Rien que pour vos perles

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Rien que pour vos perles
Mail 54 – écrit en novembre 2006
Nombres de milles parcourus : 8200
Zone de navigation : VENEZUELA – Margarita
Rien que pour vos perles...
" Il n'y a pas cinquante manières de combattre, il n'y en a qu'une, c'est d'être vainqueur. Ni la révolution ni la guerre ne consistent à se
plaire à soi-même." Malraux (André)
Nous revenons à Margarita pour cette fois découvrir " la Perle ". L'an dernier nous ne lui avions pas consacré le temps
suffisant pour en comprendre toute sa dimension. Nous faisons le tour de l'île et nous en mesurons l'ampleur culturelle et
historique. Vous trouverez également deux anecdotes qui justifierons pleinement les nécessités de comprendre et de parler la
langue des pays que l'on visite!
Vous trouverez en post-scriptum :
La photo du mois : " Gentil épouvantail qui attire les pélicans! "
L'astuce du mois et le troisième épisode du feuilleton de l'eau : Prévoir de l'eau potable supplémentaire.
Pour découvrir en détail Margarita, une page a été préparée dans le site ainsi qu'un album photo.
Bonjour à tous,
De notre premier passage, en 2005, à Margarita nous avions gardé la double image
peu élogieuse d'un panorama bétonné de Porlamar et de la rencontre saisissante
avec les pirates de Robledal. Nous ne nous avouons pas vaincus nous refaisons une
visite en 2006. Cette fois, nous voulons partir à la découverte de cette île. Cathy,
une jeune Vénézuélienne de Cumana, avec laquelle nous avions sympathisé l'an
dernier, était si triste de constater l'image déplorable que nous avions de Margarita
qu'elle nous a convaincu d'y retourner pour y découvrir, cette fois, les vrais trésors
de l'île de ses vacances. Après tout, l'île a pour surnom " La Perle ".
Pour nous aider dans notre quête d'authenticité nous faisons appel à un jeune
Margariteñio. Herman se propose en tant que guide. Prénom peu commun au
Venezuela, il l'admet lui-même... Outre sa langue maternelle il parle, chose rare
sur le territoire, l'anglais. Une journée linguiste en perspective pour nos pauvres
neurones. Attention ne dites pas à ce jeune homme qu'il parle l'espagnol... Non,
non! Il parle le vénézuélien! Nous avons de la chance il n'est pas natif de
Margarita. Il nous explique qu'un vrai Margariteñio parle un langage un peu
différent de celui qui est parlé sur le continent. Celui-ci, s'il s'apparente à
l'espagnol, est parlé si rapidement que des débutants en espagnol n'y comprendront pas grand chose. Les
Vénézuéliens en perdent eux-mêmes leur latin ou du moins leur " espagnol "... Hum! A vrai dire, nous le
croyons sur parole. Car une fois sortis de la méthode Assimil (qui a la lumineuse idée de n'enseigne que
le Castillan, qui est paraît il l'espagnol le plus courant, surtout pour ceux qui ne sortent jamais!) Hé bien,
nous sommes complètement perdus! Vous l'avez compris les habitants de Margarita se sentent avant tout
Margaritains jusqu'au bout de la langue! Ensuite, ils consentiront peut-être à dire que Margarita est une
île, la plus grande île du Vénézuela! Là encore, pas de bévue, ils ne sont pas Espagnols! Comme partout
sur cette planète, les particularismes et les identités se révèlent passionnants lorsqu'ils sont ressentis avec
la fougue et la verve de tempéraments au sang chaud!
Les insulaires préservent la culture de leur île. Ils sont
fiers de son histoire. Ils colorent leur discours de petites
notes romantiques. Ils tiennent toujours à expliquer
qu'avant l'arrivée des conquistadores cette île était
peuplée d'Indiens fiers et courageux : les Guaiqueris ou Waikeris. A les entendre les
Margariteñios se sentent plus proches des Guaiqueris que des conquistadores. Pour les
Guaiqueris Margarita s'appelait Paraguachoa. Ce qui signifie poissonneux. Les indiens
Guaiqueris récoltaient également les huîtres perlières. On peut penser que jusqu'au 15
août 1498, l'île était un réel paradis pour les Indiens. Cette année là, Christophe
Colomb entame son troisième voyage. Il passe par Paraguachoa qu'il nomme
Margarita... Herman rajoute avec un clin d'oeil appuyé que Margarita était le nom de la
maîtresse supposée de Colomb... Impossible d'y échapper, visiblement notre guide est
un grand tendre!
Les conquistadores le furent beaucoup moins... Ils voient en l'île une manne inépuisable de perles. Les Indiens, qui avaient accueillis
les nouveaux venus tels des Dieux, en deviennent les esclaves. Ce travail fastidieux et dangereux décime la population de Guaiqueris.
