Obligation de passer par un organisme agréé pour l`adoption

Transcription

Obligation de passer par un organisme agréé pour l`adoption
Centre International de Référence pour les
droits de l’enfant privé de famille
(SSI/CIR)
Date de création : Octobre 2003
Dernière mise à jour : Juin 2005
Obligation de passer par un organisme agréé pour l’adoption
internationale ?
Sommaire
I.
II.
Pays d’accueil et d’origine imposant l’intervention d’un organisme agréé dans l’adoption
internationale.
Recommandations du SSI/CIR sur l’intervention des organismes agréés dans l’adoption
internationale.
I. Pays d’accueil et d’origine imposant l’intervention d’un organisme agréé dans
l’adoption internationale.
Quels pays d’accueil et d’origine imposent l’intervention d’un organisme d’adoption agréé par le pays
d’accueil, ci-après nommé OAA, c'est-à-dire interdisent l’adoption internationale privée (ou
indépendante ou directe) ?
(Listes non exhaustives, en fonction des informations disponibles au SSI/CIR ; toute information
complémentaire est bienvenue)
La recommandation 1443 (2000) de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, intitulée
« pour un respect des droits de l’enfant dans l’adoption internationale », condamne fermement
l’adoption indépendante.
1) Pays d’accueil
• Canada (Ontario):
Source : Autorité centrale de l’Ontario,
http://www.children.gov.on.ca/CS/en/programs/Adoption/Publications/internationalAdoption.htm.
• Canada (Québec) (loi non encore en vigueur):
Sources : Loi du 22 avril 2004, non encore en vigueur ; Secrétariat à l’adoption internationale du
Québec, http://www.adoption.gouv.qc.ca/fr/index.php?menu=8 et Bulletin n° 68-69 du SSI/CIR.
• Danemark:
Source : The Danish National Adoption Board,
http://www.adoptionsnaevnet.dk/info_english/default.htm (Autorité centrale).
32, Quai du Seujet - 1201 Genève – Suisse
Tél.: +41 22 906 77 00 – Fax : +41 22 906 77 01– Email : [email protected] – Page Web : www.iss-ssi.org
• Etats Unis / Vietnam:
Un accord bilatéral sur l’adoption a été signé par les Etats Unis et le Vietnam le 21 juin 2005. Cet
accord impose le passage par un OAA pour les adoptions avec le Vietnam. Les adoptions privées
indépendantes sont interdites.
Sources : Holt International, http://www.holtintl.org/infoupdates/ ; SSI USA.
• Finlande:
Sources : Loi finlandaise sur l’adoption du 8 février 1985 ; décret 508/1997 ; I. LAMMERANT, n°
296.
• Italie:
L’obligation de passer par un OAA est assouplie pour certaines adoptions endofamiliales.
Sources : Loi du 31 décembre 1998 ; I. LAMMERANT, n° 293.
• Norvège:
Sources:
National
Office
for
Children,
Youth
and
Family
http://bufa.no/index.php?shw=ENGLISH (Autorité centrale); Département d’Etat américain.
Affairs,
• Suède:
L’adoption directe est interdite excepté dans les cas d’adoptions d’un membre de la famille ou
d’autres cas particuliers autorisés par l’Autorité centrale suédoise.
Sources : Loi 192 de 1997 (art. 4) ; The Swedish National Board for Intercountry Adoptions (NIA),
http://www.nia.se/frameset.htm (Autorité centrale); I. LAMMERANT, n° 293.
Cas particuliers : recours à des OAAs fortement conseillé; dans les cas exceptionnels d’adoptions
ne passant pas par un OAA, l’Autorité centrale exerce les principales fonctions d’un OAA (elle-même
ou par délégation à un organisme social) et contrôle la fiabilité et le professionnalisme de
l’intermédiaire dans le pays d’origine :
• Australie:
Source : J. DEGELING, « L’adoption internationale en droit australien », dans ASSOCIATION LOUIS
CHATIN POUR LA DEFENSE DES DROITS DE L’ENFANT, L’adoption internationale en droit
comparé, Actes du Colloque, Paris, 25-26 avril 2003, pp. 71-103, sp. pp. 89-90.
