2010 03 la copropriété de brevrets IP

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2010 03 la copropriété de brevrets IP
LA COPROPRIETE DE BREVETS
PREMIERE PARTIE – LES REGLES DU CODE DE LA
PROPRIETE INTELLECTUELLE
Par Isabelle PINAUD
Conseil en Propriété Industrielle,
Cabinet REGIMBEAU – Pôle Contrats
Un nombre croissant de brevets font l’objet de dépôt en copropriété. Ces
copropriétés de brevets sont souvent l’aboutissement de programmes de
recherche exécutés conjointement par des partenaires d’horizons très divers organismes publics de recherche, grandes entreprises, PME et/ou start-up
dans le cadre d’accords de collaboration de recherche inter-entreprises ou de
« Consortium Agreements ».
La copropriété de brevet français est réglementée par les disposions des
articles L 613-29 à L 613-32 du Code de la Propriété Intellectuelle. Ces
dispositions ont la particularité d’être supplétives de la volonté des
copropriétaires qui n’ont pas établi d’accord de copropriété; elles
s’appliquent aux demandes de brevet français, à son droit de priorité si la
demande de brevet est une demande prioritaire et au brevet qui en sera issu.
Elles s’appliquent également à la partie française des brevets européens.
Introduit dans le droit français des brevets en 1968 et remanié par la loi sur
les brevets du 13 juillet 1978, ce régime légal a le mérite de soustraire les
copropriétaires de brevets du régime de droit commun de l’indivision.
Dans la pratique, ces règles légales qui s’appliquent uniformément à
toute copropriété de brevet quel que soit le domaine technique de
l’invention, le nombre et les caractéristiques des copropriétaires et
leurs objectifs propres se révèlent très souvent inadaptées à la
situation qu’elles entendent régir.
Quelles sont ces règles supplétives de la volonté des copropriétaires ?
A défaut d’une répartition de droits différente décidée par les
copropriétaires, les droits et charges du brevet sont réputés être répartis de
façon égalitaire entre les différents co-titulaires.
Le Code de la Propriété Intellectuelle (CPI) exige que les copropriétaires
constituent un mandataire commun qui les représentera devant l’INPI. Ce
mandataire est choisi d’un commun accord entre les copropriétaires. Les
pouvoirs du représentant de la copropriété sont étendus à tous les actes
d’administration qui comprennent le dépôt de la demande de brevet y
compris la transformation de la demande de brevet en certificat d’utilité ou
en demande divisionnaire ou sa limitation, ainsi que la modification des
revendications. Seuls les actes de disposition tels que les actes de retrait de
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la demande de brevet et de renonciation au brevet relèvent d’une décision
conjointe de l’ensemble des copropriétaires.
Ce principe de libre choix du mandataire commun est cependant écarté
lorsque les copropriétaires sont des personnes publiques. Le décret n° 2009645 du 9 juin 2009 relatif à la gestion entre personnes publiques de la
propriété industrielle des résultats issus de travaux de recherche réalisés par
des fonctionnaires ou des agents publics réglemente en effet la désignation
du mandataire commun.
Ainsi, selon le nouvel article R-611-13 du CPI dispose que lorsque un ou
plusieurs fonctionnaires ou agents publics exerçant leur activité pour le
compte de plusieurs personnes publiques investies d’une mission de recherche
sont à l’origine d’une même invention, celle des personnes qui a fourni les
locaux dans lesquelles les études ou les recherches ont été principalement
réalisées dispose de plein droit d’un mandat pour exercer l’ensemble des
droits et obligations. Le décret 2009-645 a choisi de consacrer la primauté
de « l’hébergeur » en matière de gestion de propriété industrielle et de
valorisation. Si les locaux sont fournis par une personne privée ou par une
personne publique dont l’objet ne comporte pas une mission de recherche, le
mandat revient alors à celles des personnes publiques investies d’une mission
de recherche dont la contribution inventive des agents est la plus importante.
Si les contributions de tous les inventeurs relevant de chacune des personnes
publiques sont équivalentes, ces dernières désigneront d’un commun accord
leur mandataire. De même, lorsque les locaux sont fournis à titre égal par
plusieurs personnes publiques ces dernières doivent choisir d’un commun
accord leur mandataire.