Une journée ne suffit pas pour visiter en profondeur Margarita. Herman nous
entraîne de ville en ville, de plage en plage, de castillo en castillo, d'Eglise en
Basilique. Tout au long de cette journée il nous ouvre une autre perspective de
Margarita. Désormais, cette île ne sera plus pour nous ce gigantesque marché hors
taxe, elle revêtira également une dimension culturelle et historique. Au coeur même
des villes comme Pampatar ou Asunción, le courage des héros de la révolution
résonne encore. Que penser de la résistance de cette jeune femme qui donna sa vie
pour que son pays soit indépendant? Oui, Margarita a enfanté la Jeanne d'Arc du
Venezuela : la señiora Luisa Caceres de Arismendi. Dans toutes les villes une rue
au moins est consacrée à Santiago Mariño autre héros de l'indépendance. Si
aujourd'hui, le drapeau du
Venezuela compte sept étoiles Margarita a largement gagné la sienne! Et l'on
comprend au rythme des explications de notre guide pourquoi Margarita a mérité le
" grade " d'Etat à part entière au nom de Nueva Esparta. En référence à Spartacus,
chef des esclaves révoltés contre Rome. Plus illustre comparaison eut été
impossible... Margariteñios et fiers de l'être!
Outre les aspects historiques de Margarita, l'île a su préserver sous le couvert d'une
forêt tropicale sa montagne intacte. De plus, entre la partie Est de l'île et la
péninsule de Macanao il existe une zone protégée par décret, c'est la lagune de
Restinga. Nous y circulons en barque au sein de canaux sertis d'une mangroves riches de nombreuses espèces d'oiseaux : pélicans,
flamands roses, perruches, perroquets, ibis rouges. Ici, l'on trouve la plus grande plage de l'île : 27 kilomètres! Et une typicité
géologique qui a donné naissance aux deux Tetas de Maria : deux collines jumelles aux formes évocatrices classées monuments
naturels.
Je ne peux vous quitter sans mentionner Juan Griego. Au creux d'une baie évasée
une petite ville au cachet provinciale accueille le deuxième mouillage de l'île pour
les plaisanciers. Le mouillage est envahi de pélicans. Et c'est un euphémisme!
Incroyable population ou surpopulation de ces palmipèdes aux longs becs qui
plongent sans discontinuer dans les eaux glauques et nauséabondes de la baie.
Incompréhensible... Vu l'état de l'eau que tant de poissons daignent y vivre pour se
précipiter dans la poche de nos amis les pélicans! Cette baie est également le lieu
de prédilection des lanchas. C'est là que les pêcheurs laissent leur barque lorsqu'ils
rallient la terre. Sur la plage, à même le sable une sorte de chantier maritime
improvisé répare ces lanchas.
La baie est surplombée des restes du fort de la Galera. Une muraille, quelques canons
témoignent des nécessités de jadis à défendre l'île. L'endroit est pris d'assaut par des
gamins qui profitent de la période estivale pour alpaguer les visiteurs. Ils leur propose
en l'échange de quelques bolivars l'histoire complète du fort. Celui-ci fut témoin du
courage des indépendantistes. A vrai dire, nous aurions bien consenti à ce petite
commerce. Cependant ces gamins récitent à l'allure d'un TGV en marche les frasques
des héros de l'île. Tout bonnement amphigourique pour les pauvres petits francophones
que nous sommes.
Bien que touristique, le village couve une ambiance typiquement provinciale. En fait, il
n'y a rien d'exceptionnel à Juan Griego. Pourtant nous y sommes restés plus longtemps
que prévu. Comme aimantés par ses charmes. Nous avons apprécié de pouvoir nous
balader dans les rues avec un sac ou même un appareil photo. Jamais nous n'avons
senti la moindre insécurité. La seule chose que nous regrettions, c'est de si mal parler l'espagnol. Par deux fois, nous avons ressenti ce
manque cuisant. Laissez-moi vous raconter ces deux petites anecdotes pour illustrer l'absolue nécessité d'apprendre les rudiments de
l'espagnol.
Lors de notre arrivée à Juan Griego, notre appareil photo nous lâche. Continuer le
voyage sans immortaliser toutes les beautés qui nous attendent nous semble
impossible. Dom décide donc de se mettre en quête d'un nouvel appareil. Je lui
suggère d'acquérir le premier qu'il trouvera... Vu la taille de la ville, je doute même
qu'il en trouve un seul. Mais il n'en démord pas, il veut telle marque, tel modèle. Il
part donc plein d'espoir muni de son seul courage et d'un espagnol anorexique en
quête du Graal. Attention, l'espagnol anorexique ce n'est pas un pauvre type qui ne
mange plus et qui passe son temps dans la salle d'attente du psy... Non, non! Le
Cap n'a fait qu'un an d'espagnol à l'école en dix neuf cent... Ceci dit, moi j'en suis
encore à la méthode Assimil...Bref pour faire court , mon capitaine a arpenté toutes
les rues de la ville, sous un soleil de plomb et... il a fini par trouvé la bête... Le capitaine en personne a force de signes et de persuasion
a trouvé cette petite merveille de la technologie qui nous permettra de partager encore et encore les images de ce voyage.
