La problématique de la traduction en langue étrangère Mémoire
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La problématique de la traduction en langue étrangère Mémoire
La problématique de la traduction en langue étrangère La problématique de la traduction en langue étrangère Mémoire présenté par LIN Ting pour l’obtention du mastère ès lettres sous la direction de Madame le professeur FAN Xiaolei Département de Français Université des Etudes Internationales de Shanghai Mai 2009 1 La problématique de la traduction en langue étrangère 声明 本学位论文是我在导师的指导下取得的研究成果.在本学位论文中,除了加以标 注和致谢的部分外,不包含其他人已经发表或公布过的研究成果,也不包含我为获得 任何教育机构的学位或学历而使用的材料。与我一同工作的同事对本学位论文做出的 贡献均已在论文中作了明确的明说。 学位论文作者签名:_____________ 签名日期: 年 月 日 学位论文使用授权申明 上海外国语大学有权保存学位论文的电子和纸质文档,可以借阅或上网公开学位 论文的全部或部分内容,可以向有关部门或机构送交并授权其保存、借阅或上网公布 本学位论文的全部或部分内容。对于保密论文,按保密的有关规定和程序处理。 学位论文作者签名:_____________ 签名日期: 年 月 日 导师签名:_____________ 签名日期: 年 月 日 2 La problématique de la traduction en langue étrangère 中文摘要 现如今,翻译理论的发展日渐趋于成熟,翻译理论与翻译实践之间的结合也越来 越紧密了。然而,有一些领域尚未得到人们的重视。譬如大部分的翻译理论涉及到翻 译语言的时候,考虑到的主要是译入语与译出语之间的关系,也就是说只关注了文本 语言,而忽略了另一个重要的角色——译者。译者的母语是译入语还是译出语,直接 关系到翻译的质量。 人们对于翻译的传统观念,就是要将外语翻译成自己的母语,因为用母语来表达, 译者会觉得更自然、更畅快淋漓。如果要将母语翻译成外语,那么译者对那门外语的 掌握就必须达到一个较高的水平,这对于任何一名译者都不是件容易的事。然而,时 代的发展,社会的变迁使得目的语为外语的翻译成为一种需要。 颠覆了传统的翻译方向,译者用非母语的外语进行表达,结果会令人满意吗?翻 译的过程中会碰到什么样的困难呢?本文从译者的角度出发,讨论译者将母语翻译成 外语,也就是目的语为外语的翻译的一系列问题。分析了目的语为外语的翻译的局限 性、必要性及评判目的语为外语的翻译的标准、提出了一些在实践中被证明行之有效 的具体方法。 3 La problématique de la traduction en langue étrangère Remerciement Je voudrais tout d’abord adresser mes remerciements les plus sincères à Madame le professeur Fan Xiaolei qui a dirigé mon travail. Dès que j’ai commencé mes études à SISU, Madame Fan m’a donné des conseils pour que je puisse mieux adapter à la vie des étudiants chercheurs et bien démarrer mes recherches sur la théorie traductologique. Lors d’élaboration de ce mémoire, elle m’a accordé également beaucoup de conseils précieux. Je tiens à lui exprimer ma vive gratitude pour son aide, ses conseils et sa patience tout au long de mon travail. Je voudrais également exprimer mes remerciements à Monsieur le professeur Chen Wei, qui m’a donné des conseils méthodologiques pour que la construction de mon mémoire soit plus structurée et les arguments plus persuasifs. J’aimerais encore exprimer ma gratitude à tous les professeurs de SISU qui ont voulu me transmettre leurs connaissances et acquis de recherche durant mes études à cette université. Finalement, mes remerciements sincères vont à mes chers parents, qui m’apportent toujours du soutien spirituel et financier, à mes amis chinois les plus proches qui m’accompagnent pendant ces deux années, et à mes amis français qui m’ont donné leurs conseils précieux et m’ont aidée à faire les analyses. Sans eux, je n’aurais jamais pu mener cette recherche jusqu’au bout. 4 La problématique de la traduction en langue étrangère Sommaire Introduction ............................................................................................................................................... 6 ChapitreⅠ Le sens de la traduction en langue étrangère et ses contraintes .............................................. 9 1.1 La généralité ................................................................................................................................ 9 1.1.1 La définition de la langue maternelle et la langue étrangère ............................................ 9 1.1.2 De la langue étrangère à la langue maternelle ................................................................ 10 1.1.3 De la langue maternelle à la langue étrangère ................................................................ 10 1.1.4 Quel est le sens naturel de la traduction?........................................................................ 11 1.2 Les contraintes de la traduction en langue étrangère ................................................................. 13 1.2.1 Le facteur langagier : l’application des expressions de la langue étrangère ................... 13 1.2.2 Le facteur culturel : l’application de la culture de la langue étrangère........................... 