Ancrage définitif du taux spécial pour les prestations d`hébergement

Transcription

Ancrage définitif du taux spécial pour les prestations d`hébergement
Ancrage définitif du taux spécial pour les prestations d‘hébergement
dans la loi sur la TVA
Résumé de la position d‘hotelleriesuisse
hotelleriesuisse demande d’ancrer définitivement dans la loi le taux spécial pour les prestations
d’hébergement.
Pour la branche de l’hébergement, le taux spécial de TVA constitue un important levier
d’encouragement à l’exportation des prestations touristiques. Il est d’une importance capitale
pour obtenir un allègement des coûts et il renforce la compétitivité de la branche par rapport à
ses concurrents dans les pays voisins, surtout en période de franc fort. Après vingt ans de
caractère provisoire, le taux spécial doit être ancré définitivement dans la loi sur la TVA.
1. Point de départ
La Constitution suisse stipule que la loi sur la TVA peut fixer, pour l’imposition des prestations
d’hébergement, un taux compris entre le taux réduit (2,5% actuellement) et le taux normal (8%
actuellement). Cette pratique a cours depuis 1996, à cette précision près que le taux spécial a
toujours été limité dans le temps. Le taux appliqué aujourd’hui pour les prestations
d’hébergement (3,8%) devait expirer à fin 2013 et une large majorité de Parlementaires a
décidé, en été 2013, de le reconduire pour quatre années supplémentaires, soit jusqu’à fin
2017. La charge de l’industrie de l’hébergement se trouve ainsi allégée de quelque 180 millions
de francs par an.
2. Arguments en faveur d’un ancrage définitif du taux spécial dans la loi
2.1.
Garantir la promotion des exportations
Le taux spécial n’est pas un privilège, il tient compte du caractère d’exportation de la branche.
Près de 60% des nuitées dans le secteur de l’hébergement en Suisse sont générés par des
hôtes étrangers. Le tourisme, pourtant l’une des plus importantes branches d’exportation de la
Suisse, ne peut tirer profit de son caractère d’exportation comme les autres branches, vu que
ses prestations sont produites et consommées dans le pays. Le taux spécial de TVA en tant
qu’instrument fiscal agissant au niveau de l’offre, constitue, en plus de la promotion de l’offre via
Suisse Tourisme, le principal levier d’encouragement à l’exportation des prestations
touristiques. La suppression du taux spécial affaiblirait toutes les mesures de promotion du
tourisme en raison du renchérissement que cela provoquerait. Et les coûts ne peuvent pas être
répercutés sur les prix, et donc sur les clients, vu que la marge de manœuvre ici est déjà
épuisée. Avec 16 milliards de francs de recettes issues du tourisme et environ un milliard de
francs d’excédent qui est dégagé, l’économie du tourisme représente environ 5% du total des
recettes d’exportation de la Suisse. Le tourisme, l’une des principales branches d’exportation
du pays, a ceci de particulier que ses prestations sont produites mais aussi consommées en
Suisse à des coûts et des prix élevés.
2.2.
Assurer la continuité
Un ancrage du taux spécial dans la loi ne génère pas de pertes fiscales, il revient à maintenir le
statu quo.
Le maintien du taux spécial de la TVA est un facteur de continuité primordial. Un projet de
réforme de la TVA, qui aurait, entre autres, résolu de manière définitive la question du taux
spécial, n’a pas réussi à passer la rampe du Parlement. Un ancrage définitif du taux spécial
pour les prestations d’hébergement perpétue la réglementation sur la TVA en vigueur et
apporte aux entreprises une sécurité à long terme en matière de planification. Une prorogation
définitive du taux spécial n’engendre aucun surcoût, mais est éminemment importante pour
l’hôtellerie. Sa suppression entraînerait par contre une détérioration des conditions-cadres, ce
qui serait difficilement supportable pour la branche dans le contexte économique d’aujourd’hui.
La décision du 15 janvier 2015 de la Banque nationale suisse d’abolir le cours plancher du franc
suisse face à l’euro aura aussi des répercussions sur les nuitées dans les mois et les années à
venir. La situation économique actuelle accentue la pression sur les prix. Les marges s’érodent
et les liquidités nécessaires qui donneraient plus de latitude en termes de prix et qui devraient
être utilisées pour des investissements d’entretien et des activités de marketing font défaut, ce
qui entrave massivement le développement de la qualité.
2.3.
Soutenir la compétitivité
Dans une branche aussi sensible aux prix que le tourisme, le taux spécial constitue un moyen
efficace pour soutenir la compétitivité internationale.
