Chemin de fer
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Chemin de fer Gare aux pas perdus ! Photo Groupe SNCB Ce n’est un secret pour personne : le domaine des transports est un secteur clé et incontournable de notre société. Se déplacer est une condition sine qua non pour une participation de chaque individu à la vie collective : emploi, études, courses, loisirs… Les déplacements sont indispensables. La problématique des transports revêt par ce biais un caractère symbolique et révélateur de l’intégration que fait notre société des personnes handicapées. Dans ce dossier, nous nous concentrons sur un axe précis des transports : les chemins de fer. Points de chute centraux d’une ville, les gares et leur environnement proche peuvent être considérés comme des endroits privilégiés pour juger de l’accessibilité d’une ville, voire d’un pays. Toutes ses dimensions peuvent y être analysées : l’architecture des bâtiments, l’accès au matériel roulant ainsi que l’accès à l’information et aux services proposés. De plus, les gares s’inscrivent dans un espace dit multimodal, où l’on retrouve des liaisons avec les bus ou le métro, des zones piétonnes, des commerces… L’environnement ferroviaire est donc un milieu complexe où l’évolution des technologies côtoie un réseau implanté de longue date et des bâtiments anciens. Il en résulte que l’accessibilité est souvent difficile à mettre en place. Au travers des pages qui suivent, nous nous interrogeons dans un premier temps sur la situation en Belgique. Nous définissons ensuite les piliers d’une gare accessible en les illustrant de bonnes pratiques de pays voisins et proposons des pistes pour leur mise en œuvre. Check-up du réseau ferroviaire belge Si notre pays s’est longtemps targué d’être un précurseur en matière de développement ferroviaire, ce n’est pas le cas en ce qui concerne l’accessibilité aux personnes à mobilité réduite (PMR). Alors que, dès 1989, des avancées significatives sont enregistrées chez nos voisins européens, la Belgique ne se montre que depuis aireslibres · Mai 2009 · 7 << Les trains n’étant pas de plain-pied avec le quai, les agents SNCB installent ponctuellement une rampe afin de permettre l’embarquement ou le débarquement des personnes en chaise. que sporadiquement équipés d’écrans d’informations, les annonces sonores sont souvent de mauvaise qualité… Par ailleurs, la hauteur des quais n’est pas uniforme d’une gare à l’autre (trois hauteurs sont d’application en Belgique) et ne permet pas un accès de plain-pied aux wagons. La SNCB utilise alors des rampes mobiles pour permettre aux personnes en chaise roulante d’accéder au train mais celles-ci ne sont présentes que dans certaines gares et, vu leur inclinaison, sont impraticables sans assistance. Cette dernière, bien qu’obligatoirement réservée 24h à l’avance, se révèle dans les faits peu fiable. Plusieurs motifs peuvent expliquer, sans excuser, le retard de la Belgique en matière d’accessibilité ferroviaire. Citons-en quelques uns. Photo Groupe SNCB Les compétences PMR au sein de la SNCB1 SNCB-Holding l’accessibilité aux abords des gares (en collaboration avec les Villes, la SRWT…), l’accessibilité aux bâtiment de gare, les cheminements internes. Infrabel les quais (hauteur, revêtement), les accès aux quais (ascenseurs, escalators, rampes) et les équipements de quais (abris, lignes guides, signalétique, …). SNCB l’accueil, l’information et la vente aux guichets (ou via Internet), l’accompagnement des voyageurs et l’accès aux trains. >> 8 · aireslibres · Mai 2009 peu sensibilisée à la question. Les embûches rencontrées par les PMR, au sens large du terme (voyageurs avec des bagages, parents avec une poussette, personnes âgées…), sont encore très nombreuses. Tout d’abord, l’architecture de maintes gares ne simplifie pas les déplacements des voyageurs à mobilité réduite : absence d’ascenseurs pour accéder aux quais, guichets vitrés et trop hauts, manque de repères tactiles et de panneaux de signalisation pour s’orienter, quais non sécurisés pour les personnes déficientes visuelles… L’information dans les gares et dans les trains mériterait quant à elle d’être mieux développée. La signalétique n’est pas suffisamment claire et uniforme, les trains ne sont > L’organisation