Chemin de fer

Transcription

Chemin de fer
Chemin de fer
Gare aux pas perdus !
Photo Groupe SNCB
Ce n’est un secret pour
personne : le domaine des
transports est un secteur clé
et incontournable de notre
société. Se déplacer est une
condition sine qua non pour
une participation de chaque
individu à la vie collective :
emploi, études, courses,
loisirs… Les déplacements sont
indispensables.
La problématique des transports revêt
par ce biais un caractère symbolique
et révélateur de l’intégration que fait
notre société des personnes handicapées.
Dans ce dossier, nous nous concentrons sur un axe précis des transports :
les chemins de fer. Points de chute
centraux d’une ville, les gares et
leur environnement proche peuvent être considérés comme des
endroits privilégiés pour juger de
l’accessibilité d’une ville, voire d’un
pays. Toutes ses dimensions peuvent
y être analysées : l’architecture des
bâtiments, l’accès au matériel roulant
ainsi que l’accès à l’information et aux
services proposés. De plus, les gares
s’inscrivent dans un espace dit multimodal, où l’on retrouve des liaisons
avec les bus ou le métro, des zones
piétonnes, des commerces…
L’environnement ferroviaire est donc
un milieu complexe où l’évolution
des technologies côtoie un réseau
implanté de longue date et des bâtiments anciens. Il en résulte que
l’accessibilité est souvent difficile à
mettre en place. Au travers des pages
qui suivent, nous nous interrogeons
dans un premier temps sur la situation
en Belgique. Nous définissons ensuite
les piliers d’une gare accessible en les
illustrant de bonnes pratiques de pays
voisins et proposons des pistes pour
leur mise en œuvre.
Check-up du réseau ferroviaire
belge
Si notre pays s’est longtemps targué
d’être un précurseur en matière de
développement ferroviaire, ce n’est
pas le cas en ce qui concerne l’accessibilité aux personnes à mobilité
réduite (PMR). Alors que, dès 1989,
des avancées significatives sont enregistrées chez nos voisins européens, la
Belgique ne se montre que depuis
aireslibres · Mai 2009 · 7 <<
Les trains n’étant pas de plain-pied
avec le quai, les agents SNCB installent
ponctuellement une rampe afin de permettre
l’embarquement ou le débarquement des
personnes en chaise.
que sporadiquement équipés d’écrans
d’informations, les annonces sonores
sont souvent de mauvaise qualité…
Par ailleurs, la hauteur des quais
n’est pas uniforme d’une gare à l’autre
(trois hauteurs sont d’application en
Belgique) et ne permet pas un accès
de plain-pied aux wagons. La SNCB
utilise alors des rampes mobiles pour
permettre aux personnes en chaise
roulante d’accéder au train mais
celles-ci ne sont présentes que dans
certaines gares et, vu leur inclinaison,
sont impraticables sans assistance.
Cette dernière, bien qu’obligatoirement réservée 24h à l’avance, se
révèle dans les faits peu fiable.
Plusieurs motifs peuvent expliquer,
sans excuser, le retard de la Belgique
en matière d’accessibilité ferroviaire.
Citons-en quelques uns.
Photo Groupe SNCB
Les compétences PMR au
sein de la SNCB1
SNCB-Holding
l’accessibilité aux abords des gares
(en collaboration avec les Villes, la
SRWT…), l’accessibilité aux bâtiment de gare, les cheminements
internes.
Infrabel
les quais (hauteur, revêtement), les
accès aux quais (ascenseurs, escalators, rampes) et les équipements
de quais (abris, lignes guides,
signalétique, …).
SNCB
l’accueil, l’information et la vente
aux guichets (ou via Internet), l’accompagnement des voyageurs et
l’accès aux trains.
>> 8 · aireslibres · Mai 2009
peu sensibilisée à la question. Les
embûches rencontrées par les PMR,
au sens large du terme (voyageurs
avec des bagages, parents avec une
poussette, personnes âgées…), sont
encore très nombreuses.
