de Molière - Théâtre Le Public
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Les Carnets du Public – Dom Juan - Molière Les Carnets du Public Dom Juan Comédie Mythique de Molière Grande Salle Du 21/10 au 31/10/09 à 20h30 Relâches les dimanches et lundis Théâtre le Public – Saison 16 – 2009/2010 Page 1 Les Carnets du Public – Dom Juan - Molière Dom Juan de Molière Avec Serge Demoulin (Dom Juan), Olivier Massart (Sganarelle), Laurence d'Amelio (Done Elvire), Jean-Michel Balthazar (Monsieur Dimanche), Pierre Geranio (le mendiant), Pierre Haezaert (Dom Alonse), Nicolas Laine (Dom Carlos), Anabel Lopez (Mathurine), Aurelio Mergola (Pierrot), Quentin Milo (Dom Louis), Laura Sepul (Charlotte), Zaïre Souchi (La Ramée, La Violette et autres rôles), Clément Thirion (Dom Gusman). Mise en scène Michel Kacenelenbogen Assistante mise en scène Kim Leleux Scénographie Vincent Lemaire Création vidéo Julie Michaud Costumes Catherine Somers Lumières Marco Forcella Directeur Technique Maximilien Westerlinck UNE CREATION ET PRODUCTION DU THEATRE DE LA PLACE ET DU THÉÂTRE LE PUBLIC AVEC L’AIDE DU CENTRE DES ARTS SCENIQUES ET DU MINISTÈRE DE LA COMMUNAUTÉ FRANCAISE - SERVICE THÉÂTRE Personnage légendaire et archétype du libertin impie, Dom Juan défie toutes formes d’autorités, de règles, de morales. Maître de la transgression, il nous entraîne à sa suite dans une quête obsessionnelle de la provocation. Infidèle, aventurier, Dom Juan utilise mensonges, flatteries, usurpations, scandales, critiques, et nous plonge par ces thèmes au cœur de l’acte théâtral. Insolent libertin que rien n’inquiète, ni son avenir sur cette terre, ni son salut dans l’autre monde, il accumule les conquêtes amoureuses, séduisant les jeunes filles nobles et les servantes avec le même succès… Quand on s’inscrit contre toutes les valeurs bien pensantes d’une société, est-ce supportable ? Quel est le prix à payer ? Peut-on dire de quelqu’un qu’il est vaincu quand il a renoncé à ses convictions ? Et d’où vient que cet « insolent blasphémateur » soit devenu au fil des siècles ce « grand séducteur » ? Autres temps, autres mœurs ?... Pas si clair… Théâtre le Public – Saison 16 – 2009/2010 Page 2 Les Carnets du Public – Dom Juan - Molière I. Note d’intention du metteur en scène Nota bene La démarche dramaturgique exposée par l’auteur permettra de relever les problématiques essentielles de la pièce et de formuler, dans un second temps, les questionnements qui leur sont liés et qui pourront être développés avec les élèves, en classe ou lors de la rencontre avec les artistes. Les raisons profondes qui m’amènent à vouloir m’emparer du « Dom Juan » de Molière, je n’en ai pas encore fait le tour ; je pressens qu’il doit y avoir là-dessous de fortes présomptions de dénis d’une part de moimême : je ne me trouve pas beau ! Le « Dom juanisme » n’est pas dans ma nature, sans doute parce que la nature ne m’a pas mandaté pour cela. Cependant les séducteurs m’interpellent : un des héros de mon enfance était 007, golden boy à la raison froide, sans attaches, auquel rien ne résiste, au poil et à la mise impeccable, à l’humour ravageur… mais le Dom Juan que j’ai en rêve n’est pas là. Il y a d’un côté la figure d’un homme qui se mesure, à la société, à ses règles, aux lois, à ses congénères, aux croyances, aux puissants ; et sur l’autre face, la figure d’un homme qui a peur, qui n’ose pas, qui ne s’autorise pas une liberté de pensée, par peur des représailles, du retour de bâton, peur de la confrontation, des conséquences. Les deux profils d’une même personne qui prend, d’une part, le vent de face et de l’autre, le vent de côté pour ne pas tomber. Une même personne qui au gré des circonstances s’accroupit ou se redresse, comme moi… ou vous ? J’aborderai « Dom Juan », par le biais des deux protagonistes qui forment l’épine dorsale de la pièce : Dom Juan et Sganarelle. A priori, aujourd’hui, trois axes me poussent dans l’exploration de la pièce : Théâtre le Public – Saison 16 – 2009/2010 Page 3 Les Carnets du Public – Dom Juan - Molière I. II. Les contradictions de la nature humaine : Molière ne brandit aucune bannière, (rien ne dit qu’il n’était pas libertin et rien ne dit non plus qu’il était contre la religion), il ne met aucun personnage en « raisonneur », il éclaire les problèmes de manière contradictoire et exprime ainsi les tensions qu’ils suscitent. La