Consulter le document - Good Value for Money

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Consulter le document - Good Value for Money
Christian Noyer, Gouverneur de la Banque de France, a demandé ce mercredi 27 octobre 2014 aux
compagnies d’assurance de baisser significativement les taux de rendement servis en 2014 sur les
fonds en euros des contrats d’assurance-vie.
Compte-tenu de la fonction de l’émetteur de cette requête d’une part et du caractère hautement
réglementé et contrôlé de l’assurance en France, Good Value for Money a rédigé la présente
newsletter pour vous apporter quelques éléments d’éclairage et vous donner sa nouvelle
estimation à date du taux moyen prévisionnel de rendement des fonds en euros pour 2014.
L’effet « pétrolier » des fonds en euros avec des stocks importants d’obligations en
portefeuille permettrait théoriquement au secteur de servir des taux moyens de 2,50 % à
2,60 % en 2014.
La réglementation des fonds en euros conduit à une « mutualisation » des actifs entre les
différentes générations de versements et d’épargnants sur un même fonds en euros.
Concrètement, cela signifie qu’une obligation achetée en 2010 à un taux de 4,30 % appartiendra tout
autant à la collectivité des épargnants qu’une OAT acquises en octobre 2014 à 1,25 %. Sachant que
les encours d’un fonds en euros représentent en moyenne 8 à 12 années de collecte, il y a une inertie
considérable dans l’évolution du rendement des fonds en euros.
Concrètement, cela signifie que dans un contexte de baisse durable du rendement des obligations,
les fonds en euros réservent « des bonnes surprises » en termes de rendement, car ils bénéficient
des stocks constitués au cours des années antérieures.
Les assureurs-vie ont une obligation principale dans la gestion de leurs fonds en euros, à savoir
verser au minimum 85 % du rendement financier du fonds en euros à leurs assurés. Derrière, les
assureurs-vie ont la liberté de choix entre :
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le fait de verser directement ce rendement financier à la participation aux bénéfices (PB) de
l’année,
ou alimenter la provision pour participation aux excédents (PPE).
Concernant la PPE, les assureurs-vie ont l’obligation de la reverser à leurs assurés dans un délai de 8
années. Un assuré peut donc contribuer à alimenter une PPE dont « il ne verra jamais la couleur ».
Tandis qu’un autre pourra ultérieurement « tirer profit » de la PPE constituée par ses prédécesseurs.
La PPE constitue un « matelas de sécurité » destiné notamment à lisser et à amortir des chocs
financiers éventuels. Elle permet également, le cas échéant, de lisser sur plusieurs années le
bénéfice d’une plus-value exceptionnelle réalisée sur certains actifs.
L’OAT à 10 ans qui était à 2,42 % début 2014 n’est plus qu’à 1,17 % fin octobre 2014.
L’OAT (obligation assimilable du trésor) n’en finit plus de baisser. Alors même que la dette publique
française a dépassé les 2 000 milliards d’euros, l’Etat français bénéficie de la solidité de la monnaie
européenne et de son caractère refuge.
Avec d’ores-et-déjà 125 centimes de baisse (soit 1,25 %) depuis début 2014, l’OAT affiche une chute
considérable de rendement et se situe à un niveau historiquement bas. Ce vendredi 31 octobre
2014, l’OAT à 10 ans ne rapportait que 1,17 %.
Or, la future réglementation Solvabilité II « contraint » les assureurs-vie à acquérir davantage
d’obligations dans leurs fonds en euros d’une part et des obligations bénéficiant d’un « bon » rating
d’autre part. Même si l’Etat français est aujourd’hui en situation de faillite, le rating de sa dette reste
positionné à AA (avec orientation négative) de la part de l’agence Standard & Poor’s. Afin de
« limiter » ses futurs niveaux de marges de solvabilité, un assureur-vie français est aujourd’hui
fortement incité à acheter de la dette de l’Etat français.
En achetant des OAT à 10 ans à un taux de 1,17 %, le secteur de l’assurance-vie se met en
risque.
Concrètement pour un assureur-vie, acquérir une OAT dont le rendement n’est que de 1,17 % ne
permettrait de servir qu’un taux de l’ordre de 0,20 à 0,30 % sur son fonds en euros. Il faut en effet
déduire des 1,17 % de rendement brut :
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les frais de gestion du contrat (habituellement de l’ordre de 0,60 % à 0,80 %),
ainsi que la marge financière conservée par l’assureur-vie, notamment pour rémunérer ses
fonds propres.
