Conseil d’Etat a retenu que les articles L.1262-3 du Code du travail et
R.320-2 du Code de l’aviation civile prévoient seulement, sans porter
atteinte aux libertés invoquées, que les règles relatives au détachement
transnational des travailleurs ne sont pas applicables aux entreprises d’un
autre Etat membre dont l’activité est entièrement orientée vers le
territoire français où est réalisée de façon stable, habituelle et continue
dans des locaux ou infrastructures situées en France. Selon le Conseil
d’Etat, un Etat membre peut prendre « des dispositions permettant
d’éviter qu’un prestataire de services utilise cette liberté [de prestations
de service] en vue de réaliser une activité entièrement et principalement
tournée vers son territoire, de manière à se soustraire aux règles
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professionnelles qui lui seraient applicables s’il y était établi, une telle
situation relevant au contraire des règles relatives
au droit
d’établissement ». Les compagnies invoquaient également la violation de
la directive n° 96/71/CE relative au détachement transnational de
travailleurs, arguant que la directive n’était assortie d’aucune restriction
en cas d’établissement dans le pays. La réponse du Conseil d’Etat sur ce
point est laconique9 ; il se contente d’énoncer que l’article L. 1262-3 du
Code du travail a « pour seul objet de rappeler qu’en dehors des cas
prévus aux articles L. 1261-1 à L. 1261-2 du même code, pris pour la
transposition de la directive 96/71/CE (…), le Code du travail s’applique
aux entreprises établies en France ». Enfin, les compagnies se prévalaient
d’une violation de la Convention de Rome de 1980 10 : le droit français
aurait méconnu l’autonomie de la volonté, en imposant l’application de
l’ensemble du droit français. Le Conseil d’Etat répond que les dispositions
du Code du travail et du Code de l’aviation civile « ne fixent pas des
règles de conflits de lois » et que dès lors, les compagnies aériennes, ne
peuvent se prévaloir de la Convention de Rome.
Il apparaît ainsi que les compagnies aériennes ne peuvent échapper
à l’application du droit d’un Etat européen, lorsque c’est dans ce pays que
les salariés y ont le centre effectif de leur activité professionnelle. Elles ne
peuvent non plus considérer que leurs salariés travaillent habituellement
dans un pays et sont détachés dans un autre pays, lorsque l’entreprise à
son activité entièrement orientée vers le territoire de cet autre pays où
elle est réalisée de façon stable, habituelle et continue dans des locaux
ou infrastructures situées sur le territoire de ce pays.
6. – La question d’un éventuel dumping social intéresse également,
bien entendu, la protection sociale. La tentation pourrait être, pour les
compagnies aériennes, d’affilier leur personnel navigant au régime de
sécurité sociale le moins onéreux, c'est-à-dire celui qui prévoit des
cotisations sociales moins importantes quel que soit le régime social en
contrepartie.
Les règlements européens de coordination de sécurité sociale ont
prévu des règles spécifiques pour les salariés mobiles qui peuvent faire
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échec à cette tentation. L'article 14.2 du Règlement n° 1408/71 du 14
juin 1971 prévoyait une règle propre au personnel navigant : « la
personne qui fait partie du personnel roulant ou navigant d'une entreprise
effectuant, pour le compte d'autrui ou pour son compte, des transports
internationaux de passagers ou de marchandises par voie ferroviaire,
routière, aérienne ou batelière, et ayant son siège sur le territoire d'un
État membre, est soumise à la législation de ce dernier État ». Le
Règlement prévoyait deux exceptions. Tout d’abord, la personne occupée
par une succursale ou une représentation permanente que ladite
entreprise possède sur le territoire d'un État membre autre que celui où
elle a son siège était soumise à la législation de l'État membre sur le
territoire duquel cette succursale ou représentation permanente se
trouve. Il restait cependant délicat de déterminer dans quelles conditions
un salarié navigant pouvait être considéré « occupé » dans une
succursale. Ensuite, le Règlement prévoyait que la personne occupée de
manière prépondérante sur le territoire de l'État membre où elle réside
est soumise à la législation de cet État, même si l'entreprise qui l'occupe
n'a ni siège, ni succursale, ni représentation permanente sur ce territoire.
La notion de prépondérance de l'activité sur un territoire déterminée était
là aussi sujette à discussion. Le Règlement n°883/2004, entré en vigueur
le 1er mai 2010, ne retient plus de dispositions spécifiques au personnel
navigant affecté à des liaisons internationales ; leur sont appliquées les
règles plus générales prévues pour les salariés mobiles, entendus comme
les salariés exerçant leur activité dans deux ou plusieurs États membres.
L'article 13 du Règlement prévoit, dans l'hypothèse de l’exercice d'une
activité sur deux ou plusieurs États membres :
« (…) 1. La personne qui exerce normalement une activité salariée
dans deux ou plusieurs États membres est soumise:
- à la législation de l’État membre de résidence, si elle exerce
une partie substantielle de son activité dans cet État membre ou
si elle dépend de plusieurs entreprises ou de plusieurs employeurs
ayant leur siège social ou leur siège d’exploitation dans différents
États membres,ou
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- à la législation de l’État membre dans lequel l’entreprise
ou l’employeur qui l’emploie a son siège ou son domicile, si la
personne n’exerce pas une partie substantielle de ses activités
dans l’État membre de résidence (…).
que :
L’article 14 § 8 du Règlement d'application n° 987/2009 précise
« (…) une "partie substantielle d'une activité salariée ou non
salariée" exercée dans un État membre signifie qu'une part
quantitativement importante de l'ensemble des activités du travailleur
salarié ou non salarié y est exercée, sans qu'il s'agisse nécessairement de
la majeure partie de ces activités. Pour déterminer si une partie
substantielle des activités est exercée dans un État membre, il est tenu
compte des critères indicatifs qui suivent:
a) dans le cas d'une activité salariée, le temps de travail et/ou la
rémunération; et
b) dans le cas d'une activité non salariée, le chiffre d'affaires, le
temps de travail, le nombre de services prestés et/ou le revenu.
Dans le cadre d'une évaluation globale, la réunion de moins de 25
% des critères précités indiquera qu'une partie substantielle des activités
n'est pas exercée dans l'État membre concerné ».
7.- Les compagnies aériennes ont tenté de profiter de l’inadaptation,
au personnel navigant affecté à des liaisons internationales, des règles
internes de droit social ou de conflits de loi, dont le point d’ancrage est
un lieu terrestre d’exécution habituelle du travail. Tant les pouvoirs
publics que les juges ont voulu une parade en faisant preuve de
pragmatisme et en recherchant le pays où le salarié avait son point
d’ancrage, pour y appliquer la loi de ce pays. Il n’existe donc plus
aujourd’hui grand place en Europe pour des stratégies de dumping social
consistant à rattacher fictivement l’activité à un territoire, pour y
appliquer ce droit, alors que l’activité est effectivement déployée sur un
autre territoire.
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