et la structure de la SNCB sont complexes. Ainsi, la gestion des chemins de fer est répartie entre trois entreprises publiques autonomes (SNCB, SNCB Holding et Infrabel) et dépend de deux ministres fédéraux (celui chargé des Entreprises Publiques et celui de la Mobilité). La répartition des tâches entre ces exploitants est compliquée. Les « compétences PMR » se retrouvent ainsi parmi les obligations de chacun de ces groupes. Faire avancer l’accessibilité implique donc un important travail de concertation. Cette démarche semble être initiée au travers des contrats de gestion 20082012 qui relient les trois entreprises publiques autonomes à l’Etat fédéral. > L es choix effectués ont un impact à très long terme. Ainsi, le matériel roulant et les équipements présents dans les gares sont utilisés pendant plusieurs décennies. Nous subissons donc encore aujourd’hui les consé- Des aménagements réfléchis pour répondre aux besoins des personnes handicapées apportent plus de confort et de sécurité à tous les voyageurs. quences de décisions prises dans les années ’80 où les besoins des PMR n’étaient pas pris en compte. Cette situation perdurera encore quelques années, la notion d’accessibilité n’ayant été intégrée que récemment (et trop sommairement). > Au-delà des nouveaux contrats de gestion, aucune décision politique majeure n’est prise en faveur de l’accessibilité des gares et des trains (par exemple, adopter une loi imposant une accessibilité universelle ou simplement fixer une hauteur unique de quai au standard européen et exiger l’aménagement et le remplacement progressif des quais et des trains). Ces différents constats sont regrettables car le manque d’accessibilité du système ferroviaire belge constitue un frein important à l’intégration des PMR. Or, toutes les études montrent que le pourcentage de PMR, en ce compris les personnes âgées, est important et continuera à croître dans les années à venir. Il y a près de 10 ans, les experts du COST 3352 pointaient déjà dans leur rapport que les « données font apparaître une importante demande potentielle, dont l’intérêt stratégique est indéniable3 ». Les changements sont donc inévitables. Il s’agit non seulement d’un impératif social mais également d’une opportunité en termes de marketing et d’économie. En effet, la population PMR exprime elle aussi le besoin de se déplacer et constitue une source potentielle de nouveaux clients pour le service public. De plus, des aménagements réfléchis pour répondre aux besoins des personnes handicapées apportent plus de confort et de sécurité à tous les voyageurs : facilité et rapidité d’embarquement, orientation et circulation aisées, maîtrise de l’information… L’attractivité des chemins de fer est alors renforcée pour tous. Pour supprimer les entraves rencontrées par les voyageurs, il convient de prendre en compte toutes les étapes d’un déplacement en train4 : > la préparation du voyage (consultation des horaires, évaluation de sa faisabilité…) ; > l’accès au réseau ferroviaire (déplacement jusqu’à la gare, accès au bâtiment…) ; > l’attente du train (utilisation des aménagements en gare, vérification des détails du trajet, demande d’aide en cas de besoin…) ; > le voyage en train (embarquement, utilisation des aménagements du train, suivi de la progression du voyage, descente au bon arrêt…) ; > la sortie du réseau ferroviaire (issue de la gare, intermodalité…) ; > l’évaluation de l’expérience (fiabilité, confiance…). La prise en compte de l’ensemble de cette chaîne de déplacement est indispensable pour améliorer efficacement l’accessibilité des chemins de fer. 1. Intervention de M. Thirionet au colloque Autonomies (février 2008) 2. COST sont les initiales de COopération européenne dans le domaine de la recherche Scientifique et Technique. Le COST 335 s’est penché, en 2000, sur l’accessibilité des réseaux ferroviaires aux passagers. Des experts venus de 17 pays européens et de 4 organisations internationales ont produit un rapport complet portant sur l’accessibilité des chemins de fer. 3. COST 335, Accessibilité des réseaux ferroviaires aux passagers, Commission Européenne – Direction Générale des Transports, 2000, page 17 4. Ibid. p. 26 5. Contrat de gestion SNCB – Titre VI. Accessibilité, Art. 