Tout d’abord, l’architecture de
maintes gares ne simplifie pas les
déplacements des voyageurs à
mobilité réduite : absence d’ascenseurs pour accéder aux quais, guichets vitrés et trop hauts, manque
de repères tactiles et de panneaux
de signalisation pour s’orienter, quais
non sécurisés pour les personnes déficientes visuelles…
L’information dans les gares et
dans les trains mériterait quant à
elle d’être mieux développée. La
signalétique n’est pas suffisamment
claire et uniforme, les trains ne sont
> L’organisation et la structure de
la SNCB sont complexes. Ainsi,
la gestion des chemins de fer est
répartie entre trois entreprises publiques autonomes (SNCB, SNCB Holding et Infrabel) et dépend de deux
ministres fédéraux (celui chargé des
Entreprises Publiques et celui de la
Mobilité). La répartition des tâches
entre ces exploitants est compliquée. Les « compétences PMR » se
retrouvent ainsi parmi les obligations de chacun de ces groupes. Faire
avancer l’accessibilité implique donc
un important travail de concertation.
Cette démarche semble être initiée au
travers des contrats de gestion 20082012 qui relient les trois entreprises
publiques autonomes à l’Etat fédéral.
> L es choix effectués ont un impact
à très long terme. Ainsi, le matériel
roulant et les équipements présents
dans les gares sont utilisés pendant
plusieurs décennies. Nous subissons
donc encore aujourd’hui les consé-
Des aménagements réfléchis pour répondre aux besoins
des personnes handicapées apportent plus de confort et de
sécurité à tous les voyageurs.
quences de décisions prises dans les
années ’80 où les besoins des PMR
n’étaient pas pris en compte. Cette
situation perdurera encore quelques
années, la notion d’accessibilité
n’ayant été intégrée que récemment
(et trop sommairement).
> Au-delà des nouveaux contrats de
gestion, aucune décision politique majeure n’est prise en faveur
de l’accessibilité des gares et des
trains (par exemple, adopter une
loi imposant une accessibilité universelle ou simplement fixer une
hauteur unique de quai au standard
européen et exiger l’aménagement
et le remplacement progressif des
quais et des trains).
Ces différents constats sont regrettables car le manque d’accessibilité du
système ferroviaire belge constitue
un frein important à l’intégration des
PMR. Or, toutes les études montrent
que le pourcentage de PMR, en ce
compris les personnes âgées, est
important et continuera à croître dans
les années à venir. Il y a près de 10
ans, les experts du COST 3352 pointaient déjà dans leur rapport que les
« données font apparaître une importante demande potentielle, dont l’intérêt stratégique est indéniable3 ».
Les changements sont donc inévitables. Il s’agit non seulement d’un
impératif social mais également
d’une opportunité en termes de
marketing et d’économie. En effet,
la population PMR exprime elle aussi
le besoin de se déplacer et constitue
une source potentielle de nouveaux
clients pour le service public. De plus,
des aménagements réfléchis pour
répondre aux besoins des personnes
handicapées apportent plus de confort
et de sécurité à tous les voyageurs :
facilité et rapidité d’embarquement,
orientation et circulation aisées, maîtrise de l’information… L’attractivité
des chemins de fer est alors renforcée
pour tous.
Pour supprimer les entraves rencontrées par les voyageurs, il convient de
prendre en compte toutes les étapes
d’un déplacement en train4 :
> la préparation du voyage (consultation des horaires, évaluation de sa
faisabilité…) ;
> l’accès au réseau ferroviaire (déplacement jusqu’à la gare, accès au
bâtiment…) ;
> l’attente du train (utilisation des
aménagements en gare, vérification des détails du trajet, demande
d’aide en cas de besoin…) ;
> le voyage en train (embarquement,
utilisation des aménagements du
train, suivi de la progression du
voyage, descente au bon arrêt…) ;
> la sortie du réseau ferroviaire (issue
de la gare, intermodalité…) ;
> l’évaluation de l’expérience (fiabilité, confiance…).
La prise en compte de l’ensemble de
cette chaîne de déplacement est indispensable pour améliorer efficacement
l’accessibilité des chemins de fer.
1. Intervention de M. Thirionet au colloque Autonomies (février 2008)
2. COST sont les initiales de COopération européenne dans le domaine de la recherche Scientifique et Technique. Le COST 335 s’est
penché, en 2000, sur l’accessibilité des réseaux ferroviaires aux passagers. Des experts venus de 17 pays européens et de 4
organisations internationales ont produit un rapport complet portant sur l’accessibilité des chemins de fer.
