Le site Ask.fm dans le collimateur après le suicide d`une

Transcription

Le site Ask.fm dans le collimateur après le suicide d`une
20/08/13
LeTemps.ch | Le site Ask.fm dans le collimateur après le suicide d’une adolescente
revue de pres s e Vendredi 09 août 2013
Le site Ask.fm dans le collimateur après le
suicide d’une adolescente
Par O liv ier Per r in
Le cybe rharcè le me nt a fait une nouve lle victime . Pour soigne r son
e czé ma, de sale s langue s lui avaie nt conse illé d’alle r boire de
l’e au de Jave l ou d’«alle r cre ve r»: Hannah Smith, 14 ans, s’e st
passé la corde au cou
Le 6 août 2013, Hannah Smith, une jeune fille de 14 ans originaire de Leicestershire, en Angleterre,
s’est suicidée. Par pendaison. Non qu’elle fût malade ou désireuse de mettre fin à ses jours à l’aube
d’une vie psychologiquement ou socialement chaotique. Non: Hannah Smith a simplement été la victime
d’un réseau social qui fait beaucoup parler de lui depuis le début de l’été: le site Ask.fm.
Même le premier ministre, David Cameron, s’en est mêlé jeudi, en qualifiant ce réseau d’«abject»: «Les
gens qui gèrent ces sites doivent monter au créneau et faire preuve de responsabilité dans la façon
dont ils les font fonctionner», a-t-il asséné sur la chaîne Sky News. Et sur Twitter, la très active
Dobrevic (@Maelys_Dobrev) commente: «J’espère que les idiots qui l’ont poussée à cet acte
regretteront leurs paroles et fermeront leur gueule à l’avenir!»
De Le ttonie
Similaire à Facebook, jusque dans son apparence graphique, Ask.fm s’en distingue néanmoins par le
fait que ce réseau-là permet à n’importe quel internaute d’envoyer des messages de façon anonyme à
un utilisateur du site. Il a été créé il y a trois ans en Lettonie par les frères Mark et Ilja Terebin pour
faire concurrence à Formspring.me, un site web du type questions-réponses lancé un an plus tôt. Son
succès ne s’est pas fait attendre, générant un trafic intense en très peu de temps: 60 millions d’inscrits
dans le monde et 13,2 millions d’utilisateurs quotidiens à ce jour.
Le principe de ces «forums» d’échanges très populaires auprès des «adolescents en quête de
cyberfrissons», comme l’expliquait récemment Le Monde? Say something, simplement. «Dis quelque
chose», peu importe quoi, n’importe quoi si tu veux, pourvu que tu le dises. Par exemple: «Tu écoutes
quoi comme style de musique?» Ou: «Salut beauté!» Ou encore: «T’es un mec ou une fille?» Jusqu’aux
jugements blessants comme «T’es moche»… ou bien pire.
Dé b ile ? Ma rra nt?
Il n’est pas nouveau que les jeunes se la jouent trash – avec «des trucs débiles» ou «marrants», indique
Europe 1 –, mais le Net donne évidemment une ampleur sans précédent au phénomène. Et c’est bien
là le problème. Car ce genre de réseaux, très prisés des adolescents, ça dérape vite derrière la
calomnie ou le harcèlement. D’où l’intense polémique, les appels au boycott ou à la fermeture
d’Asf.fm, les retraits d’annonceurs: le Guardian indique que plusieurs entreprises ou associations de
tous acabits – dont le groupe d’optique Specsavers, l’ONG Save the Children ou le groupe télécoms
Vodafone – ont indiqué avoir pris les mesures nécessaires pour ne plus diffuser de publicité sur le site.
Car voilà: Hannah Smith, sur Ask.fm, avait reçu des messages insultants sur son physique, certains
www.letemps.ch/Facet/print/Uuid/a6d2d178-00c5-11e3-9228-2a7d5c3bbd90/Le_site_Ask.fm_dans_le_collimateur_après_le_suicide_dune_adolescente
1/2
20/08/13
LeTemps.ch | Le site Ask.fm dans le collimateur après le suicide d’une adolescente
l’encourageant même directement à se tuer pour supprimer le soi-disant problème, selon les dires de
son père, révolté, entré en lutte contre les «assassins» de sa fille et à son tour vilipendé par les langues
de vipère courageusement anonymes, explique le Birmingham Mail. Ce ne semble d’ailleurs pas être
une première, puisqu’il y aurait eu quatre précédents suicides. Et à chaque fois qu’un tel drame se
produit, il n’y a pas de signal d’alerte, fait remarquer le Daily Mirror.
«Fa is-nous une fa ve ur, suicid e -toi»
Mais que s’est-il passé exactement dans ce cas-là? Le Figaro explique que «le jour où elle a posé une
question anodine sur ses problèmes d’eczéma», Hannah Smith «s’est retrouvée face à des dizaines de
réponses» ignobles, du genre «T’es moche, va crever, tout le monde sera content», «Va te suicider»,
«Fais-nous une faveur, suicide-toi», «Avale de l’eau de Javel»…» Le Daily Telegraph cite aussi ce
commentaire: «Ton oncle mérite de mourir du cancer», et la réponse courageuse de la jeune fille: «Mon
oncle a eu un cancer et, oui, il est malheureusement décédé et il me manque, c’était un homme
formidable et il ne méritait certainement pas d’avoir le cancer; donc si j’étais toi, je viendrais le dire en
face.»
L’association BeatBullying juge qu’il faut donc prendre le taureau par les cornes. Les mesures
annoncées sont insuffisantes, comme le communiqué placidement rassurant des frères Terebin, selon
elle. Sur Ask.fm, «il n’y a pas de modération, personne n’a de comptes à rendre», estime cette
association spécialisée dans la protection des jeunes sur Internet: «C’est devenu une plateforme pour
promouvoir la haine», accuse Anthony Smythe, son directeur.
Contre le s «trolls»
L’ensemble de la presse regrette la possibilité de l’anonymat, car il renforce les pulsions destructrices,
selon Business Insider. A l’heure actuelle, il est encore très difficile de lutter contre ceux que l’on
nomme, en langage internet, les «trolls», ces personnes qui participent à une discussion ou à un débat
sur un forum dans le seul et unique but de susciter ou de nourrir artificiellement une polémique et, plus
généralement, de perturber l’équilibre de la communauté.
Jusqu’à en éliminer les plus faibles.
© 2013 Le Temps SA
www.letemps.ch/Facet/print/Uuid/a6d2d178-00c5-11e3-9228-2a7d5c3bbd90/Le_site_Ask.fm_dans_le_collimateur_après_le_suicide_dune_adolescente
2/2