45 Matériel roulant, page 32 Objectifs en matière d’accessibilité des trois filiales de la SNCB Jusqu’il y a peu, les objectifs des trois filiales SNCB étaient peu précis en matière d’accessibilité aux personnes à mobilité réduite. Toutefois, on constate dans les nouveaux contrats de gestions de 2008-2012 une évolution importante dans la définition des objectifs qui sont plus ambitieux et plus précis : > Courant 2009, une actualisation des normes d’accessibilité doit être réalisée dans le REVALOR (cahier des charges pour la réalisation d’une gare accessible). Cette actualisation doit se faire en concertation avec des bureaux d’accessibilité et être soumise à l’avis du Conseil National Supérieur des Personnes Handicapées. > Pour 2018, la SNCB-Holding s’engage à rendre 100 bâtiments de gare accessibles aux PMR. Le choix de ces gares doit se faire en concertation avec Infrabel qui doit quant à elle rendre accessibles les quais de 50 de ces gares. > Pour 2028, la SNCB-Holding doit rendre l’ensemble des bâtiments de gare accessibles aux PMR. Infrabel doit elle assurer l’accessibilité des quais de 100 gares, de façon à former un réseau de gares accessibles dans un rayon de 15 km. > Pour tout « achat de nouveau matériel roulant, la SNCB s’engage à prévoir des équipements spécifiques pour les PMR, ainsi que pour les déficients visuels et auditifs5». Des dispositifs sonores et des écrans d’affichage seront dorénavant présents dans tout nouveau train. Des objectifs intermédiaires sont inscrits dans les contrats de gestion. Ces derniers prévoient également un suivi dans la réalisation de ces objectifs. aireslibres · Mai 2009 · 9 << A Gand, des lignes guides aident les personnes déficientes visuelles à s’orienter dans la gare. Au Luxembourg, des bornes d’assistance sont disponibles sur les quais. critères de qualité doivent être respectés. La Conférence Européenne des Ministres des Transports en a défini sept6. Les renseignements doivent être : > clairs c’est-à-dire facilement lisibles et compréhensibles ; > concis car les voyageurs n’ont généralement que peu de temps une fois qu’ils sont en gare ; > précis et donc vérifiés et mis à jour ; ACTP Sur base de cette chaîne, un voyage en train peut s’évaluer en cinq points. Les 5 aiguillages d’un chemin de fer accessible Des informations complètes et correctes Nous avons tous été un jour inquiet de la destination d’un train ou de savoir si nous disposions d’assez de temps pour attraper une correspondance… L’absence ou le manque d’information augmente assurément notre appréhension à circuler. Chaque voyageur doit pouvoir obtenir les données nécessaires à son trajet, préalablement et pendant son déplacement. Il doit savoir où les trouver et elles doivent être faciles à comprendre. Les moyens de communication utilisés traditionnellement par les sociétés de chemins de fer sont peu accessibles aux PMR. Les informations écrites sont placées trop haut et ne sont pas systématiquement doublées voca- >> 10 · aireslibres · Mai 2009 Photo Groupe SNCB lement. Inversement, les annonces vocales ne sont pas automatiquement interprétées visuellement. Ces doublages sont pourtant essentiels pour les personnes déficientes visuelles et pour celles dont l’ouïe est affaiblie. Nous trouvons toutefois des bonnes pratiques en la matière à l’étranger. En Suisse, certaines gares disposent de bornes « Info » et « SOS » sur les quais. Les personnes déficientes visuelles peuvent entrer en contact avec du personnel et se renseigner sur les prochains départs, les voies, les retards et les perturbations éventuelles. Ces bornes seront également prochainement adaptées aux personnes malentendantes. En France, la SNCF a le projet de traduire les annonces vocales en langue des signes. C’est un personnage virtuel qui réalisera automatiquement les traductions. On le verra apparaître sur les écrans disposés dans les gares. Afin d’optimiser la transmission et l’assimilation des informations, des > opportuns soit communiqués en temps utile (ni trop tôt, ni trop tard) ; > répétés afin que les voyageurs puissent assimiler le contenu et agir en conséquence ; > cohérents par rapport à la réalité vécue ; > classés par ordre de priorité. Un environnement accessible Si la gare se situe dans