Méthodes d`enseignement – Stratégies d
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Méthodes d`enseignement – Stratégies d
Méthodes d’enseignement – Stratégies d’enseignement – Moyens d’enseignement Nous allons d’abord distinguer ces trois expressions que, trop souvent, on utilise comme s’il s’agissait d’une même réalité. Si, à la limite, on peut être justifié d’utiliser l’une pour l’autre les expressions « méthodes » et « stratégies » d’enseignement, on ne l’est jamais de parler des moyens d’enseignement comme s’il s’agissait de méthodes ou de stratégies d’enseignement. Il faut bien constater aussi que, dans chacune de ces expressions, on se réfère d’abord et avant tout à l’enseignante et à l’enseignant en tant qu’elle ou qu’il fait un travail d’enseignement et non pas à l’élève en tant qu’il fait un travail d’apprentissage. Une MÉTHODE d’enseignement est une façon d’organiser une activité pédagogique dans le but de faire faire des apprentissages aux élèves. On dira, par exemple, que l’exposé magistral, le travail en équipe, le stage sont des méthodes d’enseignement. Vous comprendrez facilement que, jusqu’à un certain point du moins, « la méthode exclut le caprice, l’improvisation, le hasard* », même si elle peut, voire même qu’elle doit, leur laisser une certaine place. En effet, en classe, il est excessivement rare que tout se passe comme prévu… Une STRATÉGIE d’enseignement est « un ensemble de méthodes harmonieusement agencées selon certains principes* ». Par exemple, l’enseignement individualisé, l’enseignement en grand groupe, l’enseignement par résolution de problèmes constituent des stratégies d’enseignement puisque, dans chacun de ces exemples, on retrouve différentes façons de faire, différentes méthodes susceptibles, lorsque agencées entre elles, de constituer un type d’enseignement cohérent avec l’appellation qu’on lui donne. Un MOYEN d’enseignement est un médium, un intermédiaire utilisé pour venir en aide et, c’est ce qu’il faut souhaiter, pour rendre le plus efficace possible une méthode d’enseignement. Il arrive trop souvent que l’on confonde moyen d’enseignement et méthode d’enseignement. Un document PowerPoint, un montage audiovisuel, un document écrit, un logiciel sont des moyens d’enseignement, ils ne devraient être utilisés que dans la mesure où ils agissent comme des moyens de rendre une méthode plus efficace et non pour s’y substituer. * Citations tirées du Dictionnaire actuel de l’éducation de Renald LEGENDRE, Larousse, Paris – Montréal, 1988, p. 369. Il existe de cet ouvrage une édition plus récente que celle à laquelle je fais référence ici. Comment choisir une méthode d’enseignement? Quand on commence à enseigner, on va au plus pressant et, spontanément, on choisit la méthode ou les méthodes d’enseignement que nos profs ont utilisées pour nous faire apprendre la matière qu’on enseigne. Il n’y a là rien de répréhensible et, quand on commence dans le métier, il n’y a pas lieu d’essayer de tout faire la première fois qu’on donne un cours. Pour qu’un cours atteigne le sommet de sa forme, j’ai toujours pensé qu’il fallait le donner de quatre à cinq fois. Vous verrez vous-mêmes si vous serez ou non un jour en accord avec cela. À ce propos, je ne peux résister à la tentation de vous donner les deux conseils suivants, que j’emprunte à un ouvrage qui peut sûrement vous être utile*. Premier conseil : La conception d’un nouveau cours ne doit pas « consommer » toute l’énergie d’un professeur, celui-ci doit pouvoir continuer de remplir ses autres tâches […] Nous avons trop souvent vu des professeurs s’user à concevoir un nouveau cours – au point d’en affecter leurs autres activités professionnelles et personnelles – pour ne pas rappeler qu’une juste mesure est nécessaire si nous voulons encore éprouver du plaisir à donner un cours qui nous a déjà beaucoup fait travailler sur papier. [p. 3] Deuxième conseil : Pour la première édition d’un nouveau cours, un professeur devrait donc prévoir un design pédagogique plus sûr qu’original, des objectifs plus modestes qu’ambitieux et des ressources plus simples que complexes. Bref, il devrait miser plutôt sur un développement progressif de l’ensemble des aspects du cours que sur la mise au point définitive de tous ces aspects. [p. 4] UN PRÉALABLE INCONTOURNABLE… D’abord et avant tout, afin d’éviter toute déception, être intimement convaincu-e de deux choses : 1. il n’existe pas de méthode qui, en soi, est meilleure qu’une autre ; chaque méthode a ses forces et ses faiblesses ; aucune n’opère de façon miraculeuse ! 