• Belgique (Communauté flamande):
L’adoption internationale peut être réalisée soit par l’entremise d’un OAA, soit de manière privée,
mais dans les deux cas après obtention par les candidats de l’agrément de l’Autorité centrale
flamande, sur la base d’un rapport familial et d’un avis communiqués par un service social. Tout
candidat adoptant doit suivre un programme de préparation. En cas d’adoption privée, l’Autorité
centrale doit en outre approuver l’intervention du contact étranger proposé par le candidat.
Sources : Décret du 15 juillet 1997(art.3 et 4) ; I. LAMMERANT, n° 297-300.
• Belgique (Communauté française) (en projet):
Source : Avant-projet de décret relatif à l’adoption, version du 14 octobre 2003.
• Pays Bas:
En matière d’adoption internationale (autre que celle de l’enfant du conjoint), les candidats, après
avoir reçu l’agrément (obligatoire et sanctionné), peuvent soit s’adresser à un OAA pour l’ensemble
de la procédure, soit entreprendre une adoption indépendante avec un intermédiaire à l’étranger qui
sera toutefois soumis à enquête et autorisation.
Source : I. LAMMERANT, n° 300.
2) Pays d’origine
32, Quai du Seujet - 1201 Genève – Suisse
Tél.: +41 22 906 77 00 – Fax : +41 22 906 77 01– Email : [email protected] – Page Web : www.iss-ssi.org
• Albanie:
Sources: Département d’Etat américain; MAI.
• Bolivie:
Sources : Bulletin SSI/CIR n° 50-51, septembre-octobre 2002 ; Département d’Etat américain.
• Chine:
Sources: China Center of Adoption Affairs, http://www.china-ccaa.org/flfg/0112syf-english.htm
(Autorité centrale); Bulletin SSI/CIR n° 54, février 2003; MAI ; Département d’Etat américain.
• Corée du Sud:
Source : MAI.
• Ethiopie:
Sources : Bulletin SSI/CIR n° 54, février 2003 ; MAI ; Département d’Etat américain.
• Honduras:
Source: Département d’Etat américain.
• Inde:
Sources : Central Adoption Resource Agency, http://www.adoptionindia.nic.in/carahome.html
(Autorité centrale); MAI; Département d’Etat américain.
• Niger:
Source : MAI.
• Russie (en projet):
Source : Mme V.S. Tsekhonia, Directrice du Département de l’approvisionnement méthodicoorganisationnel de la banque de données relatives aux enfants laissés sans soins par leurs parents,
Ministère de l’Education de la Fédération de Russie, Colloque en adoption internationale organisé à
Montréal les 4 et 5 mai 2004 par le Secrétariat à l’adoption internationale du Québec,
http://www.adoption.gouv.qc.ca/fr/mod.php?mod=userpage&page_id=69&menu=1006.
• Vietnam / Etats Unis:
Un accord bilatéral sur l’adoption a été signé par les Etats Unis et le Vietnam le 21 juin 2005. Cet
accord impose le passage par un OAA pour les adoptions avec le Vietnam. Les adoptions privées
indépendantes sont interdites.
Sources : Holt International, http://www.holtintl.org/infoupdates/ ; SSI USA.
Sources :
- I. LAMMERANT, L’adoption et les droits de l’homme en droit comparé, Librairie générale de droit
et de jurisprudence, Paris et Bruylant, Bruxelles, 2001, n°s 293-302.
- SERVICE SOCIAL INTERNATIONAL (éd.), Internal and Intercountry Adoption Laws , Kluwer Law
International, La Haye, mise à jour permanente.
- MAI (Mission de l’Adoption internationale – France),
http://www.diplomatie.fr/MAI/index.html.
