"40 ans de vie commune, mon bel alcool, ma belle ivresse, faut bien

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"40 ans de vie commune, mon bel alcool, ma belle ivresse, faut bien
Théâtre de l'Atelier : Bohringer remonte sur scène en solo après son cancer
La voix rocailleuse ne trahit aucune faiblesse: à 74 ans, Richard Bohringer tient son public en haleine plus
d'une heure dans un solo tendre et cocasse au Théâtre de l'Atelier, après une éclipse d'un an due à un cancer.
Le "survivant", comme il se nomme lui-même, n'en a que plus de bonheur à renouer avec le public dans ce
spectacle, "Ne traîne pas sous la pluie", créé en 2010 mais constamment remanié au fil des ans.
Au Théâtre de l'Atelier, Bohringer est contraint de tenir son horaire (19H00 à 20H30) puisqu'une deuxième
pièce ("Ancien malade des hôpitaux de Paris" de Daniel Pennac) lui succède.
Mais en province, où il se produit beaucoup, il "déborde" allégrement, tant la connivence avec le public le
porte. "Ne traîne pas sous la pluie" est une sorte de mille-feuille : des poèmes et courts récits qu'il a notés
dans de gros cahiers, entrelardés d'apartés savoureux sur la vie de tous les jours.
"40 ans de vie commune, mon bel alcool, ma belle ivresse, faut bien
que je te quitte"
"On va être emmerdés tous ensemble", lance-t-il, goguenard: "il va falloir voter!" Les textes sont autant de
micro-fictions : un improbable voyage vers New York avec sa mamie qui gardait "un pétard dans son
cabas", un combat de boxe en banlieue, une rencontre à Harlem avec une prostituée noire, magnifique et
shootée...
Les personnages de Bohringer sont comme lui, tendres et cabossés par la vie. L'acteur a fait une croix sur
l'alcool : "l'alcool, j'suis trop vieux pour tes jeux", dit-il. "40 ans de vie commune, mon bel alcool, ma belle
ivresse, faut bien que je te quitte"... Beaucoup des compagnons de route de cette balade alcoolisée à travers
la vie ont disparu: Jacques Villeret, Philippe Léotard dans son "aéronef céleste". Richard Bohringer a opté
pour "la vie et ses putains de misères". Les mots ont été plus forts que l'alcool, la drogue et la maladie:
"écrire relève de l'espérance", dit-il.
Sans pathos
Ses filles ont été "magnifiques" : Romane, avec qui il jouait "J'avais un beau ballon rouge" à Vevey, en
Suisse, quand il s'est effondré, paralysé par un cancer; Lou qui a fait la souffleuse quand sa mémoire
défaillait. "J'ai passé avec elles des semaines magnifiques", dit-il, "ça rallonge la vie".
Aucun pathos dans ce spectacle enlevé, où on rit beaucoup. Une seule allusion à la maladie, lorsqu'il évoque
les urgences, la réanimation qui vous transforme en "homme astronaute avec son matériel de survie".
L'auteur de "C'est beau une ville la nuit" publiera le 4 mai chez Flammarion un livre de souvenirs intitulé
"Quinze Rounds".

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