confrontation des vérités et des réalités de chacun, les petits et grands duels que chacun est obligé de mener pour tenir sa place et vivre ou survivre (c’est selon). La langue : tous ces protagonistes se caractérisent d’emblée par un langage qui leur est propre et n’appartient qu’à lui, la variété des tons est virtuose et donc jouissive à orchestrer ; les registres sont tellement différenciés que les tensions et les contradictions naissent d’emblée. Le langage dans « Dom Juan » est « une harmonie de discordances », un patchwork de styles et de rhétoriques. Dom Juan est rapide, limpide, moqueur face à un Sganarelle aux accents gouailleurs mais aussi ampoulés, un Sganarelle intempestif qui ne comprend même pas tout ce qu’il dit. C’est donc une sorte de combat au fleuret du langage qui nous attend ; Dom Juan se mesurant en combat singulier avec chaque personnage, à la pointe de la langue et du verbe. Je pense que dans « Dom Juan » les caractéristiques et les modes de langage de chacun tiennent moins à la qualité sociale de chacun qu’au caractère profond des personnages. Au-delà de l’appartenance à une caste, au-delà de la naissance, la langue est vraiment le reflet de la personnalité de chacun (la bêtise, l’égoïsme, la peur, l’élégance, l’humour… et souvent plusieurs à la fois dans le corps d’une même personne). Théâtre le Public – Saison 16 – 2009/2010 Page 4 Les Carnets du Public – Dom Juan - Molière Dans « Dom Juan » le monde des gens de cour et de leurs alliances y est très peu reluisant, voire pourri ; mais le monde des gens de la campagne n’est pas plus « pur » malgré des protagonistes simples et proches de la nature. Les personnages de Pierrot, Charlotte et Mathurine sont plus divertissants mais aussi sans doute plus cruels. Pierrot est un petit coq vantard et couillon, son étroitesse d’esprit n’a d’égal que son égoïsme et fait de lui un personnage comique mais borné et sans horizon. Quant à Charlotte, elle n’est pas tellement mieux lotie, elle se vend au plus offrant sans aucun état d’âme et suggère même à Pierrot que ce mariage avec un seigneur pourrait être une aubaine pour lui aussi. Chacun déploie sa propre langue, personne n’ayant une langue liée uniquement à sa classe sociale (du moins en profondeur) c’est donc que cette langue est liée au caractère des personnages. C’est à cela aussi que je veux m’attacher. Travailler dans le sens de chacun et de cette façon, donner aux duels cités plus haut, toute leur violence, leur acuité, leur humour aussi. III. L’homme et le féminin : le désir, la séduction, la possession, l’incompréhension, l’absolue nécessité et donc sa nécessaire destruction. Mettre en scène les aspects contradictoires de chacun par le jeu de la langue géniale de l’auteur, mettre en scène une comédie enlevée mais aussi un huis clos sans issue sur la condition humaine, une comédie lucide, désespérée et diabolique. Mettre en scène ces duels verbaux qui sur scène seront de véritables corps à corps, corps à cœur, un duel à mort… voilà mon projet. Michel Kacenelenbogen Théâtre le Public – Saison 16 – 2009/2010 Page 5 Les Carnets du Public – Dom Juan - Molière II. L’école du spectateur Nota Bene Les pistes de réflexion que nous proposons aux enseignants autour des spectacles sont loin d’être exhaustives. Elles ont pour objectif de présenter dans une vue générale différentes problématiques soulevées par le spectacle et de lancer de premières idées d’analyse. Pour préparer au mieux les élèves à la représentation, les thématiques pourront être abordées une première fois en classe avant le spectacle. Après la représentation, les élèves pourront approfondir et compléter le débat en mettant en relation leurs premières idées et celles exposées au fil du spectacle. Leurs questionnements par rapport aux thématiques peuvent également être une préparation ou un approfondissement de leur rencontre avec les artistes du spectacle. II.1. La forme théâtrale de « Dom Juan » (chapitre réalisé d’après l’étude du Pr. M. Balmont) Afin d’apprivoiser l’esthétique théâtrale classique, l’élève peut être invité à prendre connaissance des points suivants et à les repérer lors de la représentation… a. La question des unités Unité de Lieu Les fréquents déplacements des personnages rendent impossible le respect de l’unité de lieu. La scène se passe en Sicile; mais elle pourrait très bien se dérouler ailleurs. Le