3. COST 335, Accessibilité des réseaux ferroviaires aux passagers, Commission Européenne – Direction Générale des Transports, 2000,
page 17
4. Ibid. p. 26
5. Contrat de gestion SNCB – Titre VI. Accessibilité, Art. 45 Matériel roulant, page 32
Objectifs en matière
d’accessibilité des trois filiales
de la SNCB
Jusqu’il y a peu, les objectifs des trois
filiales SNCB étaient peu précis en
matière d’accessibilité aux personnes à
mobilité réduite. Toutefois, on constate
dans les nouveaux contrats de gestions
de 2008-2012 une évolution importante
dans la définition des objectifs qui sont
plus ambitieux et plus précis :
> Courant 2009, une actualisation
des normes d’accessibilité doit
être réalisée dans le REVALOR (cahier
des charges pour la réalisation d’une
gare accessible). Cette actualisation
doit se faire en concertation avec
des bureaux d’accessibilité et être
soumise à l’avis du Conseil National
Supérieur des Personnes Handicapées.
> Pour 2018, la SNCB-Holding s’engage
à rendre 100 bâtiments de gare
accessibles aux PMR. Le choix de
ces gares doit se faire en concertation avec Infrabel qui doit quant à elle
rendre accessibles les quais de 50 de
ces gares.
> Pour 2028, la SNCB-Holding doit
rendre l’ensemble des bâtiments
de gare accessibles aux PMR.
Infrabel doit elle assurer l’accessibilité des quais de 100 gares, de façon
à former un réseau de gares accessibles dans un rayon de 15 km.
> Pour tout « achat de nouveau matériel
roulant, la SNCB s’engage à prévoir
des équipements spécifiques pour
les PMR, ainsi que pour les déficients
visuels et auditifs5». Des dispositifs
sonores et des écrans d’affichage
seront dorénavant présents dans tout
nouveau train.
Des objectifs intermédiaires sont inscrits dans les contrats de gestion. Ces
derniers prévoient également un suivi
dans la réalisation de ces objectifs.
aireslibres · Mai 2009 · 9 <<
A Gand, des lignes
guides aident les
personnes déficientes
visuelles à s’orienter
dans la gare.
Au Luxembourg, des
bornes d’assistance
sont disponibles sur les
quais.
critères de qualité doivent être respectés. La Conférence Européenne
des Ministres des Transports en a
défini sept6. Les renseignements doivent être :
> clairs c’est-à-dire facilement lisibles
et compréhensibles ;
> concis car les voyageurs n’ont généralement que peu de temps une fois
qu’ils sont en gare ;
> précis et donc vérifiés et mis à jour ;
ACTP
Sur base de cette chaîne, un
voyage en train peut s’évaluer en
cinq points.
Les 5 aiguillages d’un chemin
de fer accessible
Des informations complètes et
correctes
Nous avons tous été un jour inquiet de
la destination d’un train ou de savoir
si nous disposions d’assez de temps
pour attraper une correspondance…
L’absence ou le manque d’information
augmente assurément notre appréhension à circuler. Chaque voyageur
doit pouvoir obtenir les données
nécessaires à son trajet, préalablement et pendant son déplacement. Il
doit savoir où les trouver et elles doivent être faciles à comprendre. Les
moyens de communication utilisés
traditionnellement par les sociétés de
chemins de fer sont peu accessibles
aux PMR. Les informations écrites
sont placées trop haut et ne sont pas
systématiquement doublées voca-
>> 10 · aireslibres · Mai 2009
Photo Groupe SNCB
lement. Inversement, les annonces
vocales ne sont pas automatiquement
interprétées visuellement. Ces doublages sont pourtant essentiels pour
les personnes déficientes visuelles et
pour celles dont l’ouïe est affaiblie.
Nous trouvons toutefois des bonnes
pratiques en la matière à l’étranger.
En Suisse, certaines gares disposent
de bornes « Info » et « SOS » sur les
quais. Les personnes déficientes
visuelles peuvent entrer en contact
avec du personnel et se renseigner
sur les prochains départs, les voies,
les retards et les perturbations éventuelles. Ces bornes seront également
prochainement adaptées aux personnes malentendantes. En France,
la SNCF a le projet de traduire les
annonces vocales en langue des
signes. C’est un personnage virtuel
qui réalisera automatiquement les traductions. On le verra apparaître sur les
écrans disposés dans les gares.
Afin d’optimiser la transmission et
l’assimilation des informations, des
> opportuns soit communiqués en
temps utile (ni trop tôt, ni trop
tard) ;
> répétés afin que les voyageurs puissent assimiler le contenu et agir en
conséquence ;
> cohérents par rapport à la réalité
vécue ;
> classés par ordre de priorité.
