Artíes et son Parador [brochure]

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Artíes et son Parador [brochure]
LE VAL D’ARAN : UN MONDE
HORS DU TEMPS
ARTÍES
Et son Parador
« Le val d’Aran est moins riche que ce que sa verdeur
pérenne peut laisser croire, mais il est admirablement exploité.
Les grands bois de pins de ses immenses versants sont
prodigieux ; les prés ont une grande densité végétale, on
touche l’eau du doigt, elle enchante l’oreille de sa rumeur
grave… Les arbres qui grandissent sur ses pentes ont
l’élégance svelte… On est fasciné par le calme, l’ordre, la
qualité des choses du val. »
Josep Pla
ccidentant l’isthme par lequel la péninsule ibérique s’unit au
continent européen, les Pyrénées s’élèvent, relief inamovible
dont l’âge se compte en millions d’années. Sa hauteur brutale observée
sur son versant septentrional, sur le bassin d’Aquitaine, descend peu à
peu vers l’Espagne, imprégnée d’une douceur qui s’étend dans les
vallées.
A
L’imposante chaîne montagneuse pointa sa silhouette vers le Tertiaire,
il y a 50 millions d’années, et ses débuts remontent au Mésozoïque,
lorsque la planète était un monde perdu peuplé de dinosaures. En
même temps que les Pyrénées naquirent les Montagnes Rocheuses,
l’Himalaya et les Alpes. Alors la terre n’était qu’une. Pangée se fendit
en deux et donna naissance à l’Europe et à l’Afrique, qui à partir de ce
moment dérivèrent séparément dans des directions opposées, jusqu’à
ce que soudain l’Afrique change de cap derrière l’Europe. Dans les
entrailles cachées de la montagne mère, les plaques des continents
frères convergèrent. L’océan alpin disparut dans la subduction et plus
rien ne freina la collision entre les plaques africaines et européennes.
Sous la couverture de neige, à l’horizon, on distingue, en apparence
calmes, telles les créatures d’un mythe, les superpositions et les
élévations conséquences de l’impact que nous connaissons aujourd’hui
comme les Pyrénées.
Les traits de férocité alpine se font évidents dans les sommets
tranchants, dans la disposition des volumes, dans les nombreux
sommets et dans la présence de glaciers vivants. Face à face et
immobiles, le voyageur et les montagnes profitent à l’unisson de
l’isolement et du couronnement du silence. Les érosions profondes qui
subjuguent les yeux de qui les observe, creusant les vallées modelées
par les vieux glaciers et les cours fluviaux, sont le fruit des glaciations
du Quaternaire. Dans le Val d’Aran la glace avait en cette époque
lointaine une épaisseur de 400 mètres ; les vallées sont le travail du
soleil qui en de prolifiques débits libéra l’eau du froid qui la retenait.
En suivant un jeune chamois, l’homme primitif s’enfonce dans la
montagne. Les hêtres, les bouleaux et les chênes le protègent mais à
mesure qu’il monte le froid augmente et la végétation, dure, se
matérialise en genévriers et en versants touffus de pins noirs. En haut
du subalpin, le chasseur préhistorique est hypnotisé par les blancheurs
angéliques de l’edelweiss, mythique fleur des neiges, à l’abri des
futaies et du printemps naissant.
Les Celtes se cachent entre les dolmens, et comme le granit qui forme
des pics sur la morphologie montagneuse, ils amènent une culture
accidentée, guerrière, mais revitalisante et fertile. Entre les nuances
acquises par le peuple en résultant on distingue largement le fer de
l’épée pour chasser l’ennemi, et à ras du sol, la terre que l’on a appris
ARTÍES ET SON PARADOR
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à récolter. Lorsque les Romains prennent les vallées cachées, nous sommes
au IIIe siècle av. J.-C. et ils s’étonnent de l’étrangeté des habitants et de
l’impossible ressemblance avec d’autres peuples ibères.
