Mesurer la puissance et la fragilité de l`impact de la diaspora libanaise

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Mesurer la puissance et la fragilité de l`impact de la diaspora libanaise
Les Libanais dans le monde
lundi 8 décembre 2014
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Mesurer la puissance et la fragilité
de l’impact de la diaspora libanaise
Recherche « Strong in Their Weakness or Weak in Their Strength ? The Case of Lebanese Diaspora
Engagement with Lebanon »*. Tel est le titre d’un rapport publié par le département des sciences
sociales de la LAU sur les communautés libanaises.
Pauline M. KARROUM
Décortiquer
l’émigration
libanaise est devenu une priorité pour les chercheurs en
sciences sociales. D’abord en
raison de l’importance de la
diaspora : selon les estimations, les Libanais d’origine
seraient entre 12 à 15 millions
répartis sur un grand nombre
de pays. Ensuite parce qu’on
sait que les migrants libanais
sont toujours engagés envers
leur pays d’origine. Cette
recherche récemment publiée
sur les points de force et les
fragilités de cette action de
la diaspora a été financée
par l’« International Development Research Center »
(IDRC). Son but est d’évaluer quand et dans quelles
circonstances la diaspora libanaise répartie au Canada, en
Australie et aux États-Unis
est le plus en mesure d’affecter le Liban.
Manque d’associations
caritatives
L’étude menée par Paul
Tabar et Jennifer SkulteOuaiss analyse les influences
qu’exercent les émigrés sur
le Liban. Elle se penche plus
précisément sur les divers procédés par lesquels la diaspora
s’implique dans le pays ainsi
que le poids qu’elle peut exercer sur l’État libanais. Enfin,
elle revient sur les relations
que ces comunautés nouent
avec les diverses structures
sociopolitiques locales. Plus
de 300 entretiens ont été
menés durant trois ans, avec,
d’une part, des individus et
des groupes libanais et, d’autre
part, des associations basées
en Australie, au Canada et
aux États-Unis. Quelque 29
groupes politiques, 44 habitants de zones rurales et 29
membres d’associations caritatives ont été interrogés.
Que retenir de tous ces entretiens et des diverses données
récoltées par les chercheurs
? D’une part, les associations
dans les villages exercent des
fonctions que devrait exercer
normalement l’État lui-même,
à l’instar de verser des énormes
sommes d’argent pour la
construction d’églises et de
mosquées, la création de cliniques, la construction d’une
salle d’hôpital au Liban...
D’autre part, les associations
caritatives visant à améliorer la
situation de tous les Libanais
quelles que soient leurs origines sont relativement rares
au sein de la diaspora.
Sur un autre plan, le travail
des groupes politiques dépend
de leur situation géographique.
La magie Anthony Touma
à Montréal
Anthony Touma sur scène à Montréal.
Anthony Touma a, en plus de
ses compétences musicales,
un talent particulier, rare aujourd’hui : la générosité et le
don de soi. Tous, c’est-à-dire
tous les Libano-Canadiens
(ou l’inverse), attendaient de
voir et de connaître enfin cet
artiste dont Liban-Canada
Fonds (LCF) leur parlait depuis plus de deux mois ! Le
charisme et le renom de ce
chanteur n’avaient pas encore
gagné Montréal. À la salle
Émile Legault du Cegep StLaurent, l’affluence n’était pas
pour le spectacle, mais pour la
cause que soutient Liban-Canada Fonds (LCF).
Et la magie opéra ! Anthony
Touma, avec sa simplicité, son
sourire charmeur, ses yeux
malicieux et ses blagues, a su
captiver l’attention des specta-
teurs, conquérir leur cœur !
Deux ou trois minutes ont
suffi pour qu’une connexion
s’établisse entre ce « pop singer » et les spectateurs, tous
âges confondus ! Et quand il
a lancé « Je veux chanter pour
tous ceux qui sont loin de chez
eux », l’émotion dans la salle
était à son comble !
