La conversation ne suffit pas

Transcription

La conversation ne suffit pas
N°43 - LUNDI 6 DÉCEMBRE 2010
DES PIXELS ET DES HOMMES
« La conversation ne suffit pas »
Comment la communication d'entreprise s'est-elle appropriée les outils digitaux ?
Entretien avec Nicolas André, directeur associé en charge du digital chez TBWA\CORPORATE, qui
revendique une organisation intégrée en mode « laboratoire ».
Peut-on dater la prise de conscience
numérique de TBWA\Corporate ?
Elle se date précisément à quatre ans,
lorque nous avons créé une « business unit »
consacrée au digital. Mais avant de définir
un positionnement, notre volonté était de
réaliser de véritables opérations digitales
pour nos clients. Nous voulions être en mesure
de développer des retours d’expérience, et
à ce moment-là seulement, proposer une
vision à nos clients. En novembre 2007,
nous remportons l’appel d’offres SFR et en
février 2008, nous sortons mySFR. Cette
opération a remporté de nombreux prix
et nous a permis de commencer à toucher
le 2.0 de manière pragmatique, avec des
indicateurs de performance précis. Nous en
avons tiré des « best practices » en termes
d’animation notamment, et la conviction
que les opérations digitales, y compris dans
le corporate, doivent être orientées vers le
résultat.
Le digital est-il un bon levier pour faire
du corporate ?
C’est un nouveau moyen de répondre
aux problématiques corporate de manière
encore plus impactante. À chaque opération,
nous avons fait le constat que lorsque l’on
propose un dispositif digital aux parties
prenantes, qu’il s’agisse des clients finaux
ou des employés d’une entreprise, ils jouent
le jeu et on obtient des résultats mesurables.
Cette année, nous allons mettre en place un
dispositif pour l’Armée de terre qui capitalise
sur nos précédentes expériences. Nous
sommes convaincus que la conversation ne
suffit pas. Il ne faut pas seulement discuter,
mais impliquer au-delà de la simple relation
de nature affective (le bouton like) et
permettre au public d’être un acteur au côté
de l’entreprise. Ce qui est important ce n’est
pas que celle-ci apparaisse comme sympa,
mais que l’on croit à son action, à son projet
d’entreprise, qu’on adhère à sa vision du
monde ou de son marché. Le digital amplifie
l’implication des audiences. Le public ne
veut plus seulement discuter mais avoir un
rôle à jouer.
Quel type de rôle ?
Il y trois types de rôles qui peuvent donner
lieu à des dispositifs corporate digitaux. Le
NICOLAS ANDRÉ – BIO EXPRESS
1973 : Naissance dans le Val d’Oise.
1997 : Master d’ethnologie.
1998 : DESS Analyse du travail
et des organisations.
1999 : Entre chez TBWA\
Corporate (chef de projet new biz).
2007 : Nommé directeur associé
en charge du digital.
premier consiste à proposer aux parties
prenantes d’être des innovateurs, comme
dans le portail mySFR, où les employés
de l’opérateur ont véritablement joué
ce rôle. On peut ensuite proposer
aux internautes d’être demandeurs,
d’interpeller l’entreprise. Cela ouvre le
champ des possibles, comme ce fut le cas
sur notre dispositif pour Gemalto, avec
JustaskGemalto.com une plate-forme de
conseil grand public pour répondre aux
questions liées à la sécurité numérique.
En deux mois, plus de 500 questions
ont été posées. Gemalto a répondu
avec ses experts, ce qui a contribué à
changer l’image de la marque. Enfin,
la marque peut proposer à ses parties
prenantes d’être des joueurs, ce que
nous avons mis en place pour BNP
Paribas avec Ace Manager, un « serious
adventure game » destiné à accroître
la notoriété de la banque auprès des
jeunes. Le jeu peut en effet devenir un
axe stratégique central, et permettre à
une entreprise de partager ce qu’elle
fait sur un mode ludique plébiscité.
Le jeu est un phénomène de société :
66 % des Français déclarent « jouer »
quotidiennement.
Quelle organisation avez-vous choisi
pour intégrer ces problématiques ?
Nous avons refusé de fonder une entité
digitale séparée. Nous n’avons pas de
développeurs en interne mais c’est un
atout car cela fait que nous ne sommes pas
contraints de pousser telle ou telle techno
et que nous pouvons à chaque opération
faire appel aux meilleurs. Notre ambition
est de faire coexister dans l’agence deux
types de populations – de vrais consultants
corporate et de vrais experts du web –
parce qu’on ne peut pas gérer le digital
en silo. Sur les 143 collaborateurs de
l’agence, notre business unit digitale
compte 15 personnes, toutes seniors et
pure players, capables de conceptualiser
le digital en fonction des projets. Le point
de départ c’est une idée, une création.
Ensuite, nous travaillons toujours en
binome avec les autres business unit
chargées des problématiques RH, RP
ou BtoB. Notre modèle revendiqué et
assumé est de travailler en mode bêta,
en laboratoire, pour que tout le monde
s’approprie le digital. Rien n’est figé dans
notre organisation. C’est d’ailleurs ce
que nous recommandons à nos clients :
il faut accepter d’ouvrir les vannes de
la communication, de lâcher prise et de
modifier son organisation. Il ne s’agit pas
pour autant de succomber à toutes les
modes, mais bien d’avoir une approche
critique.
Comment se mesure le ROI sur des
problématiques corporate ?
Tous les instruments de mesure classiques
du web peuvent être utilisés. Un message
qui ne vend rien de concret peut être
attractif, cela se mesure alors par le
taux de clic. On peut également évaluer
les taux de rebond. Le plus difficile à
maîtriser et à mesurer, c’est la question de
l’influence. Mais cela vaut pour toutes les
problématiques de communication.
Combien représentent aujourd’hui
vos activités digitales ?
Les revenus digitaux de l’agence ont
généré en 2009 plus de 2 millions
d’euros de marge brute, sur des clients
que l’on n’aurait pas emportés sans cette
proposition digitale, ce qui représente
2 millions de marge brute supplémentaires.
Notre ambition est de continuer à faire
croître ce chiffre. ■
Satellinet est une publication Satellifax - Hôtel de Retz, 9 rue Charlot 75003 Paris - Tél. : 01 40 29 47 48 - Fax : 01 73 72 70 36
e-mail : [email protected] - www.satellinet.fr - 1ère année de publication © 2010 Fréquences
11 /13

Documents pareils