Du Je au Nous - Mon Petit Coin
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Du Je au Nous - Mon Petit Coin
Du Je au Nous Thomas D'Ansembourg Les Editions de l'Homme ISBN: 972-2-7619-3996-6 Ceci constitue mes notes de lecture du livre précité. Les passages en italique sont des citations in extenso. Les mises en évidence au moyen de caractères gras sont miennes. Introduction Nous avons coutume de plaisanter que nous courons dans tous les sens, sans savoir quel est le sens de la vie. Loin d'être une boutade, il s'agit malheureusement souvent d'une observation certaine. Nous remplissons nos vies pour combler le vide de l'absence de sens. Ces activités compensatoires sont généralement nocives autant pour nous-mêmes que pour la planète. Elles sont le facteur de beaucoup de souffrances individuelles et sociales. Nous ne changerons pas cette attitude collective sans remettre en question notre attitude individuelle. Ainsi, en questionnant notre fuite individuelle, nous pourrons agir pour ralentir celle de la société. Nous interroger sur le sens de notre vie n'est plus seulement une question personnelle relevant de la sphère privée, mais un enjeu social relevant de l'intérêt général. La connaissance et l'estime de soi sont aujourd'hui les clés de la transformation sociale. Avec toutes ces activités, nous sommes bien plus occupés à faire qu'à être. Nous avons besoin de sens comme de pain. Pour ralentir le rythme et arrêter la fuite, nous devons prendre du recul sur nous-mêmes, aller voir à l'intérieur ce qu'il se passe. Appelons cela l'intériorité. Et si cette notion était la clé du mieux vivre ensemble, nous pourrions même l'appeler l'intériorité citoyenne. […] ce dont nous manquons ce n'est pas de ressources, mais d'accès à ces ressources. Chacun de nous possède des ressources telles que l'imagination, l'intuition, la créativité, la confiance, la paix, l'amour, etc. Il y a en nous une sagesse intérieure (appelons la Humanisme, Univers, Esprit, Être ou Dieu) à laquelle l'intériorité nous permet d'accéder. Il ne s'agit pas d'un concept (exclusivement) religieux. La célèbre citation de Socrate, "Connais-toi toi-même", se poursuit par "...et tu connaîtras l'Univers et les Dieux." Nous ne parviendrons pas à respecter la nature si nous faisons systématiquement violence à notre propre nature. Première partie La première partie s'attache à définir l'intériorité, ce qui nous en coupe et comment s'ouvrir à elle. L'intériorité vient nous porter comme un dauphin rieur. Le but est d'arriver à un état d'être plus libre et plus responsable. Plus libre, comme dans moins entravés des mécanismes inconscients (peurs, colères, croyances limitantes). Plus responsable, comme dans être capable d'offrir une réponse personnelle aux questions de la vie, dont on peut assumer joyeusement les conséquences. Quitter "l'ENFER-mement" Ce chapitre propose de nombreux exemples pour illustrer comment des personnes (accompagnées par D'Ansembourg) ont trouvé en eux les ressources pour leur changement. Je suis un trop petit passage pour la puissance de vie qui coule en moi (témoignage). Personne ne lui avait parlé de l'écoute de soi, de l'accueil de son élan de vie, ni a fortiori du nettoyage émotionnel et affectif en amont que requiert particulièrement toute activité de relation d'aide, de soins, d'enseignement ou d'accompagnement. A travers les exemples présentés, on observe que les personnes sont très dépendante de l'extériorité (faire, avoir, contrôler, paraître,…). Elles suivent aussi généralement une vision à court terme, en apportant des réponses immédiates à leurs problèmes. Elles se trouvent souvent dans des processus d'action-réaction et sont piégées par la pensée binaire. Enfin, ils sont empêtrés dans leur passé. La plupart du temps, ce sont des événements traumatiques (accidents, maladies, deuils,…) qui sont déclencheurs du processus de changement. Que nous