2. il n’existe pas de méthode qui soit neutre ; chaque méthode pédagogique véhicule (et transmet) des valeurs. * L’ouvrage dont il s’agit est le suivant : PRÉGENT, Richard, La préparation d’un cours, Montréal, Éditions de l’École Polytechnique, 272 p. Pour vous donner une idée de son contenu, je vous donne, dans l’ordre, le titre de chacun des 9 chapitres : « L’analyse des conditions de la situation d’enseignement » ; « La formulation des objectifs du cours » ; « La planification de l’évaluation des apprentissages » ; « Le choix d’une ou plusieurs méthodes d’enseignement » ; « Le choix des moyens d’enseignement » ; « La planification détaillée du cours » ; « La préparation et la présentation d’un exposé magistral » ; « La formation des étudiants au travail en équipe » ; « L’évaluation de l’enseignement ». TROIS CRITÈRES PRINCIPAUX à considérer pour choisir une méthode d’enseignement ◆ la personnalité de l’enseignante et de l’enseignant Bien des profs auraient évité de « se brûler » si, avant de se lancer dans l’utilisation d’une méthode d’enseignement, ils avaient pris le temps d’autoévaluer leurs capacités, leurs goûts, etc. ; bref, s’ils avaient osé se poser la question et y répondre : « Est-ce que j’ai ce qu’il faut pour utiliser efficacement et agréablement (pour moi et pour mes élèves) telle méthode d’enseignement ? » Qui communique bien en grand groupe n’est pas nécessairement compétent pour animer une petite équipe de travail ou pour faire de la consultation pédagogique individuelle ou pour… ◆ les élèves à qui s’adresse le cours Le problème c’est que, bien sûr, quand on prépare son cours, on ne sait ordinairement pas qui seront ces élèves « chanceux » qui suivront le cours. Dans bien des cas, mais pas toujours, s’il s’agit d’un cours de formation spécifique, il est possible d’obtenir de l’information de collègues sur le type d’élèves qu’on retrouve dans le programme, sur les méthodes d’enseignement qui passent mieux avec eux, etc. Il faut bien avouer aussi que l’expérience de l’enseignement permet des adaptations de dernière minute qu’on ne peut pas réussir quand on commence. Comme quoi l’expérience n’a pas que des inconvénients ! En ce qui concerne les élèves, il faut aussi tenir compte du nombre d’élèves qu’il y aura dans la classe. ◆ les objectifs poursuivis C’est sans doute la dimension sur laquelle, comme prof, on a le plus de prise puisque c’est là une catégorie de facteurs que l’on connaît (ou, en tout cas, qu’on devrait connaître) au moment même de la planification d’un cours. S’il n’y a pas de méthode d’enseignement qui, en soi, est supérieure à une autre, il y en a qui permettent plus que d’autres la réalisation de tel ou de tel objectif. Même si cela semble aller de soi, on ne peut, par exemple, développer chez les élèves la capacité de faire quelque chose, qu’il s’agisse de choses aussi différentes que la confection d’un vêtement, la synthèse de la pensée d’un sociologue, l’habileté à faire une piqûre ou la traversée de la piscine en utilisant le crawl, en employant uniquement, voire principalement, l’exposé magistral ou des démonstrations faites par le prof comme méthodes d’enseignement. Eh non, cela ne va pas aussi de soi que je l’ai dit précédemment… Vous constaterez par vous-mêmes, un de ces jours, qu’on a tous la tendance à croire qu’il suffit de l’avoir dit aux élèves ou, ce qui est déjà mieux, de leur avoir fait la démonstration, pour qu’ils soient capables de le faire. Et, pour terminer, prenez le temps de lire, sur la page suivante, un petit texte savoureux, déjà publié dans Pédagogie collégiale (vol. 7, no 2, décembre 1993, p. 18). Quand vous verrez l’année où il fut écrit, vous serez en droit de vous demander si les choses ont bien changé depuis… Paul Forcier 6 février 2003 Le maître de chapelle S’ils ne sont pas vertueux, faisons-leur un cours de morale. Et, s’ils sont crédules, un cours de pensée. Et s’ils méconnaissent le passé humain, un cours d’histoire. Quand je pense à tous ces cours, où le plus savant travaille tandis que les ignorants ne font rien qu’écouter, je veux imaginer un professeur de violon qui jouerait continuellement du violon devant ses élèves, sans jamais leur mettre en mains l’instrument et l’archet. Or un tel professeur de violon ferait rire. Pareillement ferait rire un maître de peinture qui admettrait ses élèves à l’honneur de le regarder peindre. Toutefois il ne semble point étrange qu’un enfant passe des heures à écouter le maître. On sait bien que c’est en lisant qu’il apprend à lire, et en écrivant, à écrire, et en calculant, à calculer. Mais il faut qu’il écoute la physique au lieu de mesurer, peser, essayer. Il faut qu’il écoute l’astronomie, au lieu de marquer sur