50 questions sur les relations entre les citoyens et les administrations

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50 questions sur les relations entre les citoyens et les administrations
Les relations entre les citoyens et les administrations
(paru dans la Gazette des communes du 23 février 2004)
I- La définition des autorités administratives..............................................................................4
1/ Quelles sont les autorités administratives soumises aux dispositions de la loi du 12 avril
2000? ........................................................................................................................................4
2/ Quelles sont celles qui en demeurent exclues ? ...................................................................4
II- La définition de la demande.....................................................................................................4
3/ Qu’entend-t-on par « demande » au sens de la loi du 12 avril 2000?..................................4
4/ Quelle doit être la forme de la demande ? ...........................................................................5
5/ Quelles sont les implications du nouveau mode de saisine de l’administration ? ...............5
6/ Qu’en est-il de la demande effectuée sur support non matérialisé ?....................................5
III- L’obligation d’accuser réception ...........................................................................................6
a)
Le cadre juridique ................................................................................................................6
7/ L’obligation d’accuser réception des demandes est-elle une innovation procédurale ? ......6
8/ Quel est le texte qui a donné valeur législative à cette obligation ? ....................................6
9/ Quand sont entrées en vigueur les dispositions de la loi du 12 avril 2000 ? .......................6
10/ La loi du 12 avril 2000 se suffit-elle à elle-même ? ..........................................................7
11/ Le texte d’application des dispositions législatives relatives aux conditions de délivrance
de l’accusé de réception a t-il été adopté ?...............................................................................7
12/ Quel est la finalité de l’obligation d’accuser réception de demandes dont
l’administration est saisie ? ......................................................................................................7
b)
Les demandes concernées ....................................................................................................7
13/ Quelles sont les demandes soumises à l’obligation d’en accuser réception ? ...................7
14/ Quelles sont les dispenses définies par les textes ? ...........................................................8
c)
Les modalités........................................................................................................................8
15/ La loi fixe t-elle un délai pour accuser réception des demandes dont elle est saisie ? ......8
16/ Quelles sont les mentions obligatoires devant figurer, a minima, dans l’accusé
réception ? ................................................................................................................................8
17/ Y a t-il un particularisme résidant dans l’obligation de préciser le service qui gère le
dossier ?....................................................................................................................................9
18/ Y a t-il des mentions supplémentaires devant figurer dans l’accusé réception dans
l’hypothèse où pourrait naître une décision implicite de rejet ou une décision implicite
d’acceptation?...........................................................................................................................9
19/ Y a t-il des mentions supplémentaires qui doivent figurer dans l’accusé de réception en
cas de demande incomplète ? ...................................................................................................9
20/ Que se passe t-il si l’autorité ne se rend compte de l’absence de certaines pièces utiles
qu’après avoir déjà accusé réception de la demande ?...........................................................10
21/ Quelles peuvent être les conséquences de l’envoi d’une demande incomplète en ce qui
concerne la formation des décisions implicites d’acceptation ou de rejet ?...........................10
22/ Que se passe-t-il en cas de communication complémentaire à son tour incomplète ? ...10
d)
Les sanctions ......................................................................................................................11
23/ Quelle sanction en cas de défaut d’accusé de réception ? ...............................................11
24/ Quelles sont les conséquences résultant de l’absence des mentions obligatoires ?.........11
25/ Quels sont les risques qui peuvent en découler ? ............................................................11
26/ L’administration peut-elle se prévaloir de l’inopposabilité des délais de recours pour
non-respect des règles afférentes à l’accusé de réception ? ...................................................11
IV- L’obligation de transmettre le demande à l’autorité compétente.....................................12
27/ En quoi consiste cette obligation ? ..................................................................................12
28/ Quelles sont les innovations apportées par la loi du 12 avril 2000 ?...............................12
29/ Quelles peuvent être les conséquences d’une demande mal orientée ?...........................12
30/ Quelle est l’autorité administrative qui doit accuser réception des demandes mal
orientées ?...............................................................................................................................13
31/ L’administration saisie initialement n’est-elle pas cependant soumise à un certain
formalisme ?...........................................................................................................................13
V- La demande de communication de documents administratifs............................................13
32/ La loi du 12 avril 2000 et le décret n°2001-493 du 6 juin 2001 ont-ils modifié les règles
en la matière ? ........................................................................................................................13
33/ Y a t-il des particularités résidant dans la formulation de la demande ? .........................14
34/ L’administration est-elle obligée de répondre à toute demande de communication de
documents ?............................................................................................................................14
35/ Quelle est l’autorité compétente pour y répondre à une demande de documents
administratifs ? .......................................................................................................................15
36/ Ces règles ne présentent-elles pas des inconvénients ? ...................................................15
37/ Comment répondre à une demande de documents ? .......................................................16
VI- La procédure contradictoire d’élaboration des décisions individuelles ...........................16
38/ Quelles sont les modalités prévues par la loi du 12 avril 2000 ?.....................................16
39/ Quels sont les cas pour lesquels cette règle ne s’applique pas ? .....................................17
40/ N’y a-t-il pas contradiction des textes ? ..........................................................................17
VII- L’obligation de respecter un délai de réponse...................................................................18
41/ De quel délai dispose l’administration pour répondre à une demande ? .........................18
42/ Que se passe-t-il en cas de silence au delà délai de réponse ?.........................................18
43/ Qu’advient-il des règles prévoyant un délai différent ?...................................................19
44/ Quand y a t-il décision implicite d’acceptation ? ............................................................19
45/ Une décision implicite d’acceptation peut-elle être formalisée ? ....................................19
46/ Quel est le point de départ des délais de recours contre les décisions implicites
d’acceptation ou de rejet ?......................................................................................................20
47/ Y a t-il des innovations en matière de retrait pour illégalité des décisions implicites
d’acceptation créatrices de droits? .........................................................................................20
48/ En va t-il de même concernant le retrait des décisions implicites de rejet créatrices de
droit ?......................................................................................................................................20
49/ Qu’en est-il du retrait des décisions explicites créatrices de droit ?................................21
50/ Qu’en est-il des décisions individuelles non créatrices de droit ? ...................................21
I- La définition des autorités administratives
1/ Quelles sont les autorités administratives soumises aux dispositions de la loi du 12 avril
2000?
Avancée certaine en matière de transparence administrative, la loi n° 2000-321 du
12 avril 2000 (JO 13 avril 2000) étend à toutes les autorités administratives les
dispositions du décret n° 83-1025 du 28 novembre 1983 concernant les relations
entre les administrations et les usagers, y compris les services placés sous l’autorité
du ministre de la Justice, exception qui disparaît dans l’article 1er de la loi. Ainsi,
«sont considérées comme autorités administratives au sens de la présente loi les
administrations de l’Etat, les collectivités territoriales, les établissements publics à
caractère administratif, les organismes de sécurité sociale et les autres organismes
chargés de la gestion d’un service public administratif».