Par rapport à ses voisins et à ses principaux concurrents, la Suisse n’a cessé de perdre des
parts de marché depuis 2008, du fait aussi du niveau des coûts élevé. Le taux spécial constitue
un instrument valable pour soutenir la compétitivité internationale de la branche et il demeure
pour l’heure l’unique moyen d’allégement des coûts. Via une stimulation de la demande, il est
propre à soutenir la croissance et, partant, l’essor touristique. Sous l’effet de l’érosion des frais
de voyage, l’hébergement est un facteur coûts qui pèse toujours plus lourd dans le forfait de
vacances. La vente de nuitées réagit donc de manière très sensible aux prix. C’est un fait dont il
est amplement tenu compte depuis des années sur le plan fiscal au sein de l’Union
européenne. En effet, au nom de la compétitivité internationale et de la stimulation de la
demande, 25 des 28 pays de l’UE appliquent un taux de TVA spécial pour l’hébergement (voir
illustration 1). Et dans 21 pays de l’UE, ce taux est même inférieur ou tout au plus égal à la
moitié du taux normal applicable (voir illustration 2).
Le taux spécial soutient la compétitivité face aux concurrents européens. La mesure est
eurocompatible et appliquée depuis des années dans pratiquement tous les pays concurrents.
La poursuite du taux spécial pour les prestations d’hébergement en Suisse n’entraîne pas un
maintien des structures non viables, elle n’est pas non plus une subvention versée selon le
principe de l’arrosoir, mais elle réduit la charge fiscale de l’hôte en tant que consommateur final.
Le taux spécial soutient la compétitivité de la branche face à ses concurrents européens et
constitue par conséquent, via une stimulation de la demande, un moyen efficace pour favoriser
la croissance, et donc l’essor du tourisme. De plus, le tourisme contribue pour une grande part
à créer de la valeur, surtout dans les régions rurales. Diverses autres branches économiques
étroitement liées au tourisme profitent de ce secteur, dont il constitue parfois la base
existentielle.
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Illustration 1: Vue d’ensemble des taux de TVA en Europe: taux normal et
taux spécial en %
Source: HOTREC (données), hotelleriesuisse (graphique), mars 2015
Illustration 2: Vue d’ensemble des taux de TVA en Europe: taux spécial par rapport au taux
normal
Source: HOTREC (données), hotelleriesuisse (graphique), mars 2015
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2.4.
Lutter contre le niveau élevé des coûts en Suisse
L’hôtellerie doit acheter ses produits aux prix suisses et les vendre aux prix étrangers.
La compétitivité internationale dépend aussi fortement du niveau des coûts et des prix. Or celuici est en Suisse bien supérieur à celui des pays environnants pour de nombreux biens et
services. Les efforts déployés pour abaisser le niveau élevé des coûts dans l’économie suisse
de l’hébergement n’ont guère porté de fruits au cours des dernières années (p. ex. révision de
la loi sur les cartels, poursuite de l’ouverture des marchés). A cela s’ajoute que le tourisme ne
peut déplacer son site de production à l’étranger et qu’il doit obligatoirement acheter la plupart
de ses prestations préalables (prestations de travail, immobilier, denrées alimentaires) en
Suisse. Dans les pays limitrophes (Allemagne, Autriche, France, Italie), la branche de
l’hôtellerie et la restauration peut acheter ses prestations préalables à des prix inférieurs de
20% à ceux que doivent payer les hôteliers et restaurateurs en Suisse. Pour l’achat des
denrées alimentaires surtout, les coûts des prestations préalables sont considérablement plus
élevés en Suisse qu’à l’étranger. Compte tenu des écarts de prix importants, la préservation de
la compétitivité des prix représente, en termes de politique structurelle, l’un des enjeux majeurs
de la place touristique suisse. Le taux spécial pour les prestations d’hébergement ne peut
certes combler les écarts, mais pour assurer un développement durable orienté sur le marché,
l’hôtellerie suisse doit bénéficier de conditions générales équivalentes à celles que connaissent
ses concurrents.
2.5.
Le taux spécial est un outil qui a fait ses preuves – les expérimentations en
matière de TVA sont à éviter
Le peuple et les politiques ont montré à plusieurs reprises qu’ils souhaitaient maintenir le statu
quo en matière de TVA, un ancrage définitif du taux spécial dans la loi répond à ce souhait.
