Le classeur-trieur allège les cartables de collégiens
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Le classeur-trieur allège les cartables de collégiens
Le Journal de l’Île SOCIÉTÉ Mercredi 11 novembre 2009 19 Le classeur-trieur allège les cartables de collégiens Déjà expérimenté l’année dernière au collège catholique Saint-Michel, le classeur-trieur est également utilisé dans le tout nouveau collège Alexandre-Monnet. Avec l’usage de porte-vues et d’attaches en plastique, ce dispositif pèse moins de deux kilos. Mais il est encore méconnu. ÉDUCATION Repères Matériel d’arts plastiques... Pour alléger le poids des cartables, plusieurs initiatives ont déjà été prises. Au collège Bourbon, les parents ont décidé en 2007 de mutualiser l’achat du matériel d’arts plastiques. En début d’année, chaque enfant paie 10 euros, qui servent à acheter gouaches et feuilles de papier Canson, qui seront entreposées dans les deux salles d’arts plastiques. Les profs n’ont plus à courir après les ciseaux ou les pinceaux... Et les parents économisent une quinzaine d’euros. Pourquoi les bonnes idées ne se répandent-elles pas plus vite ? La réponse s’impose malheureusement chez nos interlocuteurs : “Nous n’étions pas au courant” (lire ci-dessous). Comme si personne n’avait lu le reportage publié le 3 septembre 2008 par le JIR, où nous expliquions la mise en place du “classeurtrieur” pour les 1370 élèves du collège catholique Saint-Michel (Saint-Denis). Depuis, l’initiative a fait des “petits” : les cinq classes de sixième du tout nouveau collège privé Alexandre-Monnet (SaintBenoît) ont adopté le même système, avec des classeurs-trieurs noirs plus solides que les précédents. Et même si une poignée d’élèves ont encore du mal à se familiariser avec le rangement des documents, la plupart des 102 marmailles ont adopté ce cartable de moins de deux kilogrammes. Dans la classe d’Isabelle Taochy-Guidat, plusieurs petites mains se lèvent pour expliquer les avantages du classeur-trieur. Plusieurs élèves ont un grand frère ou une grande sœur, qu’ils ont déjà entendu(e) se plaindre de mal de dos. Emeline assure : “Mon frère était dans un collège de Saint-Denis, et il a des problèmes de dos. Mais mes parents ne l’ont su qu’après son départ du collège”. “AU DÉPART, LES PARENTS DOIVENT AIDER” Arnaud a aussi un frère dans un collège de Saint-André : “Son cartable est trop lourd, mais nos parents ne disent rien”. Pourquoi les parents ne disent-ils rien? “S’il faut porter le cartable, on le porte”, lâche sa voisine, philoso- ...Et casiers insuffisants Certains établissements ont déjà ouvert des casiers qui permettent aux demipensionnaires de ranger leurs affaires pendant la journée. Mais vu la taille des collèges réunionnais, il faut établir des priorités : c’est souvent réservé aux élèves de sixième, plus menus. Cela ne règle donc pas le problème du poids des cartables pour les centaines d’élèves de chaque établissement. Sarah montre son classeur-trieur en plastique noir, un porte-vues avec les cours, et la liasse des feuilles attachées, afin d’éviter les “feuilles volantes”. phe résignée, dont le frère a délibérément refusé le classeurtrieur et a préféré un autre collège. Pour sa part, Mme Taochy-Guidat a déjà tiré le bilan d’une année de classeurtrieur, puisqu’elle avait participé à sa mise en place au collège Saint-Michel. À Saint-Benoît, elle a complété le dispositif : “Outre le classeur-trieur, nous utilisons un Fasteneur, une attache d’archivage, afin de maintenir ensemble toutes les feuilles d’une même matière”. Le petit morceau de plastique coloré empêche les feuillets de s’envoler. Et lorsque le chapitre est fini, on range tout dans le porte-vues à la maison. Pour aider les étourdis, un portevues modèle reste en classe, et pendant les heures d’étude, la surveillante réexplique l’usage de ces outils nouveaux. Lesquels outils permettent également d’alléger sérieusement les dépenses de rentrée. L’ensemble classeur-trieur/ porte-vues/ matériel d’arts plastiques ne coûte que 42 euros, a compté Nathalie Letanoux, mère de Gwenaëlle. “Je suis très satisfaite de ce système”, assure la maman. “Pour la rentrée scolaire, je n’ai acheté qu’un agenda en plus, et des feuilles de classeur pour 2 euros. Et en classe, c’est plus rapide pour les élèves, et plus efficace”. N’est-ce pas un peu compliqué pour des enfants de 11 ans ? “Au départ, les parents doivent les