Classification des Tumeurs des glandes salivaires. AFIAP 22

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Classification des Tumeurs des glandes salivaires. AFIAP 22
Classification des Tumeurs des glandes salivaires.
AFIAP 22 novembre 2014
Pr Emmanuelle Uro-Coste, CHU Toulouse
Les tumeurs des glandes salivaires sont très variées : la classification OMS 2005 reconnaît 12
sous types de tumeurs bénignes et 24 sous types de carcinomes (Tableau 1). Environ deux
tiers des tumeurs sont bénignes et un tiers malignes. Cette variété contraste avec la rareté de
ces tumeurs, puisque ces carcinomes ne correspondent qu’à 3 à 5 % des tumeurs de la tête et
du cou, avec une incidence inférieure à 1/100 000 habitants. Le pic d’incidence se situe entre
60 et 70 ans, avec une moyenne autour de 45 ans. Il existe une prédominance féminine. Les
carcinomes sont re-classés en 3 sous groupes : bas grade, grade intermédiaire et haut grade de
malignité. Quelques entités trop rares ne peuvent être classées (pronostic incertain). Pour les
autres tumeurs, le grade et le stade TNM (Tableau 2) permettent d’établir des standards de
traitement.
Principes généraux pour l’analyse des tumeurs des glandes salivaires
Délimitation bénin/malin
La classification OMS des tumeurs primitives des glandes salivaires est particulière car elle
associe deux raisonnements différents pour affirmer la nature bénigne ou maligne et le grade
d’une tumeur :
- le système « classique » : le caractère infiltrant de la tumeur et l’infiltration périnerveuse
sont les critères majeurs de la malignité. Ceci implique d’effectuer des plans de coupe à
l’interface tissu normal/tumeur. Ce critère est parfois difficile à évaluer sur des biopsies. Les
atypies très marquées et l’activité mitotique très augmentée peuvent également faire partie des
facteurs qui amènent à un diagnostic de malignité.
- une approche pragmatique : les tumeurs sont classées par l’OMS bénigne ou maligne
selon leur pronostic. Ainsi, les tumeurs à cellules acineuses, le plus souvent bien limitées,
voire encapsulées et peu atypiques, d’abord classées par l’OMS dans les tumeurs bénignes,
ont été reclassées en 1991 et en 2005 dans les carcinomes de bas grade de malignité car les
études successives ont montré que cette tumeur donnait une évolution métastatique dans
environ 15% des cas.
Classification histogénétique
La classification de l’OMS est basée sur la ressemblance des cellules tumorales avec la cellule
normale. En particulier, elle amène à distinguer les cellules tumorales issues des cellules
luminales (bordant les canaux et les acini), des cellules non luminales (cellules basales et
myoépithéliales). Les cellules myoépithéliales entourent les acini et les canaux
intermédiaires. Les cellules basales, qui sont des cellules de réserve, s’intercalent à la base des
cellules luminales, à partir des canaux striés jusqu’aux canaux excréteurs. Leur phénotype se
rapproche de celui des cellules myoépithéliales. On peut parler de cellules de phénotype
basal/myoépithélial. Par commodité, nous parlerons de cellules myoépithéliales en englobant
ces deux sous types cellulaires. La morphologie de ces cellules est assez variable : fusiforme
(ressemblant à des fibroblastes ou à des myocytes), plasmocytoïde (s’accompagnant d’un
cytoplasme hyalin décentré ), épithélial ou clair (contenant en général du glycogène). Ces
cellules ont la particularité de pouvoir synthétiser un matériel de type membrane basale , qui
peut s’accumuler et former des cylindres hyalins. Il s’agit du fameux aspect cylindromateux
qui n’est donc pas du tout synonyme du diagnostic de « cylindrome » qui est l’exdénomination du carcinome adénoïde kystique, mais qui indique juste la présence de cellules
myoépithéliales.
Reconnaître la différenciation luminale ou myoépithéliale est une des premières étapes de la
stratégie diagnostique. On pourra ainsi distinguer :
- Les tumeurs purement myoépithéliales :
bénigne : myoépithéliome
maligne : carcinome myo-épithélial
- Les tumeurs « mixte » à double contingent épithélial et myoépithélial :
bénignes : adénome pléomorphe, adénome à cellules basales, adénome canaliculaire
malignes : carcinome adénoïde kystique, adénocarcinome à cellules basales,
carcinome épithélial-myoépithélial, adénocarcinome polymorphe de bas grade de
malignité.
- Les tumeurs des glandes salivaires purement épithéliales :
bénignes : adénome oncocytaire, adénome sébacé
malignes : carcinome muco-épidermoïde, adénocarcinome à cellules acineuses,
adénocarcinome SAI, adénocarcinome à cellules claires, cystadénocarcinome,
carcinome oncocytaire etc…
Les tumeurs malignes purement épithéliales sont nombreuses et peuvent être
subdivisées selon leurs composants cellulaires :
cellules acineuses : adénocarcinome à cellules acineuses
cellules mucosécrétantes : carcinome muco épidermoïde, carcinome mucineux, plus
rarement dans l’adénome pléomorphe ou l’adénocarcinome à cellules acineuses
cellules canalaires : adénocarcinome canalaire salivaire, Adénocarcinome SAI etc…
cellules claires : adénocarcinome à cellules claires mais aussi variantes
morphologiques des carcinomes mucoépidermoïdes, des carcinomes à cellules
acineuses, des carcinomes épithéliaux-myoépithéliaux, et des carcinomes sébacés.
Occasionnellement, on peut les voir dans les adénomes pléomorphes et les
oncocytomes.
cellules oncocytaires :carcinome oncocytaire
cellules épidermoïdes : carcinome épidermoïde, carcinome muco-épidermoïde
cellules intermédiaires : carcinomes muco épidermoïde
cellules sébacées : adénocarcinome sébacé,
cellules anaplasiques : carcinome anaplasique
Elles peuvent être également classées selon leur architecture kystique (cystadénome et
cystadénocarcinome) ou papillaire (exemple cystadenome, papillome inversé,
papillome intra-canalaire, sialadénome papillifère) ou leur stroma inflammatoire
(lymphadénome, carcinome lympho-épithélial)
Immunohistochimie
L’ immunohistochimie est loin d’être indispensable dans l’analyse des tumeurs des glandes
salivaires, mais elle peut apporter une aide dans les cas difficiles :
- Le marqueur myoépithélial de référence, indiquant une différenciation musculaire,
est l’actine musculaire lisse. D’autres marqueurs sont moins spécifiques mais plus
sensibles : l’anti-vimentine ou l’anti-PS100. Les cytokératines CK14, CK 5/6 et la protéine
p63, reconnaissent à la fois les cellules myoépithéliales et les cellules basales. p63 est
également exprimée dans la couche basale des épithéliums malpighiens et dans les
carcinomes épidermoïdes.
- Les anticorps anti-EMA , anti-ACE, anti- CK7, et anti-CK19 font ressortir les
structures ductales en particulier quand elles sont dissimulées dans un carcinome adénoïde
kystique de forme massive, dans un adénome pléomorphe cellulaire, dans un carcinome
épithélial-myoépithélial massif. Les marquages avec l’anti-EMA et l’anti-ACE sont tout à
fait particuliers pour une tumeur épithéliale ; seul le plateau apical des cellules ductales est
marqué. L’anti-CD 117 (c-kit) visualise également les cellules luminales et les ébauches de
formations glandulaires. Contrairement à ce qui avait été initialement rapporté, le marquage
n’est pas spécifique du carcinome adénoïde kystique.
p63 :
EMA :
L’indice de prolifération MIB-1 peut aider à stratifier les tumeurs bénignes et les tumeurs
malignes en utilisant un cut off de 5 %.
Grading
Approche pragmatique : Pour certaines tumeurs, le diagnostic est automatiquement associé
à un grade et implique un pronostic : il suffit donc de consulter le dernier fascicule de l’OMS
(2005) qui indique le grade quel que soit l’aspect microscopique de la tumeur :
- le carcinome à cellules acineuses, l’adénocarcinome à cellules basales,
l’adénocarcinome à cellules claires, le carcinome épithélial/myoépithélial sont par
définition de bas grade de malignité.
- le carcinome canalaire salivaire, le carcinome épidermoïde primitif sont par
définition de haut grade de malignité.
Une seule nuance à cette approche, quand il existe des atypies et des mitoses en franc excès ;
on peut indiquer une transformation anaplasique du carcinome qui implique une classification
en haut grade.
Approche classique : Elle concerne 3 entités qui doivent être gradées de manière spécifique
selon leur aspect microscopique:
- le carcinome adénoïde kystique : la présence d’une architecture massive supérieure à
30 % est synonyme de haut grade et s’oppose aux formes cribriformes ou tubulaires
qui sont de meilleur pronostic et dites de bas grade (cf infra).
- des critères spécifiques ont été déterminés pour grader les carcinomes
mucoépidermoïdes (cf infra).
- les adénocarcinomes SAI « sans autre indication » sont gradés selon le schéma
suivant :
- bas grade : atypies discrètes, rares mitoses
- grade intermédiaire : atypies modérées, mitoses plus fréquentes
- haut grade : atypies marquées, noyaux hyperchromatiques, mitoses nombreuses
et parfois anormales.
Stade et pronostic
Le stade TNM et le grade de la tumeur sont corrélés, mais le stade TNM est un facteur
pronostique plus puissant que le grade : les carcinomes de bas grade, mais de stade élevé ont
un pronostic souvent péjoratif.
De même pour le carcinome sur adénome pléomorphe, le pronostic va plus dépendre du
caractère invasif ou non du carcinome vis à vis de la capsule de l’adénome pléomorphe sous
jacent que du grade du contingent carcinomateux.
Les critères du stade TNM de 1997 ont été changés en 2002 (Tableau 2). Le site de survenue
de la tumeur est également un critère pronostique. Les carcinomes localisés à la glande sousmaxillaire ont un pronostic péjoratif par rapport aux carcinomes parotidiens, qui sont, euxmêmes de moins bon pronostic que les carcinomes des glandes salivaires accessoires du
palais.
Cytoponction
La cytoponction est indiquée par de nombreuses équipes car elle peut éviter un geste
chirurgical inutile quand elle permet de diagnostiquer un lymphome ou une métastase.
Une étude ayant repris 6249 cytoponctions trouve une sensibilité de 73 % et une spécificité de
91 % pour le diagnostic bénin/malin. Dans les tumeurs bénignes, l’adénome pléomorphe vient
en tête des faux positifs. Pour les tumeurs malignes, les lymphomes ont un taux de faux
négatifs de 57 %, les adénocarcinomes à cellules acineuses de 49 %, les carcinomes
mucoépidermoïde de bas grade de 43 % et les carcinomes adénoïdes kystiques de 33 %.
La ponction entraîne parfois des remaniements qui compliquent l’examen
anatomopathologique de la pièce opératoire (nécrose, métaplasie etc…).
Procedure d’analyse d’une tumeur des glandes salivaires
Devant une tumeur des glandes salivaires, une procédure logique est :
1 ) de rechercher dans un premier temps, les critères de malignité classiques :
- une infiltration du tissu péritumoral (tissu adipeux, tissu glandulaire, tissu musculaire, voire
tissu osseux ou tissu cutané) par des cellules isolées, des cellules en file indienne, des travées
cellulaires en pince de crabe, un aspect stellaire même focal du contour tumoral,
- des images d’infiltration péri nerveuses,
- des emboles vasculaires,
- des métastases ganglionnaires
- des mitoses anormales
L’activité mitotique est également un bon indicateur pour orienter le diagnostic bénin/malin.
Un indice de prolifération MIB1>5% est en général synonyme de malignité : seuls certains
adénomes pléomorphes peuvent être mitotiquement actifs , jusqu’à 3 mitoses pour 10
champs, tout en restant bénins. Les atypies isolées n’ont pas valeur de malignité.
2 ) Dans un deuxième temps, d’identifier des types tumoraux particuliers.
Des types cellulaires sont spécifiques de certaines tumeur (approche pragmatique):
- l’association dans la tumeur de ces 3 types cellulaires : cellules épithéliales malpighiennes
non kératinisantes+ cellules intermédiaires +cellules mucisécrétantes caliciformes est
synonyme de carcinome muco-épidermoïde. Le diagnostic peut être établi formellement
même s’il n’y a pas de signe d’agressivité architecturale, ce qui est le cas dans les formes
kystiques pures de carcinome muco-épidermoïde. On ne connaît pas de contrepartie bénigne à
cette tumeur.
