Ville de Saint Germain du Puy Cérémonie d`hommage à la Résistance

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Ville de Saint Germain du Puy Cérémonie d`hommage à la Résistance
Ville de Saint Germain du Puy
Cérémonie d'hommage à la Résistance
Vendredi 15 août 2014
Intervention de Maxime Camuzat, Maire.
Prononcée devant le Monument aux Morts
Mesdames, Messieurs, chaque année, nous rendons hommage à la « Résistance » à travers le
souvenir de deux hommes: Julien GIRAULT, le « Commandant Maxime », dont je salue ici le fils et
la famille, et André SCHULPEN, jeune résistant belge.
Nous avons pris cette décision voici 35 ans déjà, afin de rappeler cette période particulière de
notre histoire, la Résistance, en l'honneur de celles et ceux qui donnèrent leur vie, ainsi que les
leçons qui en ont été tirées et que l'ont se doit de transmettre aux générations qui suivent.
C'est à travers ces deux hommes, « un qui croyait au ciel et l'autre qui n'y croyait pas » selon la
belle formule d'Aragon qui évoquait dans un poème la diversité de ces hommes et de ces femmes,
que notre Mairie leur rend hommage, avec l'accord et l'aide des organisations de résistants - dont
je salue également ici les représentants, Maurice RENAUDAT, Madeleine FERDONNET et JeanClaude BONNIN.
Le premier, André Schulpen, parce qu'il était de cette « armée des ombres », serait resté inconnu
sans la proposition que nous avions faite de donner son nom au parc que nous venions de réaliser
à côté des HLM de l'allée Gérard Philipe, et qui verrait par la suite des générations d'enfants s'y
distraire.
Ce jeune belge catholique avait quitté son pays envahi puis rejoint la Résistance Française, les
maquis de Gron puis d'Ivoy le Pré. Il fut pris avec ses huit autres camarades, dont Gabriel Dordain,
l'un des responsables des FTPF de la zone sud, et fusillé à 17 ans à Bourges, le 23 novembre
1943, après avoir été torturé sans livrer les noms de ceux qui n’avaient pas été pris. Il tomba sous
les balles nazies la Marseillaise aux lèvres, tout comme ses camarades.
Le second, Julien Girault, né en 1929 à Crézancy, fut nommé après ses études, au début de sa
toute jeune carrière d'instituteur en octobre 1941, à Jouet sur l’Aubois. Dès le mois suivant, ayant
adhéré aux Jeunesses Communistes peu avant la guerre, il entre en contact avec Roland
Champenier et Marcel Cherrier qui étaient les principaux responsables de la Résistance issue des
forces communistes alors fortement implantées dans notre département.
En compagnie de sa jeune femme, Alice, il rédige alors de nombreuses publications et affiches
appelant à lutter contre l’occupant. Ensemble, ils en assument la diffusion.
Nombreuses sont ses activités, tout d'abord pacifiques, puis ce que l'on appelle ses « faits
d’arme ». Ils les conduiront à être dans la clandestinité dès novembre 1943 et à devenir le
« Commandant Maxime », un des responsables départementaux et régionaux des FTPF (Francs
Tireurs et Partisans Français).
Après de nombreux hauts faits de résistance, il part le 15 août 1944 pour une mission avec P.
Jacquet, dont il ne reviendra pas, disparaissant dans des circonstances toujours mal expliquées.
Dix jours plus tard, son corps est retrouvé par un berger à l’endroit où nous avons fait élever en
1979 la stèle que nous avons fleurie tout à l’heure. C'est pour cette raison particulière, qu'en
accord avec son épouse et les associations concernées, nous avons alors choisi à l'époque cette
date du 15 août pour évoquer la Résistance dans notre commune, Saint Germain du Puy n'ayant
pas connu de haut fait de Résistance qui nous aurait alors fait choisir une autre date.
Julien Girault repose aujourd'hui au cimetière de Crézancy.
Se souvenir, honorer « la Résistance », c'est d'abord rendre hommage à celles et ceux qui allèrent
jusqu'au sacrifice de leur vie, parfois dans des conditions de souffrance et d'abnégation qui
méritent notre respect, et que l'on ne doit surtout pas oublier.
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Un hommage à celles et ceux qui luttèrent, Français dits « libres », ceux de la Résistance
extérieure, Français dits « de la Résistance intérieure », mais pas seulement : ils en venaient de
bien des pays du monde, d'Afrique notamment, y compris des Allemands qui refusaient l'idéologie
nazie. Toutes et tous, eux, croyaient en des idéaux de justice, de liberté et de paix ; croyaient en
l'être humain, à son droit d'exister quelque soit sa façon de penser, sa religion ou sa couleur, dès
lors que lui aussi, est respectueux de l'autre. Ce que l'idéologie nazie réfutait catégoriquement.