soyons croyants, agnostiques ou athées, pratiquant d'une religion ou d'une philosophie ou de toute autre forme de spiritualité, nous pouvons, selon nos traditions, parler d'énergie, d'élan de vie, de l'Être, de la puissance d'Allah, de Yahvé ou de Dieu, pour tenter de nommer qui ou ce qui transforme en nous le "plomb" de notre personnalité humaine gentille, méchante, malheureuse ou violente, en l'"or" de notre être généreux créateur et vrai. Quelle que soit l'inspiration ou la dimension considérée, et que les circonstances soient agréables ou désagréables, c'est bien dans le creuset de l'intériorité que peut s'élaborer le processus d'ouverture du coeur et de conscience qui permet la transformation personnelle et, donc, le changement social. Entrer dans "l'OUVERT-ure" Le recul qui permet l'intériorité peut être inspiré par des sources très variées, pas uniquement par un travail "psy", ni par une démarche spirituelle. Un changement de cadre peut favoriser un changement intérieur, mais n'est pas en soi une condition suffisante. Le plus difficile est souvent quitter nos vieilles habitudes, aussi déplaisantes qu'elles puissent être. De la difficulté de gérer un enfant hors norme: Dans ce genre de cas, ma proposition est de mettre en place tout ce que nous pouvons comme attention et disponibilité dans l'acceptation de l'insondable mystère qu'est l'autre, même s'il est notre enfant, et d'avoir confiance dans le processus de la vie. Dans la plupart des cas, accepter de se laisser mettre au monde par son propre enfant, par le regard neuf qu'il nous donne sur la vie, sera l'occasion d'une co-naissance, sinon d'une renaissance. Rappelons-nous que le sens de la vie est d'apprendre à être […]" L'OUVERT-ure est abordée fortement sous l'angle de ce que nous pouvons faire pour nos enfants, quel cadre familial leur donner, afin qu'ils ne reproduisent pas nos ENFER-mements. Il est crucial, notamment, de leur permettre de développer une bonne estime d'eux-mêmes. Les parents et enseignants le savent bien: les enfants n'écoutent pas ce que l'on dit, ni ce que l'on fait. Ils écoutent ce que nous sommes, ils cherchent en nous la cohérence. Citation de Cyrulnik: Le bonheur est contagieux. Ce qui enchante un enfant, c'est la bonheur dans lequel il baigne. Si vous souhaitez son bien-être, travaillez à vous rendre heureux. Il est urgent de ne rien faire, par moments Sans prise de recul, on ne peut pas se rendre disponible à la transformation. Il s'agit de désamorcer les pièges du passé et d'accueillir le présent et la puissance de vie qui est en nous, ce qui n'est pas nécessairement confortable. L'estime de soi est un élément-clé, permettant un bien-être personnel et un bonne intégration sociale. Nos difficultés ont plus à voir avec notre manière de voir les choses qu'avec nos conditions de vie effectives. Ni l'éducation, ni les valeurs morales ne sont des conditions suffisantes. Deuxième partie Ce chapitre explore ce qui, dans notre culture, nous coupe de notre intériorité, en plus et au-delà de nos barrières personnelles. Et aussi ce qui découle de notre nature-même d'être humain. Tout cela mène à de nombreux mécanismes de compensation, au lieu de simplement vivre. Notre culture nous tire hors de nous Notre culture participe à notre incapacité de développer notre intériorité, en partie à cause des théories scientifiques qui modèlent notre système de pensée. A commencer par la vision atomiciste du monde par les Grecs, qui nous enseigne que chaque élément constitutif existe de manière séparée et autonome. Appliquée à la société, cette pensée nous mène à croire que nous sommes tous indépendants les uns des autres et que nous ne pouvons compter que sur nous-mêmes pour mener notre vie. Descartes a enfoncé le clou en séparant l'esprit du corps et en faisant du processus de réflexion un pur processus rationnel. Enfin, la théorie de l'évolution de Darwin est