- l’identification de cellules acineuses dans la tumeur permet également de porter le diagnostic
de carcinome à cellules acineuses car il n’existe pas d’adénome à cellules acineuses (attention
toutefois aux cellules acineuses résiduelles).
En dehors de ces cas, l’identification des cellules (myoépithéliales, basales, canalaires,
claires, oncocytaires etc…) et d’une architecture prédominante (kystique, papillaire,
cribriforme etc…) permettra de terminer la classification.
Conclusion
Malgré cette démarche diagnostique, certains cas restent de diagnostic difficile. Une relecture
dans le cadre du réseau Inca REFCOR (Cancers ORL rares) est organisée gratuitement par
des pathologistes labellisés REFCOR. La recherche de translocations spécifiques de certaines
tumeurs est amenée à se developper pour trancher objectivement sur certaines tumeurs
difficiles.
Tableau 1 Classification OMS 2005 [1]/ OMS classification
Tumeurs épithéliales malignes
Carcinome mucoépidermoïde
Adénocarcinome SAI
Adénocarcinome à cellules acineuses
Carcinome adénoïde kystique
Adénocarcinome polymorphe de bas grade
Carcinome ex-adénome pléomorphe
Adénocarcinome à cellules basales
Cystadénocarcinome
Carcinome épidermoïde
Carcinome indifférencié à grandes cellules
Adénocarcinome à cellules claires
Carcinome épithélial–myoépithélial
Carcinome canalaire salivaire
Carcinome indifférencié à petites cellules
Carcinome myoépithélial
Carcinome lymphoépithélial
Carcinome oncocytaire
Carcinosarcome
Adénome pléomorphe métastasiant
Carcinome sébacé
Lymphadénocarcinome sébacé
Cystadénocarcinome cribriforme de bas grade
Adénocarcinome mucineux
Sialoblastome
Tumeurs épithéliales bénignes
Adénome pléomorphe
Adénome à cellules basales
Tumeur de Warthin
Oncocytome
Adénome canaliculaire
Cystadénome
Myoépithéliome
Adénome sébacé
Lymphadénome sébacé ou non
Papillome canalaire inversé
Papillome intracanalaire
Sialadénome papillifère
Tableau 2 : Classification TNM
AJCC cancer staging 2002 [3]
la tumeur primitive ne peut être évaluée
TX
T0
la tumeur primitive n’est pas décelable
T1
tumeur ≤ 2 cm dans sa plus grande dimension sans extension extraglandulaire
T2
2 cm < T ≤ 4 cm dans sa plus grande dimension sans extension extraglandulaire
T3
T > 4 cm dans ses plus grandes dimensions (T3a) ou avec envahissement extraglandulaire
sans atteinte du nerf facial (T3b)
T4
(T4a) tumeur envahissant la peau, la mandibule, le canal auditif, et/ou le nerf facial
(T4b) tumeur envahissant la base du crâne, de l’apophyse ptérygoïde et/ou de la carotide
N0
pas de métastase ganglionnaire
N1
un seul ganglion métastatique homolatéral de diamètre < 3 cm
N2
un seul ganglion métastatique homolatéral entre 3 et 6 cm, ou plusieurs ganglions.
métastatiques homolatéraux dont aucun n’a un diamètre ≥ 6 cm, ou métastases
ganglionnaires bilatérales ou controlatérales dont aucune n’a un diamètre ≥ 6 cm
N2a
une métastase ganglionnaire unique homolatérale entre 3 et 6 cm
N2b
plusieurs métastases ganglionnaires homolatérales dont le diamètre est < 6 cm
N2c
métastases ganglionnaires bilatérales ou controlatérales dont le diamètre est < 6 cm
N3
métastase ganglionnaire dont le diamètre est ≥ 6 cm
M0
pas de métastase connue
M1
existence de métastase viscérale à distance
Stade
Équivalence TNM
Stade I
T1 N0 M0
Stade II
T2 N0 M0
Stade III
Stade IV
T3 N0 M0
T1N1M0
T2N1M0
IVa : T4a N0 M0 , T4a N1 M0, T1 N2 M0,
T2 N2 M0, T3 N2 M0 et T4a N2 M0
IVb : T4b N0 M0, tous les T avec N3 M0
IV c : tous les M1
Tableau 3 :Système de score de l’AFIP pour les CME hors glande sous maxillaire
(Cancer 1998) [20] / AFIP scoring for mucoepidermoid carcinoma (excluding
submandibular gland tumors)
Composant intrakystique < 20% : 2 points
Invasion nerveuse :
2 points
Nécrose:
3 points
Mitoses > 4 ⁄ 10 chmaps x40 :
3 points
Anaplasie :
4 points
Bas grade :
score 0–4
Intermediaire :
score 5–6
Haut grade :
score > 7
Tableau 4 : Système de score des CME par Brandwein et coll. [21]/ Scoring system by
Brandwein et al.
Composant intra-kystique <25%
Fronts d’invasion par petits îlots cellulaires
Atypies nucléaires marquées
Embols lymphatiques ou vasculaires
Infiltration osseuse
>4 mitoses/10 champs x40
Infiltration périnerveuse
Nécrose
Grade I
Grade II
Grade III
2
2
2
3
3
3
3
3
0
2–3
>4
TUMEURS DES GLANDES SALIVAIRES :
PRINCIPALES ENTITES
Pr Emmanuelle URO-COSTE, CHU Toulouse
Dr Michel WASSEF, AP HP CHU Lariboisiere
AFIAP
22 NOVEMBRE 2014
ADENOME PLEOMORPHE
Données cliniques : Tumeur la plus fréquente : 40 ans, développement lent
L’adénome pléomorphe est la plus fréquente des tumeurs d’origine salivaire, représentant
environ 50% de toutes les tumeurs salivaires. L’âge moyen de survenue se situe autour de 40
ans. C’est une tumeur à développement lent, évoluant à bas bruit pendant quelques années.
Dans la parotide, elle se manifeste par un nodule sous cutané, bien limité, mobile, indolore.
Au niveau des glandes salivaires accessoires, sa découverte est plus précoce, se traduisant par
un nodule peu mobile, refoulant la muqueuse sans l’ulcérer.
Macroscopie : une boule blanche et brillante comme du cartilage
Dans les glandes salivaires principales, le nodule est bien limité, rond ou lobulé, entouré par
une capsule fibreuse d’épaisseur variable. A la coupe, la surface est typiquement blanche et
brillante. Les récidives peuvent être multinodulaires.
Microscopique : les cellules myoépithéliales et les tubes flottent dans une
matrice bleutée.
Typiquement, un adénome pléomorphe est une matrice bleutée chondromyxoide sur laquelle
se disposent des cellules myoépithéliales, isolées ou en amas, et des formations tubulaires
isolées ou au sein d’amas de cellules myoépithéliales. Le point important est qu’il n’y a
aucune délimitation entre les cellules tumorales et le stroma !
2
Lors d’une première intervention dans une glande salivaire principale, la tumeur est un nodule
unique. Le caractère multinodulaire est à signaler dans la conclusion car associé à un risque
de récidive plus élevé.
S’il n’y a aucune formation tubulaire, il s’agit d’un myoépithéliome et non d’un adénome
pléomorphe.
Pièges : ne pas confondre avec une tumeur maligne !
Quand l’adénome pléomorphe est très densément cellulaire, le diagnostic est plus difficile :
- les nombreuses cellules myoépithéliales peuvent former des cylindres hyalins avec un
pattern cylindromateux qui ne doit pas faire porter un diagnostic de carcinome adénoïde
kystique. Ce pattern valide juste la présence de cellules myoépithéliales. Les cellules de
l’adénome pléomorphe gardent des noyaux ronds, alors qu’un carcinome adénoïde kystique
aurait au moins focalement des noyaux anguleux hyperchromatiques et des cytoplasmes
clairs.
- la substance chondromyxoide, élément majeur du diagnostic est très peu abondante : il faut
la chercher par des coupes multiples.
Des foyers de nécrose ischémique (post-traumatique et post-ponction en particulier),
entraînent une métaplasie malpighienne. Quand cette métaplasie atteint la quasi totalité de
l’adénome, elle peut en imposer pour un carcinome épidermoïde , en particulier dans une
forme kystique (évolution kystique de la nécrose centrale). Il faut rechercher minutieusement
des résidus de l’adénome pléomorphe pour éviter ce piège.
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Plus rarement, on observe des adipocytes à l’intérieur du nodule qui ne doivent pas faire
conclure que la tumeur a infiltré le tissu adipeux et qu’elle est maligne.
De rares mucocytes dans un adénome pléomorphe typique ne doivent pas faire porter le
diagnostic de carcinome muco-épidermoïde.
Evolution : la récidive
Les récidives sont fréquentes. Le traitement doit consister en une exérèse chirurgicale
complète (lobectomie superficielle au minimum dans la parotide : pas d’énucléation de la
tumeur).
La transformation carcinomateuse d’un adénome pléomorphe en « carcinome sur adénome
pléomorphe », survient en général sur une tumeur volumineuse connue depuis des années,
avec modification récente (augmentation de volume, apparition de douleurs, paralysie
faciale). Le critère diagnostic le plus objectif est la présence d’une agressivité tumorale
(infiltration de la capsule, du parenchyme glandulaire, infiltration péri-nerveuse). Les autres
critères (mitoses, atypies, densité cellulaire…) conduisent au diagnostic de carcinome sur
adénome pléomorphe quand ils sont nets, mais sont plus subjectifs.
Rarement, une greffe tumorale bénigne survient sur un adénome pléomorphe sans
particularité morphologique et s’accompagne de métastase ganglionnaires et/ou hématogène
pulmonaire de même aspect morphologique que la tumeur initiale, très lentement évolutive,
survenant en général sur une tumeur multi-récidivante.
Pathologie moléculaire des adénomes pléomorphes
Les remaniements chromosomiques impliquant PLAG1 et HMGA2 correspondent à une
signature moléculaire spécifique des adénomes pléomorphes.
- Dans 39 % des cas : réarrangement de PLAG1, un facteur de transcription qui est
dérégulé lors de sa fusion avec un autre chromosome, en général après translocation. Les
gènes partenaires sont le plus souvent les gènes de la E caténine, du Leukemia Inhibitory
Factor (LIFR) ou du facteur de transcription et d’élongation SII.
- Dans 8 % des cas : réarrangement HMGA2 qui code pour une protéine de la chromatine.
Les gènes partenaires sont Fragile Histidine Triad Gene dans la translocation
t(3;12)(p14.2;q145)
et
NFIB
dans
l’insertion
ins(9;12)(p23;q12q15).
Dans les cas de diagnostic difficile, la détection du réarrangement de PLAG1 par FISH est
très utile. Exemple : Au niveau d’une biopsie d’une lésion du palais avec un diagnostic
difficile entre adénocarcinome polymorphe de bas grade de malignité et adénome
pléomorphe, la présence du remaniement PLAG1 permettra de trancher formellement en
faveur de la bénignité et d’orienter vers une geste chirurgical limité
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CARCINOME EX ADENOME PLEOMORPHE
Données cliniques : une tumeur ancienne qui change de comportement
La clinique correspond à une masse évoluant en général depuis plus de trois ans mais dont la
vitesse de croissance s’ accélère brutalement, en présence ou pas d’antécédent d’adénome
pléomorphe. Les modifications récentes peuvent être une augmentation de volume,
l’apparition de douleurs, une paralysie faciale. Le carcinome Ex adénome pléomorphe
s’observe dans 6% des adénomes pléomorphes, chez des patients après 60 ans, et dans 69%
des cas dans la parotide. Il représente 12 % des tumeurs salivaires malignes.
Diagnostic anatomopathologique
Le diagnostic de Carcinome Ex adénome pléomorphe nécessite:
- d’affirmer la présence d’un adénome pléomorphe sous jacent
- de faire le diagnostic de malignité :
- Le critère diagnostique le plus objectif est la présence d’une agressivité tumorale
(infiltration de la capsule, du parenchyme glandulaire, infiltration péri-nerveuse).