les murs d’un couloir les voyages du soleil au cours d’une année. Et qu’il écoute des raisonnements, au lieu d’en faire de son cru. Une fillette qui veut apprendre le piano commence par répéter des centaines de fois les mêmes mouvements, sous la surveillance d’une maîtresse dont la principale vertu est la sévérité. La fillette grandit, et s’élève jusqu’au cours de piano de son quartier, où elle exécute de temps en temps, en dix minutes, un morceau qu’elle a répété pendant huit jours. Quelquefois elle est admise à jouer devant le maître éminent ; c’est pendant un mois, alors, avant ce jour redouté, qu’elle oublie la nourriture et le sommeil pour refaire dans sa tête et sur le clavier la même suite de notes. Sans ces préparations, elle ne peut comprendre ce que le maître éminent daignera lui dire. Après dix ans de cette sévère discipline, elle en est encore aux éléments ; mais enfin elle peut aborder selon ses goûts le Conservatoire, où l’on devient Pourquoi un tel texte dans une revue qui se fait fort d'être à la fine pointe de ce que la pédagogie peut produire de plus actuel ? Sans aucun doute, un brin de concession à la mode rétro… mais aussi l'idée de faire voir à qui le voudra que les enseignements pédagogiques de l'aube du XXI e siècle ne sont pas sans avoir des racines dans les enseignements pédagogiques proclamés à l'aube du XX e. Serait-ce aussi un brin de conscience historique ? Pourquoi pas ; l'histoire fait partie de la formation… Voilà pour ce qui pourrait sembler les « bonnes » raisons ; mais il y a aussi, a-t-on dit, ces raisons du cœur que la raison ignore. C'est également à cette enseigne que loge la décision d'offrir aux lectrices et aux lecteurs ce magnifique petit texte tiré des Propos d'Alain (Paris, Gallimard, © 1956, coll. Bibliothèque de la Pléiade, n° 116, 1990, p. 239-241). Quant à savoir qui était Alain, je laisse à la curiosité de chacune et de chacun d'aller voir, par exemple dans son Petit Robert 2, qui était cet Émile-Auguste Chartier né en 1868 et mort en 1951, professeur de philosophie (notamment à Rouen, comme un autre auteur dont on parle dans le présent numéro), dont ses élèves disaient qu'« il ne s'occupait point de discipline, et [que] la classe était faite d'un silence tendu qui cependant ne nous pesait point » et que « Nombre de ses élèves les plus dévoués ne lui ont jamais ou presque jamais parlé en particulier »… Paul Forcier brillant, la Schola, où l’on devient modeste, ou telle autre école selon ses goûts et selon les moyens de transports. Chacune a ses dieux et ses prêtres ; cependant on retrouve en toutes le travail redoublé, les exercices monotones, les épreuves redoutables et redoutées. Si cette pianiste devient seulement passable, je pourrai lui dire sans risque de me tromper : « Tu sais vouloir. » […] tres feront leurs tours de cartes ou de gobelets devant leurs juges paresseux et ignorants, qu’ils appellent leurs élèves, il ne faut attendre rien de bon. Car le maître, par la nécessité de plaire, ou tout au moins d’étonner, cherche le rare et l’obscur ; et l’élève se contente d’imiter passablement, comme ces spectateurs qui chantonnent en sortant d’un concert. Si l’on savait se mettre à penser, seulement à revoir ses pensées, comme on se met au piano, les maux humains reculeraient. Mais où sont ici les touches ? Où la méthode ? Même les maîtres, sur ce clavier-là, m’ont fait souvent penser à des barbares qui n’ont point appris la musique, qui voudraient l’aimer, et qui jouent d’un seul doigt « Au clair de la lune ». Penser en ordre, et selon les vrais maîtres, c’est, dites-vous, un peu plus difficile que de faire parler ces touches noires et blanches. Plus difficiles ? Je n’en sais rien. Je vous le dirai quand on enseignera la sagesse seulement aussi bien qu’on enseigne le piano ; quand les élèves travailleront ; quand le maître corrigera l’ébauche. Mais tant que les maî- Il faut que la musique soit bien forte ; car l’esprit universitaire a promené aussi par là ses cours d’esthétique et d’histoire de la musique, mais enfin je n’ai pas vu encore que cela détournât d’étudier les gammes et les arpèges ; ni que la mode se soit établie de parler sur une sonate de Beethoven au lieu de la jouer. Méfietoi pourtant, maître de chapelle. J’ai vu de jeunes pianistes, et qui savent pourtant ce que c’est qu’apprendre, venir en foule à des cours du soir, tant il est agréable de s’emplir de science comme une cruche s’emplit d’eau. Elles avaient du papier et des stylographes. Et quand l’orateur ouvrit la bouche pour dire que Beethoven était né en tel lieu et en telle année, les plumes volèrent sur le papier. 25 juin 1921