Le temps de Nicolas Giraud - Le Festival du Film de la Réunion

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Le temps de Nicolas Giraud - Le Festival du Film de la Réunion
CULTURE
3E FESTIVAL DU FILM DE LA RÉUNION
Le temps de Nicolas Giraud
David Oelhoffen, le réalisateur de “Nos retrouvailles”, nous avait dit grand bien de lui. À écouter Nicolas Giraud on est séduit par la force du
propos sur le métier qu’il s’est choisi parce que,
peut-être bien, il y va de sa vie. Brève rencontre.
“C
’est le troisième festival, après Cannes et
Bruxelles, qui me donne l’occasion de présenter Nos retrouvailles. Un accomplissement en soi quand on sait le
nombre de films qui sont proposés”, constate Nicolas Giraud, tout juste tombé de
l’avion après une nuit sans
sommeil mais paré pour nous
en dire un peu plus que David
Oelhoffen (interviewé dimanche dans nos colonnes)
sur le fameux Marco dont il
endosse la peau. Le fils d’un
père absent, faible, qui réapparaît son enfant devenu homme, pour l’embarquer dans ses
plans foireux et dangereux.
“Le fils ? Un rôle brutal, énorme, démesuré, riche !”, énumère ce jeune homme de 28
ans, prothésiste dentaire de
Charente-Maritime monté un
beau jour à Paris pour concrétiser sa passion de cinéphile.
“Et m’offrir une vie faite de
possibles. De la nourriture
pour grandir et être le plus
large et le plus précis. Envie
d’être acteur au départ… et
voilà ! Ça s’est fait naturellement. J’ai juste essayé d’être
attentif à ce qui se passait. Je
me suis retrouvé sur les
planches à jouer Squat de
Jean-Marie Chevret avec
Marthe Mercadier et Claude
Gensac pour une super-tournée avec reprise à Paris au
Théâtre Edouard VII. Une première expérience qui m’a donné un premier agent m’ouvrant pour commencer les
portes de la télévision. J’y ai
appris bien des choses, j’y ai
gagné ma vie aussi et j’ai terminé de vérifier que ce n’est
pas sur ce front-là que je trouve ma place. J’ai besoin
d’avoir du temps. Je préfère
faire moins, mais mieux”.
Après pas mal de téléfilms, il
rencontre David Oelhoffen
qui lui propose le rôle de son
court Sous le bleu. “J’ai tout
de suite su que c’était exactement ce que je voulais faire.
Même longueur d’onde. Avec
lui, chacun à son poste, on
peut faire du bon travail ensemble”, résume Nicolas Giraud qui a été nominé aux César et à la Mostra de Venise
pour un film projeté dans le
monde entier.
IL DONNE
LA RÉPLIQUE
À LIAM NEESON !
Pas mal pour un début ? “Je
prends ça bien, ni faux modeste, ni fanfaron, avec mes
forces et mes faiblesses. J’essaie d’être moi-même”, explique l’acteur qui a donné la
réplique à Gamblin (“Un homme d’une rare élégance qui
m’a respecté. Beaucoup de
pudeur l’un pour l’autre”).
À voir ce soir
■ Ciné Cambaie
(officiel)
20h15 – « L’âge d’homme… Maintenant ou jamais ! »
de Raphaël Fetjö en présence d’Aïssa Maïga et Clément
Sibony.
22h05 – « Sans moi » d’Olivier Panchot en présence
d’Olivier Panchot, Marie Masmonteil et Vincent Martinez.
■ Ciné-Plage Brisants
(gratuit)
« Deux vies plus une » d’Idit Cebula en présence
de la cinéaste et de Jocelyn Quivrin et François Kraus.
■ Ciné Cambaie public
(8 euros)
19h30 « Nos retrouvailles » de David Oelhoffen
en présence de David Oelhoffen, Nicolas Giraud
et Olivier Charvet.
Nicolas Giraud, un acteur qui privilégie la cohérence du temps… “En espérant qu’il continue à être mon allié !”
Une recette qui lui réussit cette année. Il a déjà fait le plein
en cinéma, depuis Les fragments d’Antonin (en compétition lors du précédent Festival
du Film de la Réunion), Candidat libre de Jean-Philippe
Hubert, avec Hyppolyte Girardot à paraître le 14 décembre, et puis Taken, film
d’action américain qui sortira
en février prochain, avec Liam
Neeson…” (Notre acteur préféré !) “Vous avez bien raison,
nous conforte l’acteur, c’est un
type fantastique. Il incarne là
un ancien Marine, père d’une
fille qui vit en Europe et se fait
kidnapper dans un réseau de
prostitution albanais. Intéressant, instructif. Mais je préfère les petits films de sentiment
où on dénude les gens ordinaires pour découvrir ce
qu’ils ont d’extraordinaire”.