- à défaut, on recherche des critères cytologiques : augmentation nette du nombre de
mitose (>3 mitoses/10 champs x40), atypies cytonucléaires marquées, architecture
anarchique ou spécifique d’un type carcinomateux. Dans les formes débutantes le
contingent néoplasique est pratiquement toujours d’origine ductulaire.
Critères histo-pronostiques
a)-Le niveau d’invasion
Il est maintenant clairement montré que les carcinomes développés sur adénome pléomorphe
ont un pronostic radicalement différent selon leur extension:
- Quand les cellules carcinomateuses restent strictement à l’intérieur du nodule d’adénome
pléomorphe, le pronostic est excellent comparable à un carcinome in situ.
- Quand les cellules carcinomateuses ont rompu la capsule de l’adénome pléomorphe et
infiltrent le tissu adjacent, le pronostic est moins favorable, mais il faut distinguer:
- les carcinomes avec invasion minime (invasion hors de la capsule < 1,5 mm) qui
gardent
un
pronostic
favorable,
- les carcinomes invasifs (invasion hors de la capsule entre 1,5 et 8 mm) au pronostic
plus réservé.
- les carcinomes massivement invasifs (invasion hors de la capsule >8 mm) ont un
pronostic constamment péjoratif.
b)-Type du contingent carcinomateux
Dans trois quarts des cas, le contingent carcinomateux des carcinomes ex adénomes
pléomorphes correspond à un adénocarcinome de haut grade. En fait , tous les types tumoraux
peuvent être observés ( Carcinome muco-épidermoïde etc…). Le type et le grade tumoral du
contingent carcinomateux doivent être précisés dans la conclusion car ils participent
également à l’évaluation du pronostic.
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Evolution
Les carcinomes « non invasifs » et « à invasion minime » ont un pronostic proche de celui de
l’adénome pléomorphe. Les carcinomes invasifs sont de mauvais pronostic : 70%
présenteront des métastases pulmonaires, osseuses et cérébrales au cours de leur évolution
avec une survie à 5 ans inférieure à 50 %. Dans une étude, il a également été montré que
100% des patients présentant un carcinome invasif qui infiltre le tissu adjacent au-delà de 8
mm meurent toujours de leur maladie.
Carcinome adénoïde kystique développé sur adénome pléomorphe avec infiltration extra
adénomateuse de 4,24 mm
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ADENOME A CELLULES BASALES
Données cliniques : 58 ans tumeur bénigne parotide ou lèvre supérieure
L’incidence est de 1,5 % de toutes les tumeurs des glandes salivaires et 2,4 % des tumeurs
bénignes dans les séries de l’AFIP. Le site est parotidien dans 75 % des cas et dans la lèvre
supérieure dans 8 % des cas. L’âge moyen au moment du diagnostic est de 58 ans.
Les adénomes à cellules basales de type membraneux surviennent dans 90% chez des
hommes et sont parfois associés à la présence d’une tumeur cutanée annexielle.
Macroscopie : nodule unique parfois kystique
Il s’agit classiquement d’un nodule unique bien limité, non fixé et mesurant moins de 3cm. Il
existe parfois des remaniements kystiques. Le type architectural membraneux est le plus
souvent mal limité et multifocal.
Microscopie : massifs de cellules basaloïdes formant des palissades
La tumeur présente un aspect monomorphe dû à la prédominance de cellules basaloïdes. Ce
sont des petites cellules rondes à noyau rond ou ovale et à cytoplasme pâle et mal limité. Elles
s’organisent en massifs et forment des palissades dans la couche périphérique. Elles peuvent
correspondre soit à de véritables cellules basales soit à des cellules dont le phénotype montre
une différenciation ductale ou myoépithéliale. Le terme basaloïde permet de regrouper ces
différents types cellulaires que l’on ne peut pas facilement distinguer sans
immunohistochimie.
La démarcation entre la prolifération épithéliale et le stroma tumoral est très nette et la tumeur
est dépourvue du tissu chondromyxoïde caractéristique de l’adénome pléomorphe.
Selon l’organisation architecturale prédominante, on distinguera :
- Adénome à cellules basales de type massif
Les cellules peuvent se grouper en massifs, en larges travées plus ou moins anastomotiques,
en nodules de grande taille ou de petite taille (architecture de type insulaire). Le stroma est
collagénique dense.
- Adénome à cellules basales de type trabéculaire ou trabéculo-tubulaire
Les cellules forment de fines travées anastomotiques dans un stroma lâche. Il existe parfois
une différenciation ductale.
- Adénome à cellules basales de type membraneux (dermal analoge tumor)
D’épaisses bandes hyalines PAS+ entourent chaque massif cellulaire ce qui donne à un faible
grossissement un aspect de puzzle. Ces bandes correspondent à une production excessive de
membrane basale. Le matériel hyalin peut également s’observer en situation intercellulaire
sous forme de boules hyalines PAS+ plus ou moins coalescentes. Ces aspects peuvent en
imposer en particulier lors de l’examen extemporané pour un carcinome adénoïde kystique.
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Adénome à cellules basales massif, palissades cellulaires, stroma délimité
Adénome à cellules basales de type membraneux :
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Pièges : le carcinome adénoïde kystique
a)- Carcinome basocellulaire
Si la peau est infiltrée ou très proche de l’adénome à cellules basales, ce dernier peut être
confondu avec un carcinome basocellulaire.
b)- Carcinome adénoïde kystique
La prédominance de cellules basaloïdes dans le carcinome adénoïde kystique de forme
massive, et inversement des aspects focalement cribriformes ou l’accumulation de membranes
basales dans les adénomes à cellules basales peuvent rendre le diagnostic différentiel épineux.
Il faut s’aider des critères suivants :
Adénome à cellules basales
Limitation
Bonne limitation
encapsulation
Infiltration nerveuse
Non
Architecture cribriforme Rare et focale
Anisocaryose
Non
Forme des noyaux
Arrondis
Cellules claires
Non
Métaplasie malpighienne Oui
Nécrose
Rare
Carcinome adénoïde kystique
Infiltration macroscopique et
microscopique
Fréquente
Fréquente
Oui
Anguleux
Oui
Non
Fréquente
c)- Adénocarcinome à cellules basales
Une activité mitotique supérieure à 3 mitoses pour 10 champs à G400 est très suspecte, mais
c’est le caractère infiltrant (atteinte du tissu adipeux, musculaire, cutané ou osseux, infiltration
nerveuse ou vasculaire) qui indique la malignité de cette lésion. L’architecture multinodulaire
n’est pas un critère de malignité.
Evolution
Excepté pour le type membraneux, les récidives sont rarissimes. Une exérèse totale de la
lésion est donc pratiquée d’une manière conservatrice, mais dans la parotide le geste minimal
reste une lobectomie.
Le type membraneux est à individualiser des autres types. Il récidive dans 25 % des cas et
subit une transformation carcinomateuse dans 28 % des cas contre 4 % pour les autres types
architecturaux. Cette transformation correspond le plus souvent à un adénocarcinome à
cellules basales, mais il peut également s’agir d’un autre type tumoral. A noter, l’association
de cette forme d’adénome à cellules basales avec la survenue de tumeurs cutanées.
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TUMEUR DE WARTHIN (CYSTADENOME PAPILLAIRE
AVEC STROMA LYMPHOÏDE)
Données cliniques : 62 ans parotide
La tumeur de Warthin est la tumeur bénigne parotidienne la plus fréquente après l’adénome
pléomorphe. Elle survient préférentiellement chez le fumeur. La tumeur est multicentrique
dans 15% des cas et bilatérale dans 10% des cas.
Macroscopie : il s’écoule un liquide sale !
Il s’agit d’une tumeur de site parotidien. L’âge moyen de survenue est de 62 ans. La tumeur
est bien limitée. A la coupe, il s’écoule une sécrétion mucoïde brunâtre et parfois quelques
débris tissulaires. On observe une ou plusieurs cavités kystiques de taille variable dont la
surface est soulevée par des petits nodules millimétriques qui correspondent aux follicules
lymphoïdes.
Microscopie : papilles oncocytaires bi-couche avec stroma lymphoïde+++
La tumeur de Warthin est un adénome d’architecture papillaire, initialement compact, il va se
kystiser. Les kystes contiennent des sécrétions, des débris cellulaires. Le stroma renferme un
tissu lymphoïde abondant, organisé en follicules. Le terme adénolymphome qui décrivait
précédemment cette tumeur est à bannir (confusion avec une possible malignité). Pour
certains, c’est la tumeur qui entraîne une stroma réaction lymphocytaire, pour d’autres, c’est
une tumeur qui survient sur inclusion parenchymateuse intra-ganglionnaire.
Le revêtement épithélial. Il est composé par deux types cellulaires :
- les cellules cylindriques hautes, les plus externes, ont des noyaux réguliers en
alignement palissadique et un cytoplasme acidophile, granuleux, de type oncocytaire. En
surface, on peut noter une sécrétion apocrine ou un aspect cilié.
- les cellules basales sont triangulaires ou fusiformes avec un axe perpendiculaire à
celui des cellules cylindriques. Le cytoplasme est également granuleux et éosinophile, mais
les limites cytoplasmiques sont floues.
Le stroma. L’axe des papilles correspond le plus souvent à un riche tissu lymphoïde qui
contient des follicules à centre germinatif dans plus de la moitié des cas. La proportion des
éléments épithéliaux et lymphoïdes est variable.
Des remaniements peuvent être observés : métaplasie malpighienne, métaplasie mucoïde,
formation de nodules de cellules oncocytaires…
Diagnostic différentiel
a) le lymphadénome sébacé. C’est une tumeur tout à fait superposable, y compris dans son
étiopathogénie, à la tumeur de Warthin, mais ici les kystes ou les proliférations
épithéliales nodulaires retrouvées dans le tissu lymphoïde présentent au moins focalement
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une différenciation sébacée. Des plages de métaplasie malpighienne, mucoïde ou
oncocytaire peuvent être observées.
b) Le carcinome épidermoïde ou mucoépidermoïde peut poser un problème de diagnostic
différentiel avec les tumeurs de Warthin ayant des remaniements nécrotiques avec de
larges plages de métaplasie malpighienne.
Evolution
La récidive est fréquente mais de nombreux cas correspondent à l’évolution d’un foyer laissé
en place, car la tumeur est souvent multifocale. Les séries rapportent alors un taux de récidive
de 2 %. De rares cas de transformation en carcinomes ont été décrits. Il s’agit habituellement
de carcinomes épidermoïdes, mais des carcinomes muco-épidermoïdes, oncocytaires,
indifférenciés etc…ont été décrits.
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ONCOCYTOME
Données cliniques Tumeur parotidienne rare de la personne âgée
C’est une tumeur rare, environ 1% de toutes les tumeurs des glandes salivaires survenant à 90
% dans la parotide. Les patients atteints ont entre 70 et 80 ans, l’oncocytome étant rare avant
40 ans. Il existe parfois un antécédent de radiothérapie.
Macroscopie : la couleur des oncocytes : chamois (marron orange)
En général il s’agit d’un nodule en moyenne de 3 à 4 cm (entre 1 et 7 cm) bien limité beige à
marron rouge avec possible présence de kystes. Plus rarement, la tumeur est multinodulaire.
Microscopie : des oncocytes, des oncocytes, des oncocytes
Tumeur épithéliale bénigne constituée de façon quasi exclusive par des oncocytes : grandes
cellules à cytoplasme éosinophile granuleux riche en mitochondries anormales en nombre et
en taille (occupant 60 % du cytoplasme).
Les oncocytes sont des cellules polyédriques au cytoplasme éosinophile abondant (la taille
d’un oncocyte est le double d’une cellule acineuse normale), finement granuleux. Les limites
cytoplasmiques sont nettement visibles. On observe un noyau rond à chromatine dispersé et
un nucléole proéminent.
La prolifération tumorale s’organise en massifs compacts organoïdes séparés par de fines
cloisons conjonctivo-vasculaires. Il existe parfois de petites lumières glandulaires au sein des
massifs.
Les oncocytomes à cellules claires prédominantes sont assez fréquents. Il faut alors rechercher
des oncocytes plus conventionnels pour faire le diagnostic d’oncocytome.
