19 septembre 2014, 24Heures, Images
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19 septembre 2014, 24Heures, Images
32 24 heures | Vendredi 19 septembre 2014 33 24 heures | Vendredi 19 septembre 2014 Culture&Société Culture Société Gastro Ciné Conso Sortir Les gens Festival Images La photo volée se défend au nom de l’art A Vevey, deux artistes exposent des clichés pris à l’insu des protagonistes. Une démarche entrant dans une «zone grise» du droit à l’image Stéphanie Arboit V ous êtes à la plage. Il fait beau et chaud. Vous êtes si détendus que vous vous assoupissez. On vous prend en photo pendant votre sommeil et votre image se retrouve dans une galerie d’art. C’est ce qu’a fait l’artiste Tadao Cern, sillonnant le littoral de la mer Baltique, de la Pologne jusqu’à l’Estonie, en passant par son pays, la Lituanie, avec un appareil photo camouflé en haut d’une perche de 4 mètres. Le résultat est présenté au Festival Images, à Vevey. La composition des clichés pris d’en haut est si équilibrée qu’on peine à croire que les personnages (dont les visages sont cachés) n’ont pas pris la pose. Enfant nu en position fœtale, femmes allongées, les mains tendues vers l’autre comme pour initier une danse, ou homme les bras en croix sur une serviette de bain léopard. «C’est comme si un extraterrestre feuilletait un livre sur le comportement des êtres humains à la plage, comme Dieu regardant la terre», sourit l’artiste. Alors que tout le monde peut photographier tout le monde à chaque instant grâce aux smartphones, ce projet pose des questions sur le droit à l’image. Tout comme le travail de la Suédoise Moa Karlberg, également montré à Vevey. L’artiste s’est placée derrière un miroir sans tain et a immortalisé les passants lorsqu’ils se regardaient dans la glace. A-t-elle obtenu un catalogue des expressions de l’âme humaine? «Je pensais en voir certains se recoiffer, se remaquiller ou sourire. En réalité, presque tous ont cet air sceptique, ce visage qui semble demander: «De quoi ai-je l’air?» Entre rires et choc Pourquoi prendre en photo les gens à leur insu? Les deux artistes mettent en avant leur volonté d’authenticité et leur besoin de documenter l’être humain, sans mise en scène. «Depuis l’enfance, je suis fascinée par les expressions des visages, motive Moa Karlberg. J’ai toujours voulu avoir une caméra invisible sur le front pour les enregistrer. Il est très difficile de les immortaliser, car dès qu’un objectif entre dans une pièce, les gens modifient leur comportement.» Un point de vue que partage Tadao Cern: «On nous présente dans les magazines une fausse représentation de la réalité. Dans mes «S’ils étaient d’accord que des milliers de gens les voient ainsi sur la plage, pourquoi l’image les dérangerait-elle?» Aux manettes Mathieu Fouvy, pilote d’hélicoptère et directeur de l’agence Creatives, a conçu le plan de vol des drones qui survolent le Festival Images. «Nous voulons élargir un débat déjà ouvert.» PATRICK MARTIN Les drones, nouvel ami des artistes Zone grise au niveau légal U Zoom Au Festival Images, les photos de Tadao Cern sont à découvrir avec un dispositif particulier, imaginé en première mondiale. Le visiteur regarde les clichés situés sur les toits à l’aide de lunettes d’immersion, qui montrent ce que filme un drone. Le directeur du festival, Stefano Stoll, a eu cette idée avec Mathieu Fouvy, pilote d’hélicoptère et directeur de l’agence Creatives. Stefano Stoll: «Les drones offrent une hauteur, une rapidité et une flexibilité jamais connues dans l’histoire U Eclairage «Une personne en photo dans une galerie new-yorkaise a poursuivi le photographe en justice. Ce dernier a gagné», relate Tadao Cern. Bertil Cottier, professeur de droit de la communication à l’Université de Lugano, explique que «la street photography, ces clichés pris dans la rue, constitue une zone grise. Témoigner d’une réalité sur le vif devient difficile voire impossible s’il faut un consentement.» Le cadre légal strict interdit de photographier quelqu’un sans sa permission. «L’idée de de la photo. Ce n’est pas pour rien que Yann Arthus-Bertrand ou les superhéros ont autant de succès: tout le monde veut voler, avoir le point de vue des oiseaux.» «Avec la présence des drones à Images, nous élargissons un débat déjà ouvert, précise Mathieu Fouvy. Le potentiel est extraordinaire, on peut imaginer retrouver des