Dissertation L`écrivain de Montherlant affirme : « Il ne faut pas qu`un

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Dissertation L`écrivain de Montherlant affirme : « Il ne faut pas qu`un
Dissertation L’écrivain de Montherlant affirme : « Il ne faut pas qu’un écrivain s’intéresse trop à son
époque, sous peine de faire des œuvres qui n’intéressent que son époque. » Dans quelle mesure
l’écrivain qui critique son époque et sa société peut-il faire réfléchir le lecteur sur l’homme en général ?
Vous répondrez à cette question en vous appuyant sur les textes du corpus, sur les œuvres étudiées
en classe et sur vos lectures personnelles. »
On ne peut pas reprocher à Montherlant une quelconque incohérence : son théâtre est en
effet relativement intemporel et d’ailleurs l’article défini qui caractérise les personnages éponymes,
dans « la reine morte », « la ville dont le prince était un enfant » renvoient bel et bien à des grandes
catégories sans histoire ou plutôt, aptes à s’insérer dans toutes les histoires. On peut imaginer que le
dramaturge avait l’angoisse de finir assimilé à un vulgaire manuel d’histoire, tel qu’on a pu souvent
réduire Emile Zola à une étude sociologique et historique du milieu ouvrier du 19e siècle, à tel point
que même le philosophe Karl Marx n’hésite pas à réduire le père des Rougon-Macquart au rôle
d’illustrateur, voire simple témoin historique, capable au mieux de nous instruire sur une époque bien
déterminée. Pour contrecarrer une telle atrophie, Montherlant prend le parti inverse : rendre à une
œuvre son de permanence pour ne pas dire d’éternité. Mais est-ce bien possible ? Est-ce l’enjeu ? Estce souhaitable ? Tous les lecteurs et tous les livres valent-ils cela ?
Afin de déterminer le degré de généralité contenu dans l’œuvre littéraire qui critiquerait son
époque, examinons d’abord l’inéluctabilité d’une littérature dans son époque ; puis intéressons-nous
à la capacité de la littérature à se faire intemporelle avant que de considérer les usages stratégiques
et malins de l’historicité à des fins bel et bien littéraires, démontrant qu’Histoire et littérature loin de
se limiter l’une l’autre peuvent en vérité se servir voire se renforcer.
La littérature est de fait, forcément ancrée dans son époque : on ne peut pas faire autrement
qu’écrire dans son époque pour son époque.
La cible d’une critique se trouve forcément circonstanciée, ce qui garantit sa crédibilité et et son
intelligibilité, au sein de l’époque dans laquelle se trouvent ses référents. L’ancrage constitue en outre
de façon pratique, concrète, un repère appréciable pour le lecteur en ce qu’il va guider ce lecteur dans
le texte et donner plus de sens à ce qui sera exposé. Une œuvre sans aucune contextualisation et qui
ferait fi de tout ancrage sociohistorique perdrait aussi sans doute de sa matérialité, et semblerait vaine
et inconsistante. L’Histoire loin d’être un simple décor, permet aussi de fixer le degré de gravité et
d’établir les seuils d’ « insupportabilité » ou d’importance des choses mentionnées et/ou narrées. Ainsi
malgré le risque d’une réductibilité œuvre/circonstance, les témoignages de Herta Müller (cf. la
bascule du souffle) sont d’autant plus appréciables par le lecteur aimant donner corps à la fiction et
l’inscrire dans un temps révolu mais identifiable, donc crédible. La période communiste prise comme
arrière-fond historique parle certes d’une époque mais aussi permet de rendre le discours sur la
dictature plus accessible car incarné dans une histoire des hommes, à un certain moment de notre
histoire collective. Un récit déconnecté de tout ancrage, comme on pourrait, sur le même sujet, le
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trouver chez des Kafka ou des Orwell auraient toujours sur eux le soupçon de n’être que des
constructions, de pures fictions, toujours potentiellement soumises au doute et à la défiance. L’histoire
est aussi un facilitateur de la fiction, qui va inscrire l’expérience narrée dans une vérité rendue
acceptable par tous. Même si cette réalité, dans le cas de Müller par exemple, reste difficilement
transférable et qu’elle fait certes encourir à son auteur le risque de l’exploitation indéfinie du même
filon (ce que l’on peut reprocher à Herta Müller qui paraît ne pas savoir écrire en dehors de ce cadre
historique précis et limité), en même temps, elle se trouve facilitée par ce lustre, cette importance que
donne l’histoire à un fait, et qui transforme l’anecdote en chose d’importance. Le récit littéraire
bénéficie donc du prestige de l’histoire.
Le temps n’est pas forcément l’ennemi de l’écrivain, il peut aussi renforcer la virulence d’un propos
critique sur le moment : cf. Zola (J’accuse), Vinaver (11 septembre). Si Zola avait rédigé, plutôt qu’une
charge clairement dirigée contre un certain système et un certain interlocteur (le président F. Faure)
et avait par exemple sur le modèle voltairien, produit une sorte de traité de la tolérance bis,
l’argumentation aurait perdu de sa force : d’un moment de crise aigüe l’auteur aurait risqué de faire
un moment délicat de l’histoire nationale parmi d’autres. Or, l’affaire Dreyfus n’avait pas ce statut de
« nec pluribus impar ». Cette circonstance-là était d’une ampleur et d’une gravité nettement
supérieures à toutes les autres affaires de xénophobie et de populisme de l’époque. Fixer le moment,
assumer le cadre historique, inscrire le récit dans sa particularité, le rendre non-interchangeable
permet aussi de lui donner tout son prix et pour ce qui est du récit, de pouvoir le dramatiser
pleinement. Quand Michel Vinaver choisir de ne pas intituler sa pièce « crise de civilisation », mais bien
« 11 septembre » il donne à l’œuvre littéraire, sa pièce en l’occurrence, une valeur d’exemplarité,
d’unicité terrible, qui sert le tragique paroxystique de la pièce, assumant sa circonstance extrême et
inédite. L’inscription dans un moment qui parle spécifiquement aux contemporains tout en risquant
d’intéresser surtout les gens de son époque, permet tout du moins d’intéresser véritablement les gens
de son époque.