un milieu inaccessible, peu de PMR s’y rendront. Il faut donc veiller aux abords de la gare : voiries correctes, trottoirs et passages pour piétons aménagés et sécurisés, emplacements de parking réservés proches, services de bus et de taxis adaptés à proximité, déposeminute… Bref, la gare doit s’insérer dans le réseau structurant7 de la ville. Une gare entièrement accessible En gare, toutes les facilités doivent être proposées aux personnes à mobilité réduite. L’accessibilité architecturale en est l’élément de départ : présence d’ascenseurs, sièges en suffisance, guichets surbaissés, larges aires de circulation, WC adaptés, salles d’attente accessibles… Nous ne nous attarderons pas sur cet aspect-là. D’autres points, tout aussi primordiaux, sont à développer. Une circulation facile et intuitive Les visiteurs doivent pouvoir se situer et s’orienter aisément. L’agencement de la gare doit être pensé de façon à faciliter la progression des visiteurs8. L’organisation des lieux doit donc être logique : en entrant dans la station, on doit pouvoir localiser les fonctions premières du bâtiment (guichets de vente, accès aux quais…). Les fonctions secondaires (commerces…) ne peuvent quant à elles empiéter sur l’espace principal de circulation. La signalétique d’orientation est également capitale. Elle doit être bien distincte de la publicité. Des panneaux, clairs, suffisamment grands et placés aux endroits stratégiques guideront les voyageurs. Ils seront contrastés par rapport à leur support et leur police de caractère sera suffisamment grande de façon à ce qu’ils soient visibles et lisibles pour les personnes malvoyantes. Des lignes guides naturelles (un mur contrasté et/ou dans l’alignement de la circulation…) ou artificielles (des marquages podotactiles) doivent être également prévues pour les personnes déficientes visuelles. Elles peuvent être éventuellement couplées à des balises sonores comme à la gare de l’Est à Paris. Une circulation sécurisée Un bon éclairage, en plus de faciliter l’orientation, augmente la sécurité. Il doit être uniforme, non éblouissant et renforcé au niveau des escaliers et des entrées. Les obstacles et dangers éventuels doivent être sécurisés visuellement, à l’aide de couleurs contrastées, et/ ou tactilement (escaliers, portes vitrées, éléments en saillie, bords des quais…). Un accueil humain Un accueil humain doit être prévu dans les gares. Il doit permettre aux voyageurs de se renseigner sur les horaires, la localisation des services, les aménagements spécifiques mis en place… La communication avec le personnel doit aussi être possible pour les personnes malentendantes. Il convient donc de privilégier les guichets sans vitre ou si ce n’est pas possible pour des raisons de sécurité, d’équiper le guichet d’une vitre non réfléchissante et d’une boucle à induction magnétique. En France, à la gare de l’Est (Paris), la SNCF a installé, en complément à l’accueil humain, des bornes d’accueil pour les clients aux différentes entrées du bâtiment. En actionnant le dispositif, les PMR peuvent entrer en contact avec du personnel d’accueil formé. Ces bornes adaptées à tous types de handicap permettent de dialoguer via différents canaux : l’oral, l’écrit et le visuel. Une utilisation aisée des équipements interactifs Les bornes automatiques, de plus 6. COST 335, op.cit. p.. 216-218 7. Un réseau structurant est défini à partir d’itinéraires continus et directs qui assurent les principales liaisons interquartiers et intercommunales et qui desservent les établissements scolaires et les pôles générateurs d’envergure. http://pagesperso-orange.fr/metza-velo/documents/schemavelo.pdf 8. COST 335, op.cit. p. 127 aireslibres · Mai 2009 · 11 << Grâce aux dalles de guidage, cette personne repère facilement l’entrée d’une gare bruxelloise. Photo Groupe SNCB en plus souvent présentes dans les gares, permettent d’acheter un titre de transport sans passer par les guichets à toute heure du jour et de la nuit. La manipulation des différentes commandes doit être possible et aisée pour tous. Les écrans tactiles sont donc proscrits et les synthèses vocales utiles. Le choix des billets, destination, classe... doit pouvoir se faire facilement. Du matériel roulant accessible L’embarquement et le