lieu n’est pas caractérisé, aucun pittoresque sicilien n’est présent dans la pièce (et les paysans parlent avec l’accent campagnard français). Théâtre le Public – Saison 16 – 2009/2010 Page 6 Les Carnets du Public – Dom Juan - Molière — Acte I : un palais situé dans une agglomération — Acte II : à la campagne, sur une côte — Acte III : une forêt (et à la fin de l’acte l’intérieur du tombeau du Commandeur) — Acte IV : Chez Don Juan, dans une salle prête pour le dîner. — Acte V : lieu assez vague, probablement en plein air. Unité de Temps Là encore, l’unité de temps n’est pas respectée; mais elle est moins violée que celle de lieu. L’action se déroule en trente-six heures environ: — Acte I : le matin — Acte II : en début d’après-midi — Acte III : le soir — Acte IV : la nuit — Acte V : le lendemain soir. Molière n’a donc pas rejeté la notion d’unité de temps; il s’est contenté de l’aménager. Remarquons de plus qu'il a eu soin de mettre en valeur le fait que ce qu’il nous montre n’est qu’une action parmi d’autres. Les tentatives de séduction auxquelles nous assistons se sont déjà produites avec d’autres personnes; tout ce qui arrive s’est déjà passé. Chacun des personnages et chacune des actions est ainsi située dans une chronologie (ex : le Pauvre est depuis dix ans dans les bois). Théâtre le Public – Saison 16 – 2009/2010 Page 7 Les Carnets du Public – Dom Juan - Molière Unité d'Action Molière ne la respecte guère plus : chaque acte, chaque scène parfois, a sa propre unité, raconte une histoire à elle seule (l’acte II; la scène du Pauvre). À tel point que certaines scènes ont pu être censurées entièrement sans que la pièce perde de sa valeur ou de sa logique. b. La question du genre/du registre L’action L’action est marquée par la confusion des genres et des registres qui se succèdent ou même coexistent dans la même scène. Le tragique est le fait surtout du personnage d’Elvire. Au même registre appartient la confrontation entre Don Juan et la statue, dont on connaît dès le début l’issue fatale. L’affrontement entre Don Juan et le Pauvre appartient également à ce registre, puisque chacun des deux protagonistes suit inexorablement sa destinée. La tragicomédie (ou comédie héroïque) apparaît de façon très pure dans les scènes avec Don Carlos (III, 3-4; V, 3). Les relations avec Don Luis se situent tout à fait dans ce registre et il semble même que Molière ait parodié Corneille dans la tirade de l’acte IV) La pastorale (acte II) évoque des campagnards vivant dans une nature idyllique. La farce marque le jeu de Sganarelle. Les personnages Sganarelle est un personnage de comédie. Il est même parfois un personnage de farce. D’ailleurs il ne faut pas oublier que Sganarelle est un personnage créé par Molière dans ses farces. Plus finement, il imite Théâtre le Public – Saison 16 – 2009/2010 Page 8 Les Carnets du Public – Dom Juan - Molière fréquemment son maître; mais comme il n’y parvient pas, il crée un effet de parodie involontaire. Tout comique qu’il est, il n’en est pas moins contaminé lui aussi par le registre tragique. Ainsi ses revirements quand son maître le menace prêtent à rire; mais si l’on pense à sa propre souffrance, il n’y a rien là de comique. De même dans la dernière scène, il est farcesque quand il réclame ses gages, mais il éprouve néanmoins une douleur bien réelle de la mort de son maître. Don Juan se place résolument dans le registre tragique. Placé seul face à ses adversaires, il donnerait à la pièce une coloration tout à fait sombre. Mais la présence de Sganarelle a pour effet de casser cette atmosphère tragique; car Don Juan est comme contaminé par Sganarelle (cf. La scène avec Pierrot). Non seulement les genres donc coexistent, mais ils sont contaminés les uns par les autres. c. Conclusion : à quoi tient l’unité de la pièce? Cette pièce, tout entière en ruptures et en ambiguïtés est bien loin de cette stricte observation des règles que préconisait le théâtre classique ; c’est une pièce baroque. Mais il est en son cœur deux éléments qui assurent la continuité et constituent deux fils directeurs : — Le combat Don Juan/Sganarelle. Finalement Don Juan sera vaincu, mais Sganarelle ne sera pas vainqueur. — Les avertissements/le châtiment. C’est le fil directeur de la pièce. Tous les personnages, Sganarelle en tête, ne cessent d’avertir Don Juan de ce qui l’attend. Théâtre le Public – Saison 