SICILE SYRACUSE
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SICILE SYRACUSE
SICILE SYRACUSE La cité la plus importante de la Sicile antique est aussi l’une des plus belles. Sa prospérité économique, sa densité de population, son rayonnement culturel en font la véritable “capitale” de la Sicile ; elle a d’ailleurs tenté, mais en vain, d’en faire l’unité. UN DESTIN INCOMPARABLE DES SPLENDEURS DE LA CITÉ ANTIQUE ... La ville de Syracuse, vous l’avez entendu dire souvent, est la plus grande des villes grecques et la plus belle de toutes. Et elle est, juges, absolument telle qu’on la représente. Car forte par sa position, elle est belle à voir, qu’on l’aborde par la mer ou du côté de la terre, et elle a des ports presque entourés d’édifices et enfermés dans son enceinte, ayant des entrées distinctes, mais se rejoignant et confondant leurs eaux à l’autre bout [...] Cette ville est si vaste qu’on la dirait composée de quatre villes très importantes […] Cicéron,Verrines, Les œuvres d’art ... AUX RUINES DU 1 8 e “Cette cité orgueilleuse, l’ancienne rivale de Rome, est changée maintenant en un tas de décombres ; ce qui en reste mérite à peine le nom de ville [...]. Des quatre quartiers qui formaient l’ancienne Syracuse, il n’en reste qu’un seul, le plus petit de tous, appelé Ortygia et situé sur l’île du même nom.” Fondation C’est en 734 (ou 733?) av JC que les colons grecs de la cité de Corinthe s’établissent dans l’île d’Ortygie. Ils s’installent dans cet admirable site, légèrement élevé, donc facile à défendre, entouré de deux ports naturels, où ils trouvent à deux pas de la mer une source d’eau douce : la fontaine Aréthuse. LA BELLE ARÉTHUSE “J’étais, dit Aréthuse, une des nymphes de l’Achaïe; aucune autre que moi se montrait plus ardente à parcourir les forêts, plus ardente à y poser des filets de chasse. Quoique je n’aie jamais cherché à me faire une réputation de beauté, et si courageuse que je fusse, on ne m’appelait jamais que la belle Aréthuse”. (Ovide, Métamorphoses) Cette nymphe farouche, consacrée à Artémis se baigna un jour dans le fleuve Alphée (près d’Olympie) qui tomba éperdument amoureux d’elle. Pour échapper à ses assiduités, elle invoqua la déesse qui la transporta jusqu’à Ortygie et la transforma en source d’eau claire et fraîche. On raconte qu’Alphée disparut alors sous terre pour la rejoindre en Sicile et mêler ses eaux aux siennes… P. Brydone, voyageur écossais, A tour through Sicilia and Malta, 1770 Une représentation de la nymphe Aréthuse sur une médaille grecque Une longue prospérité Aux 7e et 6e siècles av JC, la cité prospère et fonde des sub-colonies : Akrai, Kasmenai, Camarina. La population, trop nombreuse, s’installe sur la terre ferme, dans le quartier Achradine. En 480, Gélon, de la famille des Déinoménides remporte la victoire d’Himère sur les Carthaginois. La ville s’agrandit : les quartiers de Néapolis et Tyché se peuplent. Le règne de Hiéron Ier est une période de rayonnement littéraire et artistique. La guerre contre Athènes (415 - 413 av JC) se termine par la défaite des forces navales athéniennes dans le grand port de Syracuse. Le temps des tyrans Le règne de Denys Ier, l’Ancien (405 à 367 av JC) marque une époque de grande expansion pour la cité, qui résiste aux attaques carthaginoises. Sous le règne de Hiéron II (276 à 215 av JC), la ville fait alliance avec les Romains d’où un regain des activités économiques. Un lent déclin Plan schématique de Syracuse au 5e siècle av JC. En 212 av JC, les Romains s’emparent de Syracuse au terme d’un long siège durant lequel Archimède est tué. Syracuse connaîtra le sort de la plupart des villes siciliennes : envahie par les Arabes puis les Normands, avant de subir la domination aragonaise et celle des Bourbons. ORTYGIE Son nom signifie l’île aux cailles. C’est là qu’abordent au 8e s. av JC les premiers colons grecs venus de Corinthe. Et c’est là que les habitants se réfugient lors du déclin de Syracuse, abandonnant les autres quartiers antiques : cette presqu’île sera donc toujours habitée, et certains bâtiments du Moyen Age l’attestent. Cependant c’est aux 17e et 18e siècles que les beaux édifices sont construits, dans le style baroque qui prévaut à l’époque. En se promenant dans les rues d’Ortygie, on peut en admirer les façades ornementées et les balcons de fer forgé. Petit port TEMPLE D’APOLLON C’est le plus ancien temple dorique périptère (entouré de colonnes) de la Sicile (565 av JC). PALAIS MONTALTO Style gothico-chiaramontais. 