Le taux spécial de TVA qui s’applique aux prestations de l’hébergement constitue déjà une
solution optimale, son abaissement ne s’impose pas. L’objectif premier doit être d’ancrer ce
taux définitivement dans la loi après 2017, et de donner ainsi aux hôteliers une sécurité en
termes de planification, tout du moins dans ce domaine. Exonérer de la TVA les hôtels qui
dépendent fortement de l’euro n’est pas indiqué. Une telle mesure créerait une discrimination
au sein de la branche et engendrerait des difficultés supplémentaires de délimitation. Le débat
sur l’introduction d’un possible taux unique ne passe guère au plan politique, comme on l’a vu
par le passé. Tant le peuple que les politiques se sont prononcés à plusieurs reprises pour un
statu quo en matière de TVA. Ancrer définitivement le taux spécial dans la loi tient compte de
cette position. Il en faut pas oublier non plus qu’avec plus de 900 millions de francs d’impôts
payés dont 300 millions proviennent de l’hébergement, l’hôtellerie-restauration est le troisième
plus gros contribuable TVA, derrière les branches du commerce (commerce de détail,
commerce de gros, etc. y c. réparations d’automobiles) et de la construction.
3. Discussions actuelles sur la TVA dans l’hôtellerie
La partie B de la réforme de la TVA a été enterrée jusqu’à nouvel ordre après la session
d’automne 2013. Ni le taux unique, ni le modèle à deux taux n’ont pu s’imposer. L’initiative de
GastroSuisse n’a pas non plus réuni de majorité et a clairement échoué aux urnes en automne
2014. Le régime de la TVA reste donc établi sur l’ancien système à trois taux. La validité du
taux spécial pour les prestations d’hébergement expire à fin 2017. Le Parlement se prononcera
probablement en 2016 sur une prorogation de ce taux spécial ou éventuellement sur son
ancrage définitif dans la loi.
Mais les débats sont déjà lancés. Durant la session de printemps 2015, le Conseil des Etats a
discuté l’interpellation Hess «Interpellation Hess Hans. TVA. Prorogation du taux spécial pour
le secteur de l’hébergement ». L’interpellation demande une prise de position du Conseil fédéral
sur le taux spécial de TVA pour les prestations d’hébergement au regard d’une prorogation à
partir de 2018, de la justification du taux spécial et de mesures possibles pour soutenir la
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branche hôtelière. Le Conseil fédéral a répondu à l’interpellation le 11.2.2015. Pour le Conseil
fédéral, l’objectif premier réside dans l’amélioration des conditions-cadres, qui sera rendue
possible avec le programme d’impulsion 2016-2019 pour le tourisme suisse. Dans la
prorogation du taux spécial, il voit des avantages mais aussi des inconvénients. La prorogation
du taux allègerait la crise aigüe, accentuée par le franc fort, que traverse l’hôtellerie. Son
abolition simplifierait le système de TVA et réduirait la charge administrative.
Outre l’interpellation Hess, la motion Brand (15.3075) traite du taux spécial. Le Conseil fédéral
est chargé par cette motion d’abaisser le taux de TVA à 2,5% dans le secteur de la
restauration. Il doit supprimer par la même occasion le taux spécial fixé pour les prestations
d’hébergement et appliquer également un taux réduit de 2,5% pour ces prestations. Le PLR a
également déposé le 04.03.2015 une motion pour établir un taux de TVA unique (15.3035)
qu’il a toutefois déjà retirée le 09.03.2015. Cette demande sera certainement présentée sous
une autre forme par le PLR, peut-être une initiative. Le PBD demande lui aussi un taux unique
dans sa motion 15.3225 déposée le 19.03.2015. Le PBD demande en plus l’instauration d’un
taux unique pour le secteur de l’hôtellerie-restauration (motion 15.3227) ainsi que
l’exonération temporaire de la TVA dans le tourisme et la restauration (motion 15.3226).
En mars encore, l’initiative parlementaire de Buman (15.410) était déposée. Celle-ci propose
d’ancrer durablement le taux spécial de TVA applicable à l’hébergement.
Pour les raisons exposées, hotelleriesuisse soutient l’initiative parlementaire de Buman visant à
inscrire définitivement le taux spécial dans la loi. Comme il est ressorti des discussions sur la
réforme de la TVA et de la votation sur l’initiative de GastroSuisse, le taux unique mais aussi la
demande de la motion Brand ne sont pas réalisables ni susceptibles de réunir la majorité
politique. Si le modèle à trois taux est maintenu, il faut ancrer définitivement dans la loi le taux
applicable à l’hébergement. Car, par opposition à la demande de la motion Brand, la forte
proportion d’hôtes étrangers dans l’hôtellerie justifie le taux spécial et ce dernier est d’ailleurs
accepté tant par les politiques que par la société.
(hotelleriesuisse – politique économique, mai 2015)
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