Auparavant, entraient dans le champ d’application du décret du 28 novembre 1983
précité uniquement les services administratifs de l’Etat et de ses établissements
publics (art. 4 du décret). En étaient exclus, outre les services placés sous l’autorité
du ministre de la Justice, les collectivités locales et les organismes de sécurité
sociale, notamment.
2/ Quelles sont celles qui en demeurent exclues ?
Aujourd’hui, restent exclus du champ d’application des textes susmentionnés,
notamment :
• les autorités administratives indépendantes, régies par des textes spéciaux, et ce,
alors même qu’elles sont contrôlées par le juge administratif ;
• les organismes chargés de la gestion d’un service public industriel et
commercial, dont les décisions à caractère administratif concernent des tiers plus
que des usagers.
II- La définition de la demande
3/ Qu’entend-t-on par « demande » au sens de la loi du 12 avril 2000?
Pour certains, l’alinéa 1er de l’article 19 de la loi laisserait subsister un doute : s’agitil, comme le suggère le titre du chapitre II (« dispositions relatives au régime des
décisions prises par les autorités administratives") des seules demandes qui
appellent une décision ? Quoiqu’il en soit, la loi du 12 avril 2000 constitue une
amélioration certaine en ce qu’elle donne une acception large à la demande formulée
par le citoyen. Celle-ci désigne non seulement la demande initiale mais, également,
les recours gracieux ou hiérarchiques.
Ce faisant, le législateur a adopté une position contraire à celle du juge qui
considérait que les demandes visées par le décret n°83-1025 du 28 novembre 1983
concernant les relations entre les administrations et les usagers ne comprenaient
pas ces types de recours (CE Sect., 29 mars 1991, SA Laboratoire L.Lafon).
4/ Quelle doit être la forme de la demande ?
Sans aller dans les détails, on relèvera que l’article 16 de la loi du 12 avril 2000,
dont les modalités d’application sont fixées par décret en Conseil d’Etat, a repris la
proposition faite par le Médiateur de la République en 1997 (proposition de réforme
97-R013), à savoir qu’une personne tenue de respecter une date limite ou un délai,
pour présenter une demande, déposer une déclaration, exécuter un paiement ou
produire un document peut satisfaire à cette obligation avant cette date par un
envoi postal.
Les exceptions à la règle sont les cas où la présence de l’administré est indispensable
à la présentation de la demande ainsi que ce qui relève des procédures du Code des
marchés publics.
5/ Quelles sont les implications du nouveau mode de saisine de l’administration ?
Le principe, désormais, est que c’est le cachet de la poste qui fait foi de
l’accomplissement d’une des démarches mentionnées à l’article 16 de la loi
susmentionnée.
Les règles de certification sont donc assouplies, sauf pour ce qui a trait aux
procédures relevant du Code des marchés publics et à celles pour lesquelles la
présence du demandeur est obligatoire. Sur ce dernier point, la règle est claire :
aucune administration ne peut exiger la présence personnelle du demandeur si ce
n’est en vertu d’une disposition particulière.
Le législateur a, ce faisant, généralisé une règle établie par l’administration fiscale
(circ. N° 13-88 du 13 juin 1953 du Ministère de l’Economie, des Finances et du
Budget) et le régime de l’assurance chômage (lettre n° 92-117 du 31 décembre 1992
de l’UNEDIC).
Sa volonté a été d’unifier les règles de preuve en matière de certification de la date à
laquelle est satisfaite une démarche auprès des autorités administratives, alors que
l’état du droit laissait subsister des différences d’interprétation : dans certains cas et
pas d’autres, la recevabilité d’une demande était appréciée en prenant en compte la
date de réception de l’envoi par l ‘autorité destinataire et non la date d’expédition.
Qui plus est, les textes imposant un délai limite pour effectuer une déclaration ou
produire un document ne précisent pas toujours s’ils intègrent ou non les délais
d’acheminement des correspondances.
Le demandeur ne sera ainsi plus pénalisé si l’acheminement postal est défectueux
puisque est prise en compte non pas la date de réception de la demande mais celle
de son expédition.
En outre, on mentionnera une des conséquences pratiques qui en découle pour
l’administration : l’obligation de conserver les enveloppes des plis non recommandés,
en plus des souches des plis recommandés.
6/ Qu’en est-il de la demande effectuée sur support non matérialisé ?
La loi du 12 avril 2000 a validé les nouveaux modes de communication et autorise
qu’une demande soit effectuée par un procédé télématique ou informatique
homologué.
La date de prise en compte d’une demande formulée par un de ces moyens est celle
de son envoi, établie par un procédé informatique ou télématique permettant d’en
certifier (article 16 de la loi ; en outre, on se reportera utilement aux dispositions de
la loi du 13 mars 2000 portant adaptation du droit de la preuve aux technologies de
l’information et relatives à la signature électronique).
Cependant, on précisera que seules les personnes tenues de respecter une date limite ou un délai
peuvent y recourir et on rappellera que ces dispositions ne concernent pas les procédures régies
par le Code des marchés publics ni celles pour lesquelles la présence personnelle du demandeur
est exigée.
III- L’obligation d’accuser réception
a) Le cadre juridique
7/ L’obligation d’accuser réception des demandes est-elle une innovation procédurale ?
Non, cette obligation existait déjà mais son application était moindre puisqu’elle ne
s’imposait qu’aux administrations de l’Etat, et à ses établissements publics, et
qu’elle n’était prévue que par un texte à valeur réglementaire, à savoir le décret
n°83-1025 du 28 novembre 1983 concernant les relations entre les administrations
et les usagers.
Cette obligation s’est imposée aux autorités administratives, par touches
successives, en même temps que leurs interlocuteurs ont pris la dénomination d’ «
administrés », « d’usagers » puis de « citoyens ».
Le législateur n’est venu que confirmer une règle tant textuelle que
jurisprudentielle (CE, 3 juillet 199, Desault).
8/ Quel est le texte qui a donné valeur législative à cette obligation ?
Aujourd’hui, l’obligation d’accuser réception des demandes formulées par les
citoyens est posée par la loi du 12 avril, loi symbolique, qui consacre la citoyenneté
administrative et qui a pour ambition tant d’harmoniser les textes sur la
transparence administrative [loi du 6 janvier 1978 (fichiers informatisés), loi du 17
juillet 1978 (documents administratifs) et loi du 3 janvier 1979 (archives)], que de
rendre l’administration plus efficace, plus accessible et plus proche.
Son article 19, d’une loi que certains jugent «fourre-tout », prévoit qu’à l’exception
des « demandes dont l’accusé réception est régi par des dispositions spéciales, toute
demande adressée à une autorité administrative fait l’objet d’un accusé de réception
délivré dans des conditions définies par décret en Conseil d’Etat. »
9/ Quand sont entrées en vigueur les dispositions de la loi du 12 avril 2000 ?