une validation de la loi du plus fort, qui justifie, entre autres, la vision triomphante du progrès technologique (aux dépends du progrès spirituel). Or, au fond de nous, nous sentons bien que ni le rationalisme, ni la technologie n'apportent des réponses aux questions profondes que nous pouvons nous poser. Notre société cherche des solutions aux symptômes sans s'intéresser aux causes des problèmes (des attentats => plus de policiers; des maux de tête récurrents => des anti-douleurs; etc.). Nous sommes valorisés pour ce que nous faisons, pas pour ce que nous sommes. Les nouvelles découvertes en cosmologie et en physique quantique indiquent que toute la matière est liée, plutôt que d'être séparée en atomes et autres particules élémentaires. A terme, cette nouvelle vision scientifique va aussi modifier la manière de penser de la société. Nos systèmes éducatifs contribuent aussi à nous tirer hors de nous-mêmes. Citation d'Albert Jacquard: Mais l'homme est trop grand pour lui; ses possibilités de développement sont telles qu'elles l'angoissent et qu'il n'ose les mesurer. Le système éducatif, au lieu d'être le domaine privilégié où chacun prend conscience de ses possibilités et apprend à les exercer, est organisé le plus souvent de façon à inciter chacun à couper ses propres ailes. Au lieu de favoriser le développement de personnalités contrastées, on s'efforce de produire en série des individus conformes aux normes. En rentrant à l'école, les enfants doivent soudainement rester assis et ne plus jouer. Le programme scolaire doit être suivi à la lettre et ne laisse guère de place au développement personnel. Ainsi, petit à petit, les enfants se fanent. En particulier, l'éducation renforce en nous le sens des obligations, par l'obéissance aux règles. Le règne des "Il faut", "tu dois" commence. Sans parler des projections des parents sur leurs enfants, quant à leur future carrière. Nous sommes écartelés entre deux pensées contradictoires: celle qui nous dit que nous ne sommes pas là pour rigoler et l'injonction sociale d'être heureux. Nos besoins se situent à différents niveaux, comme des couches successives que l'on peut explorer. On peut voir cela comme des poupées russes: la plus petite au centre, celle qui est pleine, représente notre besoin le plus fondamental. Quand nous y arrivons, nous touchons à la plénitude. Avant cela, nous ressentons le creux, nous savons qu'il nous manque quelque chose. Cheminer vers ses besoins demandent de se rendre disponible à cette démarche, notamment par moins d'agitation et plus d'introspection et de calme. Citation de Saint-Exupéry: Je ne dis pas que les hommes des déserts et les moines des monastères connaissent forcément plus de joie que les hommes des villes, mais je dis que, dans leur dépouillement, il leur est offert moins de risques de se tromper sur la nature de leur joie. Si nous ne pouvons pas nous rapprocher de nos besoins, nous versons dans des mécanismes compensatoires. Mais nous avons de la peine à créer ces espaces de respiration (à l'instar de la bicyclette, nous avons peur de tomber en ralentissant). Soit nous arrivons à nous créer ces temps d'arrêt, soit la vie s'en charge (accidents, maladies, burn-out, etc.). Lorsque nous nous rendons disponibles, nous finissons par nous sentir bougés de l'intérieur. La pensée binaire est le mécanisme le plus subtil de la violence ordinaire. Elle pousse à la division et au cloisonnement, à faire des choix plutôt que de laisser ouvertes les alternatives pour favoriser l'émergence d'une troisième voie. Il s'agit de passer de "soit …, soit …" à "et … et …". Le mécanisme de conscience en spirale concentrique: en suivant nos besoins emboîtés, nous progressons à chaque fois et atteignons des paliers de conscience à chaque fois plus élevés. Incarnation ultime de la pensée binaire, la notion de Bien et de Mal. La CNV est très efficace pour échapper à cette