Rien qu`un peu de bonne volonté

la revue applique la réforme de l’orthographe
ANATHÈME
« Qui veut sa croute doit pouvoir la gagner », lui ai-je dit. Il fallait qu’il comprenne : je pouvais lui donner sa pitance
pendant un moment, par pure bonté, mais
il fallait à tout prix éviter qu’il compte
trop dessus. Pour son propre bien.
mais je n’exigeais pas tout de lui et immédiatement. Un signe de bonne volonté,
la preuve qu’il cherchait à conquérir son
autonomie auraient pu me suffi re dans
un premier temps. Je ne souhaite pas le
mettre à la rue, mais le guider, le coacher.
Apprendre à se lever de bonne heure, à
Savoir que les cailles lui tomberont rôties
faire sa toilette de manière raisonnable,
dans la bouche lui est néfaste. Il y va de
puis à sortir à la recherche d’opportunisa dignité. Sa nature est-elle donc d’être
tés aurait déjà été un pas dans la bonne
un assisté ? Ou est-elle plutôt de conserdirection. Et qu’importe que la chasse
ver ou de restaurer son autonomie, sa casoit infructueuse. Pensez-vous !
pacité à rebondir, à se tirer des mauvais
pas, à assurer lui-même sa survie ?
Il est bien évident que Rome ne s’est pas
faite en un jour et que la première étape
Il fallait qu’il comprenne, voyez-vous, le
est de prouver sa bonne volonté. Je remaintenir sous perfusion n’aurait d’autre
passerai : il m’a regardé de l’œil le plus inrésultat que de le priver défi nitivement
différent qui soit, comme s’il était sourd.
de ses capacités à agir par lui-même et à
Ou demeuré. Ou muré dans la conviction
s’autodéterminer. Rien n’y fit.
que mon destin était de le servir et de
Mais allez lui faire comprendre ça ! J’ai prévenir son moindre désir.
tenté d’être plus pédagogique : puisqu’on
Et là, c’en fut trop. Ah il me prenait pour
est ce qu’on mange, voulait-il vraiment
la poire de service ? Eh bien, il allait voir !
être ce que je déciderais qu’il soit en lui
Désormais, plus de croquettes tant qu’il
fournissant sa nourriture ? Ou préféraitn’aurait pas apporté la preuve de ses tenil choisir son destin, voler de ses propres
tatives de dénicher quelque proie par luiailes ? Pas davantage de réactions.
même. Ne serait-ce qu’un maigre mulot.
Il n’est pourtant pas difficile de compren- Ou un oiseau tombé du nid.
dre que le remède peut être pire que le
Ce chat me rendra fou !
■
mal et qu’il est de la nature de chacun de
trouver les moyens de s’assumer. Certes,
je ne le nie pas, cela peut être difficile,
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billet d’humeur
LAREVUENOUVELLE - NOVEMBRE 2012
Rien qu’un peu
de bonne volonté