Environnement Pollution sols

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Environnement Pollution sols
QUE PEUT FAIRE UN MAIRE FACE A UNE POLLUTION DU SOL ?
COMMENTAIRE DE L’ARTICLE L. 556-3 DU CODE DE L’ENVIRONNEMENT
Il y a un peu plus d’un an, le récent chapitre du code de l’environnement dédié aux sites et
sols pollués s’est enrichi de nouveaux articles et notamment de l’article L. 556-3. Si
l’article L. 556-3 reprend des dispositions déjà consacrées législativement par le passé (1),
il a été enrichi par d’autres qu’il est utile de relever pour les maires (2).
1) Confirmation de l’état du droit antérieur
Le nouvel alinéa 1 de l’article L. 556-3 I du code de l’environnement dispose :
I. ― En cas de pollution des sols ou de risques de pollution des sols présentant des
risques pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques et l'environnement au
regard de l'usage pris en compte, l'autorité titulaire du pouvoir de police peut,
après mise en demeure, assurer d'office l'exécution des travaux nécessaires aux frais
du responsable. L'exécution des travaux ordonnés d'office peut être confiée par le
ministre chargé de l'environnement et par le ministre chargé de l'urbanisme à un
établissement public foncier ou, en l'absence d'un tel établissement, à l'Agence de
l'environnement et de la maîtrise de l'énergie. (…) »
Il convient d’indiquer que la possibilité offerte aux Maires par le premier paragraphe existait
déjà avant 2014. L’ordonnance n°2010-1579 du 17 décembre 2010 portant diverses dispositions
d'adaptation au droit de l'Union européenne dans le domaine des déchets, qui a institué la police
spéciale des sites et sols pollués en créant au sein du code de l’environnement un chapitre
« Sites et sols pollués », avait introduit un nouvel article L.555-1. Cet article prévoyait pour
l’autorité titulaire du pouvoir de police, la faculté d’assurer d’office et aux frais du responsable,
l’exécution de travaux nécessaires à endiguer un phénomène de pollution ou un risque de
pollution, après mis en demeure préalable. Le Ministre l’environnement pouvait également
confier l’exécution des travaux de dépollution à l’ADEME.
Toutefois, force était de déplorer la trop rare utilisation de ce dispositif, eu égard notamment à
l’absence de définition précise, attachée à la notion de « responsable ».
A supposer qu’elle ait assuré d’office l’exécution de travaux de dépollution, la collectivité
conservait souvent à sa charge le coût des mesures de dépollution exécutées d’office. En effet,
elle ne savait pas vers qui se retourner aux fins de remboursement desdits travaux ou hésitait à
s’engager dans un long contentieux tendant à identifier le responsable.
Fallait-il préférer l’engagement de la responsabilité de l’ancien exploitant, du nouveau ou de
l’ancien propriétaire du terrain, du détenteurs des déchets, … ?
En pratique, ces interrogations, bien que pour certaines réglées par la jurisprudence,
dissuadaient fortement l’administration de recourir aux dispositions de l’article L. 555-1 du code
de l’environnement (numéroté L. 556-1 par ordonnance du 10 mars 2011).
SELARL Cabinet Coudray, Raphaële ANTONA-­‐TRAVERSI, Avocat à la Cour 5 mai 2015 www.cabinet-­‐coudray.fr La loi ALUR, en renforçant la police spéciale des sites et sols pollués, est venue pallier cette
lacune.
2) Innovation législative tenant à la hiérarchisation des responsables de pollutions foncières
Outre les modifications apportées au I (définition du risques de pollution, compétence du ministre en
charge de l’urbanisme et intervention d’un EPF), la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l’accès au
logement et un urbanisme rénové, dite « loi ALUR », a introduit une nouveauté notable au sein
de l’article L. 556-3 du code de l’environnement.
Le paragraphe II clarifie et complète l’arsenal législatif en précisant, selon la nature des
pollutions, la notion de responsable et introduisant un ordre de priorités afin de rechercher les
responsabilités des auteurs de pollutions des sols.
L’article L. 556-3 II du code de l’environnement dispose:
« Au sens du I, on entend par responsable, par ordre de priorité :
1° Pour les sols dont la pollution a pour origine une activité mentionnée à l'article L.
165-2, une installation classée pour la protection de l'environnement ou une
installation nucléaire de base, le dernier exploitant de l'installation à l'origine de
la pollution des sols, ou la personne désignée aux articles L. 512-21 et L. 556-1,
chacun pour ses obligations respectives. Pour les sols pollués par une autre origine,
le producteur des déchets qui a contribué à l'origine de la pollution des sols ou le
détenteur des déchets dont la faute y a contribué ;
2° A titre subsidiaire, en l'absence de responsable au titre du 1°, le propriétaire de
l'assise foncière des sols pollués par une activité ou des déchets tels que
mentionnés au 1°, s'il est démontré qu'il a fait preuve de négligence ou qu'il
n'est pas étranger à cette pollution.
III. ― Un décret en Conseil d'Etat définit les modalités d'application du présent
article. Il définit notamment l'autorité de police chargée de l'application du présent
article. »
Selon cette classification, il convient de distinguer les pollutions engendrées par les
activités industrielles (ICPE, installations nucléaires…) des autres.
9
Dans la première hypothèse, le responsable prioritaire sera le dernier exploitant de
l’installation en cause, ou le tiers qui se serait substitué à celui-ci (en vertu de l’article
L. 512-21 du code de l’environnement), ou, encore, le maître de l’ouvrage à l’origine
d’un changement d’usage.
9
Dans la seconde hypothèse, concernant les cas des sols pollués en raison d’une autre
origine, il conviendra de rechercher, prioritairement, soit la responsabilité du
producteur des déchets ayant contribué au dommage, soit celle du détenteur desdits
déchets.
SELARL Cabinet Coudray, Raphaële ANTONA-­‐TRAVERSI, Avocat à la Cour 5 mai 2015 www.cabinet-­‐coudray.fr Si, dans ces deux scénarios, aucun responsable dit « prioritaire » ne peut être trouvé, il faudra
alors actionner la responsabilité, subsidiaire, du propriétaire de l’assiette foncière des sols
pollués. Cependant, il faudra parvenir à démontrer que son comportement n’est pas étranger
au dommage ou qu’il apparaît avoir fait preuve d’une négligence fautive, ayant entraîné le
phénomène de pollution.
Si la sécurité juridique sort inéluctablement renforcée d’un tel apport législatif, un certain
nombre d’interrogations reste encore en suspend, comme celle de la qualification de la faute
ayant contribué à l'origine de la pollution des sols, ou encore celle de l’appréciation de la
négligence du propriétaire foncier, ou de son caractère non-étranger à la pollution litigieuse…
Reste à espérer que l’intervention du décret d’application vienne opportunément clarifier ces
points.
Raphaële ANTONA-TRAVERSI
Avocat associé
En collaboration avec Justine MOULAC
SELARL Cabinet Coudray, Raphaële ANTONA-­‐TRAVERSI, Avocat à la Cour 5 mai 2015 www.cabinet-­‐coudray.fr 

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