Pour les dispositions qui nous intéressent que ce soit, ici, en ce qui concerne l’accusé
de réception ou, plus loin, concernant d’autres apports de la loi, elles sont entrées en
vigueur le 1er novembre 2000 (l’article 43 de la loi prévoyant que les articles 16 et 18
à 24 entrent en vigueur le 1er jour du septième mois suivant celui de sa
promulgation). Certaines sont, au surplus, subordonnées à l’édiction de décrets
d’application.
10/ La loi du 12 avril 2000 se suffit-elle à elle-même ?
Non. Ses dispositions étant de portée générale, la loi renvoie à l’intervention du
pouvoir réglementaire.
Or, l’administration couvrant tout naturellement son irrespect des règles par leur
inapplicabilité directe, en tant qu’un décret d’application est annoncé par le
législateur lui-même, la loi risquait fort de demeurer lettre morte.
C’est le cas, notamment, pour la détermination des « cas dans lesquels il n’est pas
accusé réception des demandes en raison de la brièveté du délai imparti à l’autorité
pour répondre ou lorsque la demande n’appelle pas d’autre réponse que le service
d’une prestation ou la délivrance d’un document prévus par les lois ou les
règlements» et des indications que les accusés réception doivent comporter.
11/ Le texte d’application des dispositions législatives relatives aux conditions de
délivrance de l’accusé de réception a t-il été adopté ?
Oui. Il s’agit du décret n°2001-492 du 6 juin 2001 pris pour l’application du chapitre
II du titre II de la loi du 12 avril 2000 et relatif à l’accusé de réception des demandes
présentées aux autorités administratives qui, dans son article 5, abroge les articles 4
à 8 du décret du 28 novembre 1983 (JO du 10 juin 2001).
Notons que ce texte fait partie d’un lot de quatre décrets d’application de la loi,
concernant pour les trois autres, les modalités de communication des documents
administratifs, les maisons des services publics et la transparence des aides
financières accordées par les personnes publiques.
12/ Quel est la finalité de l’obligation d’accuser réception de demandes dont
l’administration est saisie ?
Ce formalisme a pour objet de protéger le citoyen dans ses recours administratifs.
L’accusé de réception doit, en effet, permettre à un requérant de prouver l’exercice
d’un recours préalable dans le délai de recours juridictionnel et donc de proroger
celui-ci.
b) Les demandes concernées
13/ Quelles sont les demandes soumises à l’obligation d’en accuser réception ?
Le principe est que toutes les demandes (telles que définies supra) adressées aux
autorités administratives (définies supra) doivent donner lieu à un accusé réception
de celles-ci.
Cependant, la loi du 12 avril 2000 a introduit des exceptions à la règle. Ne sont pas
soumises aux dispositions de son article 19 alinéa 1er :
• les demandes formulées par les agents d’une collectivité ou d’un établissement:
cela s’explique par le principe selon lequel les règles de la procédure administrative
non contentieuse ne sont pas applicables aux relations des services administratifs
avec leurs agents; ces derniers, pris non en leur qualité de citoyen mais d’agent,
bénéficient de garanties particulières issues des statuts en tant que l’administration
est leur employeur;
• les demandes abusives « par leur nombre, leur caractère répétitif ou
systématique » (caractère laissé à l’appréciation du juge à l’occasion d’un recours);
• les demandes dont l’accusé de réception est régi par des dispositions spéciales.
La Loi renvoie à un décret en Conseil d’Etat pour définir deux autres cas de
dispense.
14/ Quelles sont les dispenses définies par les textes ?
Deux types de dispenses sont prévus par ce texte :
• En cas de célérité de l’autorité administrative.
Afin d’éviter tout formalisme excessif qui découragerait les services administratifs
d’instruire les dossiers dans les meilleurs délais, ceux-ci sont dispensés de cette
formalité quand ils font preuve de diligence, c’est-à-dire lorsqu’ils prennent une
décision expresse, régulièrement notifiée à l’auteur de la demande avant l’expiration
du délai au terme duquel est susceptible de naître une décision implicite (loi du 12
avril 2000), ou quand une décision implicite ou expresse est acquise en vertu des lois
et règlements au profit du demandeur, au terme d’un délai inférieur ou égal à 15
jours à compter de la réception de la demande (article 3 du décret n° 2001-492 du 6
juin 2001).
• En cas de pouvoir d’appréciation limité de l’administration.
Le décret du 6 juin 2001 susmentionné exonère d’accuser réception les demandes qui
visent à obtenir la communication d’un document ou la délivrance d’une prestation
pour lesquelles les textes n’octroient à l’administration qu’un pouvoir de vérification
quant aux
conditions pour en bénéficier (quand « la demande tend à la délivrance d’un
document ou au service d’une prestation prévus par les lois et règlements pour
laquelle l’autorité administrative ne dispose d’aucun pouvoir que celui de vérifier
que le demandeur remplit les conditions légales pour l’obtenir » - art.3 du décret du
6 juin 2001-).
c) Les modalités
15/ La loi fixe t-elle un délai pour accuser réception des demandes dont elle est saisie ?
Non, mais on peut considérer que les règles posées en matière de formation des
décisions implicites et en matière de computation des délais et voies de recours
constituent autant de moyens pour que l’administration se sentent obligée d’y
souscrire.
16/ Quelles sont les mentions obligatoires devant figurer, a minima, dans l’accusé
réception ?
La loi du 12 avril 2000 renvoie, sur ce point, à son décret d’application. Ainsi, aux
termes de l’article 1er du décret n° 2001-492 du 6 juin 2001, l’accusé de réception doit
comporter, au moins :
• la désignation, l’adresse postale et, le cas échéant, l’adresse électronique, ainsi
que le numéro de téléphone du service chargé du dossier ;
• la date de réception de la demande et la date à laquelle, à défaut d’une décision
expresse, celle-ci sera réputée acceptée ou refusée ;
• l’indication, si tel est le cas, de la susceptibilité de la demande de donner lieu à
une décision implicite de rejet ou d’acceptation.
17/ Y a t-il un particularisme résidant dans l’obligation de préciser le service qui gère le
dossier ?
Non. Cette obligation a été introduite par une circulaire du Premier ministre du 30
janvier 1985, dite « circulaire Fabius ». Toutefois, son application était limitée aux
administrations de l’Etat.
Elle fait écho au principe de « levée de l’anonymat » posé par l’article 1er alinéa 1er
de la loi. En effet, celui-ci, reprenant l’obligation générale de mentionner l’identité et
la qualité des agents et personnes signataires des correspondances et décisions,
prévoit que les courriers adressés à toute personne doivent mentionner « le prénom,
le nom, la qualité et l’adresse administratives de l’agent chargé d’instruire sa
demande et-ou de traiter l’affaire qui la concerne ». Une exception au principe est le
cas où, pour des motifs intéressant la sécurité publique ou la sécurité des personnes
le justifiant, l’anonymat de l’agent doit être respecté.
On ajoutera que la loi a également défini l’obligation de porter, sur les décisions, la
signature ainsi que la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la
qualité de leur auteur.