15 1.2.3 L’écart entre le traducteur en langue étrangère et le lecteur du texte traduit .................. 16 Chapitre II La nécessité et l’importance de la traduction en langue étrangère ........................................ 20 2.1 La préservation de la diversité des langues ............................................................................... 20 2.1.1 La situation générale des langues dans le monde ........................................................... 20 2.1.2 La protection des langues de faible diffusion et leur culture .......................................... 21 2.2 Le besoin de la communication ................................................................................................. 22 Chapitre Ⅲ L’acceptabilité : critère de la traduction en langue étrangère............................................... 24 3.1 La notion d’acceptabilité ........................................................................................................... 24 3.2 Le texte traduit et le lecteur visé................................................................................................ 25 3.2.1 Le texte informatif .......................................................................................................... 26 3.2.2 Le texte technique........................................................................................................ 27 3.2.3 Le texte littéraire.......................................................................................................... 28 Chapitre IV Comment surmonter les difficultés pour atteindre un bon niveau de traduction ................. 30 4.1 Exigences générales................................................................................................................... 30 4.1.1 La compréhension et l’analyse du texte original ............................................................ 30 4.1.2 Du point de vue linguistique........................................................................................... 33 4.1.3 Du point de vue culturel ................................................................................................. 36 4.2 Méthodes spécifiques ................................................................................................................ 37 4.2.1 Traduire en coopérant avec l’autochtone ........................................................................ 37 4.2.2 Ajouter des explications nécessaires............................................................................... 43 Conclusion............................................................................................................................................... 47 Annexe 1.................................................................................................................................................. 49 Bibliographie ........................................................................................................................................... 50 5 La problématique de la traduction en langue étrangère Introduction C’est un truisme de dire que la traduction est omniprésente de nos jours. La recherche dans le domaine théorique prospérait grâce à la réflexion des traductologues ou des théoriciens contemporains qui ont déjà consacré beaucoup d’efforts à étudier, par exemple, la linguistique et la traduction, la fidélité de la traduction, le processus de la traduction, la traduction automatique, etc. Grâce aux premiers ordinateurs qui marquent l’arrivée d’une nouvelle époque informatique, à partir de la Deuxième Guerre mondiale, la traduction automatique commençait à se développer ; elle exerce une influence de plus en plus considérable à notre époque, mais la traduction humaine va, pendant une longue période, jouer un rôle dominant. Quand j’étais petite, j’ai commencé à lire des chefs-d’œuvre littéraires : Jane Eyre de Charlotte Bronte, Pride and Prejudice de Jane Austen, La dame aux Camélias d’Alexandre Dumas, Nana d’Emile Zola, etc. mais en version chinoise, évidemment. Sur la couverture, il est marqué le nom de l’auteur et celui du traducteur. Les traducteurs de ces oeuvres-là sont