Le présent calcul a un caractère « théorique », car les assureurs-vie ont évidemment d’autres actifs
en portefeuille que de simples OAT. Ils bénéficient par ailleurs de stocks historiques. Toutefois, le
présent calcul montre bien le risque pris par le secteur aujourd’hui.
Le scénario « idéal » pour éviter un problème systémique à l’assurance-vie serait celui
d’une collecte nette nulle. Or, celle-ci devrait se situer entre 15 et 20 milliards d’euros en
2014.
L’effet « pétrolier » de l’assurance-vie dans un contexte de baisse des taux rend les fonds en euros
particulièrement attractifs pour les épargnants. A comparer au rendement de 1,00 % désormais servi
par le Livret A, une perspective de rendement (nette de frais et brute de prélèvements sociaux) de
2,50 % à 2,60 % en 2014 est évidemment très attractive.
Du coup, les épargnants français sont fortement revenus sur l’assurance-vie en 2014. Mais ce n’est
pas une bonne nouvelle pour les assureurs-vie qui se retrouvent avec de la collecte à placer dans un
contexte de taux historiquement bas.
Les assureurs-vie sont « contraints » d’acquérir des obligations (souveraines ou corporate) à (très)
faible rendement. Ce n’est bon à moyen / long terme ni pour les assureurs-vie, ni pour leurs
épargnants.
En cas de remontée rapide des taux, les obligations à faible rendement seront
immédiatement en moins-value.
Dans le schéma de baisse des taux tel que nous le connaissons depuis bon nombre d’années, les
obligations acquises hier se retrouvent en plus-value aujourd’hui.
Mais le niveau d’endettement de l’Etat français ne permettra pas de rester très longtemps à un
niveau aussi bas de l’OAT. Le jour où les taux remonteront, les OAT acquises avec un rendement de
1,20 % se retrouveront en situation de moins-value.
Les deux points sur lequel il est impossible de se prononcer sont :
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la date à partir de laquelle le taux de l'OAT se mettra à remonter significativement,
l'intensité de cette remontée, en sachant qu'on ne peut exclure que l'OAT remonte aussi
rapidement qu'elle est descendue.
Si la remontée des taux de fait de manière progressive et graduelle, il n’y aura aucun problème pour
le secteur de l’assurance-vie. Dans un schéma davantage brutal ou rapide, il peut y avoir un
problème systémique. C’est justement ce que le Gouverneur de la Banque de France veut éviter.
Il n’y a aucune panique à avoir, car le secteur a d’ores-et-déjà 1,80 à 1,90 % de rendement « en
réserve » dans les provisions pour participation aux excédents (PPE) constituées. Il y a par ailleurs
encore des plus-values latentes sur certains autres poches d’actifs, notamment l’immobilier et les
actions.
Good Value for Money révise son hypothèse de taux moyen de rendement pour 2014 de
2,50 % à 2,20 % avec en parallèle une poursuite de l’alimentation de la provision pour
participation aux excédents (PPE).
En réponse à la demande de Christian Noyer, nous estimons que le secteur devrait ramener les taux
moyens servis pour 2014 à environ 2,20 %. De manière concomitante, nous devrions avoir une
alimentation (de l’ordre de 0,30 % à 0,50 %) de la provision pour participation aux excédents (PPE).
Après déduction des 15,50 % de prélèvements sociaux, le taux moyen servi net de frais et de
prélèvements sociaux serait donc de l’ordre de 1,85 %. Net d’inflation, le rendement de l’assurancevie (net de frais et de prélèvements sociaux) serait d’environ 1,35 %.
Avec une provision pour participation aux excédents (PPE) moyenne de l’ordre de 2,10 à
2,20 % fin 2014, le secteur de l’assurance-vie aura une année de rendement en réserve.
Le contexte économique et financier actuel oblige à considérer l’hypothèse d’une prochaine nouvelle
crise financière. Demander au secteur de l’assurance-vie d’avoir globalement une année de
rendement en réserve pour faire face à un éventuel choc financier significatif nous semble
raisonnable.
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