- Département d’Etat américain, http://www.travel.state.gov/adopt.html.
II. Recommandations du SSI/CIR sur l’intervention des organismes agréés dans
l’adoption internationale
32, Quai du Seujet - 1201 Genève – Suisse
Tél.: +41 22 906 77 00 – Fax : +41 22 906 77 01– Email : [email protected] – Page Web : www.iss-ssi.org
A. Les droits de l’enfant dans l’adoption nationale et internationale : Fondements éthiques et
orientations pour la pratique, SSI/CIR, 1999/2004,
http://www.iss-ssi.org/Resource_Centre/guide_ethique_fr.PDF:
« Pour l’adoption internationale, le SSI est favorable à l’intervention d’organismes agréés,
particulièrement dans les pays d’accueil car ils assurent le lien concret au cas par cas entre le pays
d’origine et le pays d’accueil, entre l’enfant et la famille adoptive, entre le terrain et le niveau
gouvernemental.
Cependant, dans l’intérêt des enfants, le SSI insiste sur la nécessité de :
o Renforcer les critères d’accréditation
o Systématiser la méthodologie d’accréditation
o Favoriser la formation de ces organismes en matière de droits de l’enfant et
adoption
o Améliorer leur supervision périodique.
Sans dévaloriser le volontariat, le SSI recommande que les organismes agréés disposent des
moyens matériels suffisants pour engager un personnel professionnellement qualifié, assurer sa
formation en matière d’adoption et de droits de l’enfant et organiser son travail de manière
appropriée pour assurer une véritable protection des enfants. Une partie des tâches effectuées par
les organismes agréés l’étant en délégation de l’Etat, celui-ci devrait s’assurer ou aider à ce que
ceux-ci disposent des ressources et des qualifications suffisantes. »
B. Commission spéciale de la Conférence de droit international privé de La Haye de
novembre/décembre 2000 sur le fonctionnement pratique de la Convention de La Haye du 29
mai 1993, Evaluation présentée par le SSI,
http://www.iss-ssi.org/Resource_Centre/Tronc_CI/clhevaluation.PDF
4) Autorité centrale ou organismes agréés
L'expérience montre que la réflexion doit être approfondie sur l'application de l'article 9 par
rapport à la protection de l'enfant.
En se référant à cet article, certains Etats ont fait marche arrière par rapport à des pratiques
antérieures mises en place pour mieux protéger les enfants : l'obligation pour les adoptants de
passer par des organismes, agréés dans l'Etat d'accueil et autorisés par l'Etat d'origine, a été
annulée et remplacée par un libre choix laissé aux adoptants de passer soit par un organisme agréé
soit directement pas l'autorité centrale de leur Etat de résidence pour adopter dans un Etat d'origine
donné. Cela pose deux problèmes sur lequel il nous faut réfléchir:
4-1) Est-il dans l'intérêt des enfants d'avoir simultanément un double mécanisme de coopération,
entre un Etat d'origine et un Etat d'accueil donnés?
Cela n'entraîne-t-il pas l'autorité centrale de l'Etat d'accueil dans un rôle semblable à celui des
organismes agréés sans en avoir les mêmes moyens (pas de représentant sur place par exemple,
pas de contact direct avec les organismes agréés de l'Etat d'origine); cela ne met-il pas l'autorité
centrale dans une attitude de compétition avec les organismes agréés de son propre pays et ne
crée-t-il pas de la confusion?
Le grand danger de ce mécanisme est qu'il crée, pour les adoptants d'un même Etat d'accueil, une
adoption à deux visages dans le pays d'origine, qu'il est porteur de risques sérieux de coûts non
raisonnables et de gains indus et, par voie de conséquence, d'abus pour la protection des enfants.