16 – 2009/2010 Page 9 Les Carnets du Public – Dom Juan - Molière II.2. Pistes de travail avec le texte… a. Lectures Acte III, scènes 1 et 2 Précisez les positions religieuses de Don Juan et de Sganarelle. Précisez la relation entre le maître et le valet. Faites le plan de la scène 2 en montrant l’évolution de la provocation de Don Juan. Imaginez les mouvements des acteurs dans la scène 2 Acte IV, scène 3 Quelles techniques emploie Don Juan pour ne pas payer ses dettes? À quoi tient le comique de la scène (situation, gestes, mots)? Acte V, scènes 5 et 6 Montrez que la scène a en même temps un sens philosophique et une valeur spectaculaire. Comment interprétez-vous les derniers mots de Sganarelle ? b. Ecriture d’invention Imaginons que Don Juan, au lieu d'être aux prises avec la justice divine, doive rendre des comptes à un tribunal humain. Les élèves pourront rédiger soit le réquisitoire de l'avocat général (qui parle au Théâtre le Public – Saison 16 – 2009/2010 Page 10 Les Carnets du Public – Dom Juan - Molière nom de la société), soit la plaidoirie d'une des parties civiles (un des personnages trompés par Don Juan), soit celle de Don Juan luimême. c. Dissertations Voici une série de citations. Celles-ci peuvent constituer le sujet d’une dissertation, comme exercice final au voyage dans le Dom Juan de Molière, par exemple… « Rien de plus joyeux que don Juan, rien aussi de plus “sain” [...]. Seulement, il a une faiblesse : il veut être à la fois désir et liberté, liberté désirante, l'homme qui, dans la lourdeur de la fascination, resterait légèreté, action souveraine, maîtrise. » Maurice Blanchot (1907). Le personnage, tel que Molière le met en scène, vous paraît-il un modèle de vie ? « Vous trouverez chez don Juan [...] un sentiment qui n'a été [...] complètement exprimé que de nos jours : l'amour artistique du mal, qui n'est qu'un raffinement d'orgueil, la forme la plus savante de l'instinct de révolte. » Jules Lemaître (1853-1914) « Pour que le don Juan soit possible, il faut qu'il y ait de l'hypocrisie dans le monde. Le don Juan eût été un effet sans cause dans l'antiquité ; la religion était une fête, elle exhortait les hommes au plaisir, comment aurait-elle flétri des êtres qui faisaient d'un certain plaisir leur unique affaire ? » Stendhal (1783-1842) « C'est à la religion chrétienne que j'attribue la possibilité du rôle satanique de don Juan. » Stendhal (1783-1842) « Don Juan [...] c'est l'infidélité perpétuelle, mais c'est aussi la perpétuelle recherche d'une femme unique, jamais rejointe par l'erreur inlassable du désir. C'est l'insolente avidité d'une jeunesse Théâtre le Public – Saison 16 – 2009/2010 Page 11 Les Carnets du Public – Dom Juan - Molière renouvelée à chaque rencontre, et c'est aussi la secrète faiblesse de celui qui ne peut pas posséder, parce qu'il n'est pas assez pour avoir... » Denis de Rougemont (1906-1985) « Si l'amour ne connaît plus d'obstacles moraux ni sociaux ; si la passion de désirer et de posséder n'est plus jamais un péché [...], si les choses aujourd'hui en sont là, que vient faire Don Juan parmi nous ? » Gregorio Marañón (1887-1960) « [Don Juan] libère la jeune fille des chaînes dans lesquelles la religion et la morale, créées pour l'avantage de l'homme, l'ont emprisonnée, par le fait qu'il ne veut pas mettre sur elle son emprise définitive, mais seulement en faire une femme. » Otto Rank (1884-1939) « Don Juan a de la gueule : celle d'un animal ; il y a un prestige de l'énergie irréfléchie, aveugle à toute autre chose qu'elle-même, qui se confond trop aisément avec la révolte libre. » Jacques Guicharnaud Théâtre le Public – Saison 16 – 2009/2010 Page 12 Les Carnets du Public – Dom Juan - Molière Lors de votre réservation, n’hésitez pas à demander une animation autour du spectacle… ! Nous vous souhaitons une excellente soirée théâtrale avec vos élèves ! Nous sommes à votre écoute ! Pour toute question concernant les activités pédagogiques du Théâtre le Public, ou pour tout commentaire, notre équipe se tient à votre disposition : Grégory Bergez : [email protected] 02/724.2423 Patricia Ide : [email protected] 02/724.24.34 Anne Mazzacavallo : [email protected] 02/724.24.33 Infos/Réservations : 0800/944 44 Théâtre Le Public Rue Braemt, 64-70 1210 Bruxelles www.theatrelepublic.be VENEZ VOIR … C’EST BEAU A VIVRE ! Théâtre le Public – Saison 16 – 2009/2010 Page 13