Nicolas Giraud a enchaîné
avec Sur ta joue ennemie,
adaptation d’un fait divers tragique (“un gamin de 14 ans
tue sa famille”) et tourne de-
puis août Une étoile dans la
nuit, l’histoire d’un garçon qui
souffre d’un cancer, ce qui
oblige l’acteur à maigrir et à
perdre ses sourcils, épisodiquement. Ce qui l’empêche
aussi, grosse déception, d’honorer, question de délais, la
proposition de jouer dans le
Barrage contre le Pacifique
adapté de Duras avec Isabelle
Huppert. “Mais aujourd’hui,
ça va, je suis content d’être
là avec Nos retrouvailles. J’aime la profondeur de ce film,
ultrasensible, ambitieux et
modeste comme l’est le réalisateur. Un film singulier et délicat où on décortique, pour ne
laisser que le nerf, sans gras,
et pourtant riche ! Je l’ai dit
déjà ?”
Effet sucré-salé, doux-amer, ici à l’envers, pour la première
soirée des films en lice pour les prix Mascarin de la Réunion
des premiers et seconds métrages du cinéma français. Avec David Oelhoffen en entrée, la pilule était belle mais amère. Avec
Nadine Labaki elle n’était que miel pour un Caramel qui se
laisse déjà déguster sur les écrans de ce département avec autant de délices que Comme t’y es belle, les accents du Liban en
supplément ce qui le rend encore plus fondant. Cette histoire
de femmes, magnifiques, à tout moment, même quand elles
sont vieilles comme Lili et sa... fantaisie aliénante pour son entourage, ne parle que d’amour et de vie. On espérait l’acteur
Adel Kaman, le superman de cette première œuvre, mais à
l’évidence il a eu un empêchement et on le regrette. Comme
Valéria Bruni-Tedeschi qui finalement ne vient plus, comme
promis. Son film Acrice en revanche a bien fait l’ouverture de
la seconde soirée de compétition, hier en présence de son actrice fétiche Noémie Lvovsky que l’on retrouvera pour la projection hors compétition du film de clôture Faut qu’ça danse
où Valerai percera encore une fois l’écran.
M.D
M.D
Caramel !
■ “Nos retrouvailles”, présenté
aujourd’hui par le réalisateur David
Oelhoffen, l’acteur Nicolas Giraud
et le producteur Olivier Charvet, à
19h30 au Cambaie en séance publique (8 euros)
“Coup de poing !”
La compétition a démarré très fort avec
le film de David Oelhoffen qui vous laisse KO assis dans votre fauteuil, confortable il est vrai, du Ciné Cambaie. La
symbolique de la boxe a d’ailleurs tout à
voir avec cette histoire dont le jeune héros, Marco, incarné par Nicolas Giraud,
en a fait son passe-temps favori, sans velléité de titre à rafler mais plutôt, on le
comprend, par besoin de défouler, avec
les poings le trop-plein de rancœur et de
douleur qui lui habite le cœur. Parents séparés, père absent, mère recasée avec un
type que le fils exècre, ce qui l’éloigne du
lien maternel… et puis, coucou le re-
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voilà ! Maxime le papa déboule dans la
vie de son rejeton qui à 20 ans, sérieux, se
coltine avec un boulot de cuisine pour
cantine ou quelque chose du même tonneau, rien de palpitant.
Ce sont donc les “retrouvailles” qui
commandent l’action de ce film, dès les
premières secondes. L’occasion d’apprécier d’entrée de jeu la caméra avide d’intimité d’un réalisateur qui maîtrise son sujet avec originalité, pertinence et doigté,
jusque dans les accolades viriles et d’une
poignante tendresse, servi par un duo
d’acteurs qui vous laisse bouche bée.
Jacques Gamblin bien sûr, et aussi Nico-
las Giraud qui n’a pas besoin de beaucoup
parler pour être “simplement” comme il
souhaite l’être, nous a-t-il dit, l’interprète
le plus réaliste, tout en étant lui, sensible
et révélateur, à la fois récepteur et émetteur sans interférence sur la ligne intérieure de ses deals d’acteur avec cette histoire, lumineuse et noire, débordante
d’émotion, de désespoir à laquelle les seconds couteaux (Spiesser et Laroche) apportent jusqu’à la nausée leur caution
avec brio. À éviter par temps de cafard.
Mais à voir, pour cause de talents rares sur
nos écrans.
M.D
VENDREDI 26 OCTOBRE 2007

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