aider”, concède Mme Letanoux. Mais comme les livres restent à la maison (une collection de manuels est disponible en classe), le triptyque classeur-trieur/ portevues/ attache a vite fait l’unanimité des parents. De quoi inciter les familles à le demander dans les 80 autres collèges... Dossier : Véronique Hummel Photos : Richel Ponapin “Aucune volonté de blocage” Marc Dunand-Roux, directeur du collège Monnet : “Il a fallu convaincre les enseignants”. Cela fait déjà un an que le cartable ultra-léger est utilisé à La Réunion. Alors, pourquoi seulement deux collèges (sur un ensemble de 82 dans l’île) ont-ils adopté ce dispositif ? Outre le manque d’information, le directeur Marc Dunand-Roux admet : “Il a fallu convaincre les enseignants. Cela change leur organisation. Car si on veut revoir en cours le chapitre 1, qui est déjà rangé dans le porte-vues à la maison, c’est compliqué...” Claude Carpentier, principal du collège de Bourbon et responsable académique du Syndicat national des personnels de direction de l’Education nationale, reconnaît humblement qu’il ignorait l’initiative de ses homologues des collèges privés. Mais même si le rectorat avait relayé l’information sur le site Web, le collège Bourbon et ses 980 élèves n’auraient pas forcément emboîté le pas à Saint-Michel et Alexandre-Monnet. “Chaque établissement se donne des priorités, explique M. Carpentier. A Bourbon, nous avons beaucoup avancé sur le traitement de la difficulté scolaire, avec la création du Casnav (dispositif pour les collégiens qui ne parlent pas le français), Dima (dispositif d’initiation aux métiers par l’alternance)... Nous avons aussi une UPI (unité pédagogique d’intégration) pour les élèves souffrant d’un handicap mental léger”. En d’autres termes, “le sujet du poids des cartables n’est pas encore venu dans l’actualité du collège. Mais il n’y a aucune volonté de blocage : si quelqu’un lance l’initiative, il peut y avoir du répondant”. Aux parents d’élèves de se manifester Isabelle Taochy-Guidat en classe : il faut parfois aider les étourdis à bien utiliser le porte-vues. Bientôt l’e-book ? Au rectorat d’académie, on attaque le problème du poids des cartables par la face numérique. Jean-Louis Forestier, responsable des services informatiques de l’académie, annonce une expérimentation de l’“environnement numérique de travail” dès janvier 2010. “Il s’agit d’un portail de services, qu’on peut consulter dans l’établissement ou sur son ordinateur personnel”, détaille M. Forestier. Dès la rentrée, cet ENT sera utilisé dans cinq ou six collèges ou lycées : “Cela évitera de transporter des photocopies, des cahiers d’exercices, et cela donnera accès à des livres en ligne”. Le manuel scolaire en ligne... Cela n’est plus une utopie; il faut juste que les éditeurs s’adaptent à cette révolution technologique, qui leur fera perdre du chiffre d’affaires sur les livres en papier. Pour sa part, M. Forestier attend impatiemment la version couleur de l’e-book (livre numérique) déjà présenté en noir et blanc dans l’académie l’année dernière. “Ce livre numérique est un périphérique d’ordinateur, qui pèse 120 grammes. Plus il y a de la lumière, plus c’est clair : cela donne vraiment l’aspect d’un livre ouvert”. Et c’est tellement plus léger... “En classe, c’est plus rapide pour les élèves”. Les parents se disent favorables Même chez les parents d’élèves, l’information sur les classeurs-trieurs ne passe pas forcément. Ainsi, Gilbert Laporte, secrétaire général départemental de la Fédération des conseils de parents d’élèves (majoritaire), avoue : “Je n’ai pas entendu parler de cette initiative, mais je trouve qu’elle va dans le bon sens. D’ailleurs, en décembre prochain, la FCPE organisera dans l’île une opération sur le problème du mal de dos”. A la Peep (Parents d’élèves de l’enseignement public), le président départemental Claude Guézello se montre tout aussi favorable: “J’ai même un parent qui souhaite mettre en place ce système. Si ça a été fait dans le privé, ça peut être fait dans le public. Il faut faire les demandes dans les conseils d’administration des établissements”. Quant à Agnès Kohler, elle s’était beaucoup bagarrée sur ce dossier lorsqu’elle était à la Peep. Mme Kohler a désormais rejoint l’Association des parents d’élèves du primaire au supérieur, qui affirme représenter 8 000 familles à La Réunion, et compte aussi faire baisser le poids des cartables