18/ Y a t-il des mentions supplémentaires devant figurer dans l’accusé réception dans
l’hypothèse où pourrait naître une décision implicite de rejet ou une décision implicite
d’acceptation?
Oui. Concernant l’éventualité d’une décision implicite de rejet, l’administration doit
préciser les délais et voies de recours que la décision peut susciter.
Concernant une éventuelle décision implicite d’acceptation, elle doit indiquer la
possibilité pour le demandeur de se voir délivrer l’attestation prévue par l’article 22
de la loi du 12 avril 2000.
19/ Y a t-il des mentions supplémentaires qui doivent figurer dans l’accusé de réception en
cas de demande incomplète ?
Oui. L’article 2 du décret n° 2001-492 du 6 juin 2001 impose que :
• l’administration informe le citoyen du fait que son dossier est incomplet et que,
de ce fait, elle est dans l’impossibilité de l’examiner, auquel cas elle lui précise quels
sont les documents manquants indispensables au traitement de sa demande;
• l’administration lui indique le délai dont il dispose pour ce faire ;
• l’administration liste, dans l’hypothèse où certains documents sont en langue
étrangère, ceux qui doivent être traduits et/ou légalisés avant de lui être
communiqués;
• l’administration précise quels sont les effets d’une demande incomplète.
20/ Que se passe t-il si l’autorité ne se rend compte de l’absence de certaines pièces utiles
qu’après avoir déjà accusé réception de la demande ?
Dans cette hypothèse, l’accusé de réception peut « être régularisé ». En effet,
l’administration doit adresser une lettre suivante, distincte de l’accusé de réception,
qui devra, cette fois, comporter les indications susmentionnées.
Les effets du retard dans l’appréciation du contenu complet ou non de la demande
déposée se ressentent dans les délais de formation des décisions implicites.
21/ Quelles peuvent être les conséquences de l’envoi d’une demande incomplète en ce qui
concerne la formation des décisions implicites d’acceptation ou de rejet ?
Le délai au terme duquel, à défaut de décision expresse, la demande est réputée
acceptée, ne court qu’à compter de la réception des pièces requises.
La formulation du décret n° 2001-492 du 6 juin est différente concernant les
décisions implicites de rejet.
Selon ses termes : « le délai au terme duquel, à défaut de décision expresse, la
demande est réputée rejetée est suspendu pendant le délai imparti pour produire les
pièces requises ».
On peut s’étonner d’une telle solution. Imaginons concrètement le cas où l’autorité
saisie est incompétente, transmet la demande à celle qui l’est, dans un délai tenant
compte de la célérité du service, et à qui il incombe d’en accuser réception.
Il revient logiquement à la seconde de juger du caractère complet ou non de la
demande et, si tel n’est pas le cas, de réclamer au demandeur les pièces
manquantes. Or, même si le délai est suspendu, l’autorité administrative peut se
trouver dans la situation de devoir répondre à une demande complétée très peu de
temps avant que ne se forme une décision implicite de rejet. Auquel cas, certains
recours contentieux seront engagés avant même que l’administration n’ait été mise
en mesure de prendre une décision explicite dont le sens pourrait être contraire.
22/ Que se passe-t-il en cas de communication complémentaire à son tour incomplète ?
Le décret du 6 juin 2001 susmentionné prévoit que le demandeur met fin à la
suspension des délais d’obtention des décisions implicites de rejet en procédant à la
communication des pièces qui lui ont été demandées.
Cependant, ce texte ne précise pas ce qui se passerait en cas de communication de
documents, dans le délai imparti, qui se révélerait elle aussi incomplète. On peut
donc se poser la question de savoir si, dans ce cas, l’autorité administrative doit
accuser réception des pièces complémentaires fournies et indiquer dans le même
temps que les délais susmentionnés auront un nouveau point de départ. On
s’aperçoit que la procédure mise en place est susceptible de générer tant de la
lourdeur que de la lenteur. Les solutions adoptées pour favoriser l’efficacité et la
transparence administratives ne sont pas dénuées d’inconvénients et
d’interrogations.
d) Les sanctions
23/ Quelle sanction en cas de défaut d’accusé de réception ?
La sanction prévue dans le cas où l’accusé de réception est inexistant est la même
que celle prévue antérieurement par le décret du 28 novembre 1983, à savoir
l’inopposabilité des délais de recours à l’auteur de la demande.
Cela signifie que, lorsque l’accusé de réception n’a pas été envoyé, les délais de
recours ne courent pas à l’encontre de l’auteur de la demande qui peut donc attaquer
la décision à tout moment, à moins qu’une décision expresse ne soit intervenue
avant l’expiration du délai au terme duquel naîtra la décision implicite.
L’administration a donc tout intérêt à accuser réception des demandes qui lui sont
adressées, sous peine que celles-ci soient indéfiniment contestables.
On relèvera que la Loi est revenue sur la curieuse rédaction de l’article 5 du décret
du 28 novembre 1983 aux termes desquels « les délais opposables à l’auteur d’une
demande (…) courent de la date de la transmission (…) d’un accusé de réception ».
Or, si sont visés les délais de recours contre la décision prise sur la demande, ceux-ci
ne peuvent courir avant la notification de la décision.
24/ Quelles sont les conséquences résultant de l’absence des mentions obligatoires ?
Le Sénat avait proposé, lors de la rédaction initiale du projet de loi d’avril 2000, que
soit sanctionné d’inopposabilité des délais et voies de recours, à l’auteur de la
demande, les décisions pour lesquelles « le caractère irrégulier de (leurs) conditions
de délivrance a empêché le demandeur de faire valoir ses droits ». L’Assemblée
nationale a jugé cette formulation insuffisamment précise pour ne pas la retenir.
Le texte adopté n’est donc pas allé aussi loin et s’est limité à sanctionner de
l’inopposabilité des délais et voies de recours celles des décisions qui ne comportent
pas les indications prévues par le décret n° 2001-492 du 6 juin 2001 (art.19 al.3 de la
loi).
On remarquera que, même si cela aurait été souhaitable, la loi du 12 avril 2000 n’a
pas prévu l’hypothèse d’indications incomplètes ou erronées contenues dans les
mentions obligatoires. Il renvoie, dans ce cas de figure, au juge saisi d’un recours
contentieux, l’appréciation de leur caractère substantiel ou non constitutif d’un vice
de procédure entachant l’acte et justifiant son annulation.
25/ Quels sont les risques qui peuvent en découler ?
Le recours administratif non contentieux peut devenir une manœuvre dilatoire
intenté dans l’espoir que, l’administration ne renouvelant pas, à chaque fois, les
mentions exigées, la décision litigieuse puisse être déférée au juge à toute époque.
L’accusé de réception détourné de sa finalité initiale serait alors source d’instabilité
juridique puisque source d’incertitude quant au sort des décisions.
26/ L’administration peut-elle se prévaloir de l’inopposabilité des délais de recours pour
non-respect des règles afférentes à l’accusé de réception ?
