La saison de chasse commence, il fait très beau et

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La saison de chasse commence, il fait très beau et
La chasse 2002 de Marie-Sophie Royer
La saison de chasse commence, il fait très beau et chaud, beaucoup trop chaud
à mon goût pour aller chasser le chevreuil. Samedi matin, c’était pleine lune, je
suis au poste de surveillance très tôt. La température était de 15 degrés celsius
à 3 hrs 30 ce matin… et on annonce du soleil aujourd’hui… je ne voudrais pas
risquer de gaspiller la venaison. Je prévois donc quitter mon poste assez tôt et
me reprendre en fin de journée, ce sera moins risqué. Tout est calme sauf une
maman raton et ses 5 rejetons qui passent voir s’il reste des pommes. Ils
doivent poursuivre leur chemin, avec la levée du jour je constate que le gros tas
de pommes que j’avais mis le jeudi est totalement disparu.
Je regarde l’heure, il est 9 heures et il fait soleil et de plus en plus chaud. Je
décide de partir. J’accroche mon arc à ma corde et la fait descendre au sol. Je
me lève pour quitter mon poste d’affût et c’est à ce moment que j’entends du
bruit en avant. Je reprends ma position assise et regarde défiler devant moi un
beau buck de 8 pointes suivit de près par un petit de 4 pointes. Je tente
discrètement de toucher à ma corde pour remonter mon arc mais c’est inutile, je
n’y arriverai pas. Je décide donc de rester sagement assise pour ne pas qu’il
détecte ma présence.
Le beau mâle cherche des pommes, il n’en trouve pas, il passe devant moi
parfaitement de côté à 15 mètres puis la même chose à 7 mètres même qu’il
s’arrête quelques instants. Finalement, il continu son chemin calmement et sans
aucune méfiance. J’attends donc une bonne ½ heure avant de bouger puis m’en
retourne à la maison très déçue de voir cette occasion unique me glisser entre
les doigts.
Le soir, je remets deux sacs de pommes, tout était très calme, je n’ai rien vu. Je
donne rendez-vous à mon 8 pointes pour le lendemain matin…
Dimanche matin, je suis à mon poste d’affût à 5 heures. Cette fois, le temps est
sombre, il a plu une bonne partie de la nuit et la température est un peu plus
basse, soit environ 12 degrés celsius. Pas de vent, c’est calme et silencieux. À
5 heures 35 je regarde l’heure, puis environ 10 minutes après, j’entends un bruit
de pomme croquée mais je ne vois rien, il fait trop sombre encore. Le bruit se
répète une autre fois. Je force mes yeux à voir et je vois maintenant la silhouette
d’un chevreuil qui semble parfaitement de côté, juste à la gauche des pommes.
Je ne l’ai absolument pas entendu s’approcher malgré que j’aie une bonne ouie.
Il semble assez gros et maintenant qu’il bouge sa tête, je vois son panache
reluire, je crois reconnaître mon beau 8 pointes d’hier. Cependant, il fait encore
trop sombre pour tenter un tir et il est aussi trop tôt. J’ai un œilleton sur mon arc.
Cela m’aide à être plus précise mais par temps sombre, c’est vraiment un
inconvénient. Je patiente donc ainsi et j’ai le temps de compter 20 pommes qu’il
vient de se mettre dans l’estomac avant qu’arrive un jeune mâle de 4 pointes qui
essaie lui aussi de manger mais il est repoussé par le gros mâle. Le petit passe
devant moi à 10 mètres, j’ai une bonne visibilité, je pourrais tirer mais je décide
d’attendre et espère que mon gros restera suffisamment longtemps pour que je
puisse le mettre dans ma mire. Un petit et sa maman arrivent à ma droite. Il y a
maintenant 4 chevreuils qui sont au buffet et moi qui attends patiemment que le
jour se lève enfin. La femelle repart avec son jeune et le 4 pointes se déplace un
peu, me laissant maintenant bien voir le beau buck. Il est maintenant à 45
degrés, sa tête vers moi.
Finalement, avec l’expérience acquise au fil des ans et les nombreuses heures
de pratique au tir je sais que j’ai maintenant suffisamment d’éclairage pour un
bon tir.
J’allonge mon arc et attends. Je me doute qu’il entendra quelque chose et
vérifiera dans ma direction, ce qu’il fait d’ailleurs. Je ne bouge plus, j’attends
qu’il reprenne une pomme, sa dernière pomme. Voilà, sa tête tourne et il penche
droit sur une belle pomme rouge. Je prends tout mon temps pour être sûr de
mon tir car j’ai tout juste assez d’éclairage, par contre, je suis étrangement
calme. Je sais que cette occasion ne se représentera peut être plus jamais de
ma vie, je ne veux pas la manquer. Je décoche, le gros mâle part droit devant lui
comme une fusée, le petit 4 pointes fait un 180 degrés et part se cacher aussi.
J’entends ses pas, je sais dans quelle direction il va, je sais qu’il vient de
parcourir au moins 100 pieds (30 mètres) puis plus rien quelques instants puis
un petit bruit sourd mais non identifié à ce moment. Plus tard, je comprendrai
qu’il venait de s’effondrer au sol.
L’attente recommence. Je regarde l’heure, il est 6 heures 6 minutes. Je me
promets d’attendre au moins 30 minutes avant de bouger d’ici. Finalement, à 6
heures 36, je descends de mon arbre sans faire de bruit et je vais examiner
l’endroit ou il se trouvait. Pas de traces de sang, pas de flèches. Je fais
quelques pas dans la direction ou il est parti et pas de sang non plus mais
comme il fait encore assez sombre, je ne suis pas trop inquiète. Je sors du bois,
je retourne à la maison chercher l’aide de mon conjoint pour le pistage.
Une fois de retour sur place, je trouve les premières gouttes de sang à 100 pieds
du lieu du tir, exactement ou je l’avais entendu. On l’a rapidement retrouvé.
Maintenant qu’il ne bouge plus, je vois que la flèche est allé exactement là ou je
la voulais , je le regarde de près et constate que ce n’est pas du tout le chevreuil
que j’avais vu la veille mais un superbe 12 pointes. Une chance que je n’ai pas
vu cela avant, je ne sais pas si cela aurait affecté mon jugement de la situation et
que je n’aurais pas eu envie de précipiter mon tir par crainte de leur grande
finesse à cet âge.
Quelques photos pour immortaliser ce moment ou se mélange la surprise, la
satisfaction, la fierté et la joie de récolter une bête aussi majestueuse.
Marie Sophie Royer