sans exception des traducteurs chinois. Cela me donne l’impression que la traduction d’une oeuvre étrangère en langue chinoise s’effectue généralement par un traducteur chinois ou une traductrice chinoise. Il en va de même pour les autres pays ou les autres langues. Au niveau théorique, il paraît logique que l’on traduit d’une langue étrangère à sa langue maternelle. Dans la traduction, notamment dans la traduction littéraire, on voit peu de cas contraires. Il est rarissime de remarquer, sur la couverture d’une traduction chinoise, le nom d’un traducteur étranger. Ces faits ne constituent pas une excuse pour éliminer la traduction en langue étrangère. Elle est sinon un terrain vierge, du moins un terrain qui n’est pas encore bien exploité par les traductologues. La traduction est en évolution incessante. Dans la traduction en langue étrangère, outre la traduction littéraire, il existe la traduction fonctionnelle : modes d’emploi, conventions, rapports, informations de la presse, etc. lesquels sont de plus en plus 6 La problématique de la traduction en langue étrangère fréquents de nos jours. Ainsi les aspects particuliers dans la traduction en langue étrangère sont non négligeables et restent à découvrir. C’est Marianne Lederer, professeur à l'Université de Paris VII, qui a consacré un chapitre, dans son livre intitulé La traduction aujourd’hui, à la traduction en langue étrangère. Le contenu et les points de vue de Marianne Lederer m’ont beaucoup inspiré. C’est un livre auquel je fais un bon nombre de références au cours de la rédaction de ce mémoire. Vu que la traduction et l’interprétation (ou la traduction orale) ont des aspects différents, au lieu de les traiter en même temps, mon travail se limite à étudier la traduction écrite. Ce mémoire se situe au niveau de la traduction professionnelle plutôt que la traduction didactique : dans l’enseignement, la traduction en langue étrangère dite le thème, il ne porte pas sur un texte véritable mais sur un macro-signe artificiellement créé par l’enseignant ou l’auteur du manuel. A cet égard, cet exercice ne peut donc pas être assimilé à la traduction de textes authentiques. Allant à l’encontre du sens naturel de la traduction, le traducteur se voit obligé d’exprimer dans une langue étrangère, le résultat pourrait-il être satisfaisant ? Quelles sortes de difficultés le traducteur affrontera-t-il ? Comment résoudre ces problèmes ? Le présent mémoire comporte quatre parties. Le premier chapitre parle du sens de la traduction qui est souvent négligé dans la recherche théorique. Normalement, on traduit de la langue étrangère à la langue maternelle, parce qu’on est toujours plus à l’aise d’exprimer dans sa propre langue maternelle. Si l’on va à l’encontre de ce « sens naturel », des contraintes sont inévitables. Dans le deuxième chapitre, la présentation de la conjoncture actuelle des langues, notamment les langues de faible diffusion, nous démontre que pour protéger la diversité des langues et des cultures issues de différentes nations, la traduction en langue étrangère est nécessaire. De surcroît, la traduction en langue étrangère répond davantage au développement des échanges internationaux : sites Internet, colloques scientifiques, etc. En raison des particularités de la traduction en langue étrangère, le critère traditionnel pour critiquer la traduction n’est plus convenable. Le troisième chapitre porte sur la notion 7 La problématique de la traduction en langue étrangère d’acceptabilité, un critère plus rationnel qui tient compte des facteurs extérieurs comme le genre du texte et le niveau d’instruction du lecteur en langue étrangère. Quelles que soient les langues et quels que soient les types de texte, le processus de la traduction respecte ses principes fondamentaux. Le dernier chapitre se consacre en premier lieu à des exigences générales concernant l’analyse du texte original, la langue étrangère et la culture, et puis nous tenons à proposer deux méthodes spécifiques qui répondent au besoin de franchir les obstacles fréquemment rencontrés au cours de la traduction : traduire en langue étrangère en coopérant avec l’autochtone et ajouter des explications nécessaires. Dans la conclusion, nous voyons la perspective brillante de la traduction en langue étrangère grâce aux efforts provenant de différentes parties, les traducteurs professionnels, les universités, les départements concernés. 