Baruch Spinoza, Éthique, appendice du livre 1

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Baruch Spinoza, Éthique, appendice du livre 1
Baruch Spinoza, Éthique, appendice du livre 1
Introduction
Idée fondamentale de Spinoza : Dieu se caractérise par les attributs suivants : unité, existence,
nécessité, puissance infinie. Or le problème est que la plupart des êtres humains, et notamment dans
les religions, ne veulent voir la réalité que par le prisme de leurs désirs, se font donc des illusions sur
la réalité et développent ainsi des croyances irrationnelles en un Dieu qui a des volontés, des désirs,
et qui donc perd son unité et sa puissance infinie – car désirer, c'est avoir un manque, et donc être
imparfait. Les religions font donc Dieu... à l'image de l'homme !
Le but de Spinoza est donc d'analyser ces croyances irrationnelles en montrant leur fausseté. Il va
1./ partir de la manière dont les êtres humains se font, en suivant leurs désirs, une vision illusoire de la
réalité
2./ pour ensuite analyser l'idée qu'il existerait un Dieu qui désire et détruire cette idée
I./ les préjugés finalistes des êtres humains
•
le problème central : l'opposition entre le finalisme, qui est illusoire, et la nécessité, qui est
réelle
Illusion du finalisme
Réalité de la nécessité.
Lorsque nous agissons, nous croyons que nous
savons pourquoi : pourquoi j'achète une voiture,
en la payant avec mes économie ? Tout le monde
dira : parce que j'avais le désir, l'envie de l'acheter.
Mais c'est une ERREUR !
La voiture me plait ? Mais ce désir, il sort d'où ?
Est-il véritablement une cause, n'est-ce pas plutôt
un effet de causes dont je n'ai pas conscience ? Par
exemple l'influence de la culture dans laquelle j'ai
C'est donc ma fin, mon but qui est la cause de grandi, de l'éducation que j'ai reçue ?
mon action.
Ce n'est donc pas ma fin, mon but, qui est cause
Le préjugé consiste à croire qu'on a identifié des de mon action, c'est le passé de tout ce que j'ai
causes... sans même se donner la peine d'y vécu qui me détermine nécessairement à vouloir
réfléchir !
ceci ou cela
Donc la première grande conclusion de Spinoza est que « les êtres humains se croient libres
parce qu'ils ignorent les causes véritables qui les déterminent. »
II./ Une vision insensée de la réalité qui doit être corrigée par la science
• On comprend pourquoi les êtres humains sont superstitieux, croient aux esprits
Nous avons donc une tendance illusoire à interpréter la réalité en fonction de nos désirs. Imaginons que
je désire fortement qu'il fasse beau, et qu'effectivement ce jour là le soleil soit resplendissant. Et bien
c'est absurde, mais j'aurais tendance à croire que le soleil a voulu me rendre ce service ! C'est là ce que
Spinoza appelle la superstition. Pour Spinoza c'est mon désir qui est la source d'une grande partie des
croyances religieuses. D'où la croyance dans les miracles, les mauvais présages, etc... Les épidémies,
les tremblements de Terre, sont identifiés à une mystérieuse « volonté divine créatrice » qui n'est en
fait que le produit de l'ignorance accouplée au désir.
• Comment sortir de ce délire interprétatif ?
Tout simplement en arrêtant de prendre nos désirs pour des réalités, et en acceptant qu'il n'y a qu'une
manière de comprendre la nature, et la réalité en général : c'est de rechercher les nécessités naturelles.
Ainsi j'arrête de croire que le soleil a voulu m'aider, j'apprends la météorologie et je comprends que le
temps qu'il fait ne dépend absolument pas de mon désir, ni du désir de quelque être divin.
Donc le point de départ de la science, c'est éviter d'interpréter les phénomènes naturels en fonction
de nos désirs, mais accepter de partir de notre ignorance des mécanismes de la nature.
IMAGINATION
RAISON
La plupart des hommes prennent leurs désirs pour Ce qu'il faut faire au contraire, c'est accepter que
des réalités. Ils analysent la réalité en fonction de
la réalité n'obéit pas à nos désir. Il faut la voir
leurs désirs. Ils restent donc prisonniers de leur
comme un simple ensemble de nécessités que
subjectivité
nous devons apprendre à connaître : il faut s'ouvrir
à l'objectivité
On voit donc bien que lorsque la plupart des êtres humains disent qu'ils croient en Dieu, ils
croient en fait d'abord à ce que leur désir les pousse à imaginer
La plupart des religieux disent qu'ils parlent de Dieu alors qu'en fait ils n'expriment que leurs propres
désirs. Donc ces religieux sont en fait des ignorants qui imposent leur ignorance aux autres croyants.
C'est ce qu'on appelle l'obscurantisme. La religion devient alors un instrument de pouvoir. Ici Spinoza
critique donc la dynamique sectaire des religions : on enferme les croyants dans des représentations
mentales qui n'ont aucune base objective, et on crée ainsi un dogme officiel, et toute idée divergeante
est cataloguée comme hérésie ou impiété. Et ainsi on prend le pouvoir sur les esprits faibles de la
plupart des hommes. L'ignorance est une prison.
•
Récapitulation :
L'erreur de la plupart des hommes : le
finalisme
Le préjugé CIT : « tous les hommes naissent
fondaignorants des causes des choses, et ont
mental
tous l'appétit de rechercher ce qui leur est
utile, de quoi ils ont conscience »
Les hommes n'analysent pas la nature, ils
ne voient que leurs désirs. Ils se croient
libres de désirer parce qu'ils ignorent les
causes qui les déterminent.
La valeur
fondament
ale
L'esprit
humain
Qu'est-ce
que la
religion ?
L'idée de Spinoza :
la nécessité
CIT : « tout dans la nature procède selon
une nécessité éternelle et une souveraine
perfection »
En réalité l'être humain n'est pas libre, mais
il est déterminé à être ce qu'il est par le jeu
de la nécessité.
L 'utilité, toujours subjective : c'est utile
pour moi, donc c'est bon, c'est vrai, c'est
bien, c'est juste
La vérité : accepter de voir la réalité de
manière objective même si ça déçoit mes
désirs.
L'imagination ignorante des vraies
causes des choses et qui se nourrit des
désirs
L'intelligence, c'est-à-dire se confronter à
son ignorance pour essayer de comprendre
les vraies causes des choses
C'est imaginer que Dieu est à notre image, C'est comprendre que Dieu est un être
et qu'il a donné à la réalité un sens qui absolument nécessaire et parfait
peut s'accorder à nos désirs
Comment Par la superstition : vaine croyance que Par la simple connaissance de la nature
se tourner nous pouvons attirer l'attention de Dieu
vers Dieu ? sur nous.
conclusion Tant que les êtres humains se croiront
libres, ils prendront leur désir pour des
réalités, et croiront en un ou des Dieux qui
n'existent pas puisqu'ils trouvent leur
source dans leur propre imagination
Le sage est celui qui prend conscience que
ce qu'il croyait savoir n'est que le produit de
l'imagination. Alors, avec méthode, il essaye
de vraiment comprendre la nature, et ainsi,
de se tourner réellement vers le divin.