Les adoptants qui soumettent leur dossier via l'autorité centrale de l'Etat d'accueil entrent ensuite en
contact direct avec les intervenants officiels ou agréés de l'Etat d'origine avec, lorsque ceux-ci sont
32, Quai du Seujet - 1201 Genève – Suisse
Tél.: +41 22 906 77 00 – Fax : +41 22 906 77 01– Email : [email protected] – Page Web : www.iss-ssi.org
nombreux ou variés, des dangers de corruption et de surenchère financière pour obtenir un enfant
selon des critères souvent étrangers à l'intérêt de l'enfant; ils se trouvent parfois dans l'obligation
pratique d'utiliser les services d'avocat, traducteur, etc. dont les coûts, l'éthique et le
professionnalisme sont incontrôlés.
En parallèle, les adoptions gérées par des organismes agréés soucieux de l'intérêt de l'enfant et
refusant d'entrer dans un mécanisme de surenchère financière sont pénalisés dans la pratique: les
enfants qui leur sont confiés sont moins nombreux et sont principalement les enfants à besoins
spéciaux.
4-2)
L'autorité centrale d'un Etat d'accueil est-elle l'organisme le plus apte à suivre, au cas par
cas, la procédure en vue d'adoption dans l'intérêt supérieur des enfants, particulièrement
lorsqu'il s'agit d'adoptions avec des Etats d'origine pour lesquels la demande est forte et le
nombre de dossiers élevé ?
Ne se limite-t-elle pas à un contrôle essentiellement administratif ou légaliste des dossiers car elle
ne peut assurer l'accompagnement psychosocial et pratique au cours de la procédure d'adoption
malgré son importance pour l'enfant et les adoptants ?
Nous estimons, en observant la pratique, qu'il ne devrait pas être possible d'établir un double
mécanisme dans un Etat d'accueil pour sa coopération avec un Etat d'origine donné ou, dans un Etat
d'origine pour sa coopération avec un Etat d'accueil donné. L'interprétation de l'article 9 devrait
limiter le choix à l'un ou l'autre mécanisme entre deux Etats donnés, mais pas permettre de choix
des deux mécanismes simultanément.
5) Organismes agréés
PROBLÈMES MAJEURS
Le SSI est favorable à l'intervention d'organismes agréés, particulièrement dans les Etats d'accueil
car ils assurent le lien concret, personnalisé, au cas par cas entre l'Etat d'accueil et l'Etat d'origine
entre l'enfant et la famille adoptive, entre le niveau local et le niveau gouvernemental. Mais, d'après
nos observations:
5-1) La qualification des organismes agréés reste actuellement généralement très insuffisante
pour assurer une véritable protection des enfants. Les pratiques de certains organismes agréés sont
même parfois contraires aux dispositions de la Convention de La Haye de 1993 et de la Convention
des droits de l’enfant (amateurisme, méconnaissance des droits de l'enfant en matière d'adoption,
non subsidiarité réelle de l'adoption internationale, gains matériels indus, etc.). Cela concerne tant
les Etats d'accueil que les Etats d'origine. CLH art. 10 et 11.
5-2) Le nombre des organismes nationaux agréés (article 10), comme celui des organismes
agréés étrangers autorisés (article 12) n'est pas compatible avec une réelle protection des
enfants.
5-2-1) En vue de la ratification, ou suite à la ratification de la CLH, certains Etats ont encouragé la
création rapide et agréé un grand nombre d'organismes sans que ceux-ci aient l'expérience, les
qualifications ou connaissances nécessaires, ou une éthique avérée de droits de l'enfant. Cela pose
de graves problèmes pour la protection des enfants.
5-2-2) La fréquente absence de critères d'agrément ou d'autorisation basés sur une évaluation des
besoins des Etats d'origine fait que:
• Dans un Etat d'accueil, un trop grand nombre d'organismes sont parfois agréés pour travailler
dans un même Etat d'origine. Cela contribue à la pression des Etats d'accueil sur l'Etat d'origine.
Alors que, simultanément, il arrive qu'aucun organisme ne soit agréé pour coopérer avec des
Etats d'origine où des besoins existent.