Sa sensibilité, sa finesse,
la simplicité de sa tenue
sur scène ont tout de suite
fait la différence et conquis
l’audience. Cette authenticité s’est dévoilée encore plus
à travers les chansons de sa
propre composition. Dans
la salle, ce n’était plus des
spectateurs face à un artiste,
mais une grande famille qui
écoutait un des siens. C’était
le fils, le frère qui chantait
devant tous pour la première
fois. Il y a eu de l’amour dans
l’air, une communion parfaite
établie entre spectateurs et
artiste, entre Libanais solidaires d’une et même cause :
celle des enfants démunis du
Liban. Les recettes du concert
iront intégralement au profit
des enfants de Sesobel, l’Irap
et l’Afel.
Liban-Canada
Fonds
(LCF) est une association caritative, apolitique, non confessionnelle, qui vient en aide aux
enfants démunis et handicapés
au Liban. Elle organise des
levées de fonds annuelles dont
les procédés sont utilisés pour
soutenir l’action d’associations
caritatives libanaises travaillant
directement avec les enfants
handicapés et déshérités.
Nicole ABDEL MASSIH
À titre d’exemple, ceux situés
en Australie et au Canada sont
nombreux à être tout simplement représentatifs du système politique libanais. Leurs
objectifs : lever une quantité
importante de fonds pour les
partis qu’ils soutiennent. Aux
États-Unis, en revanche, ces
partis exercent du lobbying
pour pousser les expatriés à
réclamer leurs droits de vote
lors des élections locales. Par
ailleurs, cette étude démontre
comment les divisions internes libanaises sont souvent
reproduites à l’étranger. Pire
encore, les dissensions profondes locales engendrent non
seulement un schisme au sein
de la diaspora, mais aussi une
tendance chez certains organismes de l’étranger à adopter
une pratique politique encore
plus radicale qu’au Liban.
C’est pour toutes ces raisons
que l’État libanais semble incapable d’atteindre cette diaspora en tant que corps unitaire
et de l’intégrer dans une politique nationale. Quant au système confessionnel, il a un tel
impact sur la perception de la
citoyenneté qu’un migrant définit en général son identité via
son appartenance à une secte
religieuse plutôt qu’à la nation.
Dans un tel contexte, les
chercheurs se penchent sur
une question cruciale : dans
l’exercice de son engagement
envers son pays d’origine,
quand cette diaspora montret-elle des signes de force, et
quand apparaît-elle plus fragile ? Il semblerait que les
groupes diasporiques soient
plus puissants quand ils sont
liés à des organisations ayant
une bonne assise au niveau
national. Ainsi, certaines associations se trouvent affaiblies
lorsqu’elles désirent préserver
leur indépendance par rapport
au système libanais interne.
Une culture qui se
développe
C’est autour de cette réalité
et d’autres que Paul Tabar,
professeur associé en sociologie et anthropologie et directeur de l’Institut des études
migratoires à la LAU, a bien
voulu discuter. Selon lui, il y
a de plus en plus de voix qui
tentent au sein de la diaspora
de s’élever contre cette donne
et aspirent à la changer. « Il
s’agit d’individus ou de groupes
qui font souvent partie de la
seconde génération d’émigrés
et qui ne se satisfont plus de
la situation politique libanaise,
explique-t-il. Ils veulent aider
leur pays d’origine, mais à
leur manière, c’est-à-dire en
allant au-delà des structures
Paul Tabar, l’un des coauteurs de cette étude.
locales existantes. » Certes,
ajoute le chercheur, « ces voix
ne sont pas encore assez nombreuses ni assez fortes pour
faire basculer la réalité diasporique. Mais il existe au sein
de cette diaspora une culture
démocratique à prendre en
considération. C’est un genre
de responsabilité citoyenne
qu’acquiert l’émigrant. Il est
capable d’interroger davantage
ses dirigeants ».
À la suite de la publication de cette recherche, une
rencontre avec les instances
locales étatiques a été organisée. Les dirigeants libanais ont
donc eu connaissance de cette
réalité diasporique. La balle est
aujourd’hui dans leur camp.
*L’étude est de Jennifer SkulteOuaiss et Paul Tabar. Elle vient
de paraître dans la revue
« Immigrants & Minorities ».