Rappelons que dans notre département, si 162 résistants sont morts au combat, 200 ont été
fusillés et 699 de ses habitants déportés. Parmi eux, de nombreuses femmes et 46 enfants.
Ces 46 enfants ont été déportés parce que leur religion, leur couleur de peau ou les idées de leurs
parents, en faisaient pour les nazis des « sous-enfants », comme leurs parents étaient des « sousêtres humains », et pouvaient donc être traités comme des animaux nuisibles.
420 n'en sont jamais revenus.
S'en souvenir, c'est donc d'abord et surtout ne jamais oublier cela, bien que l'actualité de ce début
de XXIème siècle montre hélas trop souvent que la phrase de l'homme de théâtre allemand
qu'était Bertolt BRECHT, « Le ventre toujours fécond d'où est sorti la bête immonde », est toujours
une terrible réalité. Chacun en regardant, écoutant ou lisant les informations quotidiennes voit bien
ce qu'il en est de cette réalité.
Je saluais d'ailleurs ici voici quelques instants notre ami Jean-Claude BONNIN, Germinois qui
représente les « Amis de la Fondation de la Mémoire de la Déportation ». Je vous renvoie à
l'article qu'il a écrit dans un bulletin de l'association, dans lequel il dit : « ...l'histoire ne sert jamais
les mêmes plats, mais des similitudes sont là... », en concluant « ...notre rôle consiste toujours à
informer les jeunes scolarisés et les adultes sur les dangers de la xénophobie, du racisme, du
mépris des droits essentiels, de tout ou partie des êtres humains, car le néonazisme est un danger
aujourd'hui hélas grandissant... ».
Face à cela, comment ne pas approuver Lucie AUBRAC, Résistante décédée voici quelques
années déjà, lorsqu'elle déclarait : « Toujours, toujours doit être gardée vivante dans notre cœur la
flamme de la Résistance ». En rappelant le passé, l'esprit de la Résistance doit éclairer le
quotidien et l'avenir, même lorsqu'il n'est pas facile à évoquer, pour éviter que ces idéologies ne se
développent.
Pour ne citer qu'un seul exemple, il vient d'être rappelé de nouveau que la grande rafle dite « du
Vel' d'Hiv », lors de laquelle des milliers d'hommes, de femmes et d'enfants furent déportés dans
les camps de la mort parce qu'ils étaient de confession juive, fut réalisée par l'Etat Français sous
Pétain, et donc par des hommes et des femmes de notre pays, et non pas par des soldats ou
policiers de l'occupation allemande.
Le reconnaître ne fut pas chose aisée : la France le fit par la voix de Jacques CHIRAC alors
Président de la République, soit 50 ans après, reconnaissant ainsi que l'Etat Français s'était donc
mis au service de cette idéologie. Dans la logique de ceux qui, quelques années avant l'invasion
allemande, après les élections législatives remportées par le Front Populaire, justement,
« préféraient Hitler que le Front Populaire », phrase qui resta dans la mémoire collective tout au
long de l'occupation mais aussi bien après la Libération.
C'est de cette réalité que le Conseil National de la Résistance tira toutes les leçons.
Regroupant toutes les forces de la Résistance, sous la présidence de Jean MOULIN, il organisait
la libération de notre pays en liaison avec les Français Libres de Londres et d'ailleurs, et proposa
un programme politique, économique et social qui fut mis en place en 1945. Des réformes qui
furent inscrites dans la constitution de notre pays en 1948 et qui sont toujours vivantes et
présentes.
La réalité de ce que fut dans les faits l'application de l'idéologie nazie provoqua en effet chez nous,
mais aussi sur toute la planète, un sursaut de la conscience mondiale.
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Cela aboutit à des principes nouveaux concernant l'ensemble des pays, principes inscrits dans la
Déclaration Universelle des Droits de l'homme adoptée en 1948, et paraphée alors
symboliquement à Paris par les responsables des pays ayant à ce moment adhéré à la toute
nouvelle Organisation des Nations Unies.
Oui, Mesdames et Messieurs, je me suis toujours retrouvé, avec ce message, dans la nécessité de
le transmettre dans toute sa dimension et sans en occulter les difficultés. Le transmettre, en ayant
profondément enraciné au cœur et à la raison une seule certitude: c'est qu'il nous aide à travailler,
à rechercher le chemin d'un nouveau progrès « à la Française » dans une mondialisation qui serait
bien différente de celle que nous vivons aujourd'hui.