32, Quai du Seujet - 1201 Genève – Suisse
Tél.: +41 22 906 77 00 – Fax : +41 22 906 77 01– Email : [email protected] – Page Web : www.iss-ssi.org
•
•
Dans un Etat d'origine, un trop grand nombre d'organismes agréés étrangers sont parfois
autorisés, cela créant une surcharge de travail ingérable par l'autorité centrale ainsi que des
pressions et compétitions défavorables à l'intérêt des enfants.
Tant dans l'Etat d'accueil que dans l'Etat d'origine, l'agrément ou l'autorisation ne prend pas
suffisamment en compte des critères liés au profil des enfants en besoin d'adoption
internationale, ce qui entraîne une inadaptation des familles disponibles aux besoins des enfants
et, par suite, des frustrations porteuses de risques d'abus.
5-2-3) Dans certains Etats d'accueil au contraire, le nombre des organismes agréés est insuffisant
pour gérer les adoptions internationales.
5-3) La diversité des critères d'agrément et de retrait d'agrément dans les Etats où plusieurs
autorités ont la compétence officielle pour l'octroyer entraîne des déséquilibres, des carences
au niveau de la coordination et est porteuse de risques lorsque certaines des autorités compétentes
sont peu formées aux réalités de l'adoption internationale. »
C. Intervention of ISABELLE LAMMERANT, Coordinatrice du SSI/CIR,
« Ethique et Adoption Internationale », dans ASSOCIATION LOUIS CHATIN POUR LA
DEFENSE DES DROITS DE L’ENFANT, L’Adoption internationale en droit comparé, Actes du
colloque, Paris, 25-26 Avril 2003, pp. 35-50 :
L’intervention d’organismes d’adoption agréés
21.- La Convention de La Haye sur l’adoption autorise les Etats à déléguer certaines des fonctions
conférées aux Autorités centrales à des organismes agréés, professionnels et sans but lucratif. Pour
intervenir sur le territoire d’un autre Etat membre, ils doivent en outre être autorisés par cet Etat (art.
9-13 et 22). Dans les principaux pays d’accueil, un pourcentage variable des candidats adoptants a
recours aux organismes agréés, les autres procédant à une adoption dite « indépendante », en
prenant directement contact avec des professionnels ou des autorités des pays d’origine, voire – ce
qui est en tout cas critiquable - avec les parents d’origine ou les gardiens de l’enfant.
Le Service Social International n’est pas favorable aux adoptions indépendantes1. L’organisme
d’adoption agréé est en effet garant du professionnalisme et, en principe, du caractère
interdisciplinaire du processus d’adoption internationale2. Il tient le rôle du « tiers » et met en œuvre
la nécessaire intervention de la société et de l’Etat. Par l’intermédiaire de ses représentants dans les
pays d’origine, l’organisme d’adoption du pays d’accueil constitue également un lien concret entre
les pays, et entre leurs autorités respectives. A ce titre, il justifie, face aux Autorités du pays
d’accueil, l’adoptabilité de l’enfant, le respect du principe de double subsidiarité de l’adoption
internationale et la préparation de l’enfant, et face aux Autorités du pays d’origine, l’aptitude à
adopter et la préparation des candidats adoptants.
En cas d’adoption indépendante, ce rôle professionnel n’est pas tenu, et des garanties de respect
des droits de l’enfant et de l’homme peuvent manquer, eu égard, notamment, à la situation concrète
dans le pays d’origine. L’agrément conféré aux adoptants peut alors être interprété – à tort – comme
un « feu vert » pour tous les agissements dans le pays d’origine, voire comme un « droit d’adopter ».