Un environnement accessible
Si la gare se situe dans un milieu inaccessible, peu de PMR s’y rendront.
Il faut donc veiller aux abords de la
gare : voiries correctes, trottoirs et
passages pour piétons aménagés et
sécurisés, emplacements de parking
réservés proches, services de bus et
de taxis adaptés à proximité, déposeminute…
Bref, la gare doit s’insérer dans le
réseau structurant7 de la ville.
Une gare entièrement accessible
En gare, toutes les facilités doivent
être proposées aux personnes à mobilité réduite. L’accessibilité architecturale en est l’élément de départ :
présence d’ascenseurs, sièges en suffisance, guichets surbaissés, larges
aires de circulation, WC adaptés,
salles d’attente accessibles… Nous
ne nous attarderons pas sur cet
aspect-là. D’autres points, tout aussi
primordiaux, sont à développer.
Une circulation facile et intuitive
Les visiteurs doivent pouvoir se situer
et s’orienter aisément. L’agencement
de la gare doit être pensé de façon à
faciliter la progression des visiteurs8.
L’organisation des lieux doit donc être
logique : en entrant dans la station,
on doit pouvoir localiser les fonctions
premières du bâtiment (guichets de
vente, accès aux quais…). Les fonctions secondaires (commerces…) ne
peuvent quant à elles empiéter sur
l’espace principal de circulation.
La signalétique d’orientation est également capitale. Elle doit être bien distincte de la publicité. Des panneaux,
clairs, suffisamment grands et placés
aux endroits stratégiques guideront
les voyageurs. Ils seront contrastés
par rapport à leur support et leur
police de caractère sera suffisamment
grande de façon à ce qu’ils soient
visibles et lisibles pour les personnes
malvoyantes.
Des lignes guides naturelles (un mur
contrasté et/ou dans l’alignement de
la circulation…) ou artificielles (des
marquages podotactiles) doivent être
également prévues pour les personnes
déficientes visuelles. Elles peuvent
être éventuellement couplées à des
balises sonores comme à la gare de
l’Est à Paris.
Une circulation sécurisée
Un bon éclairage, en plus de faciliter
l’orientation, augmente la sécurité. Il
doit être uniforme, non éblouissant
et renforcé au niveau des escaliers et
des entrées.
Les obstacles et dangers éventuels
doivent être sécurisés visuellement,
à l’aide de couleurs contrastées, et/
ou tactilement (escaliers, portes
vitrées, éléments en saillie, bords des
quais…).
Un accueil humain
Un accueil humain doit être prévu
dans les gares. Il doit permettre aux
voyageurs de se renseigner sur les
horaires, la localisation des services,
les aménagements spécifiques mis
en place… La communication avec
le personnel doit aussi être possible
pour les personnes malentendantes.
Il convient donc de privilégier les
guichets sans vitre ou si ce n’est pas
possible pour des raisons de sécurité, d’équiper le guichet d’une vitre
non réfléchissante et d’une boucle à
induction magnétique. En France, à la
gare de l’Est (Paris), la SNCF a installé,
en complément à l’accueil humain,
des bornes d’accueil pour les clients
aux différentes entrées du bâtiment.
En actionnant le dispositif, les PMR
peuvent entrer en contact avec du
personnel d’accueil formé. Ces bornes
adaptées à tous types de handicap
permettent de dialoguer via différents
canaux : l’oral, l’écrit et le visuel.
Une utilisation aisée des
équipements interactifs
Les bornes automatiques, de plus
6. COST 335, op.cit. p.. 216-218
7. Un réseau structurant est défini
à partir d’itinéraires continus et
directs qui assurent les principales
liaisons interquartiers et
intercommunales et qui desservent
les établissements scolaires et
les pôles générateurs d’envergure.
http://pagesperso-orange.fr/metza-velo/documents/schemavelo.pdf
8. COST 335, op.cit. p. 127
aireslibres · Mai 2009 · 11 <<
Grâce aux dalles de guidage, cette
personne repère facilement l’entrée
d’une gare bruxelloise.
Photo Groupe SNCB
en plus souvent présentes dans les
gares, permettent d’acheter un titre
de transport sans passer par les guichets à toute heure du jour et de la
nuit. La manipulation des différentes
commandes doit être possible et
aisée pour tous. Les écrans tactiles
sont donc proscrits et les synthèses
vocales utiles. Le choix des billets,
destination, classe... doit pouvoir se
faire facilement.