Rappelez-vous qu'au début de ce XXIème siècle, nous avons vu 13 hommes et femmes du CNR
alors toujours présents, à la lecture de l'état de notre société, se réunir, et lancer de nouveau un
appel, qui est encore et plus que jamais aujourd'hui hélas, d'une brûlante actualité.
Je ne peux que vous recommander de le lire, et le relire, lui qui se concluait par la phrase
suivante : « Plus que jamais, à ceux et celles qui feront le siècle qui commence, nous
voulons dire avec notre affection : " Créer, c’est résister. Résister, c’est créer ". »
Se souvenir, honorer « la Résistance » avec un « R » majuscule, celle qui a appuyé les Forces
Françaises dites « libres », celle que le peuple de France a opposée à ce que lui imposait sur son
territoire l'idéologie nazie, c'est donc aussi transmettre son message dans toutes ses
composantes. A travers cette cérémonie du 15 août bien sûr, mais aussi en continuant, lorsque
nous en avons l'occasion, à donner, comme l'ont fait les élus qui nous ont précédé, le nom de
Résistants ayant eu des responsabilités nationales, ou ayant agit au niveau local, à des rues de
notre commune.
C'est ainsi que les rues de notre commune portent les noms du Général De Gaulle, de Jean
Moulin, du Maréchal Leclerc, du Maréchal Juin, de Paul Éluard... mais aussi d'Edmé Boiché, de
Bernard Guillier de Chalvron, de Laurent Bilbeau, de Pierre Ferdonnet (inaugurée voici près d'un
an déjà)... sans oublier la Place du 8 mai 1945, l'allée du Souvenirs Français etc...
Nous étions de ceux qui avaient souhaité que la date de création du CNR devienne une journée
nationale, pour permettre au « devoir de mémoire » nécessaire aux jeunes générations de prendre
ainsi une autre dimension, avec des initiatives telles que le dépôt de primevères à cette occasion.
C'est ce que nous avons fait à deux reprises dans notre commune, les primevères étant, selon leur
définition, des plantes qui, quelle que soit la dureté de l'hiver, résistent et refleurissent au
printemps, avec des fleurs de couleurs variées (« prima-vera », premier printemps; « primo-vere »,
au début du printemps (latin)). Tout à fait la symbolique de la « Résistance », celle de la France
pendant cette seconde guerre mondiale, en cette année du 70ème anniversaire de la Libération.
Oui, vraiment, plus que jamais, « Résister doit toujours se conjuguer au présent » comme l'avait dit
l'une de ces grandes figures que j'ai déjà évoquée, Lucie Aubrac, dont le nom, associé à celui de
son époux Raymond, a été également donné à l'une des rues de notre commune parmi les autres
citées précédemment.
Certes, ce message vient de loin : je pense que Jean Jaurès, dont une de nos rues porte
également le nom (à Fénestrelay), et à qui nous venons de rendre hommage le 31 juillet dernier, le
portait déjà avant que ne soit déclenchée la 1ère guerre mondiale, qui fit de 1914 à 1918 des
millions de morts. Je me suis d'ailleurs permis à cette occasion de reprendre une de ses phrases
prononcée quelques jours avant son assassinat : « Songez à ce que serait le désastre pour
l’Europe : ce ne serait plus comme dans les Balkans (peu d’années auparavant), une armée de
300 000 hommes, mais quatre, cinq, six armées de 2 millions d’hommes ! Quel massacre !
Quelles ruines ! Quelle barbarie ! ». Les articles de presse qui ont publié voici quelques jours cette
citation disaient également que : «Jaurès aurait pu l’écrire la semaine dernière. Entre Gaza,
l’Ukraine, l’Iran, la Syrie… cette réflexion qui vise à désamorcer les situations de conflits est plus
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que jamais à l’ordre du jour » (l’Humanité du 28 juillet dernier), car « un siècle après sa mort, Jean
Jaurès questionne toujours » (le Berry Républicain). Et ces 15 derniers jours, disons que la
situation ne s'est pas vraiment améliorée...
Mesdames et Messieurs, l'hommage que nous rendons aujourd'hui à ces deux jeunes hommes
bien différents est le symbole de toutes celles et ceux qui « entrèrent en Résistance ».
C'est aussi ne pas oublier et travailler à faire que les générations qui n'auront plus la chance de
parler avec celles et ceux qui ont vécu la Résistance, puissent continuer à percevoir ce pan de
l'histoire et son importance.
Pour que, quelles que soient les difficultés du monde d'aujourd'hui, la conscience mondiale
n'accepte plus jamais cela.
Oui, il nous faudra toujours prendre quelques minutes de notre si précieux temps pour leur rendre
hommage, nous leur devons.
Merci pour eux d'avoir été présents ce matin.
Maxime Camuzat
15 août 2014
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