La finance dicte toujours sa loi aux politiques

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La finance dicte toujours sa loi aux politiques
10/12 SEPT 10
Quotidien Paris
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es deux auteurs, émineirts spécialistes des marchés financiers,
dressent un réquisitoire sans appel de la finance mondialisée plus
puissante que jamais deux ans après l'effondrement de Lehman
Brothers. Rien n'a véritablement change et tous les ingrédients sont
à nouveau réunis pour une prochaine crise.
Encore la crise, toujours la
crise. Pour le deuxième anniversaire de la chute de la banque
Lehman Brothers, point d'orgue
de la crise financière, de nombreux essais sur la crise seront
au rendez-vous de cette rentrée
littéraire. Et une fois de plus,
la finance n'y fait pas bonne figure. Le dernier ouvrage d'Henri
Bourguinat et d'Éric Briys ne
fait pas exception à la règle. Le
professeur d'économie, spécialiste des marchés financiers, qui
n'a cessé d'alerter les politiques
sur les dérives de la finance, et
l'ancien trader, fin connaisseur
des modèles d'évaluation des
risques, reviennent un an après
leur précédent essai (davantage
pour les initiés), « l'Arrogance dè
la finance », dresser un état des
lieux post-crise pour le moins inquiétant. « Cette quasi-volonté
de ne rien changer pourrait bien
conduire à un seul résultat : la
"re-crise" dont les conséquences seraient encore plus cruelles
que celles que nous venons de
traverser. » C'est dit, au travers
d'une succession de chapitres
courts et limpides, souvent sous
MAXIMA
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la forme de commentaires analytiques de l'actualité économique, les auteurs ne peuvent
que constater le maintien d'une
hyperfinance plus prédatrice
qu'utile pour l'économie et le renoncement des pouvoirs publics
à tirer les enseignements de la
crise. Pire, les États, écrasés par
le poids d'une dette publique hypertrophiée par les plans dè sauvetage et de relance successifs,
sont plus que jamais à la merci
des humeurs des marchés financiers qui peuvent, sous la simple
menace d'une dégradation du
rating d'un pays, infléchir des
politiques économiques et budgétaires. Enfin, le secteur bancaire apparaît plus concentré et
puissant que jamais. Quant à la
nouvelle régulation, les auteurs
en dénoncent méthodiquement
les faux-semblants.
Bref, tout semble fait pour ne
pas contrarier le monde de la
finance. Pourtant, notent les
auteurs, le monde a cependant
change et la crise a permis une
prise de conscience des dangers
et des limites du système financier international. Le
mythe de la
globalisation
heureuse a bel
et bien vécu.
C'est la lueur
d'espoir de cet
essai sans concession. Quèlques
pistes sont même esquissées
pour contrer une évolution qui
apparaît aussi funeste qu'inéluctable. La nécessité de revoir en
profondeur, non seulement les
règles des marchés financiers et
la façon dont opèrent les banques, mais aussi les principes
qui régissent notre système de
libre-échange, source de bien
des déséquilibres. Mais aussi de
remettre l'intelligence au service
de la croissance ou rompre avec
cette fâcheuse habitude de nos
gouvernants de masquer à tout
prix la réalité des choses.
C'est bien à un changement de
culture et de mentalité qu'appellent de leurs vœux les auteurs.
C'est sans doute la rupture la
plus difficile à faire. Cet ouvrage
est utile car il permet au lecteur
d'appréhender les principaux
enjeux qui se posent aujourd'hui
et ainsi de participer en toute
connaissance de cause aux débats qui ne manqueront pas
d'agiter nos démocraties. En
ce sens, c'est un livre citoyen.
ÉRICBENHAMOU
« Marchés de dupes. Pourquoi la crise se prolonge », par
Henri Bourguinat et Éric Briys.
Maxima Editions. 25O pages,
19,8O euros.
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