12
Diagnostic différentiel
a)- Le problème de la métaplasie oncocytaire
Le diagnostic est le plus souvent facile, les autres tumeurs avec métaplasie oncocytaire
comme l’adénome pléomorphe ou le carcinome mucoépidermoïde ayant des caractéristiques
assez spécifiques.
b)- L’oncocytome à cellules claires
C’est essentiellement l’oncocytome à cellules claires qui posera de réels problèmes de
diagnostic avec les tumeurs à cellules claires
c)- L’oncocytose
L’oncocytome se distingue des nodules de l’oncocytose (prolifération multifocale et parfois
diffuse d’oncocytes) par une plus grande taille, une nette délimitation du parenchyme adjacent
avec souvent une capsule et cliniquement un caractère palpable. La distinction avec
l’oncocytome est parfois subtile mais n’a aucune conséquence clinique !
d)- Le carcinome oncocytaire
Le carcinome oncocytaire est un carcinome qui présente de manière prédominante une
cytologie oncocytaire. La transformation d’un oncocytome en carcinome oncocytaire a été
décrite. Il faut rechercher des critères en particulier architecturaux de malignité (infiltration
périneurale, invasion vasculaire, infiltration de la glande et/ou des structures adjacentes).
Evolution
Tumeur bénigne dont le traitement curatif est l’exérèse chirurgicale complète. Le pourcentage
de récidive va de 0 à 30%. Un traitement chirurgical incomplet est le facteur essentiel de
récidive.
13
CARCINOME MUCO-EPIDERMOÏDE
Données cliniques : N°1 des tumeurs malignes de 9 à 99 ans
Le CME est la tumeur maligne des glandes salivaires la plus fréquente
53 % des CME siègent au niveau des glandes salivaires majeures (GSM), 43 % au niveau des
glandes salivaires accessoires (GSA).
Dans 4 % des cas, le CME se développe au niveau des os maxillaires (mandibule impliquée 4
fois plus fréquemment que le maxillaire supérieur). On parle alors de CME de type central.
Ces tumeurs s’observent à tout âge, avec un pic d’incidence dans la troisième décennie. La
survenue d’un CME au cours des 10 premières années de vie est inhabituelle. Une exposition
antérieure aux radiations ionisantes semble augmenter le risque de survenue du CME. La
durée moyenne des symptômes est de 6 ans pour les tumeurs de faible grade et de 1,5 ans
pour les tumeurs de grade élevé.
Macroscopie : attention aux kystes faussement innocents !
Les CME sont mal limités, en particulier dans les formes de haut grade. De rares cas sont
partiellement encapsulés. A la coupe, ces tumeurs présentent fréquemment des kystes, dont la
taille est très variable (1 à 10 cm). Le contenu des kystes est visqueux, mucoïde, ou sanglant.
Certains CME se présentent comme des kystes uniques.
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Microscopie : Savant mélange de 3 types cellulaires
Le CME est une tumeur épithéliale maligne caractérisée par un mélange en proportions
variables de cellules mucisécrétantes, épidermoïdes et intermédiaires. Des cellules claires,
cylindriques ou oncocytaires sont parfois également observées.
1-Les différents types cellulaires.
- Les cellules intermédiaires prédominent souvent sur les autres types cellulaires. Ce sont
des cellules basophiles, transitionnelles entre la cellule basale de petite taille et la cellule de
plus grande taille polygonale d’aspect épidermoïde. Ces cellules se regroupent pour former
des massifs solides et sont souvent mélangées aux autres types cellulaires.
- Les cellules à mucus (mucicarmin et PAS +) sont cuboïdes ou cylindriques à pôle apical
ouvert (cellules en gobelet). Le cytoplasme est parfois spumeux et abondant. Ces cellules
peuvent border les kystes, former des petits îlots, ou se mêler aux autres types cellulaires.
Elles sont en général peu représentées : moins de 10 % des CME contiennent une majorité de
cellules mucisécrétantes.
- Les cellules épidermoïdes forment des petits massifs solides ou bordent partiellement les
espaces kystiques. Dans la plupart des cas la différentiation épidermoïde est focale. Les foyers
de kératinisation sont très rares et souvent en rapport avec une inflammation. Une importante
kératinisation doit faire discuter un carcinome adénosquameux
- Les cellules claires représentent un contingent variable dans les CME. Il semble exister
focalement une transition entre la cellule épidermoïde et la cellule claire. Ces cellules
contiennent du glycogène et parfois de la mucine.
- Les cellules cylindriques sont peu nombreuses et bordent souvent des kystes ou des
structures canalaires.
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2-L’agencement architectural
Ces types cellulaires prolifèrent en proportion variable selon une architecture kystique ou
solide. Les kystes sont habituellement bordés de cellules mucisécrétantes, intermédiaires ou
épidermoïdes. Les massifs solides sont essentiellement composés de cellules intermédiaires
mélangées à des cellules mucisécrétantes, claires et épidermoïdes.
Parfois il existe un contingent de cellules oncocytaires. Le stroma est abondant, fibro-hyalin.
L’infiltrat inflammatoire peut être majeur sous la forme de follicules lymphoïdes volumineux.
c)-Les formes particulières de CME
1-CME kystique.
Dans les formes à prédominance kystique, l’architecture n’est souvent ni anarchique, ni
destructrice ou infiltrante. Le diagnostic repose alors uniquement sur l’identification de
cellules mucisécrétantes (Bleu Alcian +) au sein de l’épithélium de revêtement du ou des
kystes. En effet, il n’existe pas de lésion bénigne de type adénome mucisécrétant, et la
métaplasie mucisécrétante au niveau des glandes salivaires est rarissime. Pour faciliter le
diagnostic, il faut rechercher une zone charnue qui permettra d’observer des massifs
cellulaires : ces massifs objectivent la présence d’une prolifération tumorale et permettent
d’identifier les 3 types cellulaires correspondant au CME : cellules épidermoïdes, cellules
intermédiaires et cellules mucisécrétantes. Ce type conduit souvent à des faux négatifs en
examen extemporané.
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2-CME oncocytaire
Certains CME ont une morphologie oncocytaire prédominante. Les quelques séries limitées
publiées suggèrent une évolution favorable malgré des critères cytologiques parfois péjoratifs.
Le principal problème apporté par cette variante est sa possible confusion avec un
oncocytome. Il faut donc connaître cette variante oncocytaire de CME et réaliser un Bleu
Alcian qui facilitera l’identification de cellules muci-sécrétantes. L’aspect de cadres clairs
avec des ébauches de desmosomes autour des cellules oncocytaires est également à relever :
les nappes cellulaires prennent un aspect dit en « pavement ». Le CME oncocytaire est
diffusément p63 positif tandis que les lésions oncocytaires montrent un marquage limité aux
cellules en périphérie des nids d'oncocytes.
3-CME sclérosant avec ou sans éosinophilie.
Certains CME ont un stroma sclérosant et/ou inflammatoire très important. De plus, Urano et
coll. ont décrit en 2002, deux cas de « CME sclérosant avec éosinophilie ». Cette entité avait
été décrite dans la thyroïde, comme une évolution très rare des thyroïdites de Hashimoto. Au
niveau des glandes salivaires, il n’est pas encore possible de savoir s’il s’agit d’une simple
variante de CME ou d’une entité physiopathogénique, compte tenu du peu de nombre de cas
rapportés.
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4-CME à cellules claires
Les cellules claires représentent un contingent variable dans les CME. Il semble exister
focalement une transition entre la cellule épidermoïde et la cellule claire. Ces cellules
contiennent du glycogène et parfois de la mucine. Elles peuvent être prédominantes et poser
alors des problèmes de diagnostic différentiel avec d’autres tumeurs qui peuvent comporter
des cellules claires : le carcinome épithélial-myoépithélial, le carcinome à cellules
acineuses, les tumeurs oncocytaires, l’adénocarcinome à cellules claires, le carcinome
rénal métastatique. Ces tumeurs contiennent des cellules claires, mais seules les cellules
claires du CME sont associées à une différentiation épidermoïde et mucisécrétante.
d)- Grade
Les systèmes de grading sont discutés. Le Système de l’AFIP semble toutefois le plus
consensuel. Ce grading ne s’applique pas aux CME de la glande sous-maxillaire qui ont une
évolution en général péjorative. Les tumeurs de la base de la langue et des sinus maxillaires
sont également plus agressives
Système de score de l’AFIP pour les CME hors glande sous maxillaire (Cancer 1998)
Facteurs
Valeur
Contingent kystique < 20 %
2
Invasion périnerveuse
2
Nécrose
3
4 ou plus mitose pour 10 HPF
3
Anaplasie
cellulaire
(pléomorphisme
nucléaire,
n
N/C,
gros
nucléole, 4
hyperchromatisme et anisochromie)
Grade
Faible grade
Grade intermédiaire
Haut grade
Score
0-4
5-6
7 ou plus
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Diagnostic différentiel
a) Adénome pléomorphe (Tumeur mixte) : les cellules intermédiaires du CME quand elles
prolifèrent massivement prennent parfois des aspects morphologiques proches des cellules
myoépithéliales présentes dans une tumeur mixte. Cependant dans les CME, il manque les
zones chondroïdes et myxoïdes et les petits canaux caractéristiques des tumeurs mixtes. Dans
les tumeurs mixtes, on peut observer parfois quelques cellules mucisécrétantes…L’étude
immunohistochimique montrant la présence d’un contingent myo épithélial et une positivité
uniquement tubulaire de l’EMA peut trancher objectivement pour un adénome pléomorphe.
b) Carcinome adéno-squameux
Dans une localisation buccale ou sino-nasale, le diagnostic différentiel entre carcinome
adéno-squameux et CME de haut grade de malignité, doit être systématiquement discuté.
Sethala et coll ont proposé d’utiliser des critères objectifs pour le diagnostic de carcinome
adénosquameux: (i) la présence d’une dysplasie de l’épithélium de surface, (ii) une
kératinisation nette, (iii) un foyer adénocarcinomateux distinct du reste du carcinome (le plus
souvent situé dans la partie profonde de la tumeur).
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Pathologie moléculaire des carcinomes muco-épidermoïdes
Une translocation t(11;19) est retrouvée dans 70% des CME. Elle aboutit à la fusion génique
de MECT1 avec MAML2.
Survie moyenne
Age moyen de survenue
Taille moyenne de la
tumeur
Grades constatés
Translocation MECT1-MAML2
> 10 ans
48 ans
1,8
Bas
grades
intermédiaires
et
Absence de la translocation
1,6 ans
73 ans
3
grade Hauts grades
intermédiaires
et
grades
Les CME de haut grade seraient a priori des tumeurs de novo, avec une carcinogenèse
distincte des CME de bas grade.
Des études plus récentes ont retrouvé des translocations MECT1-MAML2 dans les CME de
haut grade avec évolution péjorative semblant être associées à la présence d’une méthylation
ou d’une délétion de CDKN2A. A l’avenir, la recherche de la fusion MECT1-MAML2 et
d’inactivation de CDKN2A pourrait aider à l’évaluation pronostique et à une stratification
thérapeutique des patients selon ces critères. La recherche de la translocation ou la mise en en
évidence de la protéine de fusion par immunohistochimie aurait des indications pronostiques,
en particulier dans les CME de grade intermédiaire.
Evolution
Le pronostic du CME dépend largement du stade clinique, du grade tumoral et du traitement.
Les tumeurs de faible grade, sont peu métastatiques et récidivent rarement.
Les tumeurs de haut grade métastasient aux ganglions cervicaux et entraînent la mort dans 80
% des cas. Les tumeurs de la glande sous maxillaire, de la base de la langue et des sinus
maxillaires sont plus agressives.
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CARCINOME ADENOÏDE KYSTIQUE
Données cliniques
Cette tumeur s’observe à tout âge avec un pic d’incidence autour de 60 ans. Les sites de
prédilection sont par ordre décroissant : la glande parotide (2 % des tumeurs parotidiennes), la
glande sous-maxillaire (12 % des tumeurs sous-maxillaires), le palais, la langue (8 % des
tumeurs des glandes salivaires accessoires). La fixation à la peau ou aux tissus profonds, une
symptomatologie douloureuse ou une paralysie faciale sont fréquentes dans les tumeurs
volumineuses.