gens en montagne avec des caméras infrarouges. Il y a aussi des inconvénients – comme l’intrusion dans la vie privée Le festival Kino met en lumière les films de l’Est Dès le 10 octobre, la manifestation met à l’affiche films pointus et succès populaires Des cinéastes russes? Euh… Sergueï Eisenstein, Andreï Tarkovski… Si vous séchez sur le septième art russe, profitez du Kino Festival des films de Russie et d’ailleurs pour enrichir votre culture générale. Par l’expression «et d’ailleurs», les organisateurs désignent des films provenant des pays de l’ancien bloc de l’Est, tels l’Arménie, l’Estonie, la Lituanie, la Géorgie, le Kazakhstan, la Moldavie ou encore l’Ukraine. VC5 Contrôle qualité CHANTAL DERVEY Cinéma Tourné en partie au Bouveret, Sunstroke sera projeté à Kino. En compétition, 14 longs-métrages diffusés en première suisse et 12 documentaires récents. Une rétrospective de classiques russes regroupés autour du thème de la représentation du héros soviétique, des films d’animation pour enfants, et des tables rondes figurent également au programme. Yasmine Char Wegmüller a concocté pour l’Octogone, à Pully, une nouvelle saison panachant théâtre, musique et danse. Elle livre son credo et ses coups de cœur. Interview Kino s’ouvre le 12 octobre à Genève avec la première mondiale de Coup de soleil (Sunstroke), un drame de Nikita Mikhalkov basé sur la nouvelle éponyme d’Ivan Bounine, et dont des séquences ont été tournées au Bouveret en 2012. A Lausanne, une pré-ouverture aura lieu au cinéma Capitole le 10 octobre avec Gorko 2, le second volet d’une comédie populaire qui a fait un carton en Russie. La plupart des films seront projetés en version originale et sous-titrés en français. Dans les musts, on repère Durak (littéralement «l’idiot»), de Yuri Bykov, très apprécié à Locarno cet été. En première suisse, Test, d’Alexandre Kott, un film sans dialogue qui Coups de cœur Danse So Blue, chorégraphié et dansé par Louise Lecavallier: «C’est une femme magnifique de 50 ans qui dansera seule sur scène, simplement accompagnée d’un musicien de musique electro», détaille Yasmine Char. Di 14 décembre, 19 h 30. Théâtre Sonate d’automne, d’Ingmar Bergman: «Un magnifique face-à-face entre Françoise Fabian et Rachida Brakni». Jeudi 22 janvier 2015, 20 h 30. Musique Plaza Francia, avec Catherine Ringer et l’inspiration tango de Müller et de Makaroff (Gotan Project). «C’est le genre de projet que je recherche, une rencontre a priori improbable et qui s’annonce magnifique.» Jeudi 4 décembre, 20 h 30. «Si le projet artistique est original et bien pensé, cela peut déboucher sur des rencontres magiques» Yasmine Char, directrice de l’Octogone Comment faites-vous pour réussir à faire exister l’Octogone dans la carte culturelle lausannoise? C’est le fruit d’un intense travail, qui a d’ailleurs débuté avant moi, et qui a permis de développer un lien de confiance avec le public et avec les artistes. C’est cet esprit de famille, ce soin de l’accueil, une exigence dans la qualité des spectacles proposés que je m’efforce de cultiver. Parce que c’est un domaine que j’ai toujours défendu, j’aime aussi l’idée d’être une maison de la danse, avec la compagnie Linga en résidence. Tadao Cern, artiste lituanien Vevey, divers sites Jusqu’au di 5 octobre. Gratuit Rens.: 021 922 48 54 www.images.ch Scène Parce qu’elle trouve le théâtre qu’elle dirige depuis quatre ans un peu austère, Yasmine Char Wegmüller tente de lui insuffler un supplément d’âme. Elle a confié la vitrine à la vidéaste Emmanuelle Antille, qui vient de rhabiller – «et de rendre plus humain» – le site internet de l’Octogone. La femme de plume, qui a actuellement plusieurs manuscrits sur le feu, se réjouit aussi de voir bientôt apparaître un nouveau logo sur la façade du bâtiment. Mais pour rendre plus chaleureux cet Octogone posé en bord de route, à Pully, Yasmine Char a surtout concocté une nouvelle saison qui promet de nombreuses et belles rencontres artistiques dans une des salles les plus intimistes de la région, malgré ses 450 places. Le menu débute dans une semaine autour du chanteur Vincent Delerm. Un prélude au programme 2014-2015 qui mélangera – c’est la marque de fabrique de la maison – danse, musique et théâtre. photos, ces personnes – imparfaites, comme nous tous – racontent beaucoup de choses! Les détails nous disent beaucoup sur eux, sur nous-mêmes, sur