L’administration peut souhaiter se prévaloir de l’absence d’accusé de réception, ou
d’erreurs dans l’accusé de réception, pour retirer une décision.
Or, elle ne peut invoquer à son bénéfice sa propre turpitude (CE, 24 octobre 1997,
Mme de Laubier : l’auteur de l’acte ne saurait l’invoquer pour retirer de sa propre
initiative une décision individuelle créatrice de droits au-delà d’un délai de deux
mois après sa notification, alors même que cette décision serait illégale ).
IV- L’obligation de transmettre le demande à l’autorité compétente
27/ En quoi consiste cette obligation ?
Parmi les demandes reçues par une autorité administrative, certaines ne sont pas
adressées à celle qui serait compétente pour y répondre. On peut donner pour
exemple, des demandes adressées à la commune, alors que seul le préfet est
compétent pour délivrer une autorisation ou statuer sur la demande.
L’administration n’étant théoriquement tenue de répondre qu’aux demandes dont
elle est saisie, on aurait pu penser qu’une telle erreur exonérerait dans une telle
hypothèse. Mais, considérant que les administrés peuvent avoir des « circonstances
atténuantes » (du fait du cloisonnement des services, notamment), l’exigence
d’adresser sa demande à l’autorité compétente a été aménagée de façon libérale.
En ce sens, a été établi un principe selon lequel l’autorité administrative
destinataire d’une demande à laquelle il ne lui appartient pas de répondre, car ne
relevant pas de ses attributions, doit la transmettre à l’autorité compétente.
Ce principe a été initialement inscrit dans le décret du 28 novembre 1983, lui-même
venu renforcer une pratique antérieure autorisant la réorientation d’une demande à
l’intérieur d’une même collectivité publique (CE, 23 janvier 1931, Dame et
Demoiselle Garein).
Mais si, en vertu du décret, une demande adressée, à tort, à un service de l’Etat
était transmise à un service d’une collectivité locale, l’inverse n’était pas possible.
28/ Quelles sont les innovations apportées par la loi du 12 avril 2000 ?
La loi du 12 avril 2000 met fin à l’illogisme évoqué supra et reprend le décret du 28
novembre 1983 pour en étendre l’application aux administrations qui étaient, jusque
là, exclues de son champ d’application. A savoir : les administrations de l’Etat, les
collectivités territoriales, les établissements publics à caractère administratif, les
organismes de sécurité sociale et les autres organismes chargés de la gestion d’un
service public administratif (art.1er de la loi).
On remarquera, cependant, qu’en demeurent exclues les demandes intéressant les
relations de l’administration avec ses agents.
L’article 20 alinéa 1er de la loi a assorti ce principe d’obligations à la charge tantôt de
l’autorité saisie originairement, tantôt de l’autorité réellement compétente pour y
répondre.
29/ Quelles peuvent être les conséquences d’une demande mal orientée ?
L’article 20 alinéa 3 de la loi prévoit qu’une décision implicite d’acceptation ne peut
naître tant que l’autorité compétente n’a pas encore reçu la demande, principe
conforme à la jurisprudence antérieure (CE, 18 décembre 1981, Vernet-Lozet ; CE,
31 mai 1989, SA Baltz-Sanirec).
La solution donnée concernant les décisions implicites de rejet est identique : en cas
de demande adressée à une autorité incompétente, celle-ci devant la transmettre à
l’autorité administrative compétente et en aviser l’intéressé, le délai au terme
duquel est susceptible d’intervenir une décision implicite de rejet ne court qu’à
compter de la date de réception de la demande (art.20 al.2). Désormais, la date de
réception de la demande devrait correspondre à la date de l’accusé de réception
délivré par l’administration. On peut, par conséquent, se poser la question de savoir
ce qu’il advient de la règle d’après laquelle la transmission est réputée faite dès le
dépôt de la demande.
30/ Quelle est l’autorité administrative qui doit accuser réception des demandes mal
orientées ?
Il s’agit de l’autorité compétente et non de l’autorité initialement saisie (art. 20
dernier alinéa : « Dans tous les cas, l’accusé de réception est délivré par l’autorité
compétente »).
Cela change singulièrement les choses puisque le décret du 28 novembre 1983, s’il
n’avait pas explicitement prévu ce cas, dans son application, semblait imposer la
règle contraire. En effet, parmi les mentions devant obligatoirement être présentes
dans l’accusé de réception « ancienne version » figurait l’information selon laquelle
la demande avait été transmise à l’autorité compétente.
Toutefois, l’autorité initialement saisie n’étant pas, en général, capable de fournir
tous les renseignements de l’accusé de réception, il a été progressivement admis
qu’il incombait à l’administration compétente de délivrer celui-ci.
31/ L’administration saisie initialement n’est-elle pas cependant soumise à un certain
formalisme ?
L’autorité saisie à tort doit informer l’auteur de la demande de la réorientation de
son dossier, et ce, conformément à la pratique adoptée par les services étatiques.
Si on ne peut évoquer ici la soumission aux règles de l’accusé de réception telles que
prévues par la loi (article 19) et les décrets, force est de constater que
l’administration est, de fait, tenue à l’obligation de répondre à une demande qu’elle
transmet et d’en tenir informé l’auteur.
V- La demande de communication de documents administratifs
32/ La loi du 12 avril 2000 et le décret n°2001-493 du 6 juin 2001 ont-ils modifié les règles
en la matière ?
Oui. L’article 7 de la Loi modifie le titre I de la loi n°78-753 du 17 juillet 1978
relative à la liberté d’accès aux documents administratifs.
On attirera l’attention sur un certain nombre de ses apports : elle détermine
l’autorité compétente pour répondre aux demandes de communication de documents
administratifs ; elle étend la liste des documents pouvant être communiqués en
vertu de l’article 1er alinéa 2 de la loi du 17 juillet 1978 précitée (avis et prévisions,
notamment) ; elle consacre, implicitement, la doctrine du document à caractère
nominatif (devenus documents à caractère personnel) ; elle officialise la pratique
consistant pour la Commission d’accès aux documents administratifs (CADA), à
pouvoir « conseiller » les collectivités sur le caractère communicable ou non de tel ou
tel document ; et, elle étend les modalités formelles d’accès aux documents
administratifs.
Le décret n° 2001-493 du 6 juin 2001, pris pour l’application de l’article 4 de la loi du
17 juillet 1978 tel que modifié par la loi du 12 avril 2000, précise les modalités du
droit de l’administré à pouvoir toujours obtenir copie d’un document communicable
au sens de la loi précitée.
33/ Y a t-il des particularités résidant dans la formulation de la demande ?
La question peut se poser de savoir si l’administration est tenue de répondre à une
demande verbale tendant à la communication d’un document administratif.