14e s. SAN FRANCESCO. Eglise de style baroque(1769). PALAIS BENEVENTANO DEL BOSCO Construit en 1775 par Lucio Ali. Style baroque. A voir : sa cour intérieure et l’escalier. PALAIS MUNICIPAL Construit par Giovanni Vermexio, de 1629 à 1633. Style baroque. PALAIS ÉPISCOPAL Construit par Andrea Vermexio en 1618. SANTA LUCIA ALLA BADIA Eglise de style baroque, édifiée de 1695 à 1703 par Luciano Caracciolo. FONTAINE ARÉTHUSE LE DUOMO C’est un monument unique qui contient à lui seul les traces de toutes les civilisations qui se sont succédé en Sicile. Temple d’Athéna du 5 s. av JC, transformé en église chrétienne au 7e s. ap JC. L’église fut agrandie par les Normands au 12e s. et remaniée au 17e s. La façade, de style baroque est d’Andrea Palma (1754). PALAIS BELLOMO 13e siècle, remanié au 15e. Actuellement musée national. SANTO SPIRITO Eglise de style baroque (1727). BAROQUE EN SICILE OU BAROQUE SICILIEN? “Le baroque, adversaire de toute règle, refuse l’équilibre, la mesure, la raison. Il est le triomphe du pathétique, de l’excessif, de l’irrationnel.” François Lebrun Art religieux qui privilégie le mouvement et la mise en scène, il exprime la sensibilité d’une époque tourmentée. Cette définition ne peut pas mieux convenir au caractère sicilien. Ce sont en effet essentiellement des architectes locaux comme Gagliardi, Landolina, Palma, Sinatra, Vermexio, qui ont dessiné et modelé les façades des palais et des églises. Mais c’est aussi grâce à la giugiolena, cette belle pierre blonde et tendre de Syracuse qu’ils ont pu leur donner le mouvement et la couleur. La façade baroque du duomo Plans du temple d’Athéna et de la cathédrale. En noir, les parties du temple encore visibles dans l’ar chitecture de la cathédrale. “Andrea Vermexio a construit en 1618, place du Duomo,le palais épiscopal, de facture encore classique. Avec son fils, Giovanni Vermexio, commence l’ère baroque. Rien de plus instructif que de se placer, face au Duomo, à une distance convenable, et d’embrasser d’un seul regard les deux palais du père et du fils. A droite, la façade plate, divisée en trois étages bien séparés, les fenêtres sans ornements, les frontons réguliers, l’entablement rectiligne, l’apparence modeste et sévère de la résidence de l’archevêque. A gauche, le palazzo del Senato (aujourd’hui la mairie) élevé en 1630 par Giovanni Vermexio. Ces deux édifices n’ont que douze ans d’écart, la différence est pourtant prodigieuse. Sans pitié le fils a détrôné son père. Pilastres en bossage au premier niveau, pilastres de plein corps au second, chapiteaux feuillus, profusion d’ornements en relief, dont un masque de tragédie au-dessus du portail, frises d’animaux symboliques, lévriers, oiseaux, serpents, et jusqu’à un lézard, qui serait la signature de l’architecte, aigle royal, blasons, panoplies, attique à modillons cannelés : pas un mètre carré qui ait été laissé nu, pas une occasion de charmer l’œil par un détail savoureux qui ait été négligée. La révolution baroque a brandi, contre l’ancien testament du dépouillement morose, le nouvel évangile de la gaieté et de l’abondance.” Dominique FERNANDEZ, Le radeau de la Gorgone NEAPOLIS N 0 È N’oubliez pas que 100m ı toutes ces constructions étaient ornées de statues et de colonnes ı les rues étaient pavées, certaines abritées par des portiques, ouvertes sur des bassins, des fontaines, bordées de boutiques et de jardins. théâtre grec amphithéâtre romain Plan de la zone archéologique de Neapolis v, avec le tracé des voies antiques (orthogonales) et actuelles v = ville nouvelle : c’est l’un des 4 quartiers de la cité antique. Les latomies Ce sont d’anciennes carrières d’où on extrayait dans l’antiquité la pierre nécessaire aux constructions. Elles ont été réutilisées pour la plupart comme orangeraies. La plus importante est la latomie du Paradis. C’est là que se trouve l’oreille de Denys, grotte artificielle soigneusement taillée en forme de S. N * A voir : les traces des outils qui ont permis d’extraire les blocs de pierre. A faire : Distinguez-vous! Ne vous mêlez pas aux hurlements, sifflements et autres claquements de pieds “touristiques". L’oreille de Denys vous livrera mieux le secret de son acoustique si vous y chantez, seul ou à plusieurs voix. Le théâtre grec Commencé dès le 5e s av JC, en partie creusé dans la colline et en partie construit, il pouvait accueillir 15 000 spectateurs. Au Ier s. av JC, il a été transformé par les Romains pour les jeux du cirque. Il était surmonté, en haut des gradins, d’un portique et d’un nymphée (fontaine). L’oreille de Denys PLAN DU THÉÂTRE A : bâtiments de la scène grecque B : aménagements romains de la scène C : partie des gradins supprimée à l'époque romaine D : diazoma Le théâtre grec de Syracuse, remanié par les Romains, est l’un des plus vastes édifices du genre L’autel de Hiéron II Agora entourée de portiques Il n’en reste que la base taillée dans le roc. Long de 198m, c’est le plus grand du monde grec. On distingue les rampes permettant d’y faire monter les animaux. On pouvait y pratiquer une hécatombe, c’est à dire sacrifier 100 bœufs en même temps. L’amphithéâtre Edifié plus tard, au cours du 3e ou 4e s. ap JC, c’est un édifice romain qui servait pour les combats de gladiateurs ou d’animaux. Texte, conception, réalisation : Magali & Claude CHARPENTIER, Michèle GOZARD - Edition 2003