la façon dont nous interagissons.» Ces projets n’ont pas réellement suscité de réactions négatives. La fille de l’homme à la serviette léopard lui a offert un tirage pour Noël. «Il l’a suspendu dans sa chambre, riant du fait qu’il devait désormais maigrir», sourit Tadao Cern. «Seule une femme, présente au vernissage, était choquée de sa photo. Je peux comprendre, convient Moa Karlberg, car sur l’image elle a l’air quinze ans plus âgée et moins heureuse que dans la réalité. J’ai proposé de couvrir ce tirage, mais elle ne m’a plus donné de nouvelles.» Ni Tadao Cern ni Moa Karlberg n’ont rencontré de problèmes moraux ou juridiques avec leurs démarches. «Certes, j’ai eu l’impression de leur voler un moment qui n’était destiné qu’à eux, reconnaît Moa Karlberg. C’était excitant et inconfortable à la fois. Mais c’était dans l’espace public. Je ne l’aurais pas fait dans un endroit privé, comme des toilettes.» Tadao Cern revendique: «S’ils étaient d’accord que des milliers de personnes les voient ainsi sur la plage, pourquoi la prise de vue les dérangerait-elle? Je ne m’intéresse pas à une personne en particulier, mais à une culture, à des comportements sociétaux, dans une démarche anthropologique.» Et Tadao Cern de citer la street photography (lire ci-contre), avant de conclure: «L’intrusion dans l’intimité n’est qu’un détail de mon projet. Celui-ci pose d’autres questions: par exemple, pourquoi n’est-on pas aussi libre de nos comportements en ville qu’à la plage? Tout le monde doit trouver ses réponses.» «J’ai toujours été attirée par les projets originaux et les personnalités fortes» se passe en plein cœur de la steppe, fait également partie des favoris pour le prix des longs-métrages. Côté documentaires, ne ratons pas Nepal Forever, un docu-comédie sur deux membres du Conseil municipal de Saint-Pétersbourg partis léniniser des communistes au Népal. Le budget, de 750 000 francs, est principalement assumé par la Fondation Neva. Le consulat honoraire de Russie à Lausanne y participe également. Marianne Grosjean Lausanne, Cinémathèque suisse et cinéma Capitole Du ve 10 au di 19 octobre www.kinofestival.ch et la sécurité. Les pros du vol essaient de limiter l’impact, mais 5000 drones par an sont vendus à des amateurs.» Les lois? Ne pas voler à 5 km d’un aéroport, ne pas perdre de vue son engin, et, depuis le 1er août, demander l’autorisation pour survoler une manifestation. L’idée ravit Tadao Cern: «Mes photos sont montrées de la manière dont je voulais initialement les prendre, avant de me rabattre sur un dispositif plus simple.» Repéré pour vous C’est la tournée de Brasseur la législation est que mon visage et ma voix m’appartiennent, et que chacun doit être maître des données qui le concernent», rappelle Bertil Cottier. Or ces principes se heurtent à la liberté artistique. «L’artiste devrait disposer d’un «bonus» que le commun des mortels n’a pas, nuance l’homme de loi. Même ainsi, le projet de Moa Karlberg me paraît plus difficile à défendre que celui de Tadao Cern, car il va plus dans le tréfonds de l’âme, et moins dans le témoignage de société.» ton non voulu (mais bien éduqué) de deux stars de l’époque, l’«hénaurme» Pierre Brasseur et la comédienne Odette Joyeux. On croise Sartre dans la cuisine, puis les copains du Conservatoire (Bébel, Marielle, Rochefort), l’Algérie, la galère et le vedettariat. Les anecdotes inattendues et souvent édifiantes pavent le récit de ce comédien par naissance. François Barras Merci! Claude Brasseur Flammarion, 258 p. En appliquant quelle recette? En restant simplement perméable. De manière inconsciente, j’ai tendance à aller vers les personnalités fortes. J’aime l’humain, quand quelque chose se passe. C’est ce qui m’a permis, avec le temps, de développer des liens avec certains acteurs ou danseurs. Aujourd’hui, on avance ensemble et beaucoup aiment revenir jouer à l’Octogone. Qu’est-ce qui leur plaît? L’écoute du public et une salle qui crée des moments très forts de proximité entre artistes et spectateurs. De par sa forme, la scène peut constituer un handicap. Mais si le projet artistique est original et bien pensé, cela peut déboucher sur des rencontres magiques. On l’a vu avec Stefan Eicher, Sophie Hunger et beaucoup d’autres. On le verra, cette saison, avec des personnalités telles qu’André Dussollier ou Jacques Weber, avec le pianiste François Lindemann ou la