Clichés de São Paulo
« La fête de
l’Indépendance du Liban,
une fête brésilienne »
« La fête de l’Indépendance
du Liban est aussi une fête
nationale brésilienne. » C’est
par cette phrase, lancée depuis
le Club Monte-Libano de
São Paulo, que le ministre
brésilien des Sports, Aldo
Rebelo, a réussi à toucher
une assistance composée
de plus de 800 Libanais
d’origine et amis du Liban,
venus écouter les hymnes
nationaux du Brésil et du
Liban lors d’une cérémonie
à l’occasion de la fête de
l’Indépendance au Liban. Le
ministre Rebelo a poursuivi :
« Je m’adresse à vous avec
une grande gratitude pour
tous les apports rendus par
la communauté libanaise
dans toutes les régions du
Brésil, Nous célébrons
l’indépendance du Liban
et allons veiller à ce que la
souveraineté de ce cher pays
ne soit plus bafouée comme
elle l’est actuellement en
raison des conflits sévissant au
Proche-Orient. »
La fête de l’Indépendance,
célébrée lors d’une grande
cérémonie, le 25 novembre
au Club Monte-Libano
de São Paulo, a permis à
la communauté libanobrésilienne de se retrouver
une fois de plus, évoquant
les problèmes du pays et
s’engageant avec plus de
force pour la réunification
des Libanais du Brésil. Le
président du Club Marcellino
Zarzour, très applaudi, a
bien souligné ces points.
L’orchestre militaire jouait
des œuvres musicales
brésiliennes et internationales.
MM. Rebelo et Zarzour
ont reçu des plaques
commémoratives du consul
Kabalan Frangié, qui leur
ont été livrées par des
mannequins portant des robes
du couturier libanais Tony
Ward. M. Frangié a souligné
que le drapeau libanais
avait été dessiné au Brésil
en 1913, soit 30 ans avant
l’indépendance du Liban.
L’Union vinicole du Liban
au Brésil
Les grands vins libanais
ont été présentés à la
communauté libanobrésilienne à São Paulo lors
d’une grande réception qui
s’est déroulée le 27 novembre
à la maison du consul du
Liban, Kabalan Frangié.
Celui-ci avait convié plus de
400 personnes, aussi bien
des professionnels et des
journalistes, que des membres
influents de la communauté.
Une délégation libanaise
était présente, présidée par
Zafer Chaoui, établissant des
contacts avec les convives,
parmi lesquels l’ambassadeur
du Liban Joseph Sayyah.
Une deuxième réception a
eu lieu le lendemain à Rio
de Janeiro, où le consul du
Liban Ziad Itani et son
équipe organisaient un grand
événement au Club MonteLibano.
Promenade dans le
quartier d’affaires
de Bras
La force du travail, l’amour
des belles femmes et
l’attachement au Liban
caractérisent la majorité
des émigrés et de leurs
descendants au Brésil. Une
promenade dans le quartier
d’affaires de Bras, au centre
de São Paulo, a permis de
découvrir l’importance de
l’activité commerciale des
Libanais qui détiennent une
grande partie des fonds de
commerce. Les Chinois sont
aujourd’hui très présents,
participant avec les Libanais
au développement de cet
important quartier historique.
Cérémonie de
l’indépendance à Rio
de Janeiro
C’est au Club Monte-Libano
de Rio de Janeiro que s’est
En compagnie d’un groupe de Libano-Brésiliens dans le quartier d’affaires de
Bras, au centre de São Paulo.
Le ministre brésilien des Sports, Aldo Rebelo, prononçant son
allocution.
déroulée cette année la fête de
l’indépendance du Liban, le
21 novembre, avec un grand
nombre de Libanais d’origine
réunis autour du consul Ziad
Itani. De nombreux discours
et une belle prestation de
l’orchestre militaire régional
ont été suivis d’un cocktail
auquel participaient un grand
nombre de descendants de
Libanais.
Les robes de la nouvelle
collection de Tony Ward ont
été également présentées au
public par l’intermédiaire de
sa directrice de marketing
Youmna Assouad. Une des
mannequins qui ont présenté
ces robes, Jasmín, étudiante
en droit, s’est avérée être de
descendance libanaise. Elle
s’apprête à visiter le Liban
pour la première fois en
février.