On peut, à ce propos, évoquer une réponse ministérielle du 29 décembre 1997
(Réponse à Bernard Nayral, JO AN, p. 4917) qui a donné une réponse modulée à
cette question. Quoi qu’il en soit, il donne une réponse positive, concernant les
demandes fondées sur la loi du 17 juillet 1978, s’en référent à un avis de la CADA (2
février 1995, affaire Guillot) selon lequel aucune disposition de la loi du 17 juillet
1978 ne fait obstacle à ce que la demande de communication soit purement verbale,
étant donné qu’elle n’en précise pas la forme.
On notera que la réponse est différente selon que la demande est fondée sur d’autres
dispositions telles que le Code général des collectivités territoriales.
En tout état de cause, il convient de souligner l’intérêt qui s’attache à la
présentation écrite de la demande. Celle-ci facilite, en effet, l’administration de la
preuve et permet de déterminer le point de départ du délai imparti à l’autorité
compétente pour satisfaire la demande.
Si la demande est présentée par écrit, elle suit le régime décrit supra.
34/ L’administration est-elle obligée de répondre à toute demande de communication de
documents ?
Non. Sans étudier la question du caractère communicable ou non d’un document
dont la « production » est requise, on s’intéressera à celle de la « requête » abusive.
La loi du 12 avril 2000 a introduit une disposition autorisant l’administration à ne
pas donner suite aux « demandes abusives, en particulier par leur nombre, leur
caractère répétitif ou systématique ». Toutefois, à l’instar de la formule utilisée
concernant la dispense d’accuser réception, le législateur n’a pas davantage précisé
le caractère abusif d’une demande , laissant au juge (exemple : CAA Paris, 8 juin
2000, Cne. de Charny, req n° 97PA03164) et à la CADA le pouvoir d’en apprécier.
Préalablement à l’intervention de la loi du 12 avril 2000, dans le silence des textes,
la CADA a été amenée à définir l’usage abusif du droit de la communication et à le
sanctionner. Il pouvait s’agir, au minimum, de certaines demandes ayant un
caractère systématique et répétitif et, au maximum, de demandes exercées en vue
de perturber le fonctionnement normal du service. L’usage de la loi est, alors,
constitutif d’un « détournement de son esprit ». Cependant, cette « doctrine » a
toujours été employée avec prudence par la CADA.
En outre, cette règle ne doit pas conduire les administrations à refuser l’accès à
certains documents, même réclamés régulièrement, par un seul et même administré.
Ajoutons que la loi entérine la solution adoptée par la CADA en ce qui a trait à
l’irrecevabilité des demandes tendant à la communication de pièces faisant l’objet
d’une publication au Journal officiel, du fait qu’elles sont aisément accessibles. Elle
a également exclu de son champ d’application les documents réalisés en vue d’être
vendus (exemple : les études élaborées par l’INSEE dans le cadre d’un contrat de
prestation de services exécutés pour le compte de tiers, ou les données « météo »
vendues par Météo France).
35/ Quelle est l’autorité compétente pour y répondre à une demande de documents
administratifs ?
La détermination de l’autorité compétente pour satisfaire une demande de
communication a suscité de vifs débats lors des discussions parlementaires. Fallaitil reconnaître à toute administration qui possède matériellement le document le
droit de le communiquer ou bien fallait-il réserver ce droit à celle qui en est
l’auteur ?
Pour l’Assemblée nationale, la première règle se justifiait par la volonté d’élargir les
voies d’accès des citoyens aux documents administratifs et de décloisonner
l’administration. Pour le Sénat, la généralisation de cette règle était inacceptable
posant la question de la capacité de l’autorité qui n’est pas l’auteur du document à
juger de sa communicabilité, et celle, par conséquent, de sa responsabilité en cas de
divulgation d’un document non communicable.
L’article 2 de la loi du 17 juillet 1978, tel que modifié par l’article 7 de la loi du 12
avril 2000, prévoit que, désormais, les administrés peuvent s’adresser à
l’administration « détentrice» d’un document administratif, même si celle-ci n’en est
pas l’auteur. Il lui revient, tout à fait logiquement, d’en accuser réception.
On relèvera que cette disposition est susceptible d’infléchir ponctuellement la
doctrine de la CADA qui avait admis quelques tempéraments au critère de la
détention. A titre d’illustration, on rappellera que la Commission a estimé que les
documents émanant des collectivités locales et transmis au représentant de l’Etat
dans le département, dans le cadre d’un contrôle de légalité, ne peuvent être
communiqués par ce dernier, seule l’autorité compétente de la collectivité locale
étant habilitée à en donner communication (Avis CADA, 6 février 1992, Préfet de
l’Oise).
36/ Ces règles ne présentent-elles pas des inconvénients ?
Si. Son application n’est pas sans inconvénients potentiels. Certaines
administrations pourraient bien se trouver confrontées à une montée en charge des
demandes à laquelle ne correspondrait pas des effectifs suffisants. La loi n’a, en
effet, prévu ni d’obligation de recrutement, bien qu’imposant des obligations
nouvelles, ni l’octroi de moyens financiers pouvant encourager une telle politique.
Concernant plus particulièrement les collectivités locales, le droit pour tout individu
de s’adresser à une personne publique en sa qualité de détenteur d’un document
administratif, alors même qu’elle n’en est pas l’auteur, peut être à l’origine d’une
croissance des demandes formulées auprès des communes. En ce sens, on
remarquera que les administrés préfèrent souvent privilégier la proximité pour
obtenir la communication de documents ou décisions que ces collectivités possèdent,
alors qu’ils émanent de la préfecture ou d’une structure intercommunale.
Enfin, on ne peut manquer de noter que la règle entre en contradiction avec l’article
20 de la loi du 12 avril 2000 qui oblige une autorité incompétente à transmettre une
demande mal dirigée. Cependant, elles ont toutes deux en commun d’avoir pour but
de protéger le demandeur.
37/ Comment répondre à une demande de documents ?
La loi du 12 avril 2000 adapte, là aussi, le droit d’accès aux évolutions techniques.
Ce, en intégrant aux documents administratifs ceux ayant un « support
informatique ou pouvant être obtenus par un traitement automatisé d’usage
courant », et en autorisant les copies « sur un support identique à celui utilisé par
l’administration ».
Le décret n°2001-493 du 6 juin 2001 prévoit, en ce sens, que toute personne
demandant copie d’un document peut obtenir celle-ci soit sur papier, soit sur support
informatique identique à celui utilisé par l’administration, soit par messagerie
électronique.
En dehors de cela, les modalités d’accès ne sont guère modifiées si ce n’est pour
reprendre certaines précisions jurisprudentielles.
Cependant, si comme avant les documents sont reproduits aux frais du demandeur,
le mode de calcul est modifié pour se référer aux frais de reproduction. Pourront
ainsi être prises en compte, à l’exclusion des frais de personnel, outre le coût du
support et le coût de l’affranchissement, les dépenses d’amortissement et de
fonctionnement du matériel utilisé (les tarifs plafonds doivent être fixés par arrêté
du Premier ministre).