débarquement restent des écueils récurrents et majeurs pour l’ensemble des personnes à mobilité réduite. L’espace présent entre le bord du quai et le train (la lacune), suivi généralement de marches, constitue un obstacle difficilement franchissable pour les personnes âgées, les enfants, les parents avec landaus, les voyageurs avec valises… >> 12 · aireslibres · Mai 2009 Des dalles d’éveil à la vigilance doivent être placées sur les bords de chaque quai. Photo Groupe SNCB et empêche un accès en autonomie aux personnes en chaise roulante. L’accès dans le train devrait idéalement se faire grâce à des wagons de plain-pied avec les quais. De larges doubles portes, placées à deux voire trois endroits par wagon, faciliteraient également le passage du quai au train (et inversement). En Suisse, un tel matériel est utilisé depuis plusieurs années et présente de nombreux avantages. L’ensemble des personnes à mobilité réduite accède au train de manière autonome et rapide. Les autres voyageurs profitent d’un confort supplémentaire très apprécié. Le temps d’embarquement et de débarquement en est fortement réduit, la vitesse commerciale du train est ainsi améliorée. A défaut de matériel roulant et de quais adaptés, il convient de mettre à disposition des personnes en chaise roulante soit une rampe pratique et facile à utiliser, soit un élévateur. Le choix du dispositif d’accès doit être mûrement réfléchi car de nombreux facteurs entrent en ligne de compte : largeur du quai, hauteur du train, temps de manœuvre, fiabilité du dispositif, sécurité des passagers mais également du personnel d’assistance… Une fois à bord du train, la circulation dans les wagons doit être assurée : larges couloirs pour accéder aux places assises et aux toilettes, absence de marches, etc. Des espaces libres doivent être prévus pour les personnes en chaise. Les autres personnes à mobilité réduite doivent pouvoir disposer de sièges qui leur sont prioritairement réservés. Les bagages et poussettes doivent pouvoir être entreposés facilement. A la gare de l’Est (Paris), des bornes d’accueil ont été placées aux différentes entrées du bâtiment. Ces dispositifs sont adaptés à tous les types de handicap. Dans cette gare anglaise, les bornes automatiques sont suffisamment basses pour être facilement utilisées par une personne en chaise. Entrée de plain-pied dans un train suisse (Flirt de Stadler) ACTP Les informations essentielles (destination, prochain arrêt, retard éventuel…) doivent aussi être fournies dans le train de manière visuelle et auditive. Du personnel formé et attentif Même si tout est prévu pour faciliter le déplacement des voyageurs dans la gare, il reste nécessaire de proposer une aide humaine. Cette assistance doit pouvoir être obtenue en se rendant à un guichet ou en abordant un membre du personnel. Au-delà de cet accueil ponctuel, les personnes à mobilité réduite ont souvent besoin d’une assistance spécifique. Le personnel ferroviaire doit donc être correctement formé à l’accueil et à l’accompagnement des PMR en gare afin de leur offrir un service de qualité et d’améliorer leur confiance dans ce moyen de transport. L’assistance spécifique doit être possible à chaque étape du voyage en train. L’idéal serait que les personnes à mobilité réduite n’aient pas besoin de réserver cette assistance à l’avance. C’est peu envisageable si l’accessibilité n’est pas généralisée sur l’ensemble du réseau ferroviaire. En Suisse, où l’accessibilité des gares et des trains est prise en compte depuis de nombreuses années, le temps de réservation a pu être nettement diminué : dans la plupart des cas, il est possible de réserver une assistance jusqu’à une heure avant le départ du train. On le voit, la Belgique a encore un long chemin à parcourir avant de disposer d’un parc roulant et de gares réellement accessibles. Quelle route suivre pour y arriver ? Itinéraire d’un réseau accessible Les bonnes pratiques en matière d’accessibilité ferroviaire sont généralement présentes dans des pays où la concertation entre les associations représentatives de personnes handicapées et les sociétés de chemins de fer est instaurée de manière systématique et à long terme. En Suisse, les chemins de fer fédéraux (CFF) collaborent étroitement pour