8 La problématique de la traduction en langue étrangère Chapitre Ⅰ Le sens de la traduction en langue étrangère et ses contraintes 1.1 La généralité Nous ne nous étonnons pas de lire un texte traduit par un traducteur chinois de la langue française en langue chinoise dont l’expression est stricte et naturelle, mais si le texte est traduit convenablement par un traducteur français, nous nous étonnerons du bon niveau de traduction de ce traducteur français. Pourquoi cette réaction différente ? La distinction de la langue source et la langue cible ne permet pas aux lecteurs de savoir quelle est la langue maternelle du traducteur. Dire de façon plus précise, les compétences linguistiques du traducteur peuvent-elles être jugées d’une manière objective et scientifique ? Pour le traducteur, il n’existe que deux sens de la traduction : de la langue étrangère à la langue maternelle ou bien de la langue maternelle à la langue étrangère. Le sens de la traduction choisi par le traducteur aura-t-il une influence directe sur la qualité du texte traduit ? 1.1.1 La définition de la langue maternelle et la langue étrangère La langue maternelle, c’est la langue de la mère, la première langue qu’un enfant apprend. Il arrive que certains enfants connaissent les deux langues de leurs parents car ceux-ci ne sont pas de la même origine : ces enfants sont souvent bilingues. Aucune des deux langues n’est alors étrangère pour l’enfant, même si l’une des deux est étrangère dans le pays de résidence. Au contraire, la langue étrangère est une langue que l’on a apprise plus tard, à l’école ou dans des circonstances plus particulières, si bien qu’on doit faire effort pour la maîtriser. L’apprentissage peut se faire de différentes manières : par la voie scolaire, par des cours, des stages ou des formations à l’âge adulte, par des manuels ou des 9 La problématique de la traduction en langue étrangère méthodes multimédias, par le bain linguistique, etc. 1 Il est probable qu’un traducteur chinois dont le père est Français et la mère Chinoise maîtrise remarquablement deux langues : le chinois et le français. Dans ce cas-là, c’est un véritable bilingue. Cette situation exceptionnelle est exclue dans le présent mémoire et on suppose que le traducteur n’a qu’une seule langue maternelle. 1.1.2 De la langue étrangère à la langue maternelle Le traducteur traduit de la langue étrangère vers sa langue maternelle. Par exemple, un traducteur chinois traduit d’anglais ou de français en chinois. Traditionnellement, la traduction s’effectue dans la langue maternelle du traducteur. Par commodité, les professionnels appellent ce sens « sens de B (langue étrangère) en A (langue maternelle) ». La distinction de la langue de départ et la langue d’arrivée n’indique que la langue des textes, elle ne laisse pas voir les compétences linguistiques du traducteur. Mais la distinction de langue B en langue A peut compléter la déficience. Dans ce sens de B en A, la langue étrangère est la langue de départ tandis que la langue maternelle est la langue d’arrivée. Le traducteur est plus à l’aise dans ce sens. La plupart d’opérations traduisantes s’effectuent dans ce sens, surtout pour la traduction des œuvres littératures. 1.1.3 De la langue maternelle à la langue étrangère Le traducteur traduit de sa langue maternelle vers une langue étrangère. Cette langue étrangère est une langue acquise pour lui. On appelle ce sens « sens de A en B ». Par exemple, un traducteur chinois traduit du chinois en français ou en anglais. Dans ce sens, la langue maternelle est la langue de départ tandis que la langue étrangère est la langue d’arrivée. Par rapport à la traduction de la langue étrangère à la langue maternelle, ce sens de traduction est beaucoup moins appliqué dans la pratique. Les raisons sont multiples, mais en général, cette opération exige des traducteurs un très bon niveau de la langue 1 www.wikipedia.fr 10 La problématique de la traduction en langue étrangère étrangère, surtout en expression, ce qui pose d’énormes problèmes aux traducteurs. 