Macroscopie
A la coupe, la tumeur est ferme et blanchâtre, souvent assez bien limitée, non encapsulée.
Microscopie : « massifs en gruyère » et infiltration nerveuse
Le carcinome adénoïde kystique est une tumeur biphasique. La différenciation cellulaire
prédominante est myoépithéliale associée à une différenciation ductulaire focale. Différentes
inflexions architecturales sont associées au sein d’une même tumeur qui est alors classée
selon le type architectural le plus représenté. Le plus fréquent est le type cribriforme, ensuite
viennent le type tubulaire et enfin le type massif. Dans l’agencement cribriforme, on observe
des cylindres hyalins d’où le terme de cylindrome utilisé par le passé pour cette tumeur.
L’utilisation de ce terme n’est plus souhaitable, car il prête à confusion avec la tumeur
bénigne des glandes sudoripares eccrines qui porte le même nom.
21
1) Le type cribriforme correspond à des massifs en “ gruyère “» : les massifs
cellulaires contiennent en effet de petites lacunes arrondies. Il s’agit d’une invagination du
stroma tumoral à l’intérieur des massifs. Ces cavités pseudo-kystiques contiennent un matériel
tantôt éosinophile correspondant à l’accumulation d’une substance type membrane basale,
tantôt basophile constituée par des glycosaminoglycanes.
Les cellules majoritaires ont les caractéristiques de cellules à différenciation myoépithéliale.
Il faut cependant rechercher des noyaux anguleux qui sont quasi spécifiques du carcinome
adénoïde kystique : ces noyaux sont volontiers observés dans des cellules à cytoplasme clair.
La co-expression cytokératine-vimentine et la positivité de l’actine muscle lisse indiquent une
différenciation myoépithéliale. Un marquage avec l’anticorps anti-pS100 est fréquemment
observé. Certaines cellules sont parfois faiblement marquées par l’anti-GFAP.
La différenciation ductulaire est focale, elle s’observe sous forme de lumières de petite
taille (beaucoup plus petites que les pseudo-kystes), entourées par des cellules à cytoplasme
éosinophile et à contour cytoplasmique net. Ces cellules différenciées sont les seules dans la
tumeur à exprime l’ACE et l’EMA et n’expriment pas l’actine, la vimentine ou la protéine S100.
22
2) Dans la forme tubulaire, les mêmes types cellulaires sont présents, mais forment des
îlots de petite taille souvent centrés par un seul pseudo-kyste ou une seule structure ductulaire.
Le stroma est souvent abondant et hyalin. Il peut parfois “ écraser ” les îlots et leur conférer
un aspect plus trabéculaire que tubulaire.
3) La forme massive est quasiment dépourvue de pseudo-kystes et de différenciation
ductulaire. Les cellules sont majoritairement des cellules myoépithéliales basaloïdes. L’index
mitotique peut atteindre 5 mitoses pour 10 champs au fort grossissement (les mitoses sont très
rares dans les autres types architecturaux). C’est la forme de pronostic péjoratif. Il faut
multiplier les prélèvements sur la tumeur pour retrouver des inflexions cribriformes et/ou
tubulaires qui permettront le diagnostic.
L’infiltration périnerveuse est quasi systématiquement présente, mais elle n’est pas
pathognomonique du carcinome adénoïde kystique. L’infiltration des tissus avoisinants est
presque constante. Certaines tumeurs sont toutefois très bien limitées et le diagnostic repose
sur les caractéristiques cytologiques et l’agencement architectural.
Diagnostic différentiel : un cylindre ne fait pas le diagnostic
a) Adénome pléomorphe
Les aspects cylindromateux ne sont pas spécifiques d’un carcinome adénoïde kystique : ils
peuvent tout aussi bien s’observer dans l’adénome pléomorphe, dans les adénomes et
adénocarcinomes à cellules basales. Toutes les cellules de nature myoépithéliale peuvent
synthétiser du matériel de type membrane basale qui va produire cette image de cylindre
hyalin. Les cellules basales/myoépithéliales (petites cellules monomorphes d’aspect
fusiforme, plasmocytoïde etc…) sont assez communes dans les différents types tumoraux des
glandes salivaires. Certains adénomes pléomorphes, pauvres en substance chondro-myxoide
sont ainsi difficiles à distinguer des carcinomes adénoïdes kystiques. En extemporané, il ne
faut donc pas répondre « carcinome adénoïde kystique » devant un simple aspect «
cylindromateux » s’il n’existe pas d’agressivité architecturale patente (infiltration nerveuse,
destruction du parenchyme glandulaire adjacent avec absence de capsule, embols vasculaires)
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b) Le carcinome épithélial-myoépithélial
Il pose réellement un problème de diagnostic dans la forme tubuleuse du carcinome adénoïde
kystique car ce sont les mêmes types cellulaires qui sont représentés avec une disposition
architecturale très proche. Il faut alors rechercher un contingent cribriforme riche en cylindre
qui n’existe que dans le carcinome adénoïde kystique. Les noyaux anguleux sont également
plus marqués dans cette dernière tumeur.
Biologie moléculaire dans les lésions d’aspect cylindromateux.
30 à 50 % des carcinomes adénoïdes kystiques portent une translocation MYB-NFIB qui leur
est totalement spécifique parmi tous les types tumoraux présents dans les glandes salivaires.
La recherche de cette anomalie par FISH peut parfois résoudre des cas de diagnostic
différentiel difficile. En effet, les aspects cylindromateux peuvent s’observer dans toute
prolifération tumorale avec un contingent myoépithélial pouvant par définition synthétiser du
matériel de type membrane basale et engendrer cette image de cylindre hyalin.
Cette difficulté diagnostique est exacerbée sur des petites biopsies et sur des ponctions
cytologiques où l’on ne peut pas visualiser les critères architecturaux. C’est dans ce contexte
qu’une recherche de translocation PLAG1 (présente dans 60% des adénomes pléomorphes)
ou de la translocation MYB-NFIB (présente dans 30% des carcinomes adénoïdes kystiques)
peut être réalisée. En cas de positivité de l’une ou l’autre des ces altérations, le diagnostic est
formellement posé. En cas de négativité, on ne peut en revanche tirer aucune conclusion.
Statistiquement cela permet de résoudre environ la moitié des cas de diagnostic différentiel
difficile entre adénome pléomorphe et carcinome adénoïde kystique.
Evolution initialement favorable…mais évolution inexorable
Le carcinome adénoïde kystique est une tumeur maligne ne donnant des métastases que
tardivement, mais dont la croissance locale est tenace et continue. Les récidives locales
surviennent dans près d’un cas sur deux. Les métastases à distance (poumons, os, tissus mous,
cerveau, foie) sont plus fréquentes que les métastases ganglionnaires. Elles surviennent dans
40 à 60 % des cas, tardivement dans l’histoire de la maladie. Ce qui explique que la survie
soit supérieure à celle des autres carcinomes à l’échéance 5 ans, mais nettement inférieure à
l’échéance 10 ans (10 %).
Les éléments de mauvais pronostic sont :
- le stade tumoral qui est le facteur pronostique le plus puissant,
- un contingent de forme massive représentant plus de 30 % de la tumeur. Ces CAK ont un
pronostic péjoratif et méritent d’être individualisés des formes cribriforme/tubulaire,
- le site tumoral : l’atteinte sous-maxillaire est de mauvais pronostic,
- l’existence d’un envahissement osseux,
- des limites chirurgicales insuffisantes.
Le traitement initial de la tumeur est une exérèse chirurgicale large associée à une
radiothérapie externe.
24
ADENOCARCINOME A CELLULES ACINEUSES
Données cliniques . Tumeur fréquente : gagne à être connue !
L ‘adénocarcinome à cellules acineuse (ACA) représente 6% de toutes les tumeurs salivaires
et 17% des tumeurs malignes.
Il est le troisième carcinome le plus fréquent après le carcinome mucoépidermoïde et
l’adénocarcinome SAI.
L’ACA siège dans 83% des cas au niveau de la parotide, 13% dans les glandes salivaires
accessoires et 4% dans la glande sous maxillaire. L’âge médian est de 40 ans.
Les signes cliniques sont représentés par une masse tumorale de croissante lente. Un tiers des
tumeurs est à l’origine de phénomènes douloureux et 10% de paralysie faciale.
Macroscopie
L’aspect macroscopique de ces tumeurs n’est pas très spécifique : habituellement uniques,
bien limitées, pseudo-encapsulées ; rarement multiples, d’aspect infiltrant, mal limitées.
Microscopie : identifier les cellules acineuses
L’ACA est un carcinome caractérisé par la présence de cellules acineuses contenant des
grains de zymogène intra-cytoplasmiques. La forme typique se caractérise par des nappes de
cellules acineuses, polygonales. Les noyaux sont ronds, le plus souvent excentrés. Les
réactions par le PAS et PAS amylase sont positives. Le pourcentage de ces cellules acineuses
est très variable selon les tumeurs. Les autres types cellulaires présents sont des cellules de
type canalaire, des cellules à vacuoles optiquement vides, des cellules claires.
A ce polymorphisme cellulaire s’associe une grande variété architecturale : microkystique,
massive, kystique et papillaire, folliculaire. La forme folliculaire mime le parenchyme
thyroïdien et ne doit pas en imposer pour la métastase d’un carcinome thyroïdien…
La stroma réaction est souvent lymphocytaire parfois fibro-hyaline.
25
Des suffusions hémorragiques peuvent s’observer ainsi que des dépôts d’hémosidérine entre
ou dans les cellules (cellules tumorales Perls +)
Les cellules sont marquées avec le « pan-kératine » KL1, les anti-ACE, LeuM1. Des
marquages avec les anticorps anti-PS100 et anti-GFAP ont été rapportés. Le marquage avec
l'anticorps anti DOG1 est assez caractéristique lorsqu'il est diffus avec un renforcement
membranaire apical.
Diagnostic différentiel : le MASC
Les tumeurs riches en cellules acineuses posent peu de problèmes diagnostiques. Le
diagnostic différentiel se pose dans les formes « pauvres en grain » ou à cellules claires
prédominantes ( ne pas hésiter à s’aider du PAS avec et sans amylase).
A la fois dans la parotide et dans les glandes salivaires accessoires le principal diagnostic
différentiel est le carcinome des glandes salivaires analogue au carcinome mammaire
sécrétoire (MASC), nouvelle entité caractérisée par la translocation spécifique ETV6. Le
MASC est intensément PS100 positif et mammaglobine positif. Il existe parfois quelques
cellules tumorales ayant un marquage cytoplasmique aberrent de p63. On peut confirmer le
diagnostic par FISH à la recherche de la translocation ETV6.
Evolution
Pendant de nombreuses années ces tumeurs ont été considérées comme des tumeurs à
malignité incertaine, le terme de « tumeur à cellules acineuses » traduisant une évolution
clinique ambiguë tantôt bénigne, tantôt maligne. Elles sont reconnues actuellement (cf.
classification de l’OMS 1991 et 2005) comme étant des adénocarcinomes de faible degré de
malignité.
Le traitement classique consiste en une exérèse chirurgicale large, associée à une
radiothérapie externe en cas de chirurgie insuffisante ou de récidive locale.
26
CARCINOME SECRETOIRE DES GLANDES SALIVAIRES :
Mammary Analog Secretory Carcinoma (MASC)
Données cliniques
Il s'agit d'une tumeur plus fréquente chez l'homme d'age moyen 47 ans ( de 11 à 78 ans).
La majorité des cas sont situés dans la parotide, mais la tumeur est assez fréquente dans les
glandes salivaires accessoires de la cavité orale.
Microscopie : Tumeur caméléon ! Y penser dès que l’on a du mal à
étiqueter une tumeur et demander l’immunohistochimie !
Il s'agit d'une entité récente décrite par Skalova en 2010 qui se caractérise comme son
homologue mammaire par la présence d’une translocation spécifique : t(12 ;15) (p13 ;q25)
ETV6-NTRK3.
La tumeur correspond à une prolifération de cellules assez monomorphes au noyau arrondi à
chromatine vésiculeuse avec des cytoplasmes éosinophiles pâles finement granuleux.
L’architecture est essentiellemnent microkystique ou tubulaire avec accumulation dans les
cavités d'un matériel PAS positif. Des formes kystiques et papillaires sont fréquentes.