La vie de l’aranais poursuit son cours sur les vallons et les cols derrière les
troupeaux, à peine affectée par l’interminable travail impérial qui allonge
jusque par ici les voies de communication entre Perpignan, Gérone et
Barcelone par la Via Augusta, et au temps de Pompée, la voie romaine qui
unissait Vétual, aujourd’hui Vielha, à Lérida, et dont le tracé suivait le
fleuve Noguera Pallaresa.
les lunes, les dégels, les récoltes.
Hors du musée, le peuple vivant, avec ses rites et ses coutumes
renaissantes, évoque l’attachement essentiel à ses ancêtres et le lien
évident avec la sensibilité gasconne.
Une fois l’empire déchu, la voie commerciale ouverte est employée par les
barbares et les Wisigoths qui s’y installent. Leur legs comprend les plus
anciens sièges chrétiens dans des estivations pyrénéennes ; ils seront pris
comme exemple de persévérance religieuse et souvent comme base des
temples des siècles à venir.
Mais l’essor architectonique ne viendra ni des ardeurs mystiques, ni des
soifs de transcendance, ni de la lassitude terrestre ni des délectables clins
d’œil du très haut, mais bien de l’exode vers les rochers, conséquence de la
fuite de la domination arabe, des vieux Catalans et des Chrétiens
émigrants de l’intérieur. A Lérida et Tarragone la domination arabe est
totale.
FERVEUR ROMANE
L
es moments de splendeur romane profitent
des circonstances historiques qui favorisèrent
les deux Catalognes, la vieille et la nouvelle ; les
divisions comtales et le féodalisme. La croissance
démographique est décisive : unie à l’expansion
économique des XIe et XIIe siècles et à une réforme
structurelle de l’Eglise avec l’adoption de la liturgie
romane et l’arrivée de la règle bénédictine, elle
consomme les hautes cotes artistiques laissées par le
roman d’influence lombarde.
La conquête de Tarragone étend le cadre géographique,
ébauchant les limites de la Catalogne Nouvelle. La conquête est suivie de
la repopulation et de la construction d’importants bâtiments de culte dans
les villes principales. On entrevoit les cathédrales.
La cordillère est alors décidément une barrière naturelle entre des cultures
qui s’affrontent, entre infidèles et Chrétiens. Mais le Val, déboîté à force
de regarder le versant français des Pyrénées, est déjà différent. Nous
trouvons la première référence documentée sur l’existence administrative
de la culture aranaise dans les « Ordinations » de Juan Francisco Gracia,
en 1616. Il y révèle l’existence d’une arche, gardienne de documents
anciens du Val ayant pour siège l’église de Sant Miquel de Vielha.
Aujourd’hui les Archives Historiques Générales d’Aran se trouvent à la «
Casa Deth Senhor de Arros », une maison aranaise de 1820. Les effets, les
outils, les bijoux, la vaisselle, les instruments de musique et autres objets
artisanaux gardés ici éclairent l’étranger sur les particularités
anthropologiques de cette nation minuscule, de ce grand peuple. Les
vallées répètent le legs, l’herbe du pré est éloquente, les brebis la
chantent. Presque tout, comme alors, continue d’être réglé par les soleils,
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ARTÍES ET SON PARADOR
AMOUR ET FEU
u pied du parador où le voyageur sera comme chez lui, comme
dans d’autres villages du Val, Arties rénove au moyen du feu son
amour et sa reconnaissance envers la terre qui l’alimente. C’est
un rite d’origine païenne qui étend ses vocations de fécondité sollicites à
tous les hommes s’approchant et dansant. La « Fiesta deth Taro », un peu
avant la Saint Jean, commence par l’arrachage d’un sapin, le plus grand
de la forêt, que l’on replante immédiatement sur le chemin de Sacuma, à
la sortie du village. Il y reste jusqu’au 23 juin, jour où il est béni, brûlé
puis tiré dans les rues jusqu’à la maison du maire. Ce ne sera
probablement pas la seule occasion pour le voyageur de se délecter des
danses que chaque village exécute en différents styles locaux.