1.1.4 Quel est le sens naturel de la traduction? La traduction de la langue étrangère à la langue maternelle est un test de compréhension de la langue étrangère et un test d’expression en langue maternelle, tandis que la traduction de la langue maternelle à la langue étrangère est plutôt un test des connaissances grammaticales et culturelles de la langue étrangère. On est persuadé que le résultat de la traduction de B en A est toujours beaucoup meilleur que celui de A en B, en d’autres termes, le traducteur réussit plus facilement dans la traduction de B en A que dans la traduction en langue étrangère. De plus, la traduction de A en B subit des contraintes que la traduction de B en A ne connaît pas. Primo, la compréhension est toujours plus facile que l’expression. Chaque langue est une façon de réfléchir et de penser spécifique. De ce fait, la langue maternelle enferme l'homme dans une mentalité spécifique, d'où un écart de compréhension entre les peuples. Et dans sa langue maternelle, le traducteur possède une connaissance linguistique et culturelle plus profonde que celle de la langue étrangère. La langue maternelle est une langue que le traducteur acquiert dans un environnement où cette langue est pratiquée. La façon d’apprendre cette langue est tout à fait naturelle tandis que l’apprentissage d’une langue étrangère est souvent déterminé par le manuel, coupé d’un environnement naturel. Dans le sens de B en A, le traducteur travaille avec beaucoup de facilité et maîtrise à son aise les éléments linguistiques et culturels de la langue de sa mère. Il jouit d’une perception instinctive dans l’expression. Ce qui est beaucoup plus difficile dans la traduction de A en B. « Dans sa langue maternelle, le bon traducteur jouit d’une parfaite aisance d’expression ; en revanche sa connaissance de la langue B et de ce qu’il est convenu d’appeler la « culture » étrangère est, par définition, inférieure à celle de sa langue maternelle et de sa propre culture, et inférieure à celle d’un autochtone parlant cette langue et appartenant à cette culture. Travaillant en langue A, le traducteur n’est pas 11 La problématique de la traduction en langue étrangère aussi familiarisé que l’autochtone avec la civilisation, l’histoire, les mœurs, la littérature, les habitudes culinaires et autres du peuple dont il traduit les textes » 2 Pourtant, certains pensent que la compréhension du texte original demande des connaissances linguistiques parfaites de cette langue ainsi que des connaissances au-delà de la langue. Les connaissances linguistiques comme système grammatical, morphologie, connotation des mots, etc. Les connaissances non linguistiques comme événements, faits historiques, gastronomie, comportements collectifs, oeuvres littéraires, préjugé, bref tout le non-linguistique qui se cache derrière les mots. Si les informations ne pouvaient pas être assurées par le traducteur de B en A, c’est-à-dire le traducteur non natif, la traduction serait incomplète et insatisfaisante. Mais si la traduction était faite de A en B, le traducteur serait en mesure d’éviter la confusion et l’ambiguïté. Nonobstant, ces connaissances culturelles passives ainsi que celles de la langue peuvent être acquises à tout âge ; de plus, les dictionnaires, les sites Internet, la documentation peuvent tous servir d’un outil pour faciliter la compréhension d’une langue étrangère. S’agissant des structures syntaxiques de la langue étrangère et de ses tournures idiomatiques, elles sont aussi comprises plus aisément qu’elles ne seraient utilisées activement. 