danseuse Louise Lecavallier. Gérald Cordonier Pully, Octogone Nouvelle saison dès le 26 septembre Tél. 021 721 36 20 www.theatre-octogone.ch Côté programmation, comment se démarquer des autres salles? En cultivant en permanence sa propre originalité. J’aime nuancer un certain discours politiquement correct selon lequel le public serait extensible. On tire tous sur la même corde et, à un moment donné, on atteint un trop-plein. Le spectateur n’a plus d’autre choix que de faire le tri. Originalité et budget modeste, estce compatible? Avec son petit budget annuel (ndlr: 480 000 francs), un théâtre comme l’Octogone ne pourra jamais régater avec les grosses structures. C’est la même chose pour les cachets. La concurrence est donc réelle. Mais plutôt que de jouer à David contre Goliath, je cherche à me démarquer, tout en veillant à ne pas empiéter sur les créneaux des autres salles. Il y a tellement de choses à faire que ce serait dommage que tout le monde se contente Ecrivaine, Yasmine Char est aussi depuis quatre ans à la barre du Théâtre de l’Octogone, à Pully. VANESSA CARDOSO Le Corbusier retente encore une fois sa chance à l’Unesco En deux mots… Candidats recherchés Architecture Merci! Depuis quatre générations, la famille de Claude Brasseur salue lors du baisser de rideau. L’acteur de 78 ans n’a pas dû chercher très loin le titre de sa «biographie» – plutôt un vaste et tonique entretien avec Jeff Domenech, également auteur d’une bio sur Belmondo. L’une des tronches les plus inévitables du cinéma français des années 1970 et 1980 revient sur sa vie et sa carrière – les deux sont indissociables. Franc et tonique, Brasseur raconte une jeunesse à part, reje- de travailler avec les mêmes artistes. Je prends cela comme un défi: c’est à moi de trouver d’autres projets intéressants et originaux. Appelée à revoir sa copie après deux échecs, l’association regroupant les réalisations de l’architecte y croit toujours Recalée en 2009, encore recalée en 2011, l’Association des sites Le Corbusier n’en démord pas: l’universalité de l’œuvre du Chaux-deFonnier et de sa réponse aux défis architecturaux et urbanistiques du XXe siècle mérite d’être classée au Patrimoine mondial de l’Unesco. Redimensionnée et étayée en suivant les critiques faites aux précédentes moutures, une nouvelle VC5 Contrôle qualité La Villa Le Lac a vécu une saison record en voyant défiler plus de 2000 visiteurs cet été à Corseaux. GÉRALD BOSSHARD demande d’inscription – la troisième en cinq ans – vient donc d’être envoyée. Responsable des expositions de la Villa Le Lac à Corseaux, l’une des plus petites constructions signées Corbu après le Cabanon, près de Nice, Patrick Moser confirme: «La liste des réalisations retenues pour cette candidature a été revue et la Villa pensée et réalisée en 1923 pour ses parents au bord du lac en fait partie. Espérons que la troisième tentative sera la bonne.» Le saint des saints du patrimoine mondial plaidait pour davantage de cohérence entre les sites choisis, l’association y répond en proposant dix-sept œuvres réparties sur sept pays, au lieu de vingt-deux précédemment. «Une des principales évolutions du dossier, a souligné son président, Marc Petit, est l’intégration d’un ensemble de trois bâtiments du Capitole de Chandigarh, avec un engagement fort des autorités fédérales indiennes.» Le paquet final sera remis en janvier suite à un pré-examen du dossier. Attendue fin juin 2016, la décision tombera une année après le 50e anniversaire de la mort de Charles-Edouard Jeanneret, fer de lance du brutalisme, auteur de la Cité radieuse à Marseille, qui ne concevait l’architecture qu’en regard de l’évolution de la société. Florence Millioud Henriques Télévision Télé la Question, le jeu de culture générale de la RTS, recrute de nouveaux candidats prêts à se frotter aux questions de l’animateur Philippe Robin. Les amateurs de quiz peuvent se présenter directement aux sélections, qui auront lieu lundi prochain à l’hôtel Continental de Lausanne, entre 11 h et 14 h. R.M. L’Académie compile Langage A la page, les gardiens de la langue de Molière répondent depuis quelques années aux internautes sur le site internet de l’Académie française (www.academie-francaise.fr/dire-nepas-dire). Empruntant son titre au site internet, un ouvrage compilant les fautes et tics les plus fréquents vient de sortir (Ed. Philippe Rey). F.M.H.