A
Les inclémences politiques tirent cette société appartenant à la Catalogne
vers la houle de la Méditerranée ; elle sort fortifiée de l’union avec le
Royaume d’Aragon suite à l’accord historique de 1137. Le système
montagneux devient alors la frontière avec le nord, allongeant la
convulsion entre les couronnes française et espagnole même après la
Guerre de Trente Ans, au XVIIe siècle. Cependant, le jumelage entre les
villages frontaliers à la civilisation aranaise est un fait indiscutable ; sa
trace est évidente dans la langue aranaise, variante de l’occitan, une des
langues romanes les plus fleuries. Géographiquement, la langue d’oc
englobe l’ensemble des dialectes de la zone méridionale de la France,
arrive jusqu’en Italie et de ce côté-ci des Pyrénées. Au Moyen-Age, les vers
des troubadours représentaient l’ensemble dialectal parlé avec le plus de
fierté. Ainsi chantaient-ils :
Aqueres montanhes
Aqueres montanhes
Que tan nautes son,
M' ampèishen de véder
Mèns amors a on son.
Se cantes perque cantes
Cantes pas per jo
Montanhes coronades
Tot er an de nhyèu
Tain mautes e bères
Que vos pune eth cèu.
Naules se son nautres
Ja s`abaisharan
Es mies amoretes
Que s´apropaàn.
étranger à la civilisation et à la morale, pour le natif enraciné dans
son giron, les sommets lorgnaient de nombreux autres pouvoirs
incroyables. Sylphides, sorcières, génies, chasseurs errants, géants,
fils de dieux et guérisseurs visionnaires pour leur faire front,
peuplent les bois et les cimes, les nuits, les vents et la mémoire
collective des habitants. Une brume de légendes très épaisse et
prolongée a ébauché la réalité géologique, la vérité tectonique des
Pyrénées, son visage jusqu’en 1973, lorsqu’on publia la carte
définitive radiographiant au complet la chaîne montagneuse, en
terminant, entre autres mensonges scientifiques, avec celui qui
affirmait que les Pyrénées étaient deux chaînes distinctes qui se
croisaient dans le Val d’Aran. Mais le net relief de l’Aneto, la Tuca
de Mulleres ou le Pico de Russell, au-dessus des 3000 mètres, ne fut
pas gagné d’un coup, mais pas à pas, mousqueton à mousqueton, à
la force des cordes, de la volonté et de la folie de ne pas se rendre
aux calamités du froid. Avant les difficultés montagneuses, ce sont
les dons bénéfiques des eaux qui firent de ces reliefs crus
indésirables de très bons remèdes pour soigner certains maux,
ouvrant la première vanne touristique. Ensuite, vus à courte distance,
depuis la conscience européenne que l’exploration des Alpes avait réveillée,
les milles sommets du massif commencèrent à voir des fourmis grimpeuses.
Laissons de côté Pierre le Grand, à qui on donne souvent le titre de
premier Pyrénéen et qui, si l’on en croit la légende, tua un dragon au
Canigou. Les premières approches sérieuses de la nature de la montagne
remontent au dernier quart du XVIIIe siècle, époque à laquelle furent
effectuées des classifications minéralogiques et où le Mont Perdu (Monte
Perdido) fut conquis. Les sommets, parents de ces vallées, préservèrent
leurs solitudes encore quelques décennies, concrètement jusqu’en 1842,
année où Tchihatcheff et Franqueville entamèrent l’ascension de l’Aneto.
Mais c’est H. Russell, incombustible aventurier qui, après avoir parcouru
la Sibérie, la Chine, le Japon et l’Australie, rendit hommage à cette partie
aranaise des Pyrénées, laissant d’abondants écrits à la valeur scientifique
discutée mais d’une indiscutable valeur littéraire, et qui représentent le
mieux, lyriquement, la conquête de la cordillère : « Si mes explorations ont
été inutiles à la science – confessait finalement le poète – je ne regrette
pas… : que les heures et les années que j’ai passées dans ces régions
sereines et lumineuses soient trois fois bénies. Comment pourrais-je les
déplorer si j’ai appris dans la sainte solitude des montagnes à trembler
devant Dieu, à oublier ceux qui m’ont fait mal et à calmer un cœur trop
tourmenté pour être heureux longtemps parmi les hommes ?