Du matériel roulant accessible
L’embarquement et le débarquement restent des écueils récurrents
et majeurs pour l’ensemble des personnes à mobilité réduite. L’espace
présent entre le bord du quai et le train
(la lacune), suivi généralement de marches, constitue un obstacle difficilement franchissable pour les personnes
âgées, les enfants, les parents avec
landaus, les voyageurs avec valises…
>> 12 · aireslibres · Mai 2009
Des dalles d’éveil à la vigilance
doivent être placées sur les bords
de chaque quai.
Photo Groupe SNCB
et empêche un accès en autonomie
aux personnes en chaise roulante.
L’accès dans le train devrait idéalement se faire grâce à des wagons de
plain-pied avec les quais. De larges
doubles portes, placées à deux voire
trois endroits par wagon, faciliteraient
également le passage du quai au train
(et inversement).
En Suisse, un tel matériel est utilisé
depuis plusieurs années et présente
de nombreux avantages. L’ensemble
des personnes à mobilité réduite
accède au train de manière autonome
et rapide. Les autres voyageurs profitent d’un confort supplémentaire très
apprécié. Le temps d’embarquement
et de débarquement en est fortement
réduit, la vitesse commerciale du train
est ainsi améliorée.
A défaut de matériel roulant et de
quais adaptés, il convient de mettre
à disposition des personnes en chaise
roulante soit une rampe pratique et
facile à utiliser, soit un élévateur.
Le choix du dispositif d’accès doit
être mûrement réfléchi car de nombreux facteurs entrent en ligne de
compte : largeur du quai, hauteur du
train, temps de manœuvre, fiabilité
du dispositif, sécurité des passagers
mais également du personnel d’assistance…
Une fois à bord du train, la circulation
dans les wagons doit être assurée :
larges couloirs pour accéder aux places
assises et aux toilettes, absence de
marches, etc. Des espaces libres doivent être prévus pour les personnes en
chaise. Les autres personnes à mobilité réduite doivent pouvoir disposer
de sièges qui leur sont prioritairement
réservés. Les bagages et poussettes
doivent pouvoir être entreposés facilement.
A la gare de l’Est (Paris), des bornes d’accueil
ont été placées aux différentes entrées du
bâtiment. Ces dispositifs sont adaptés à tous les
types de handicap.
Dans cette gare anglaise, les bornes
automatiques sont suffisamment basses pour
être facilement utilisées par une personne
en chaise.
Entrée de plain-pied dans un train suisse
(Flirt de Stadler)
ACTP
Les informations essentielles (destination, prochain arrêt, retard éventuel…) doivent aussi être fournies
dans le train de manière visuelle et
auditive.
Du personnel formé et attentif
Même si tout est prévu pour faciliter
le déplacement des voyageurs dans la
gare, il reste nécessaire de proposer
une aide humaine. Cette assistance
doit pouvoir être obtenue en se rendant à un guichet ou en abordant un
membre du personnel. Au-delà de cet
accueil ponctuel, les personnes à mobilité réduite ont souvent besoin d’une
assistance spécifique. Le personnel
ferroviaire doit donc être correctement formé à l’accueil et à l’accompagnement des PMR en gare afin de leur
offrir un service de qualité et d’améliorer leur confiance dans ce moyen de
transport. L’assistance spécifique
doit être possible à chaque étape
du voyage en train. L’idéal serait
que les personnes à mobilité réduite
n’aient pas besoin de réserver cette
assistance à l’avance. C’est peu envisageable si l’accessibilité n’est pas
généralisée sur l’ensemble du réseau
ferroviaire. En Suisse, où l’accessibilité des gares et des trains est prise en
compte depuis de nombreuses années,
le temps de réservation a pu être nettement diminué : dans la plupart des
cas, il est possible de réserver une
assistance jusqu’à une heure avant le
départ du train.
On le voit, la Belgique a encore un
long chemin à parcourir avant de disposer d’un parc roulant et de gares
réellement accessibles. Quelle route
suivre pour y arriver ?