22.- Or, l’Etat d’accueil peut être considéré comme portant une responsabilité relative aux
comportements de ses ressortissants, candidats adoptants, à l’étranger. Par ailleurs, il lui reviendra
de reconnaître ou de refuser de reconnaître des effets juridiques essentiels (un lien de filiation) aux
conséquences de ces comportements ainsi que, le cas échéant, d’en assumer, par l’intermédiaire de
1
Voy. aussi les résultats d’une enquête effectuée pour informer la Conférence de La Haye de droit
international privé : DEFENSE DES ENFANTS – INTERNATIONAL, FEDERATION INTERNATIONALE
TERRE DES HOMMES ET SERVICE SOCIAL INTERNATIONAL, Conclusions préliminaires d’une enquête
conjointe sur les adoptions transnationales indépendantes, Genève, mars 1991, 20 pp.
2
Faisant intervenir travailleurs sociaux, psychologues, médecins et juristes.
32, Quai du Seujet - 1201 Genève – Suisse
Tél.: +41 22 906 77 00 – Fax : +41 22 906 77 01– Email : [email protected] – Page Web : www.iss-ssi.org
ses autorités et organismes de protection de l’enfance, les résultats éventuellement dommageables
s’ils donnent lieu à un échec de l’adoption.
Ne serait-il donc pas envisageable de rendre obligatoire le passage par des organismes agréés ?
Plusieurs Etats d’accueil imposent déjà pareil recours à leurs ressortissants souhaitant adopter
internationalement ou à tout le moins soumettent à un contrôle officiel le contact à l’étranger des
personnes envisageant une adoption indépendante.
Lorsqu’il agrée des organismes d’adoption, l’Etat est bien entendu également responsable de leur
contrôle, de leur formation continue, de leur supervision ainsi que de l’amélioration constante de
leurs pratiques. Il est garant de l’éthique (y compris financière) et du professionnalisme tant du
personnel des organismes sur son territoire que de leurs représentants dans les Etats d’origine. Il
peut de la sorte mener une véritable politique de l’adoption internationale et gérer effectivement ce
secteur de l’aide à la jeunesse qui, dans les hypothèses de l’adoption indépendante, lui échappe le
plus souvent.
A défaut de pareille politique, les Etats d’accueil devraient, pour assumer pleinement leurs
responsabilités, investiguer à propos des contacts à l’étranger de chaque candidat optant pour une
adoption indépendante. »
D. Editorial du Bulletin mensuel n° 70 : Adoption internationale : Intérêt de l’intervention
obligatoire des organismes agréés des pays d’accueil, sous le contrôle des Autorités
centrales (disponible sur notre site, http://www.iss-ssi.org/Edito.70.fra.pdf )
Le passage obligatoire des candidats adoptants par des organismes d’adoption agréés (OAA) des
pays d’accueil, bien que non imposé par la Convention de La Haye de 1993, représente une garantie
certaine pour les adoptions internationales entre pays membres ou non de la convention. Ces OAA
doivent être agréés par le pays d’accueil (art. 9-11 de la CLH-1993) et autorisés par le pays d’origine
(art. 12.
En effet, les Autorités centrales et compétentes des pays d’accueil et d’origine ont rarement les
moyens matériels et humains (personnel interdisciplinaire en nombre suffisant, formé, expérimenté et
proche du terrain) de remplir pleinement les fonctions de préparation et d’accompagnement des
enfants, des parents d’origine et/ou des futurs parents adoptifs (art. 12 et 21 de la Convention des
droits de l’enfant - CDE - et 4-5 de la CLH-1993 ; Guide éthique du SSI : www.issssi.org/Resource_Centre/guide_ethique_fr.PDF). Il en va pourtant de la réalisation d’une procédure
d’adoption la plus conforme possible aux droits de l’enfant et à l’éthique promue par les conventions
internationales. Le rôle des OAA relève alors d’une délégation, par les Etats, d’une partie de leurs
tâches, à des organismes du secteur privé et/ou public répondant à des critères spécifiques prévus
par la loi.
En outre l’organisme d’adoption agréé devrait être garant, sous le contrôle des Etats d’accueil et
d’origine, de l’éthique, du professionnalisme et du caractère interdisciplinaire du processus d’adoption
internationale. Il tient le rôle du « tiers » de proximité et contribue à mettre en œuvre les nécessaires
intervention et médiation de la société et de l’Etat dans la protection des enfants privés de famille (art.