dualité. La religion prétend avoir la monopole de la spiritualité. Or, bien des gens sont dans une quête spirituelle, malgré leur activité religieuse. Il ne s'agit pas renier les bienfaits que peuvent apporter certaines religions, surtout au niveau communautaire, mais la pratique religieuse actuelle tend à tirer les gens hors d'eux, en apportant Dieu de l'extérieur, au lieu d'aller le chercher à l'intérieur. Citation de Gandhi: Si les chrétiens vivaient vraiment en cohérence avec les valeurs du Christ, en quelques jours toute la planète se convertirait au christianisme. Notre nature d'être incarné nous éloigne de notre être Dans ce chapitre, D'Ansembourg offre sa vision de notre venue à la vie, qu'il a mise à l'épreuve avec succès depuis qu'il accompagne des gens dans leur processus de transformation intérieure. Sur le plan de l'Être, il n'y a aucune raison pour que la minute suivante soit plus vivante que la minute précédente. Nous pouvons sentir en nous un potentiel énorme et nous sentir coincés dans un corps qui ne nous permet pas de tout réaliser. Un être infini dans un corps fini… Citation de Marc-Aurèle: Transformer ce qu'on veut transformer, accepter ce qu'on ne peut transformer et avoir la sagesse de distinguer l'un de l'autre. Avant de nous incarner, nous baignons dans le Tout, nous sommes reliés à tout l'Univers. Lorsque nous nous incarnons, dans le ventre d'une femme, nous subissons une contraction et une séparation. Nous passons de l'Univers à un corps limité (contraction) et nous perdons le lien avec le Tout (séparation). Ceci entraîne deux sentiments forts qui sont en nous dès le début de notre vie: une peur liée à la contraction et une nostalgie du paradis perdu. Ces sentiments peuvent être plus ou moins forts et nous accompagnent jusqu'à ce que nous ayons retrouvé le chemin de notre Être. Notre Être intérieur est toujours connecté à l'Univers. C'est nous qui ne sommes pas connectés à notre Être. Développer notre intériorité revient à se reconnecter à notre Être, et donc à l'Univers. C'est un processus de dé-contraction. Citation de Patrick Viveret: Le manque de confiance en l'avenir n'est qu'une variante du manque de confiance en autrui ou en soi-même. Nous avons plus appris à compenser qu'à vivre Nous compensons le vide que nous ressentons par divers mécanismes. (Avidité, consommation) Nous remplissons notre vie de choses à faire, dans une recherche du succès dans laquelle nous sommes éduqués dès notre plus jeune âge. Citation de Charles Rojzman: L'avantage de l'un est perçu par l'autre comme son propre handicap. Cette logique installe une tension hostile entre les hommes. La conséquence est que l'estime de soi repose sur une base fragile qui est le succès. Nous le savons bien, depuis nos années d'école et ses multiples classements. Il faut réussir et ne pas se laisser distancer […]. Chacun vit avec un sentiment d'insuffisance qui est aggravé par le fait que cette compétition permanente crée une situation de solitude affective. Cette ruine de l'estime de soi entraîne des sentiments de rivalité et d'agressivité, des frustrations impossibles à satisfaire. (Droit au bonheur) Nous nous épuisons à rechercher le bonheur dans des formes diverses, sans le chercher en nous. Se ménage-t-il des signes extérieurs de richesse suffisants pour rassurer son entourage, éviter des questions et suspicions? Paie-t-il bien l'impôt de la bonne mine, des sourires convenus et postures de circonstances, et autres généreuses contributions au déni public? (Fascination pour l'horreur) Les mauvaises nouvelles font vendre les journaux, télévisions et autres médias. Nous sommes fascinés par l'horreur. Si une grande partie de la population se sent déconnectée de ce qui est vivant en elle, du frisson d'être en vie, du tressaillement d'appartenir au monde, elle va bien sûr nourrir le besoin de frissonner et de tressaillir avec la première mauvaise