Par ailleurs, à Rio de Janeiro
puis à São Paulo, une
délégation de l’association
RJLiban a assisté aux
festivités de l’indépendance
du Liban, avec pour objectif
de renforcer les relations
avec les Libanais résidant au
Brésil. Cette délégation était
composée de Naji Farah, du
général Tarek Abdallah, de
Ali Ismaïl, Youmna Assouad,
Marie-Claude el-Hage et
de Götz Karphofer, venus
de Beyrouth, ainsi que de
Cielo Daou Zgaib, venue de
Mendoza en Argentine.
Naji FARAH
La délégation de RJLiban lors de la fête de l’Indépendance au Club Monte-Libano
de Rio de Janeiro avec, de gauche à droite : Ali Ismaïl, Youmna Assouad, Naji
Farah, Jasmín, le général Tarek Abdallah, Marisa, Marie-Claude el-Hage et Götz
Karphofer.
De Rio à Beyrouth, un voyage de retour
aux sources en 2015
Diaspora Plus d’une centaine de jeunes Brésiliens d’origine libanaise passeront un séjour au Liban l’été
prochain, un séjour pris en charge par RJLiban.
C’est à partir de l’hôtel Maksoud Plaza à São Paulo, la plus
grande ville d’émigrés libanais
dans le monde, qu’a été annoncé le prochain voyage de
retour aux sources au Liban
qui se déroulera durant l’été
2015 au Liban. Ce voyage, organisé par l’association RJLiban pour célébrer les 30 ans de
sa fondation, permettra à 120
jeunes d’origine libanaise de
découvrir le pays du Cèdre, ce
nombre pouvant augmenter
en fonction des parrainages.
Les systèmes d’inscription et
de financement sont déjà mis
en place, les jeunes de 18 à 35
ans n’ayant qu’à payer leurs
billets d’avion. Ils seront entièrement pris en charge par
l’association, du 16 juillet au
6 août, dans le but de former
de nouveaux cadres de la jeunesse libanaise dans le monde.
Toutes les institutions libanaises concernées sont appelées à participer à ce voyage
de retour aux sources auquel
aspirent un grand nombre
de jeunes. Les inscriptions
débuteront en décembre,
avec un tirage au sort un mois
plus tard pour déterminer la
première sélection.
Pour les jeunes Brésiliens
d’origine libanaise, un nouveau regroupement est en préparation, en collaboration avec
les organismes officiels libanais à Brasilia, São Paulo et
Rio de Janeiro. À l’instar des
jeunes Libanais d’Argentine
et du Mexique, des réunions
devraient se tenir au courant
de l’année prochaine dans tout
le pays, afin de permettre aux
jeunes qui militent pour le Liban de s’exprimer et de s’engager dans des actions concrètes
pouvant servir le pays.
L’hôtel Maksoud Plaza,
toute une histoire
Fondé en 1979 par des
Brésiliens d’origine libanaise,
l’hôtel Maksoud Plaza trône
au cœur de São Paulo, au
niveau de l’avenue Paulista et
de l’avenue Alameida Campos. Durant les dix premières
années, ce palace de plus de
400 chambres a accueilli les
principales célébrités visitant
le Brésil, se classant premier
dans toute l’Amérique latine.
Dès qu’on pénètre dans le
Maksoud Plaza, on y décèle
une ambiance toute particu-
lière. Le majestueux Atrium
Lobby offre aux hôtes une impression inoubliable, révélant
une combinaison sophistiquée
entre l’hôtel et le milieu ambiant. Une collection d’œuvres
d’artistes de renom garnit les
divers recoins de ce lobby.
C’est un magnifique projet architectural qui convertit
l’édifice en une icône de la cité,
marquant le paysage métropolitain. Au-delà du charmant
design qui le distingue, les
commodités offertes au touriste sont nombreuses, comme
la piscine, le gymnasium, la
salle de physiothérapie, un
restaurant français et des cafés,
des salles de conférences et un
théâtre. C’est ainsi qu’on ne
sent pratiquement pas le besoin de sortir de l’édifice, que
l’on soit en visite d’affaires ou
d’agrément.
Cielo DAOU ZGAIB
Cette page est réalisée en collaboration avec l’Association RJLiban.
E-mail : [email protected] – www.rjliban.com
Le fameux lobby du Maksoud Plaza, avec ses œuvres d’art.

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