Le Val redevient territoire
français sous l’Empire de
Napoléon qui inclut Aran
à l’inventaire de la Haute
Garonne. Cette terre doit
aussi aux ingénieurs
originaires de l’autre côté
des Pyrénées la première
ébauche du tunnel qui
prendra forme un siècle
plus tard. Jusqu’à la
pénétration en ces lieux de
la révolution industrielle
qu’a été la révolution touristique, la culture était ici courante, plurielle
grâce aux sources voisines : elles dilatèrent et exagérèrent le médiéval. Si la
montagne sortie des hauts plateaux était un autel ancien, inaccessible,
ARTÍES ET SON PARADOR
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Un siècle et demi
plus tard, avec les
précieux travaux
cartographiques
des infatigables
pionniers, les
Pyrénées n’ont
plus aucun secret,
par contre, elles
conservent leur
mystère toujours
immaculé. A la
différence des
autres grandes
montagnes comme
les Alpes ou
l’Himalaya, des
montagnes
inhospitalières, les
Pyrénées, et cette
opinion est étendue parmi les héros qui la préservent, gardent la chaleur
humaine comme aucune autre cordillère: son escalade est abordable et les
tracas à la merci des vents gelés sont récompensés après chaque journée
par un verre de vin, une table amicale et l’aimable accueil des habitants.
En bas, la montagne se fait col, elle étale dans la vallée et au-delà
l’impressionnant relief de granits et d’ardoises du Parc Naturel qui émerge
des eaux qui couvraient l’endroit il y a environ deux-cents millions
d’années. Le paysage adouci est le fruit du travail d’érosion minutieuse des
grandes masses de glace aux diverses périodes glaciaires. Maintenant
retirée du gel, l’eau est la principale protagoniste, elle forme les lacs et les
méandres de haute montagne si caractéristiques qui donnent son nom au
parc d’Aigües Tortes (Eaux Tordues). Le phénomène est observable aussi
dans sa plus grande expression sur les fleuves San Nicolau et Aiguam. Des
presque 300 étangs des versants montagnards répartis dans la région, la
moitié se concentre en cet endroit protégé, le seul Parc National de
Catalogne. Les accumulations d’eau restantes sont des lagunes temporaires
souvent asséchées à la fin de l’été. Les habitants ? La truite arc-en-ciel, le
vairon, la grenouille rousse et l’emblématique triton des Pyrénées. Mais le
visiteur ne doit pas perdre de vue qu’il n’est pas rare de voir s’ouvrir les
eaux au passage d’un merle noir autochtone qui avait plongé. Le canard
colvert est souvent en train de nager et le héron royal se déplace à grandes
enjambées. Si le voyageur reste jusqu’à la nuit tombée, il est possible qu’il
profite de l’incroyable excès de la non moins splendide loutre qui accourt
se baigner au crépuscule.
POUR DES EXCURSIONS
SUR LE VAL D’ARAN ROMAN
suit cet
itinéraire. La
montagne, nord
sûr vers lequel
de nombreux
étrangers
dirigent leurs
boussoles, séduit
si l’on est
disposé à
marcher et que
l’on ne souffre
pas du vertige.
Le mont de
granit que l’on
devine derrière
Varties n’atteint
pas les 3000
mètres. Son
ascension fait
passer le marcheur par des bois de pins noirs, des lacs et des cols
jusqu’au superbe sommet qui regarde le versant sud, devant le pic Punta
Alta. Les efforts sont largement récompensés mais il est indispensable de
répartir l’excursion sur deux journées : la nuit en refuge est obligatoire.
Laissons le parador, la maison noble que le visiteur aura remarquée,
possède une belle tour en pierre et en ardoise et une petite chapelle aux
traits originaux. A Arties même il faut visiter l’église de San Joan, très
bel édifice à trois nefs avec des voûtes en demi-cintre, qui en tête de ses
côtés conserve la décoration de petits arcs lombards. D’origine romane,
du XIIIe siècle, restaurée et agrandie de façon gothique en 1385, il faut
s’approcher de ses deux façades et entrer pour voir les peintures murales
de l’autel. Aujourd’hui l’église est agencée pour accueillir une salle
d’expositions.