Le phénotype est assez caractéristique: PS100+, mammaglobine+, Dog1- . Quelques rares
cellules ont parfois une expression cytoplasmique de p63. La présence de la translocation
spécifique ETV6-NTRK3 vient confirmer le diagnostic.
Diagnostic différentiel :
l’adénocarcinome SAI.
l’adénocarcinome
à
cellules
acineuses
et
Le principal diagnostic différentiel morphologique est représenté par le carcinome à cellules
acineuses pauvres en grains. Cette entité représenterait également plus du tiers des
adénocarcinomes SAI.
Evolution
Les données sont encore limitées pour apprécier l'évolution mais il semble s'agir d'un
carcinome de bas grade.
27
CARCINOME EPITHELIAL MYOEPITHELIAL.
Données cliniques
Il s’agit d’un carcinome de bas degré de malignité rare, environ 1% des tumeurs des glandes
salivaires, prédominant au niveau des glandes salivaires principales, essentiellement la
parotide (80%). Elle survient chez l’adulte entre les 6ème et 8ème décennies avec un pic à 60
ans. Elle se présente habituellement comme une masse intra-parotidienne, s’accompagnant
parfois d’une compression du nerf facial. Sa croissance est lente (quelques mois à quelques
années).
Macroscopie
Lésion de 2 à 3 cm (1 à 12 cm), bien limitée, souvent multinodulaire, ferme et blanchâtre.
Il s’agit souvent d’une formation plurilobulée assez bien limitée, par une capsule fibreuse,
parfois discontinue.
Microscopie : un peu comme un papier peint à motifs répétitifs !
La tumeur est constituée d’une double population cellulaire : des cellules claires
myoépithéliales autour de cellules épithéliales formant de petites lumières glandulaires. Les
cellules myoépithéliales sont habituellement plus nombreuses, munies d’un noyau plus
volumineux et irrégulier. Les mitoses sont rares. Les cordons ou amas cellulaires sont
entourés d’une membrane hyaline soulignée par le PAS. Cette tumeur peut être solide ou
kystique.
L’étude immunohistochimique confirme la double composante cellulaire : les cellules
canalaires sont marquées par les anticorps KL1 et anti-EMA et parfois par l’anticorps antiACE. Les cellules claires périphériques expriment l’actine musculaire lisse, la vimentine, la
protéine S100 et la GFAP d’une manière variable.
28
AE1/AE3
PS100
Diagnostic différentiel : toutes les autres tumeurs à double composante et
toutes les autres tumeurs à cellules claires…
Les autres tumeurs à double composante : adénome pléomorphe, carcinome adénoïde
kystique, adénocarcinome à cellules basales, adénocarcinome polymorphe de bas grade.
Les autres tumeurs à cellules claires : carcinome muco-épidermoïde à cellules claires,
adénocarcinome à cellules acineuses, carcinome sébacé, oncocytome à cellules claires,
carcinome sclérosant à cellules claires, métastase d’un carcinome rénal à cellules claires.
Evolution
Il s’agit d’un carcinome de bas degré de malignité. Les récidives sont fréquentes (30%) avec
une tendance à métastaser au niveau des ganglions lymphatiques parotidiens et cervicaux (18
%). Les métastases à distances sont rares (8%)(poumons, rein, cerveau).
29
ADENOCARCINOME CANALAIRE SALIVAIRE.
Données cliniques : grosse tumeur agressive chez un homme de 60 ans
Il s’agit d’un carcinome de haut degré de malignité. Il siège de façon préférentielle au niveau
de la parotide (80 %), puis des glandes sous-maxillaires (5 %). Il s’observe plus fréquemment
chez l’homme que chez la femme (environ 5/1) avec un pic de fréquence autour de la sixième
décennie. On observe dans 40% des cas une paralysie faciale, dans 20% une douleur et dans
35% une adénopathie cervicale (35 %).
Ce carcinome est rare, représentant de 1 à 3 % des carcinomes des glandes salivaires.
Macroscopie : grosse tumeur nécrotique
Il s’agit d’une tumeur mal limitée, dont la taille varie de 1 à 6 cm, non encapsulée, remaniée
par des plages nécrotiques.
Microscopie : comme un comédocarcinome mammaire
Il mime les aspects d’un carcinome canalaire in situ et/ou infiltrant du sein. Il s’agit d’une
prolifération carcinomateuse infiltrante, d’architecture polymorphe. Elle se dispose sous
forme de petits amas compacts ou de massifs cribriformes ou « comédocarcinoma like ». Les
cellules ont un volumineux cytoplasme éosinophile, un noyau de taille très variable, parfois
monstrueux. L’activité mitotique est importante.
La stroma réaction est fibro-hyaline. Cette prolifération s’accompagne d’infiltrations
périnerveuses.
L’immunohistochimie confirme la nature épithéliale (KL1 +, EMA +, ACE +), mais reste
négative avec la PS100, l’actine muscle lisse. Ce carcinome ne possède pas de récepteurs
hormonaux œstrogène et progestérone mais exprime parfois les récepteurs aux androgènes, et
le PSA…
30
Diagnostic différentiel
a) Le carcinome mucoépidermoïde de haut grade (surtout en examen extemporané) :
présence de cellules mucineuses et épidermoïdes, absence de structure cribriforme ou
papillaire.
b) Le carcinome oncocytaire : cytoplasme abondant, granuleux, pas d’aspect de carcinome
intracanalaire typique, pas de comédonécrose.
c)- La métastase d’un carcinome canalaire du sein. On peut éventuellement s’aider du
profil RE RP du carcinome mammaire initial , de la situation dans un ganglion lymphatique.
Certains massifs de l’adénocarcinome canalaire salivaire sont bordés par une mince couche de
cellules actine musculaire lisse, contrairement à une métastase. C’est parfois la clinique seule
qui tranche.
Les marqueurs des cellules myoépithéliales (ici p63) visualisent focalement une couche de
cellules myoépithéliales résiduelles et aide beaucoup au diagnostic différentiel.
Evolution : très mauvaise
L’adénocarcinome canalaire salivaire est l’un des carcinomes salivaires les plus agressifs.
Le taux de mortalité est élevé, de l’ordre de 77 % à 3 ans. Les récidives locales s’observent
chez 35 à 66 % des patients, les métastases ganglionnaires dans 66 % et les métastases à
distance dans 50 à 70 %. Celles-ci se situent préférentiellement dans le poumon, l’os et le
cerveau. Cette agressivité locale et à distance nécessite l’association thérapeutique d’une
exérèse la plus large possible, d’un évidement ganglionnaire cervical et d’une radiothérapie.
31
ADENOCARCINOME SAI (Sans Autre Indication)
ou NOS (Not Otherwise Specified)
Définition
Ce carcinome présente une différenciation glandulaire ou ductulaire, mais qui ne répond à
aucun critère des tumeurs spécifiques des glandes salivaires. Il s’agit donc d’un diagnostic
d’élimination.
Données cliniques
Ce carcinome représente environ 10 % des tumeurs des glandes salivaires et 18 % des
tumeurs malignes. Il est décrit de 10 à 93 ans avec un âge moyen de 58 ans. Il existe une
légère prédominance féminine.
Diagnostic anatomopathologique
La différenciation glandulaire ou ductulaire permet de distinguer cette tumeur d’un carcinome
indifférencié. Il existe une infiltration nerveuse, vasculaire ou du parenchyme adjacent qui
permet de faire le diagnostic de malignité. Pour le grade, on tient compte des atypies
cytonucléaires, des mitoses et de la différenciation tubulaire.
Diagnostic différentiel
On discutera d’abord les formes indifférenciées des tumeurs spécifiques, puis les métastases
d’un adénocarcinome : thyroïdien, prostatique etc…
Evolution
Elle est corrélée au grade. Parallèlement, les tumeurs de la cavité buccale ont un meilleur
pronostic que celles de la parotide ou de la sous-maxillaire.
En synthèse
1)- Diagnostic d’élimination : à retenir uniquement si aucun critère diagnostique d’une
autre entité n’est présent (éliminer un carcinome secrétoire)
2)- Diagnostic à faire sans culpabilisation. Ce carcinome représente presque 20 % des
tumeurs malignes dans certaines séries.
32
QUELQUES TUMEURS MALIGNES RARES
CARCINOME A CELLULES CLAIRES HYALINISANT
Décrit comme un diagnostic d'élimination dans l'OMS 2005, cette entité est aujourd'hui
rapprochée du carcinome odontogénique à cellules claires avec qui elle partage une histologie
proche et surtout la même anomalie moléculaire (fusion EWSR1-ATF1). Il est constitué d’un
seul type cellulaire (épithélial) tant en histologie qu’en immunohistochimie, même si quelques
plages de cellules à cytoplasme plus éosinophile sont admissibles. Il peut être associé à une
hyalinisation prononcée du stroma. C'est un carcinome de bas grade essentiellement observé
dans les glandes salivaires accessoires.
ADENOCARCINOME SEBACE
L’adénocarcinome sébacé est une tumeur maligne composée de massifs cellulaires ayant des
noyaux atypiques, un caractère infiltrant et une différenciation sébacée.
Une véritable différenciation sébacée est fréquemment associée aux tumeurs de Warthin,
parfois aux adénomes pléomorphes, aux carcinomes mucoépidermoïdes et adénoïdes
kystiques.
CARCINOME ONCOCYTAIRE
Le carcinome oncocytaire est un carcinome qui présente de manière prédominante une
cytologie oncocytaire. Si le caractère oncocytaire n’est pas sûr, l’aspect est dit oncocytoïde et
le diagnostic d’adénocarcinome de type non défini doit être retenu.
Les critères de malignité sont surtout architecturaux : infiltration périneurale, invasion
vasculaire, infiltration de la glande et/ou des structures adjacentes.
33
METASTASES AU NIVEAU DES GLANDES SALIVAIRES
Les métastases représentent 5 à 10% des tumeurs malignes des glandes salivaires.
Elles se développent soit par voie lymphatique soit par voie hématogène.
La parotide renferme de nombreux ganglions lymphatiques intra-parenchymateux qui
constituent autant de sites privilégiés pour les cancers à dissémination lymphatique. Environ
80 % des métastases parotidiennes sont issues de carcinomes ORL. Les mélanomes de la face
donnent fréquemment des métastases ganglionnaires à ce niveau.
Dans la glande sous maxillaire, par contre, les ganglions lymphatiques sont situés en dehors
de la capsule de la glande. Les métastases intra-glandulaires vraies sont plus volontiers
d’origine hématogène. Dans 80% des cas, elles proviennent de tumeurs situées en dehors de la
sphère ORL : carcinomes neuroendocrines à petites cellules pulmonaires, carcinomes rénal,
mammaire…
La sub-linguale et les glandes salivaires accessoires ne sont pas considérées comme des sites
métastatiques. Elles sont plutôt envahies par contiguité dans les cancers bucco-pharyngés et
de la langue.
34
Principaux profils
correspondants
histologiques
et
principaux
types
tumoraux
Profil cylindromateux
Profil épithélial-myoépithélial
Carcinome adénoïde kystique
Carcinome épithélial-myoépithélial
Adénocarcinome polymorphe de bas grade
Adénome pléomorphe
Adénome à cellules basales
Carcinome épidermoïde basaloïde
Carcinome épithélial-myoépithélial
Adénome pléomorphe
Carcinome adénoïde kystique
Adénome à cellules basales, forme tubulaire
Profil à cellules claires
Profil oncocytaire ou oncocytoïde
Myoépithéliome et carcinome myoépithélial
Oncocytome à cellules claires
Adénome et carcinome sébacés
Carcinome muco-épidermoïde
Carcinome à cellules acineuses
Carcinome épithélial-myoépithélial
Carcinome à cellules claires SAI
Métastase d'un carcinome rénal
Oncocytose, hyperpl. oncocytaire nodulaire
Oncocytome et carcinome oncocytaire
Cystadénolymphome
Carcinome muco-épidermoïde
Adénome pléomorphe
Adénome et carcinome myoépithéliaux
Carcinome canalaire salivaire
Profil à cellules basales ou basaloïdes
Profil kystique
Adénome à cellules basales
Adénocarcinome à cellules basales
Carcinome adénoïde kystique
Carcinome à petites cellules
Carcinome épidermoïde basaloïde
Cystadénolymphome (tumeur de Whartin)
Carcinome muco-épidermoïde
Carcinome à cellules acineuses
Adénome à cellules basales
Cystadénome et cystadénocarcinome
Profil papillaire
Cystadénolymphome (tumeur de Whartin)
Carcinome muco-épidermoïde
Carcinome à cellules acineuses
Adénocarcinome polymorphe de bas grade
Cystadénome et cystadénocarcinome
Sialadénome papillifère
Papillomes canalaires
En gras : type(s) tumoral(aux) dans lequel le
profil est le plus typique
35
Et derniers petits « trucs »
Métaplasie malpighienne
Fréquente dans l’adénome et l’adénocarcinome à cellules basales, elle n’est en revanche
généralement pas retrouvée dans les carcinomes adénoïdes kystiques.