20 et 21 de la CDE). L’organisme d’adoption constitue un lien concret entre les familles, les
intervenants et les Autorités des pays d’accueil et d’origine. L’intervention complémentaire des OAA
permet aux Autorités centrales de remplir pleinement leur mission et de développer une véritable
politique intégrée de l’adoption internationale, dans un souci toujours plus grand de service aux
enfants. Ce rôle n’est pas assuré dans les adoptions indépendantes, que nous définissons ici comme
les adoptions dans lesquelles les candidats adoptants, sans aucun recours à un OAA de leur pays,
entrent en contact direct avec les professionnels ou autorités des pays d’origine, en particulier ceux
qui déterminent l’adoptabilité de l’enfant ou l’apparentement - voire même parfois avec les parents
d’origine ou les gardiens de l’enfant (ce qui est encore plus critiquable : voir l’article 29 de la CLH1993).
Par ailleurs, l’obligation pour les candidats adoptants de passer par un OAA participe à la lutte
contre certains abus, trafics et échecs trouvant leur origine dans le recours aux adoptions
indépendantes. L’agrément conféré aux adoptants au terme de leur évaluation psychosociale est
32, Quai du Seujet - 1201 Genève – Suisse
Tél.: +41 22 906 77 00 – Fax : +41 22 906 77 01– Email : [email protected] – Page Web : www.iss-ssi.org
parfois interprété – à tort - par certains adoptants indépendants comme un « droit à un enfant »
justifiant des agissements dans le pays d’origine pouvant conduire à des pressions pour obtenir un
enfant ou à une complicité consciente ou inconsciente dans des trafics. Or, l’Etat d’accueil peut être
considéré comme portant une responsabilité relative aux comportements de ses ressortissants,
candidats adoptants, à l’étranger. Pour mémoire, dans ses recommandations à la France en mai
2004, le Comité des Nations Unies pour les droits de l’enfant a rappelé les risques que présentent les
adoptions indépendantes, et encouragé le recours à des OAA (voir Bulletin 68-69). S’il autorise
l’adoption indépendante, l’Etat d’accueil devrait à tout le moins, pour réunir un minimum de garanties
et en collaboration avec l’Etat d’origine, mener des investigations sur la fiabilité (en termes de droits
de l’enfant) des contacts à l’étranger de chaque candidat individuel, tâche quasiment impossible à
remplir de façon effective quand le nombre de requérants est important.
En conséquence, pour remplir pleinement leurs obligations internationales et éthiques, il revient
aux Etats d’envisager le recours obligatoire, par les candidats adoptants, aux OAA des pays
d’accueil. Un nombre croissant d’Etats d’accueil et d’origine l’imposent déjà : voir CIR, « Obligation de
passer
par
un
organisme
agréé
pour
l’adoption
internationale?»,
www.issssi.org/Resource_Centre/Interdiction_adoptions_internationales_priveesFRA.pdf. Cependant, cette
mesure ne constitue une garantie effective pour les droits de l’enfant que si les Etats assurent
parallèlement le soutien, la formation et le contrôle des OAA, ainsi que la mise en place d’un système
de régulation qualitative et quantitative (notamment en rapport avec le nombre et le profil des enfants
en besoin d’adoption internationale : voir Editorial du Bulletin 65, www.iss-ssi.org/Edito.65.fra.pdf).
Nous reviendrons dans un prochain bulletin sur la régulation des OAA des pays d’accueil. Voir aussi
ci-dessous, Intervenants, Réflexions critiques, France et Suisse.
L’équipe du CIR
32, Quai du Seujet - 1201 Genève – Suisse
Tél.: +41 22 906 77 00 – Fax : +41 22 906 77 01– Email : [email protected] – Page Web : www.iss-ssi.org

Documents pareils