La route suit la Garonne, joue avec elle, la croise jusqu’aux sources
françaises. Garos, encore au-dessus des 1000 mètres, réunit un
considérable ensemble de maisons d’été dans le style de la région. Nous
en trouvons un bon exemple près de la place de Garos où se trouve la
plus superbe représentante du style, une maison typiquement aranaise de
plus de 700 ans d’âge, que le tourisme a récompensée d’une médaille.
Les Pyrénées en sont l’architecte, comme elles le sont de ses voisines,
toutes ensembles serrées contre le froid, couvertes de toits pentus et
mansardés autour d’un patio central mettant toute la famille en
communication. Garos a bien sûr une église, avec des éléments romans
détectables comme le village voisin, Casarih, où le voyageur, s’il s’arrête,
trouvera également de nobles maisons.
rrivé à Arties, le voyageur ne tardera pas à pénétrer ses rues.
Le village est amical, l’accueil aimable. Se loger au parador
comble qui est hébergé dans un paysage pyrénéen, spécialement à la nuit
tombée, lorsque la montagne et le clocher accaparent les ors du ponant.
Nous sommes à 1144 mètres d’altitude, dans celle qui fut la villa d’été
de l’aventurier et conquistador Don Gaspar de Portola, à qui nous
devons la découverte de la Haute Californie.
Toujours sur la route en direction de l’est vous trouverez Betren, plus
peuplé et touristique. Ici les habitations serrées sont remplacées par une
grande place et deux église, celle de Sant Sadurní, du XIIe siècle
restaurée au XVIe, et la paroissiale de Sant Esteve, unanimement
considérée comme un des ensembles les plus beaux et les plus complets
de l’architecture ecclésiastique du Val. La porte gothique est ornée d’une
figure en haut relief et le temple garde en son intérieur une pile de
baptême romane au ciselé végétal divin.
Ces deux sommets que sont l’aiguille de la tour de Saint Jean (torre de
San Juan) et le pic du Montardo appellent le nouveau venu depuis le
dernier étage. La route romane disséminée sur la montagne est entravée
d’une géographie accidentée et d’une richesse naturelle ; c’est celle que
Nous arrivons à Vielha, capitale du Val, renommée depuis très longtemps
pour la grâce d’un emplacement privilégié, et pour le tunnel mythique
lui ouvrant les rochers jusqu’à Alta Ribagorça. Le voyageur ne trouvera
pas d’endroit mieux pourvu sur tout son parcours, c’est donc le bon
A
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ARTÍES ET SON PARADOR
moment pour se procurer les
services offerts. La paroissiale de
San Miqueu se distingue par sa
présence protéique comme le
principal bâtiment. La ville,
courant le long de la rivière Nere,
dispose pour la promenade
d’autres attraits architectoniques
comme la Tour de Santesmasses,
les maisons de Co de Rodes et Co
de Fedusa et le « Muséu dera Val
d’Aran ».
L’intérieur de la péninsule passe
jusqu’à Biela, discret sous le
tunnel, évitant d’alerter de sa présence la faune variée qui a trouvé son
paradis dans le Parc Naturel d’Aigües Tortes. Sur cette même route, sans
le secours technologique du tunnel et des chaussées, dans des vallons
douloureux, siècle après siècle, les bergers passèrent lors de la
transhumance des troupeaux fuyant la montagne en hiver. Lorsque le
temps bienfaiteur et propice revenait ils commençaient à remonter vers
les prés, non sans avoir d’abord réuni, suivant les vallées et les régions,
plusieurs dizaines de troupeaux à l’entrée d’un ermitage où le curé
célébrait « la messe des brebis » ; chaque berger mettait tout son
acharnement à faire bêler ses animaux pour confirmer son assistance
fidèle.