Itinéraire d’un réseau
accessible
Les bonnes pratiques en matière d’accessibilité ferroviaire sont généralement présentes dans des pays où la
concertation entre les associations
représentatives de personnes handicapées et les sociétés de chemins
de fer est instaurée de manière systématique et à long terme. En Suisse,
les chemins de fer fédéraux (CFF) collaborent étroitement pour tous leurs
projets avec le bureau « Personnes
handicapées et transports publics »
depuis 2001. En France, la SNCF a
créé un « Conseil Consultatif des Personnes Handicapées et à Mobilité
Réduite » qui réunit deux fois par an
huit grandes associations nationales
et des responsables de la SNCF. Des
réunions mensuelles sont par ailleurs
prévues pour trois sous-commissions
qui abordent plus en profondeur cer-
aireslibres · Mai 2009 · 13 <<
Plate-forme multimodale pour les
PMR et les vélos en Allemagne
(Autorail Talent de Bombardier)
Un train à ne pas rater
ACTP
tains axes (trains, gares et services,
schéma directeur national d’accessibilité).
Ces échanges permettent de connaître
les besoins et demandes des personnes à mobilité réduite dans l’environnement ferroviaire. Toutefois, afin
de s’assurer que les aménagements
et équipements proposés améliorent
efficacement l’accessibilité, il peut
être utile de passer par une phase
d’expérimentation. C’est notamment la méthode que la SNCF a utilisée en 2006 lors de son opération
« Gare laboratoire de l’accessibilité »
à Paris-Montparnasse. Pendant trois
mois, les PMR ont pu tester plus de 35
dispositifs, telles que des bandes de
guidage au sol et des bornes sonores,
des boucles magnétiques au guichet
et en salle, des écrans TFT, une signalétique en caractères agrandis… Les
résultats de cette expérimentation
ont été récoltés par des enquêteurs
professionnels et la SNCF a pu ainsi
s’assurer de la qualité des dispositifs
proposés. Une démarche similaire est
actuellement en cours avec le « train
laboratoire de l’accessibilité » : un
wagon est installé sur l’esplanade
de la gare de l’Est et les clients sont
invités à tester les différents aménagements jusqu’en juin. La politique
>> 14 · aireslibres · Mai 2009
d’accessibilité de la SNCF est exprimée
très clairement : sa démarche d’accessibilité sera construite, étape par
étape, sur l’écoute et l’échange avec
les personnes handicapées. Comme
l’affirme Marie-Christine Cotin, déléguée à l’accessibilité de la SNCF, « il
faut que chaque euro investi le soit
pour une solution qui facilite réellement la mobilité des personnes handicapées9 ».
Au travers des exemples français et
suisse, nous pouvons constater que
l’amélioration de l’accessibilité passe
par une politique volontariste des
sociétés de chemins de fer. Toutefois,
ces gouvernements ont également
agit en recourant à des législations
contraignantes pour renforcer le
processus de mise en accessibilité.
Plusieurs pays (Royaume-Uni, France,
Suisse, États-Unis…) ont une loi qui
prévoit l’élimination des inégalités
envers les personnes handicapées.
Ces lois prévoient la mise en accessibilité de l’ensemble des infrastructures ferroviaires mais également du
matériel. Des dates butoirs raisonnables y sont fixées pour une mise en
conformité (de 10 à 20 ans en fonction
des pays).
A travers les nouveaux contrats de
gestion, l’accessibilité du système
ferroviaire commence à être prise
en compte en Belgique. Un accès en
autonomie dans les gares et les trains
n’est cependant pas possible du jour
au lendemain. La SNCB doit donc
planifier des étapes pour atteindre
une accessibilité universelle de
son réseau. Il importe de se fixer des
objectifs ambitieux en la matière et
de vérifier régulièrement le bon avancement du processus.
L’achat de matériel roulant inadapté,
la construction de gares inaccessibles
ou encore les rénovations excluant les
PMR ne peuvent plus être acceptés (ni
par les associations représentatives
de personnes handicapées ni par les
autorités publiques).
L’accessibilité doit être abordée
par les sociétés de chemins de fer
de manière globale, c’est-à-dire en
traitant l’ensemble des étapes d’un
voyage et en prenant en compte
toutes les catégories de personnes à
mobilité réduite. La SNCB a tout à y
gagner… En attendant, il convient de
compenser les équipements existants
non accessibles par des mesures
spécifiques, provisoires mais performantes (accompagnement, assistance
ou service alternatif de transport…)
afin de donner à tous les usagers les
mêmes chances de se déplacer et
ainsi de participer à la vie en société.
Marie-Ange Vandecandelaere
Anne-Sophie Marchal
nnn
9. SNCF, Gare laboratoire de l’accessibilité, Dossier de presse du
10 novembre 2006