VI- La procédure
individuelles
contradictoire
d’élaboration
des
décisions
38/ Quelles sont les modalités prévues par la loi du 12 avril 2000 ?
L’article 24 de la loi du 12 avril 2000 impose une procédure contradictoire se
traduisant , théoriquement, par l’obligation de prendre une décision individuelle
défavorable « qu’après que la personne intéressée a été mise à même de présenter
des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales».
Ce faisant, elle a étendu à l’ensemble des autorités administratives la procédure
contradictoire d’élaboration des décisions individuelles qui avait été instituée par le
décret du 28 novembre 1983. Cette mesure a un champ d’application limitativement
défini puisqu’elle ne vise que les décisions individuelles défavorables devant être
motivées en application des articles 1er et 2 de la loi n° 79-587du 11 juillet 1979
relative à la motivation des actes administratifs. On peut citer les mesures
individuelles de police, les sanctions, les décisions abrogeant ou retirant une
décision créatrice de droits, les décisions qui opposent une prescription ou une
déchéance ou, encore, le refus d’un avantage dont l’attribution est un droit pour
l’administré.
Remarquons que le projet de loi mentionnait « les décisions individuelles qui doivent
être motivées », sans précision, ce qui aurait permis d’inclure les décisions dont la
motivation est imposée par des dispositions spécifiques. L’Assemblée nationale
avait, quant à elle, étendu l’application de cette procédure à toutes les décisions
défavorables qu’elles soient motivées ou non. On l’a vu, le Parlement a finalement
adopté une rédaction restrictive, proche de celle du décret du 28 novembre 1983.
On peut se poser la question de savoir si l’article 24 précité ne génère pas une
obligation d’accuser réception d’un type particulier. En effet, si l’administration n’est
pas tenue d’accuser réception au sens de l’article 19 de la loi du 12 avril 2000, elle
doit formuler une réponse à une demande qui ne peut donner lieu à une décision
sans qu’elle ait, au préalable, indiqué à l’intéressé de quelles garanties procédurales
il pouvait se prévaloir : mention de la faculté de présenter des observations orales,
de se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix.
39/ Quels sont les cas pour lesquels cette règle ne s’applique pas ?
Ne sont pas soumises au principe du contradictoire les décisions intéressant les
agents d’une collectivité ou d’un établissement, qui sont soumises à des règles
précises, ainsi que celles pour lesquelles des dispositions législatives ont instauré
une procédure contradictoire particulière.
La référence à la loi du 17 juillet 1978 permet d’exclure les organismes de sécurité
sociale en ce qui concerne la motivation de certaines décisions (décisions
individuelles par lesquelles est refusé un avantage dont l’attribution constitue un
droit, aides et subventions dans le cadre de leur action sanitaire et sociale). Le Code
de la sécurité sociale a institué pour ces organismes des procédures particulières
permettant à l’assuré de présenter ses observations.
Exonèrent, également, l’administration de se conformer à la procédure
contradictoire les situations d’urgence, l’existence de circonstances exceptionnelles,
le risque de compromettre l’ordre public, la conduite des relations internationales ou
les demandes d’audition abusives, notamment par « leur nombre, leur caractère
répétitif ou systématique ».
Par ailleurs, curiosité des textes, cette règle ne s’applique pas aux décisions prises
en réponse à une demande. Cela peut paraître excessif si l’on considère que
l’intéressé ne connaît pas nécessairement, au moment de sa requête, les motifs de
droit ou de fait qui pourront justifier un refus, d’où l’utilité d’une procédure
contradictoire, même dans ce cas.
40/ N’y a-t-il pas contradiction des textes ?
Un problème se pose concernant l’articulation des règles générales issues de la loi
du 12 avril 2000 avec la procédure contradictoire instituée par l’article 24 de cette
même loi du 12 avril 2000. Celle-ci réserve, en effet, le bénéfice de la procédure
contradictoire aux décisions qui doivent être motivées, mais en exclue « les cas où il
est statué sur une demande ». On peut en trouver la raison dans la croyance selon
laquelle l’intéressé a pu faire valoir ses arguments lors de sa requête.
Or, la loi du 11 juillet 1979 modifiée relative à la motivation des actes administratifs
vise expressément les décisions « qui refusent une autorisation ». Et, s’il y a refus,
c’est qu’il y a eu demande !
VII- L’obligation de respecter un délai de réponse
41/ De quel délai dispose l’administration pour répondre à une demande ?
Le législateur a réduit, de façon générale, de deux mois, le délai pour répondre, de
façon expresse, à une demande dont une autorité administrative est saisie (articles
21 et 22 de la loi du 12 avril 2000). Cette dernière n’a donc plus quatre mais deux
mois pour se prononcer expressément. Il s’agit là d’une des innovations essentielles
introduites par la loi et qui concerne tout type de demande, y compris celles
formulées par les agents de la collectivité ou de l’établissement. Ce, sauf
allongement du délai par les décrets en Conseil d’Etat qui doivent intervenir, ou cas
particuliers régis par des dispositions spécifiques (permis de construire, par
exemple).
La loi, ce faisant, a pris en compte les évolutions sociales et technologiques qui
permettent à l’administration de se prononcer plus rapidement (le délai de quatre
mois avait été fixé par un décret du 2 novembre 1864 !).
42/ Que se passe-t-il en cas de silence au delà du délai de réponse ?
Le principe est que le silence gardé par l’administration au-delà du délai de droit
commun de deux mois équivaut à une décision implicite de rejet.
La Loi fait oublier les déclarations hâtives du gouvernement, en 1995, selon
lesquelles le silence gardé par l’administration vaudrait bientôt acceptation, sauf
exception limitativement énumérées.
Pour s’en convaincre, on se référera à la lettre de l’article 21 de la loi concernant
l'exception au cas où « un régime de décision implicite d’acceptation est institué »,
ainsi qu’à l’article 4 du décret du 6 juin 2001 qui remplace certaines dispositions de
l’article 1er de la loi du 11 janvier 1965 relatif aux délais de recours contentieux en
matière administrative. Elle prévoit ainsi que, « sauf disposition législative ou
réglementaire contraire, le silence gardé pendant plus de deux mois sur une
réclamation par l’autorité compétente vaut décision de rejet ». A cet égard, on
insistera sur les apports de la loi du 12 avril 2000. D’une part, elle a donné au
principe valeur législative, mettant fin à la différence de point de vue qui existait
entre le Conseil constitutionnel et le Conseil d’Etat. Le premier considérait que
seule la loi pouvait y déroger, étant un principe général du droit (DC, 26 juin 1969,
protection des sites ; DC, 18 janvier 1995, vidéo surveillance), alors que, pour le
second, un décret retenant la règle inverse n’était pas irrégulier (CE Ass., 27 février
1970, Commune de Bozas ; CE, 23 avril 1975, Vilain). D’autre part, la Loi a
singulièrement modifié les choses en réduisant le délai au terme duquel peut naître
une décision implicite de rejet de quatre à deux mois, à compter de la demande
(art.21de la loi), cherchant par là à accélérer le processus décisionnel.