Autre petite anecdote: le Venezuela et plus précisément les 4 Etats à l'Est du pays
vénèrent la Vierge de la Vallée. Depuis plusieurs jours des voitures sillonnent la ville.
Elles laissent s'échapper une abondance de décibels apparentés à des chants. Loin des
mélodies liturgiques, nous décodons des mots comme "révolution" en roulant les
rrrrrrr. Le ton se rapproche plus du hayli hay lo.... un peu tendance 40/45... que de
préparatifs aux fêtes apostoliques... Très surprenant! Ils font également des feux
d'artifice de jour... Autant dire qu'ils envoient une quantité incroyable de pétards
mouillés! Bref, nous sommes au jour de la nativité. Tous les commerces sont fermés.
Les voitures bruyantes cèdent enfin leur place aux enfants. Ils se réunissent dans les
chapelles où ils accordent leur voix mélodieuse. La ferveur est palpable dans les rues
de la ville. Intriguée je me décide et j'achète le journal. Pour un coup d'éclat ! Pour voir
si sans l'accent, bref en lisant, j'arriverais à comprendre ce que représente pour eux la
fête de la Vierge. Me voici en plein milieu de la place du village à lire... Hum à
regarder les photos de la Vierge. Vient à moi un retraité, sympa qui dans un large sourire m'envoie des phrases (enfin je suppose que
c'étaient des phrases ordonnées et qui avaient un sens, du moins pour lui!) Je me demandais quand j'arriverais à en placer une...
intarissable! J'ai trouvé mon maître! Les chutes du Niagara du phrasé. Il m'a tout fait en apnée! Je finis par lui faire un large sourire, je
l'arrête de la main pour lancer ma phrase décisive : " Yo soy francesa! " Et là moi qui pensait l'arrêter net, je le regarde, il regarde le
journal que je tiens toujours dans la main. Il pense toujours que je comprends... Il ne ralentit pas l'allure. Je finis par comprendre
quelques bribes... Il me demande, d'où je suis en France, à quel hôtel je suis descendue... Infatigable! Je lui dit avec peine que " mi
hotel es la embarcation amarillo " Il finit par me prodiguer des conseils, par exemple de ne pas jouer au Bonto... Je lui réponds que ça
tombe bien, que je n'ai plus de " dineros " pour jouer... Il me dit que si je n'ai plus de sous, alors je peux aller à la fête car on en me
volera rien...
Finalement c'est simple le venez!!!
Amitié marine
Nat et Dom de L'Etoile de Lune
La photo du mois: " Gentil épouvantail qui attire les pélicans! "
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Troisième épisode: Prévoir de l'eau potable supplémentaire
Mille et une chose peuvent arriver en bateau. Il y a les inévitables pannes de dessal, mais nous avons rencontré un équipage qui a failli
manquer d'eau potable pendant la traversée de l'Atlantique. En effet, ils avaient embarqué de l'eau " potable " qu'ils avaient conditionné
eux-mêmes. C'était l'eau fournie au quai aux Canaries. Au bout de quinze jours l'eau a pris un goût. Puis, elle changea de couleur.
L'équipage qui n'avait pas d'autre ressource à bord a fini par bouillir l'eau. Malgré cela l'eau gardait un goût. Etait-elle toujours
potable? Que risquaient-ils en buvant cette eau?
Solution pour éviter de manquer d'eau potable :
Nous embarquons toujours de l'eau minérale achetée en bouteille ou en bidons de 5 litres. Nous stockons en général 150 litres d'eau
potable. Il nous est arrivé d'embarquer 300 litres d'eau minérale. Ce qui nous donne, pour deux personnes, une autonomie de 50 à 100
jours. Aux Canaries par exemple, l'eau en bidons de 5 litres est à des prix défiant toute concurrence. C'est là que nous avons fait nos
plus grandes provisions. De plus ils la conditionnent dans des bidons rectangulaires beaucoup plus faciles à caser dans nos coffres de
bateau. Après usage nous les avons gardés afin d'y consigner l'eau de pluie. Attention, celle-ci se dégrade rapidement à la lumière et à
la chaleur ambiante. Ainsi, une mini dose de javel dans les bidons d'eau de pluie permet de la garder plus longtemps. Nous ne
l'utilisons que pour la douche et l'entretien, jamais pour la boire.
Texte écrit par Nathalie Cathala et mis en page par Dominique Cathala en Novembre 2006 - Tous droits réservés Pour toute
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