nouvelle venue. En regardant les effusions de sang des guerres et des catastrophes devant lesquelles nous sommes impuissants, devant tous ces signes de mort, le peu de vie qui nous reste palpite enfin, nous nous disons: "Ca alors, je suis vivant(e)… parce que je ne suis pas mort(e)! […]" Et nous voilà en train de prendre la mesure de la vie à l'aune de ce qu'elle n'est pas, faute d'avoir appris à vivre ce qu'elle est. (Sécurité) Poussé par la peur primale de notre incarnation, nous recherchons une sécurité absolue, dans tous les domaines (financiers, affectifs, professionnels, les enfants, etc.). Citation de Frédéric Fanget: L'intolérance à l'incertitude représente un véritable danger pour l'équilibre psychique et l'aptitude au bonheur. Troisième partie Temps nouveaux Si l'on fait l'effort de regarder au-delà des mauvaises nouvelles déversées quotidiennement par les médias, il se passe de nombreuses choses positives de par le monde, qui donnent espoir pour le futur. Citation de Christiane Signer: Etre soi-même un point d'acupuncture réactivant le corps social. Les exemples de D'Ansembourg datent un peu, le livre étant paru en 2008. Ce qui est intéressant de relever est l'effet de masse critique: une fois qu'une certaine pratique est adoptée par suffisamment de monde, le reste de la société l'adopte spontanément. C'est cela qu'il faut rechercher avec la quête d'intériorité: que développer son intériorité soit quelque chose de suffisamment commun pour que chacun s'y mette, afin que la société se transforme et que nous puissions à nouveau vivre en harmonie avec notre planète. La Terre est, au final, notre seule ressource. Conscience nouvelle: choix et voies d'aujourd'hui De plus en plus de gens s'interrogent sur le sens de leur vie et sur l'enjeu spirituel de la Vie. Ces gens font souvent des choix nouveaux. De plus en plus de personnes ne veulent plus remettre leur sécurité entre les seules mains de l’État, leur santé entre les mains de médecins traditionnels et de la pharma, et leur salut entre les mains des religions institutionnelles. Des enquêtes sociologiques ont montré que, dans les années 60, à peine 5% de la population faisait des choix radicaux. Aujourd'hui, ce serait entre 25 et 30%. Toutefois, ce mouvement n'est pas (encore) organisé et chacun se sent souvent marginal. Entre modernistes et traditionalistes, ces individus cherchent une troisième voie. Certains les regroupent sous l'appellation de "créatifs culturels". Pour eux, développement personnel et implication sociale ne sont pas mutuellement exclusifs. Ce processus commence par un changement du regard que nous portons sur le monde, une prise de conscience pas forcément agréable au début. Il est intéressant d'effectuer ce changement dans le cadre dans lequel nous nous trouvons. Un changement de cadre peut survenir, mais il entraîne le risque que seul ce cadre change, sans que nous changions intérieurement. Oser être soi dans un cadre connu, avec bienveillance et respect, nous aide considérablement à nous affranchir de la peur du regard de l'autre, à nourrir notre confiance en nous et à améliorer notre capacité d'affirmation. Un mouvement qui illustre bien cette tendance est celui de la simplicité volontaire. Changer entraîne souvent des peurs et des doutes, des renoncements et la pression des pairs (qui ont eux-mêmes peur de ce qu'ils voient changer en nous). Il n'est pas facile de savoir garder son cap et sa motivation parmi ces tourments, qui sont inhérents au processus de changement. Il n'y a pas de péridurale pour l'accouchement de soi-même. Il s'agit de décroître économiquement tout en croissant spirituellement. C'est une forme de résistance citoyenne au système dominant. Cela demande courage et détermination. Le jeu en vaut la chandelle. Citation de Christiane Singer: Dans ce monde qui se dessèche, si nous ne voulons pas mourir de soif, il nous faudra