3 Secundo, passé l’adolescence, on ne peut plus parvenir à manier une langue comme si elle était maternelle. L’aisance d’expression dans la langue maternelle, les effets stylistiques que permet le maniement intuitif de la langue sont inaccessibles à l’expression en B. De la traduction de l’information à la transmission de l’émotion, la langue d’expression exige une intuition de plus en plus sûre. On peut prétendre arriver dans une langue B à une grande correction lexicale et grammaticale mais, dans une langue A, le traducteur y ajoute du naturel, de la pertinence, parfois de l’élégance et toujours un sens très sûr de la langue. On peut parvenir à comprendre la langue et la culture étrangère aussi bien que l’on comprend sa propre langue et sa propre culture. Pour s’exprimer en traduction, cependant, on sera toujours plus à l’aise dans sa langue maternelle. Théoriquement, il est préférable de suivre le sens naturel de la traduction, soit de B en A. Néanmoins, en raison de divers besoins (voir chapitre Ⅱ), la traduction en langue 2 3 La traduction aujourd’hui, Marianne Lederer, P147 La traduction aujourd’hui, Marianne Lederer, P149 12 La problématique de la traduction en langue étrangère étrangère est sinon nécessaire, du moins inévitable. Dans la pratique, elle ne manque jamais. 1.2 Les contraintes de la traduction en langue étrangère Le sens naturel de la traduction est de B en A vient d’être justifié ; si la traduction se fait de A en B, des difficultés seraient inévitables au cours de l’opération. Les contraintes venant d’une part de l’imperfection du traducteur même, d’autre part des facteurs extérieurs. 1.2.1 Le facteur langagier : l’application des expressions de la langue étrangère Par rapport à la compréhension en langue A, il est plus difficile de reformuler en langue B pour le traducteur de A en B. Dans le sous chapitre 1.1.2, il a été justifié que le traducteur pouvait profiter d’une parfaite aisance d’expression dans sa langue maternelle, par contre, il se sentirait moins à l’aise s’il traduit de A en B. En d’autres termes, exprimer en langue étrangère n’est pas toujours facile. Chaque langue a son histoire propre qui dure déjà longtemps, le système langagier est énorme et complexe. Pour le traducteur qui doit exprimer en langue étrangère, il lui est presque impossible de maîtriser une langue comme sa propre langue maternelle. Dans l’expression, il s’agit de choisir des mots adéquats, de formuler des phrases adaptant à la situation. Faute d’intuition, le traducteur rencontrera des problèmes linguistiques comme la définition d’un mot, la mise en oeuvre d’une rhétorique, l’application de la grammaire. Même s’il traduit, il ne peut non plus garantir l’exactitude de son travail. Voyons la traduction en français de deux expressions chinoises. Ex 1 : « 物质文明和精神文明建设 » 13 La problématique de la traduction en langue étrangère « L’édification de la civilisation matérielle et de la civilisation spirituelle » Ex 2 : « 计划生育» « Le contrôle des naissances » Nous ne découvrons point de problème en lisant la traduction dans laquelle chaque unité de sens dans l’expression originale trouve sa place. En fait, dans l’exemple 1, au mot « édification », il est préférable de substituer « réalisation ». On peut traduire « édification » par « 建设 » en chinois si l’on traduit mot à mot. Mais est-ce que le mot « édification » correspond parfaitement au sens du mot « 建设 » dans l’expression « 物质 文明和精神文明建设 » ? Le dictionnaire nous donne la réponse. Voilà comment le dictionnaire Trésor définit ces deux mots « édification » et « réalisation ». Edification : 1. Action de construire un ouvrage d’art ; 2. Action de mettre sur pied un vaste ensemble, d’élaborer une oeuvre importante (au sens figuré). 4 Réalisation : action d’accomplir ou fait de voir s’accomplir des aspirations, des désirs. 5 Nous savons que la civilisation matérielle et la civilisation spirituelle (物质文明与精 神文明 ) sont une des aspirations du peuple chinois, donc d’après la définition, par rapport à « édification », « réalisation » peux mieux interpréter le sens original du mot « 建设 » dans l’expression « 物质文明和精神文明建设 ». On ne peut pas juger que « édification » est une traduction fausse, on ne peut non plus nier que l’utilisation de « édification » dans cette phrase manque d’exactitude, ce qui est une demande essentielle pour la bonne traduction. Et dans l’exemple 2, l’expression « contrôle des naissances » vient de l’anglais : birth-control. Comme la Chine a une population trop nombreuse, le gouvernement a pris des mesures pour limiter le nombre des naissances. Le mot «计划» a un sens de limiter. 