Elle est également fréquente après une ponction de la tumeur à l’aiguille.
Accumulation de globules/cylindres hyalins
1) Carcinome adénoïde kystique (2/3 des cas)
2) Adénome à cellules basales
3) Adénome pléomorphe
4) Carcinome épithélial/myoépithélial
5) Adénocarcinome mucineux
6) Adénocarcinome polymorphe de bas grade
:
Stroma Réaction Lymphocytaire
Tumeur de Warthin par définition !
Le carcinome muco-épidermoïde, l’adénocarcinome à cellules acineuses, s’accompagnent
volontiers d’une forte stroma réaction lymphocytaire.
36
BENIN : ARRONDI, CONVEXE
NODULAIRE
CELLLULES RESTANT GROUPEES
MALIN : ANGLES AIGUS,
CONTENDANTS, EBOURIFFES,
PINCE DE CRABE, CELLULES
ISOLEES, TRAVEES INFILTRANTES
Trombinoscope cellulaire
Cellules myoépithéliales fusiformes
Cellules basaloides
Cellules myoépithéliales plasmocytoïdes
Cellules acineuses
Celluels myoépithéliales épithélioödes
Cellules mucosécrétantes
Cellules claires
Oncocytes
LESIONS PARTICULIERES AUX GLANDES SALIVAIRES ACCESSOIRES DE LA
CAVITE BUCCALE
Pr Emmanuelle Uro-Coste, CHU Toulouse
Introduction
La cavité buccale contient 500 à 1000 glandes salivaires accessoires (GSA), mesurant de 1 à 5
mm, disséminées dans toute la muqueuse et drainées chacune par un petit canal excréteur.
Seules la partie antérieure du palais dur et des gencives (jusqu’aux molaires) sont
pratiquement dépourvues de ces petites glandes.
Elles ne sont pas encapsulées et sont bien souvent intriquées au tissu musculaire, ou adipeux.
Cette absence de limitation rendra difficile l’appréciation du caractère infiltrant des tumeurs
survenant sur ces GSA. Certains types de tumeurs des glandes salivaires ont une très nette
prédilection pour la cavité buccale. Des variations morphologiques des GSA, comme la
sialométaplasie peuvent poser des problèmes de diagnostic différentiel avec des entités
malignes et sont à l’origine de difficultés diagnostiques.
Epidémiologie des tumeurs des GSA
Les tumeurs primitives des glandes salivaires concernent majoritairement la parotide, mais au
total les tumeurs des GSA correspondent au quart des tumeurs des glandes salivaires avec
une prédilection pour le palais et la lèvre supérieure (fig. 3).
La proportion de tumeurs malignes parmi les GSA est supérieure à celle des glandes salivaires
principales (environ 40 %) avec une forte variation selon les sites (fig. 4). Dans la langue, le
plancher buccal et la zone rétro molaire, le pourcentage de malignité dépasse 80 % de
malignité.
Les tumeurs malignes des GSA se concentrent autour de trois diagnostics : Carcinome
adénoïde kystique, carcinome mucoépidermoïde et adénocarcinome polymorphe de bas
grade. Les autres diagnostics de malignité observés au niveau des glandes salivaires
principales sont très rares (carcinome sur adénome pléomorphe, adénocarcinome à cellules
basales) ou moins fréquents (carcinome épithélial/myoépithélial, adénocarcinome à cellules
acineuses). Pour les tumeurs bénignes, notons que la tumeur de Warthin n’est pas observée au
niveau des GSA. Certaines entités ont une prédilection voire une spécificité pour les GSA, en
particulier les tumeurs papillaires qui se développent sur les petits canaux collecteurs.
Tumeurs « spécifiques » des glande salivaires accessoires de la cavité buccale
x Adenocarcinome polymorphe de bas grade de malignité
Cette entité se caractérise par :
- sa nature infiltrante : cellules isolées ou petites travées infiltrant le tissu adjacent à la
tumeur, infiltration péri-nerveuse très fréquente.
-
-
un polymorphisme architectural avec des aspects trabéculaires, cribriformes, massifs,
tubulaires, en file indienne ou en cellules isolées. Une architecture papillaire ou kystique
peut également être présente.
certains éléments architecturaux particuliers : formation de courant cellulaire, (toutes les
cellules étant orientées dans la même direction), œil de cyclone (organisation cellulaire en
tourbillon autour d’une structure tubulaire)
- et une cytologie innocente, des noyaux arrondis parfois finement nucléolés qui ont une
morphologie tout à fait superposable au noyau des glandes salivaires normales adjacentes.
Cette entité s’observe quasi exclusivement dans la cavité buccale et dans 60 % des cas au
niveau du palais dur. Il est deux fois plus fréquent chez la femme. L’âge moyen est de 60
ans. Cette tumeur a comme caractéristique une croissance très lente avec une survie
moyenne d’une quinzaine d’années. Des récidives ou des métastases ganglionnaires qui
surviennent respectivement dans 15 % et 10 % des cas peuvent être séparées du premier
diagnostic d’un intervalle libre pouvant atteindre une dizaine d’années. Le traitement est une
exérèse tumorale avec marge saine.
x Adénocarcinome cribriforme de la langue et d’autres sites glandulaires
salivaires accessoires (CATS : Cribriform Adenocarcinoma of the
Tongue and other minor Salivary glands)
Le CATS est le plus souvent localisé au tiers postérieur de la langue avec des métastases
ganglionnaires locales au diagnostic dans 70 % des cas. En revanche, aucune métastase à
distance n’a été décrite et le pronostic est excellent. L’âge moyen est de 54 ans ( cas
rapportés de 5 à 85 ans). Il s’agit d’un tumeur infiltrante formant des lobules séparés par des
septa fibreux. Ces lobules sont constitués par des massifs souvent creusés par de nombreux
microkystes, parfois remplis de mucine. Les noyaux sont souvent clarifiés, chevauchant et
peuvent en imposer pour un carcinome papillaire de la thyroïde mais la thyroglobuline et
TTF1 ne sont pas exprimés. Les mitoses sont rares et l’indice de prolifération MIB1<4%.
x Adénome canaliculaire
Il survient généralement dans la muqueuse buccale et dans 80 % des cas au niveau de la lèvre
supérieure. Seuls quelques cas ont été rapportés dans la parotide. L’aspect architectural
spécifique de l’adénome caniculaire correspond à deux rangées de cellules cylindriques, qui
se séparent puis s’anastomosent périodiquement. On observe typiquement un aspect « en
collier de perles », constituées par des zones arrondies de stroma myxoïde se retrouvant
emprisonnées entre les deux travées cellulaires..
Ce stroma est richement vascularisé par des capillaires. Les noyaux sont réguliers, sans atypie
nucléaire, les images de mitose sont très rares. La prolifération cellulaire forme un nodule
bien délimité, le plus souvent encapsulé Plus rarement, l’adénome canaliculaire est
multifocal avec de multiples foyers microscopiques autour d’un nodule principal. Cet aspect
ne doit pas en imposer pour un carcinome. Le pronostic est excellent avec peu de récidive
après excision locale
x Les papillomes canalaires
Ce groupe de tumeurs bénignes est relativement rare et a une prédilection pour les GSA. Elles
sont plutôt observées chez l’adulte mûr ou âgé, et rarement chez les enfants. Elles
correspondent à des proliférations papillaires développées à partir du système canalaire
excrétoire.
Il en existe trois types :
-
-
-
Le papillome canalaire inversé. Il s’agit d’une masse nodulaire formée par une
prolifération épithéliale endophytique à la jonction entre le canal salivaire excrétoire et la
muqueuse buccale.
Le papillome intracanalaire. Il s’agit d’une dilatation uni-kystique d’un segment de canal
excrétoire qui est partiellement ou totalement occupé par une prolifération papillaire
intraluminale.
Le sialadénome papillifère. Il est caractérisé par un aspect biphasique (fig. 9) : en surface
une prolifération malpighienne papillaire exophytique, et en profondeur des kystes revêtus
par un épithélium cylindrique formant parfois quelques projections papillaires. Des trois
papillomes canalaires, c’est la seule forme qui a tendance à récidiver localement après
exérèse (environ 10 % des cas). Figure ci-dessous.
Glandes salivaires
difficiles
de la
cavité
buccale : les
diagnostics différentiels
x Kystes canalaires et carcinome muco-épidermoïde
Suite à une microlithiase, à un traumatisme ou à une inflammation, les canaux excréteurs ou
les acini peuvent se dilater et former des kystes puis, se rompre. Ils laissent alors échapper un
matériel mucoïde qui se retrouve directement au niveau du tissu musculaire ou adipeux
(mucorragie).
Les carcinomes muco-épidermoïdes fréquents dans la cavité buccale peuvent également
présenter une architecture kystique prédominante et des plages de mucorragie. Ces kystes
sont alors interprétés comme néoplasiques grâce à l’identification d’une prolifération
cellulaire constituée de cellules intermédiaires (cellules de taille moyenne à cytoplasme
éosinophile, ne présentant pas de caractère de différenciation malpighienne), de cellules
mucisécrétantes caliciformes et de cellules malpighiennes. Ces trois composants cellulaires
sont intriqués et forment une combinaison spécifique du carcinome muco-épidermoïde. Ces
kystes tumoraux sont parfois rompus et on peut alors observer une mucorragie.
x Sialométaplasie et carcinome épidermoïde
La métaplasie malpighienne, plus ou moins complète, des canaux et même des lobules
glandulaires (ou sialométaplasie) est un phénomène fréquent. Elle survient le plus souvent
dans un contexte inflammatoire chronique ou post radique.
Les GSA n’étant pas encapsulées mais souvent enchâssées dans le tissu musculaire ou
adipeux, ces massifs malpighiens peuvent en imposer pour un carcinome épidermoïde en
particulier sur des biopsies. Cependant dans la sialométaplasie, l’architecture lobulaire est
respectée avec un aspect arborescent des massifs et il n’existe pas d’atypie nucléaire.
L’activité mitotique reste faible, sans image de mitose anormale. Une forme particulière de
sialométaplasie, la sialométaplasie nécrosante constitue un piège diagnostique encore plus
important car cette lésion se présente comme un ulcère profond à bord net qui tarde à
cicatriser. Cette cicatrisation retardée (entre 3 et 12 semaines) conduit à une suspicion
clinique de malignité. Cette lésion probablement d’origine ischémique correspond à une
nécrose des GSA, située le plus souvent au niveau du palais dur.