nous-mêmes devenir des sources. La psychologie évolue aussi. Cette science s'est longtemps contentée d'explorer les effets des mauvaises nouvelles et catastrophes sur la psyché. Depuis quelques décennies à peine, la psychologie dite "positive" explore le bienfait des expériences positives et nourrissantes. Un des fondateurs de ce mouvement, Mihaly Csikszentmihalyi, indique que les gens sont clairement plus heureux lorsqu'ils sont en compagnie d'autres êtres humains. Ceux qui ont déjà entamé leur changement peuvent devenir des passeurs d'expérience pour ceux qui veulent se lancer. La demande est grande, mais pas pour des recettes toutes faites. Ces gens veulent acquérir une autonomie. Ils veulent des trucs et des conseils, apprendre à connaître la météo et à lire une boussole, afin d'être capables de trouver leur propre chemin. Pour le guide/accompagnant, il s'agit avant tout d'être à disposition avec empathie. La démarche empathique demande deux qualités peu fréquentes, même chez les personnes les mieux intentionnées: l'humilité d'accepter qu'elles ne savent pas ce qui est juste pour l'autre; et la confiance que l'autre dispose de toutes les ressources intérieures pour trouver par lui-même ce qui est juste pour lui. En Occident, nous avons oublié que la vie est un parcours initiatique. D'Ansembourg propose de cheminer vers la prise de conscience suivante: J'appartiens à un univers vivant et inspiré. Je ne suis pas tout seul et je n'ai pas que mon mental intelligent et rationnel comme outil pour résoudre les énigmes sur mon parcours. Je peux expérimenter de l'intérieur la présence d'une ressource puissante en moi qui, quel que soit son nom, n'attend qu'une ouverture de ma part pour m'éclairer et m'alimenter, que les outils de cette ouverture s'appellent notamment silence, intuition et discernement, lâcher prise et élan créateur; et que cette expérience, loin de m'enfermer à l'intérieur de moi-même, m'ouvre à la reliance et à la compassion pour les êtres et les choses, au goût de l'action juste et, de plus en plus, à la joie rayonnante. La croyance en quelque chose vient de toute façon. Comme le dit André Comte-Sponville, qui se définir comme athée: On peut se passer de religion […] mais pas de communion, ni de fidélité, ni d'amour. On ne peut davantage se passer de spiritualité. […] Que vous croyez ou non en Dieu, au surnaturel ou au sacré, vous n'en serez pas moins confronté à l'infini, à l'éternité, à l'absolu – et à vous-même. Conclusion Nous nous faisons violence en négligeant notre sensibilité, notre intériorité, notre besoin de beauté, de sens, de tendresse et de proximité. Notre planète est en crise économique, écologique et sociale. Notre société actuelle est mortifère et suicidaire. Cette situation requiert un changement social, qui ne peut survenir que par accumulation de changements personnels. Le travail de développement personnel relève ainsi de l'intérêt collectif plutôt que de la sphère privée. Quelques méthodes simples peuvent nous aider à entamer le cheminement: • la méditation et la prière • respirer • contempler • explorer notre espace intérieur A propos de ce dernier point: Cela consiste à identifier les contours (de notre espace intérieur), puis à chercher le centre en voyageant d'un bout à l'autre. Concrètement, pour nous connaître, nous sommes invités à voyager régulièrement jusqu'aux marches de nous-mêmes: jusque dans nos pôles et territoires d'outre-mer, de notre urbanité à notre sauvagerie, de nos déserts intérieurs à nos lacs intimes, de nos pics lumineux à nos fonds marins… et ce, en nous donnant l'autorisation de faire d'autres choses, de rencontrer d'autres gens, d'autres cultures et pratiques que nous avons l'habitude de fréquenter. Nous pouvons aussi nous mettre face à deux questions: • qui choisit? (en moi, lorsque je prends une décision) • ma façon d'être au monde témoigne-t-elle du monde dont je rêve?