A Vielha, l’église paroissiale héberge le Christ polychrome en bois le plus
important de l’art roman ; à l’origine il mesurait plus de deux mètres. Il
est intéressant de connaître son usine Dera Lan, qui confirme l’essor de
l’industrie textile à petite échelle qui eut lieu un jour ici. Les portes du
bâtiment du XIXe siècle sont ouvertes au public.
Si le voyageur en a envie il peut abandonner Vielha pour profiter du
parc naturel, mais il sera préférable de l’aborder très tôt le matin pour
tirer un meilleur profit des éclats solaires. Si au contraire le voyageur
préfère poursuivre la route du roman des estivations que nous lui
proposons, il trouvera très vite Cassau et Gaussac, très proches l’un de
l’autre, tous deux gardant des églises romane et gothique respectivement.
En continuant la route de retour vers Arties, entre la montagne de
Guarbes et celle d’Arengo, sur la route N230, vous apercevrez sur la
gauche une étroite chaussée où se succèdent Vilac, Mont et Montocarbau.
La situation élevée de Vilac, perché dans le haut du Val, parle de son
importance stratégique en tant que site défensif. Des données rappellent
l’existence ici de deux superbes tours à créneaux, d’autant d’églises et
d’un château. Les grandes maisons, les linteaux et les balcons imposants
réitèrent l’éloge des temps seigneuriaux. Le roman qui survit dans son
église de San Feliu mérite de l’attention mais c’est à l’intérieur que se
chiffre l’énigmatique message que les tailleurs de pierre, les sculpteurs et
occasionnellement les moines et les laïques laissèrent dans la pierre de la
pile de baptême. Ici cohabitent une bête ailée et une beauté nue. Leur
signification allégorique nous échappe. Quant à Mont et Montcorbau, à
quelques kilomètres l’un de l’autre, ils remercient les visites en mettant
leurs biens à disposition de l’étranger : des temples et des vues
admirables.
A nouveau Betlan vient à nous sur la nationale, et nous arrivons bientôt
à la déviation que nous devons prendre au passage de la rivière Varrados
jusqu’aux sources et qui embellit le chemin du retour avec les villages de
Vielha et Arros. Ils possèdent également leurs églises gothiques et leurs
piles romanes. Le plus grand attrait de la région vient, court, saute,
tombe en se dégelant et forme des
cascades. La plus populaire de
toutes, avec presque 25 mètres de
chute, se trouve en haut du bois de
Barrados, que le voyageur trouvera
sûrement en passant le pont d’Arros
et en prenant une piste de
montagne signalée. Avant de
rejoindre Arties il reste les villages
de Bagergue, Unya et Salardu, très
proches des glaciers de la Maladeta,
un des rares survivants actifs des
Pyrénées.
DES SAVEUR A FORTE
TRADITION
a cuisine des Pyrénées aranaises n’est pas de la cuisine catalane,
ni basque, ni française dans leurs variantes qui la touchent de
plus près. Ce n’est pas une cuisine méditerranéenne ni complètement
atlantique : c’est une cuisine de montagne, puissante en saveur et en
calories, comme l’exigent les rudesses du climat et comme le
recommandent les âpretés du relief. Dans ces plats qui aideront le
voyageur à s’adapter aux alentours, on observe la domination du gibier,
l’usage abondant d’épices et la générosité des sauces.
L
Dans le foyer aranais, la tradition encore en vigueur basait les repas sur
le porc, les végétaux des bois et des prés, comme les champignons
appréciés et plus exceptionnellement sur la viande de bœuf et de brebis
grillée pour les fêtes. A la charcuterie commune aux autres terres
péninsulaires s’ajoute ici la typiquement catalane « botifarra crua »
(saucisse crue) aussi appelée « llonganissa » qui si on la prépare pour
passer l’hiver en des mélanges variés et familiers, porte le nom de « seques
». On prépare aussi la langue, délicieuse, pour durer et pour rendre
supportable les pénitences du froid.
L’extraordinaire circonstance d’isolement et de connexion du Val qui
nous intéresse avec la France dote ses livres de recettes d’une double
influence dans le goût pour les pâtés, sans oublier les crêpes et, en
ARTÍES ET SON PARADOR
5
contraste, dans le goût pour des préparations moins raffinées et bergères
comme peut l’être le « cofitam », un plat de bœuf ou de mouton suivant
les cas, sous une carapace de graisse.