tous leurs projets avec le bureau « Personnes handicapées et transports publics » depuis 2001. En France, la SNCF a créé un « Conseil Consultatif des Personnes Handicapées et à Mobilité Réduite » qui réunit deux fois par an huit grandes associations nationales et des responsables de la SNCF. Des réunions mensuelles sont par ailleurs prévues pour trois sous-commissions qui abordent plus en profondeur cer- aireslibres · Mai 2009 · 13 << Plate-forme multimodale pour les PMR et les vélos en Allemagne (Autorail Talent de Bombardier) Un train à ne pas rater ACTP tains axes (trains, gares et services, schéma directeur national d’accessibilité). Ces échanges permettent de connaître les besoins et demandes des personnes à mobilité réduite dans l’environnement ferroviaire. Toutefois, afin de s’assurer que les aménagements et équipements proposés améliorent efficacement l’accessibilité, il peut être utile de passer par une phase d’expérimentation. C’est notamment la méthode que la SNCF a utilisée en 2006 lors de son opération « Gare laboratoire de l’accessibilité » à Paris-Montparnasse. Pendant trois mois, les PMR ont pu tester plus de 35 dispositifs, telles que des bandes de guidage au sol et des bornes sonores, des boucles magnétiques au guichet et en salle, des écrans TFT, une signalétique en caractères agrandis… Les résultats de cette expérimentation ont été récoltés par des enquêteurs professionnels et la SNCF a pu ainsi s’assurer de la qualité des dispositifs proposés. Une démarche similaire est actuellement en cours avec le « train laboratoire de l’accessibilité » : un wagon est installé sur l’esplanade de la gare de l’Est et les clients sont invités à tester les différents aménagements jusqu’en juin. La politique >> 14 · aireslibres · Mai 2009 d’accessibilité de la SNCF est exprimée très clairement : sa démarche d’accessibilité sera construite, étape par étape, sur l’écoute et l’échange avec les personnes handicapées. Comme l’affirme Marie-Christine Cotin, déléguée à l’accessibilité de la SNCF, « il faut que chaque euro investi le soit pour une solution qui facilite réellement la mobilité des personnes handicapées9 ». Au travers des exemples français et suisse, nous pouvons constater que l’amélioration de l’accessibilité passe par une politique volontariste des sociétés de chemins de fer. Toutefois, ces gouvernements ont également agit en recourant à des législations contraignantes pour renforcer le processus de mise en accessibilité. Plusieurs pays (Royaume-Uni, France, Suisse, États-Unis…) ont une loi qui prévoit l’élimination des inégalités envers les personnes handicapées. Ces lois prévoient la mise en accessibilité de l’ensemble des infrastructures ferroviaires mais également du matériel. Des dates butoirs raisonnables y sont fixées pour une mise en conformité (de 10 à 20 ans en fonction des pays). A travers les nouveaux contrats de gestion, l’accessibilité du système ferroviaire commence à être prise en compte en Belgique. Un accès en autonomie dans les gares et les trains n’est cependant pas possible du jour au lendemain. La SNCB doit donc planifier des étapes pour atteindre une accessibilité universelle de son réseau. Il importe de se fixer des objectifs ambitieux en la matière et de vérifier régulièrement le bon avancement du processus. L’achat de matériel roulant inadapté, la construction de gares inaccessibles ou encore les rénovations excluant les PMR ne peuvent plus être acceptés (ni par les associations représentatives de personnes handicapées ni par les autorités publiques). L’accessibilité doit être abordée par les sociétés de chemins de fer de manière globale, c’est-à-dire en traitant l’ensemble des étapes d’un voyage et en prenant en compte toutes les catégories de personnes à mobilité réduite. La SNCB a tout à y gagner… En attendant, il convient de compenser les équipements existants non accessibles par des mesures spécifiques, provisoires mais performantes (accompagnement, assistance ou service alternatif de transport…) afin de donner à tous les usagers les mêmes chances de se déplacer et ainsi de participer à la vie en société. Marie-Ange Vandecandelaere Anne-Sophie Marchal nnn 9. SNCF, Gare laboratoire de l’accessibilité, Dossier de presse du 10 novembre 2006