L’attachement au principe peut s’expliquer par le souci d’éviter les risques tenant à
la mise en cause de la responsabilité de l’administration, en cas de négligence de sa
part.
43/ Qu’advient-il des règles prévoyant un délai différent ?
S’agissant des régimes existants, le gouvernement devra déterminer ce pour
lesquels il est opportun de fixer un délai supérieur à deux mois, du fait de la
complexité de la procédure d’instruction de la demande.
S’agissant des régimes qui prévoient actuellement un délai plus court que celui de
deux mois, les articles 21 et 22 de la loi ne semblent pas avoir pour objet, ni pour
effet, de les rendre « caducs ». Dès lors qu’ils sont en accord avec les finalités de la
loi, il ne semble pas y avoir lieu de remettre en cause les préoccupations d’urgence
qui les justifient.
44/ Quand y a t-il décision implicite d’acceptation ?
Le législateur, s’il fait largement appel au pouvoir réglementaire pour déterminer
les cas où le silence gardé par l’administration vaut décision d’acceptation, a pris au
moins parti sur le délai au terme duquel le silence vaudra acceptation : le délai de
droit commun de deux mois.
L’article 22 de la loi du 12 avril 2000 renvoie également au pouvoir réglementaire en
ce qui concerne la détermination des cas où un délai différent de celui qu’elle fixe de
manière générale peut être institué en raison de la complexité ou de l’urgence de la
procédure. Il en va de même en ce qui concerne les mesures de publicité de ces actes
vis-à-vis de tiers
Néanmoins, les décrets ne peuvent pas instituer un régime de décision implicite
d’acceptation qui s’opposerait à des engagements internationaux pris par la France,
à l’ordre public, à la protection des libertés ou à la sauvegarde des autres principes
de valeur constitutionnelle (article 22 de la loi). Au surplus, afin de prémunir
l’administration contre des négligences susceptibles d’engager les finances
publiques, la loi du 12 avril 2000 interdit au pouvoir réglementaire d’instaurer un
régime d’acceptation implicite lorsque la décision présente un caractère financier,
sauf dans le domaine de la sécurité sociale où il existe des régimes d’entente
préalable permettant aux caisses d’accepter tacitement le remboursement de
certains soins. On a vu, question supra, les effets d’une demande incomplète sur la
formation de la décision implicite d’acceptation.
45/ Une décision implicite d’acceptation peut-elle être formalisée ?
Oui. Sur demande de l’intéressé, l’autorité administrative délivre une attestation.
L’intérêt de ce droit réside dans la difficulté qu’éprouvent parfois les administrés a
prouver, auprès d’autres organismes (banques, assurances), la réalité d’une décision
tacite d’acceptation. Cependant, le texte ne définit ni la forme que doit prendre
l’attestation, ni dans quel délai celle-ci doit être délivrée, ni de quelle sanction est
passible le refus de l’établir.
46/ Quel est le point de départ des délais de recours contre les décisions implicites
d’acceptation ou de rejet ?
L’article 20 de la loi du 12 avril 2000 prévoit qu’en cas de décision implicite
d’acceptation, le délai de recours contentieux ne court qu’à compter de la date de
réception de la demande par l’autorité compétente. Rappelons qu’il incombe à
l’autorité compétente, et non à l’autorité saisie, d’accuser réception de la demande
(redirigée ou non) à l’intéressé. En ce qui concerne les décisions implicites de rejet,
l’intéressé dispose de deux mois à compter de la formation de la décision, délai qui
est prolongé d’autant si une décision explicite de rejet intervient dans l’intervalle.
47/ Y a t-il des innovations en matière de retrait pour illégalité des décisions implicites
d’acceptation créatrices de droits?
Oui, l’article 23 de la loi du 12 avril 2000 est intervenu en la matière, alors que l’état
du droit était essentiellement jurisprudentiel, pour en corriger certaines
imperfections. Il revient, notamment, sur la jurisprudence Eve (CE Sect., 14
septembre 1969, Eve). En vertu de cette jurisprudence, toute possibilité de retrait
d’une décision implicite d’acceptation, entachée ou non d’illégalité par
l’administration qui en est l’auteur ou par l’autorité hiérarchique, est exclue, même
pendant le délai de recours contentieux, dès lors que cette décision n’a pas fait l’objet
d’une mesure d’information. Ainsi, l’absence de publicité à l’égard des tiers avait
pour effet de ne pas déclencher le délai de recours : l’administration se retrouvait
dessaisie dès l’intervention de la décision. En revanche, quand la décision avait fait
l’objet d’une mesure de publicité assurant l’information des tiers, elle pouvait être
retirée, en tant qu’entachée d’illégalité, pendant le délai de recours contentieux
ouvert aux tiers et pendant la durée de l’instance si un recours avait été
effectivement formé.
Désormais, l’article 23 de la loi pose clairement le principe : une autorisation tacite
peut être retirée, si elle est illégale, pendant le délai de recours contentieux, lorsque
des mesures d’information des tiers ont été mises en œuvre ; elle peut également
l’être, dans le cas contraire, mais seulement dans les deux mois suivant la date à
laquelle elle est intervenue. Dans un cas comme dans l’autre, le retrait est en outre
possible pendant la durée de l’instance, si un recours contentieux est formé.
48/ En va t-il de même concernant le retrait des décisions implicites de rejet créatrices de
droit ?
Non. Le législateur n’a pas introduit de règles nouvelles en la matière. Il convient
donc de s’en référer à la « jurisprudence Dame Cachet » (CE, 3 novembre 1922,
Dame Cachet) et à ses prolongements. On rappellera uniquement que la légalité du
retrait de ces décisions est subordonnée à deux conditions : qu’elles soient entachées
d’illégalité et qu’elles ne soient pas devenues définitives c’est-à-dire qu’elles soient
encore susceptibles d’une annulation juridictionnelle. Tel est le cas si le délai de
recours n’a pas été enclenché, faute d’une mesure d’information adéquate
(l’observation des règles afférentes à l’accusé de réception trouve ici tout son
intérêt), ou si le délai enclenché n’est pas encore arrivé à son terme, ou encore, si le
recours qui a été exercé est en cours d’instance.
49/ Qu’en est-il du retrait des décisions explicites créatrices de droit ?
La loi du 12 avril 2000 n’introduit pas de règles nouvelles au regard de celles
définies par le juge. Leur régime est le même que celui des décisions implicites de
rejet créatrices de droit et que les décisions implicites d’acceptation ayant fait l’objet
d’information à l’égard des tiers. On s’en tiendra donc aux remarques exprimées
précédemment.
50/ Qu’en est-il des décisions individuelles non créatrices de droit ?
Leur retrait peut être prononcé pour toute cause tenant tant à leur inopportunité
qu’à leur illégalité.
Les formalités relatives à l’obligation d’accuser réception n’ont donc pas d’intérêt
particulier les concernant.