Le décret n° 2009-645 du 9 juin 2009 modifie donc la donne en matière de
copropriété de brevets entre personnes publiques mais aussi entre personnes
publiques et privées qui se retrouvent co-titulaires d’un même brevet
invention – et le cas n’est pas rare.
Ce décret précise enfin que le mandataire assure l’exploitation. Cela signifie
qu’il se charge de chercher des licenciés au nom et pour le compte de tous
les copropriétaires puisque les personnes publiques n’ont pas vocation à
exploiter directement. Les copropriétaires doivent également décider de la
répartition entre elles des revenus de l’exploitation.
Le décret adapte le « droit commun » en matière d’exploitation des brevets
qui figure à l’article L 613-29 du CPI, tout en renvoyant à un accord écrit que
les personnes publiques copropriétaires doivent établir. Afin de favoriser
l’exploitation du brevet, chaque copropriétaire a le droit d’exploiter
l’invention brevetée ou de la faire exploiter par voie de licence non exclusive
par un tiers. Seule une licence exclusive d’exploitation nécessite l’accord de
tous les copropriétaires ou à défaut une autorisation de justice.
La liberté pour chaque copropriétaire d’exploiter directement ou
indirectement par licence non exclusive l’invention brevetée est toute
relative. Ainsi, chaque copropriétaire qui exploite ou accorde une licence non
exclusive doit indemniser les autres copropriétaires qui n’exploitent pas. Le
copropriétaire qui souhaite accorder une licence d’exploitation non exclusive
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doit notifier le projet de licence aux autres copropriétaires accompagné
d’une offre de cession de sa quote-part à un prix déterminé. Ainsi, chaque
copropriétaire peut s’opposer à la concession d’une licence simple à la
condition qu’il se porte acquéreur de la quote-part du copropriétaire qui
souhaite concéder un droit d’exploitation. Voilà des règles bien lourdes qui
prévoient en outre qu’en cas de désaccord entre les deux copropriétaires, le
Tribunal de Grande Instance peut être saisi pour déterminer le prix de la
cession et qu’à la suite du jugement, chacune des parties conserve le droit
d’interjeter appel ou de renoncer l’une à la concession de licence, l’autre à
l’achat de quote-part.
L’article L 613-29 e) du CPI organise un droit de préemption au profit des
copropriétaires en cas de cession de quote-part par un des copropriétaires.
Faute d’accord amiable entre les parties, le TGI peut être saisi afin de
déterminer le prix. Là encore, chacune des parties pourra soit faire appel du
jugement soit renoncer à son projet de vente ou d’acquisition de la quotepart de brevet.
Bref, les règles supplétives mettent en place des procédures lourdes qui, in
fine, sont susceptibles d’entraver des projets d’exploitation et qui font la
part belle à la protection des intérêts des copropriétaires passifs.
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Les copropriétaires – personnes publiques et privées - ont tout intérêt à
établir un règlement de copropriété qui sera spécifiquement adapté à
leur statut et à leur vocation à exploiter ou non – ce que nous étudierons
dans notre prochain article.
Par Isabelle PINAUD
Conseil en Propriété Industrielle
Cabinet REGIMBEAU – Pôle Contrats
Paris, le 23 mars 2010.
A propos du Cabinet Regimbeau :
Le Cabinet Regimbeau, Conseil en Propriété Industrielle, accompagne depuis
plus de 75 ans les entreprises et les porteurs de projets des secteurs privés
et publics, pour la protection, la valorisation et la rentabilisation de leurs
innovations (brevets, marques, dessins et modèles). 10 associés animent une
équipe de 180 personnes, dont les compétences s'exercent dans tous les
aspects stratégiques de la propriété industrielle: veille technologique,
contrats de licence, audit de portefeuilles de PI, négociations dans le cadre
de partenariat, acquisition des droits, contentieux. La force de frappe
homogène du Cabinet Regimbeau et de ses agences régionales permet de
répondre à des logiques stratégiques internationales, tout en préservant des
relations personnalisées de très haute qualité avec ses clients.
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