Les biopsies concerneront tantôt des lobules salivaires nécrotiques (et le diagnostic de
sialométaplasie nécrosante peut alors être évoqué), tantôt uniquement des massifs
métaplasiques malghiens qui peuvent en imposer pour un carcinome épidermoïde infiltrant et
conduire à une thérapeutique agressive inadaptée. La connaissance de cette entité doit mener à
une corrélation anatomo-clinique pour redresser le diagnostic ou à de nouveaux prélèvements
pour rechercher la persistance de l’architecture lobulaire.
x Adénome pléomorphe/ carcinome de bas grade / plasmocytome
L’adénome pléomorphe de la cavité buccale a pour particularité de ne pas être encapsulé et le
contact des cellules tumorales avec les cellules adipeuses, ou musculaires ne doit pas en
imposer pour un carcinome infiltrant :
La présence d’un monomorphisme cellulaire associé au pattern typique de l’adénome
pléomorphe (cellules fusiformes ou stellaires dans une matrice chondromyxoïde, structures
tubulaires n’apparaissant pas nettement délimitées du stroma) permettra de confirmer ce
diagnostic. Les adénomes pléomorphes de cette région ont souvent un contingent
myoépithélial prédominant, qui prend volontiers un aspect plasmocytoïde :
une confusion avec un plasmocytome est donc possible. Au moindre doute un examen
immunohistochimique permet de redresser le diagnostic.
x Hyperplasie pseudo-épithéliomateuse en regard des glandes salivaires
accessoires/ carcinome épidermoïde verruqueux
En regard d’une tumeur des glandes salivaires accessoires, la muqueuse malpighienne peut
apparaître hyperplasique et pseudo-épithéliomateuse. Sur des biopsies trop superficielles
n’ayant pas concerné la prolifération néoplasique sous-jacente, on pourrait être conduit à un
diagnostic erroné de carcinome épidermoïde, en particulier de type verruqueux. Dans ces cas
une corrélation anatomo-clinique est indispensable pour effectuer des prélèvements plus
profonds. Notons que cette hyperplasie pseudo-épithéliomateuse est décrite dans la cavité
buccale en regard d’assez nombreuses affections tumorales (tumeur à cellules granuleuses,
mélanomes muqueux etc …) ou non tumorales (histoplasmose, tuberculose, etc…ou
inflammation non spécifique). Figure ci-dessous : hyperplasie épithéliale pseudoépithéliomatose en regard d’un améloblastome :
x Organe de Chievitz et infiltration par un carcinome épidermoide
L’organe juxta-oral de Chievitz correspond à une structure de 3 à 4 mm de diamètre sur 2 cm
de long situé sur la face interne de la branche montante de la mandibule. Il est constitué par
des îlots épithéliaux (fig. 17) souvent intriqués à des filets nerveux.
Sa fonction n’est pas déterminée (capteur barométrique?). Il pourrait également correspondre
à une glande salivaire principale abortive. Cet organe peut être biopsié soit par hasard, dans le
cadre de la surveillance d’un carcinome épidermoïde, soit parce qu’une hyperplasie le
transforme en petit nodule sous muqueux. Il peut alors en imposer pour un carcinome
épidermoïde infiltrant (fig. 18), avec des images imitant parfois une infiltration péri-nerveuse.
Cependant le site exact de la biopsie et la connaissance de cette structure permettent d’éviter
ce piège diagnostique. De rares cas d’adénomes développés à partir de l’organe de Chievitz
ont été rapportés avec une manifestation clinique sous forme de nodules parfois volumineux.
Conclusion
L’absence d’encapsulation des GSA et leur intrication au tissu musculaire ou adipeux est la
source des principales difficultés diagnostiques : la mauvaise limitation des adénomes
pléomorphes n’est pas un critère d’agressivité dans la cavité buccale (contrairement aux
glandes salivaires principales), les massifs de sialométaplasie, miment parfois une infiltration
tissulaire par un carcinome épidermoïde.
Certaines tumeurs comme l’adénocarcinome polymorphe de bas grade de malignité, le CATS,
l’adénome canaliculaire et les papillomes intracanalaires ont une très nette prédilection pour
les GSA de la cavité buccale et sont moins connues que les entités tumorales des glandes
salivaires principales.
SELECTION DE LESIONS PARTICULIERES DE L’OREILLE
Michel Wassef, hôpital Lariboisière.
Les lésions des différents compartiments de l'oreille sont variées. Certaines sont fréquentes,
d'autres beaucoup plus rares.
Cette présentation se limitera à une situation fréquente - la présence de lamelles de kératine
dans l'oreille moyenne (principalement la caisse du tympan) - et deux lésions rares mais
intéressantes à connaitre, l'adénome de l'oreille moyenne et l'adénocarcinome papillaire du sac
endolymphatique.
LESIONS AVEC PRESENCE DE KERATINE dans l’oreille moyenne et le rocher :
Plusieurs types de lésions se caractérisent par une accumulation de lamelles de kératine dans
les cavités de l'oreille moyenne ou dans le rocher. La classification et l'histogenèse de ces
lésions restent controversées. On peut distinguer les lésions congénitales, le plus souvent
révélées dans l'enfance et les lésions acquises, apparaissant en général chez des sujets ayant
un passé d'otite chronique.
Lésions congénitales :
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Le cholestéatome de la pointe du rocher : c'est un kyste congénital bordé par un
épithélium malpighien orthokératosique. Il se développe très probablement à partir
d'inclusions embryonnaires qui n'ont cependant pas été objectivées.
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Le cholestéatome congénital de la caisse du tympan : Il se développerait à partir de restes
épithéliaux stratifiés que l'on observe chez l'embryon dans la muqueuse de l'oreille
moyenne et qui disparaîtraient au cours de la première année de vie. Ils forment une lésion
en perle, blanc nacrée, derrière un tympan normal. Ils ont un aspect histologique
semblable au cholestéatome de la pointe du rocher. La rupture du revêtement malpighien
peut mettre les lamelles de kératine au contact des tissus et déterminer une réaction à
corps étranger.
Lésions acquises :
La métaplasie malpighienne de l'épithélium de la caisse : Elle se voit en cas d'otite muqueuse
ouverte (otite chronique avec large perforation tympanique), sous la forme de foyers
blanchâtres, plus ou moins étendus, disséminés sur la muqueuse inflammatoire de la caisse.
Elle ne s'accompagne pas, en général, de réaction à corps étrangers notable, ni a fortiori de
granulome cholestérolique.
Le cholestéatome acquis : Il est fréquent et fait suite à une otite chronique à tympan fermé. Il
est constitué d'une poche formée par un épithélium malpighien très mince, hyperkératosique
avec une couche de cellules granuleuses, reposant sur un mince tissu fibreux banal, ces deux
éléments constituant ensemble la "matrice" du cholestéatome. Il fait suite à une rétraction
localisée du tympan (ou poche de rétraction), à point de départ postéro-supérieur ou attical.
Cette poche s'invagine progressivement dans la caisse du tympan. Les mécanismes normaux
d'élimination des squames cornées étant rendus inopérants par la déformation du tympan, les
lamelles de kératine vont s'accumuler dans la poche qui va augmenter de volume, s'appliquer
contre la muqueuse du fond de caisse puis éroder les osselets et la paroi osseuse du rocher,
probablement par l’intermédiaire des phénomènes inflammatoires qu’elle induit.
Des phénomènes de macération et/ou d'infection peuvent aboutir à la rupture de la matrice et
à la libération de lamelles de kératine qui vont entraîne une réaction à corps étranger. La
libération des graisses membranaires des squames cornées détermine la formation de cristaux
de cholestérol. Ces éléments (squames et cristaux) pérennisent la réaction inflammatoire et la
lyse osseuse.
Les phénomènes d'"invasion" et l'épidermose typmpanique : cet autre mécanisme, plus rare,
peut aboutir à la présence d'un épithélium malpighien sur la face médiale du tympan et à la
desquamation de lamelles cornées dans la caisse du tympan. Cette lésion, pour laquelle le
nom d'épidermose tympanique est proposé, se rencontre en cas de perforation tympanique
bordant le manche du marteau. Un épithélium malpighien est observé sur la face médiale du
tympan, en continuité avec l'épithélium malpighien normal de la face latérale, à travers la
perforation. Il n'est pas possible de déterminer avec certitude s'il s'agit d'une forme
particulière de métaplasie de la face médiale du tympan ou d'un véritable glissement de
l'épithélium malpighien à travers la perforation (théorie de l'invasion). Contrairement à ce que
l'on observe dans les poches de rétractions évoluées et dans le cholestéatome, la structure
fibreuse en double couche du tympan est parfaitement respectée. Cette entité ne s'accompagne
pas de lésion osseuse (rarement de lyse des osselets) ni de granulome cholestérolique.
LES TUMEURS GLANDULAIRES DE L'OREILLE MOYENNE
L’adénome de l’oreille moyenne (adénome amphicrine, adénome neuroendocrine) :
C’est une tumeur glandulaire à différenciation neuroendocrine et souvent exocrine, parfois
focalement mucosécrétante. Elle est mal limitée et son architecture est très polymorphe,
tubulaire, cribriforme, cordonale, en plages, avec souvent des aspects ébranlés ou à cellules
indépendantes. De nombreux cas anciens ont été étiquetés adénocarcinome de bas grade. Les
tumeurs rapportées sous le nom de carcinoïde correspondent à la même entité.
Elle est constituée de deux types cellulaires, en proportions variées, des cellules exocrines
apicales (cellules A) bordant les lumières et exprimant la CK7 et l’EMA et des cellules
basales (B) exprimant des marqueurs neuroendocrine, synaptophysine ou chromogranine,
NSE, polypeptide pancréatique et divers autres peptides et la vimentine souvent au pôle basal.
Une extension intra osseuse peut être observée, sans conséquence sur le pronostic. Après
avoir longtemps été considérée comme un adénocarcinome de bas grade, cette tumeur,
d’évolution clinique bénigne, est actuellement classée dans les adénomes. Un article récent
collige cependant 4 exceptionnels cas avec métastases ganglionnaires très tardives (13 ans en
moyenne et jusqu'à 33 ans). Ceci soulève à nouveau la question de l’existence de rares formes
malignes, mais à malignité très atténuée.
La nomenclature de ces tumeurs est encore susceptible d'évoluer. Pour la prochaine édition de
la classification de l'OMS on s'orienterait vers l'utilisation de "tumeur mixte épithéliale et
neuroendocrine" ou MENET. Adénome amphicrine ou tumeur amphicrine semblerait
cependant plus simple, d'autant que les tumeurs neuroendocrines sont pour la plupart
épithéliales.
Les autres tumeurs glandulaires de l’oreille moyenne : de rares cas d'adénocarcinome
papillaire de faible grade de malignité de l'OM ont été rapportés. Ils sont plus agressifs que
les adénomes. Ils semblent avoir une évolution et une morphologie similaire à celles des
tumeurs du sac endolymphatique. Leur existence en temps que groupe distinct des tumeurs du
sac endolymphatique n’est pas évidente. Des adénocarcinomes de haut grade primitifs sont
également exceptionnellement observés. ils doivent être différenciés des métastases (à l'OM
ou au rocher) d'adénocarcinomes d'autres origines (sein, poumon, estomac, rein, prostate). La
tumeur primitive est en général connue (au moins du clinicien) au moment de l'apparition de
la métastase.
UNE TUMEUR GLANDULAIRE DE L'OREILLE INTERNE
L’adénocarcinome du sac endolymphatique :
Il s’agit d’un adénocarcinome de faible grade de malignité qui se développe à partir du sac
endolymphatique situé à la face postérieure du rocher, sous la dure-mère. Il est en rapport
avec une mutation sporadique ou familiale du gène VHL (sur 3p 25-26) responsable de la
maladie de von Hippel Lindau. Les formes évoluées vont s’étendre d’une part vers le rocher
et l’oreille moyenne et d’autre part vers la fosse postérieure et l’angle ponto-cérébelleux. La
tumeur a une évolution généralement lente et locale et ne donne pas de métastase.
Histologiquement l’aspect est polymorphe avec souvent des papilles anguleuses et des aspects
cribriformes, pseudothyroïdiens. Les cellules sont cubiques ou cubocylindriques, à
cytoplasme parfois clair. Les noyaux sont réguliers. Le stroma est richement vascularisé avec
souvent une condensation sous-épithéliale des capillaires. Les cellules tumorales expriment
les marqueurs épithéliaux, la vimentine, la protéine S-100 et parfois la GFAP. Une métastase
d’un carcinome thyroïdien, rénal ou prostatique pourra être discutée dans le diagnostic
différentiel mais le caractère centré sur la région du sac endolymphatique, en imagerie, est
très caractéristique.
Poche d'un cholestéatome : épithélium
malpighien et mince tissu fibreux
Adénome de l'OM : architecture cordonnale et
tubulaire
Granulome cholestérolique associé à un
cholestéatome rompu
Zone ébranlée, à cellules indépendantes
Aspect en pile d'assiettes
Cellules luminales (A) marquées par CK 7
Adénocarcinome du sac endolymphatique
Cellules claires microvacuolaires
Cellules luminales (A) et non luminales (B)
Chromogranine A
Papilles richement vascularisées
Riche réseau capillaire sous épithélial

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