Septembre noir, octobre rouge?

Transcription

Septembre noir, octobre rouge?
Journal trimestriel
réalisé par la Fédération des syndicats
L’école n’est pas
une entreprise
pas
L’éducation n’est
une marchandise
éducation
Sud éducation
Numéro de CPPAP : 0408 S 06443
Prix : 1,5 euro, Abonnements : 10 euros
Directrice de la publication
Huguette Cordelier
numéro 24
septembre-octobre 2007
Imprimerie Rotographie, Montreuil
Dépôt légal en cours
Expression des syndicats membres de la Fédération Sud éducation
Septembre noir,
octobre rouge?
« On tire d’abord et on discute après» semble être la devise adoptée par ce gouvernement.
Pour commencer, le passage en douce, pendant la grisaille estivale, du «paquet fiscal», de la franchise
médicale, du service minimum dans les transports terrestres, de la loi d’autonomie des universités et
de la suppression de 22700 postes dans la fonction publique d’Etat ; ensuite, à partir de septembre
seulement, l’ouverture de négociations sur le pouvoir d’achat, les parcours professionnels, la rénovation
du dialogue social et les missions de la fonction publique. Certaines organisations syndicales prennent
d’autant plus au sérieux ces mondanités ministérielles que les modalités de leur représentativité sont
au menu des discussions. Il ne faut pourtant pas se faire d’illusions. Au bout du compte, les personnels finissent toujours par payer la note quand c’est le patron qui invite. Seule notre détermination
et une mobilisation résolue, organisée dans la durée, pourront donner un coup d’arrêt à la politique
antisociale de ce gouvernement.
En attendant, l’addition a de quoi
donner des aigreurs, en particulier à l’Edu-
8
+ 54 es
post les
dans naux
tribu
cation nationale : 9400 postes d’enseignants
supprimés dans les collèges et lycées publics +
1400 (seulement) dans le privé + 400 postes
administratifs dans le public = 11200 postes
amputés au budget 2008, l’équivalent des réductions d’effectifs de 2004 à 2007 ! Et ce n’est
qu’un début, car le gouvernement promet de
poursuivre à ce rythme au moins jusqu’en 2010.
Sa rigueur budgétaire est pourtant très sélective : les ministres Alliot-Marie et Morin ont
ainsi respectivement obtenus 400 policiers et
1387 gendarmes supplémentaires… largement
de quoi faire la chasse à nos élèves sans papiers
et à leurs familles !
Plus de répression, moins d’éducation : l’équation sarkozyste est simple.
Darcos l’assume d’ailleurs sans complexe.
«Comme tous les pays, a-t-il déclaré, la France doit rationaliser les études, avec plus de suivi individualisé
et moins d’options.» En clair, un enseignement limité au tronc commun avec, en guise de supplément d’âme, quelques heures de soutien accordées à une poignée d’élèves. A la clé, une politique d’individualisation qui affecte non seulement la remédiation de l’échec scolaire mais aussi les revendications salariales. Car après avoir perdu 6% de pouvoir d’achat en sept ans, la multiplication des heures
supplémentaires offre une bouffée d’oxygène aux collègues désireux de «gagner plus en travaillant
plus» : une tentation qui se paiera pourtant de la casse des solidarités collectives, seules capables
d’imposer une revalorisation générale des salaires. D’ailleurs, les
chefs d’établissement se frottent les mains, eux qui disposent désormais d’une volumineuse carotte pour récompenser les plus «méritants» tandis que la majorité des collègues continueront de trimer
en se serrant la ceinture… le mépris en prime !
Les politiques d’austérité salariale et de division
des personnels s’alimentent mutuellement. Sans lutte
collective, elles se poursuivront au détriment de nos conditions de
travail. Il suffit d’ailleurs de regarder les dégâts infligés à l’université
par la loi Pécresse, «la plus importante de la législature», pour comprendre ce qui attend le reste du système éducatif. Avec son recrutement maison (et précaire), ses financements privés, son enseignement et ses recherches adaptés aux demandes des entreprises,
le tout sous la houlette d’un président devenu seul maître à bord,
+ 1387
gendarmes
supérieur p.2 Université, les propositions de Sud éducation.
c’est la lutte p.3 Droit de grève / Service minimum, serre-vis maximum.
sous pression p.4-5 IUFM / Lycée Pro / Carte Scolaire.
ICI, ailleurs p.6 Amiens, le drame / JO de Pékin, pas très sport.
précarité p.7AE en lutte / Contrat de Travail Unique.
big brother p.8 Fichage des élèves / Biométrie, toujours plus fort.
Encart jeté en aléatoire pour certains destinataires
+ 400
policiers
l’université autonome préfigure par bien des aspects l’établissement secondaire de demain. La promesse faite par Darcos de supprimer la sectorisation scolaire d’ici trois ans - avec ce que cela
implique comme accroissement des inégalités entre les élèves, de
renforcement des pouvoirs du chef d’établissement et de mise en
concurrence des enseignants - en donne d’ores et déjà un aperçu.
Quant à l’enseignement primaire, les motifs d’inquiétude ne manquent pas non plus. Certes, Darcos a
prudemment désavoué les outrances de son prédécesseur sur les
méthodes d’apprentissages, promis une heure de sport hebdomadaire et ouvert généreusement 1100 postes en 2007 et 2008…
mais pour une augmentation du nombre d’élèves estimée au minimum à 69000 sur la même période ! Avec une telle pénurie de
moyens, le Haut Conseil de l’Education a beau jeu de remettre en
cause les performances du premier
degré. Aussi succinct qu’alarmiste,
en particulier son chiffrage fantaisiste
de 40% d’élèves en difficulté à l’entrée au collège, le rapport de cet organisme opportunément institué en
2005 par la loi Fillon n’a qu’une seule
fonction : anesthésier personnels et
usagers en prévision des futures «thérapies» de choc imposées par le gouvernement.
La fédération des syndicats Sud
éducation appelle tous les collègues soucieux de travailler
dans des conditions décentes, en
défendant le principe d’éducabilité de tous les élèves dans une
école publique, laïque et émancipatrice, à la rejoindre dès cette
rentrée. Les régressions imposées par le gouvernement ne
peuvent se combattre individuellement : ce n’est qu’en mutualisant nos idées et nos énergies
que nous pourrons agir efficacement pour une autre école, une
autre société.
À Saint Denis, le 1er septembre 2007
-10800 enseignants