L’étranger
qui s’assoit à
la table d’un
restaurant
choisit souvent
des plats de
gibier dans
leurs différents
styles, la
plupart du
temps de la
viande de
chamois ou de
sanglier, les
plus gros
mammifères
peuplant les bois méditerranéens et montagnards. Dans les Pyrénées les
soupes comme les potages et les « escudelles » plaisent également. Certains
préfèrent un seul plat, du porc ou de l’agneau grillé, ou un de ces pot-aufeu à la manière de l’endroit, en communion avec les mûres et les « ceps »
(cèpes) si appréciés, l’espèce de champignons la plus vénérée par les
gastronomes des deux côtés du fourneau. Les poissons qui arrivent à la
table viennent des rivières, ce sont donc souvent des truites porteuses de
l’idiosyncrasie des fougueux courants du dégel, tranquilles locataires des
spectaculaires « estany ».
CIVET
Le civet est une autres des reliques de la tradition culinaire, c’est un
plat principal
exquis. En voici
les ingrédients : 4
kg de viande de
sanglier, des
carottes, trois
têtes d’ails, des «
semolets » ou des
oignons, du vin
rouge, une pincée
de chocolat noir,
du thym, du
laurier et du
persil. Quelques
indications sur sa
préparation : il est
important de
commencer par l’ustensile, à savoir une casserole en terre. Vous ferez frire
la viande puis vous la mettrez dans la casserole avec autant d’eau que de
vin. La viande frite et macérée avec les « semolets », l’ail et les carottes se
mettra à cuire puis on ajoutera le chocolat. Le feu devra être le plus doux
possible, une journée entière sera nécessaire ici. Vous pourrez ajouter du
sucre et corriger avec du sel. Le plat se sert directement dans la casserole.
Au dessert, viennent les fromages, les framboises et, pour aromatiser, les
fréquentes liqueurs, la prodigieuse gentiane et les noix. Un verre de cassis
ou de « ratafia » ou « d’aigua de nodes » est un plaisir inestimable et un
parfait digestif.
LA RECETTE SECRETE
LEGUMES SECS DES MONTAGNES
La recette secrète que nous recommandons est une entrée basée sur «
l’olla aranesa ». Vous aurez besoin de :
Un os de bœuf, de l’échine de porc, 250g de viande de poule, 250g de
viande de poulet, un os de jambon, une queue de bœuf ou du canard, des
carottes, du chou pommé, des pois chiches, des haricots blancs, une petite
tasse de riz, du vermicelle moyen, du boudin noir, 100g de porc, 100g de
bœuf, un œuf, du persil, de l’ail et de la mie de pain.
On la prépare de la manière suivante : une fois la viande hachée et
mélangée, on ajoute l’œuf, l’ail, un peu de poivre, le sel et la mie de pain,
en tournant dans le récipient jusqu’à l’obtention d’une sphère aussi
parfaite que possible. Elle doit être consistante. On la passe dans la farine.
Avec le reste de la viande on préparera alors un bouillon auquel on
ajoutera la boule de viande enfarinée dès qu’il commencera à bouillir. On
laissera cuire à feu très doux pendant environ deux heures. On ajoutera
alors les légumes, les haricots et les pois chiches cuits à part et une heure
plus tard, le riz, le boudin et le vermicelle. On cuira le tout à peine 15
minutes avant de servir.
Parador de Artíes
D. Gaspar de Portolá
Ctra. Baqueira Beret. 25599 Artíes (Lleida)
Tel.: 973 64 08 01 - Fax: 973 64 10 01
e-mail: [email protected]
Centrale de Reservations
Requena, 3. 28013 Madrid (España)
Tel.: 902 54 79 79 - Fax: 902 52 54 32
www.parador.es / e-mail: [email protected]
wap.parador.es/wap/
Textos: Juan G. D’Atri y Miguel García Sánchez Dibujos: Fernando Aznar
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