4 5 http://www.cnrtl.fr/definition/édification http://www.cnrtl.fr/definition/réalisation 14 La problématique de la traduction en langue étrangère Mais en français, « contrôle des naissances » désigne le libre choix par les époux d’avoir ou non des enfants en temps voulu grâce aux méthodes contraceptives, ce qui ne parle pas la même situation que la réalité en Chine. Donc il faudrait mieux traduire par « limitation des naissances ». L’essentiel d’une langue est son pouvoir de signification. Le choix de mots est important dans l’expression et dans la communication. Les deux exemples nous montrent que distinguer de façon précise des nuances des mots et appliquer des expressions de façon pertinente restent des compétences à désir sans cesse par le traducteur. En règle générale, la traduction entre les langues proches est beaucoup plus facile grâce à leur ressemblance, alors que la traduction entre les langues éloignées semble plus délicate. On constate que plus l’histoire et les mentalités des peuples sont rapprochées, plus la traduction serait simple. Par exemple, l’anglais et le français ont des points communs dans le vocabulaire et la grammaire. Pourtant il faut éviter de tomber dans le piège des faux-amis. 1.2.2 Le facteur culturel : l’application de la culture de la langue étrangère Comprendre une langue étrangère demande des connaissances extralinguistiques ; exprimer en langue étrangère demande davantage d’expériences extralinguistiques. Néanmoins, pour le traducteur de A en B, les connaissances encyclopédiques en langue B sont toujours insuffisantes. De plus, il est possible que certaines notions culturelles ou phénomènes existant en langue A n’aient pas leurs équivalences ou correspondances en langue B, et vice versa. Dans ce cas-là, le traducteur se trouve dans le dilemme. Le problème culturel apparaît souvent dans la traduction des proverbes. Si le traducteur chinois veut traduire 说曹操,曹操到(shūo-cáo-cāo, cáo-cāo-dào) en français, comment traiter 曹操(Cáo-cāo), un homme de l’époque des Trois Royaumes (220–265) ? Traduire littéralement ? Bien sûr que non. En fait, dans le français, il existe une expression qui signifie le même sens : Quand on parle du loup, on en voit la queue. Si le traducteur ne 15 La problématique de la traduction en langue étrangère connaît pas cette expression, peut-être va-t-il trouver une traduction pour transmettre le sens, mais l’effet est moins évidant. En plus, l’absence de la connaissance à l’égard de la culture de langue B conduirait quelquefois à une absurdité. Ci-dessous est une traduction faite par une étudiante chinoise. Ex : « La pluie nous a surpris à mi-chemin et nous sommes devenus des poules mouillées tombées dans la soupe » Nous notons au premier moment que c’est une traduction mot à mot. En réalité, l’expression « poule mouillée » en français renvoie à une autre image que celle en chinois, et signifie une personne poltronne. Cette ignorance provoque une faute ridicule. Il vaudrait mieux dire : « Surpris à mi-chemin par une averse, nous sommes devenus tout trempés sous la pluie » Comme le dit J.-P. Vinay : « Vouloir traduire un message qui appelle une équivalence par traduction directe aboutirait à une absurdité non pas linguistique cette fois, mais culturelle. » 6 En raison de la diversité, les éléments culturels demeurent des difficultés tuantes pour le traducteur. 1.2.3 L’écart entre le traducteur en langue étrangère et le lecteur du texte traduit Beaucoup d’écrivains, lorsqu’ils écrivent un roman, ils ne pensent pas que leur ouvrage serait traduit un jour dans une langue étrangère. Autrement dit, les lecteurs étrangers ne sont pas pris en considération au cours de la rédaction ni leurs réactions en face de l’événement raconté dans le livre. Le traducteur travaillant de A en B, en tant qu’intermédiaire ou passeur de culture, ne fait pas partie du même monde linguistique et culturel que les lecteurs du texte traduit. De ce fait, le traducteur est inconscient des réactions probables des lecteurs de son texte traduit. 6 La traduction humaine, dans A. Martinet : Le langage, Edition Gallimard, 1958, P747 16