Mais si l’ancrage relève d’une réalité ou d’une nécessité pratique, il n’a pas forcément pas à
devenir l’horizon de l’œuvre, laquelle peut aussi tirer sa grandeur de son émancipation vis-à-vis du
cadre immédiat dans lequel on pourrait la placer. L’ancrage dans l’époque pour utile qu’il est, n’a rien
d’obligatoire ni d’insurmontable et même, la force de l’œuvre littéraire peut justement devenir son
intemporalité.
L’universalité des topoi permet de considérer dans l’œuvre la possibilité d’une permanence des
discours et des débats, et dès lors, permet de lire dans les critiques adressées à une certaine époque
des annonces ou bien à l’inverse des reformulations d’un mouvement contestataire plus large, et qui
peut toucher plusieurs générations voire siècles. On trouve ainsi fréquemment que les Lumières ou
l’Humanisme dépassent leur strict cadre chronologique de départ. On reprend aisément et
fréquemment l’adjectif « humaniste » et l’on mentionne « un esprit des Lumières » bien au-delà des
seuls auteurs concernés de prime abord. Jacqueline de Romilly avait été qualifiée par le président
Sarkozy (rendant hommage à l’helléniste décédée en 2010) d’ « humaniste ». Pourtant évidemment
rien de chronologiquement plausible : la spécialiste de Thucydide est morte en 2010, c’est-à-dire cinq
siècles après Montaigne et ses acolytes. Mais personne ne s’est mépris : Romilly avait toujours incarné,
en tant que traductrice, historienne et enseignante, comme Montaigne le souci de faire vivre les
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Anciens auprès de nouvelles générations de lecteurs, le souci d’une langue et d’une syntaxe maîtrisées
et signifiantes, et l’envie de partager un savoir rigoureux autant qu’exigeant. Les valeurs avaient su
dépasser leur lieu originel d’expression. De même, on sait rendre aux récits très ancrés dans la réalité
est-allemande de Christa Wolf leur intemporalité: nombre de lecteurs sont touchés par la thématique
large du déchirement, bien qu’ils ne soient à priori ni allemands et encore moins est-allemands, et
qu’ils soient postérieurs aux années 70. Le fait que le sujet central du récit de Christa Wolf touche
davantage à des problématiques anthropologiques (le pouvoir, la place d’un individu de la société) et
ontologiques (la définition de soi, la recherche du bonheur) que purement historiques permet à
l’écriture de Christa Wolf d’être accessible pour tous les publics, et de ne pas rester à la merci d’un
décor sociohistorique. De même l’étranger de Camus & le sentiment d’absurde. Ou encore le guépard
de Lampedusa et la chute des valeurs nobiliaires passées. Ces récits parlent à des lecteurs bien
postérieurs au temps d’écriture et sans plus de rapport avec la société décrite. Les valeurs
transhistoriques véhiculées par les personnages dépassent l’ancrage purement historique du récit.
L’auteur assume un certain ancrage dans une certaine histoire, mais l’homme lui conserve une certaine
permanence. L’Histoire n’est pas minorée, mais elle n’empêche pas à l’Homme de développer sa
propre temporalité, qui elle surmonte les époques. Lire un récit de Thomas Hardy c’est évidemment
s’engager dans une vision profondément et explicitement victorienne des rapports sociaux et des
statuts des hommes et des femmes , idem de la dimension à la fois très provinciale (normande) et très
bourgeoise typique fin 19e à l’œuvre dans Madame Bovary, pourtant la valeur surpasse le cadre
puisque du roman de Flaubert on a même tiré un terme, le « bovarysme » qui lui, se passe de contexte
historique pour s’exprimer, renvoyant à une notion pouvant s’incarner aussi bien au siècle d’Emma
qu’au nôtre.
La vision de l’histoire selon Montherlant montre ses limites ainsi que son étroitesse, en ce que
Montherlant la considérant comme une et révolue, n’appartenant qu’à un moment ponctuel et qu’à
ceux qui la font (en évacuant ceux qui la lisent) occulte la dimension elle-même mobile de l’Histoire.
Ainsi un même ouvrage pourra acquérir une « seconde jeunesse » selon ses usages et relectures
ultérieures, à la lumière de nouveaux événements par exemple. On pourra considérer pour s’en
convaincre les propos sur le tremblement de terre de Lisbonne par Voltaire ou Rousseau, qui
semblaient n’appartenir qu’à l’année 1755 mais on pourra se référer même en 2009 à leurs
questionnements , et il faut sans doute voir dans le procès fait aux scientifiques sismologues en 2012
une forme d’écho à cette angoisse d’un monde où non seulement Dieu mais aussi la Raison auraient
déserté les hommes, cf. le tremblement de terre qui a secoué l’Aquila en Italie en 2009. De même les
propos de Léon-Gontran Damas ou Aimé Césaire semblaient relever d’une urgence propre aux années
30/40 alors que la France coloniale existait encore et que les noirs manquaient de visibilité en France
aussi bien dans les institutions que dans la vie médiatique, pourtant leurs propos sont repris lors de
débats nouveaux, à un moment où l’enjeu n’est plus même spécifiquement ethnique ni racial, car la
notion de discrimination a revêtu de nouveaux visages depuis. Montherlant veut ignorer la part de
répétitivité de l’Histoire et assimile au fond l’événement à une donnée caduque sitôt qu’il est advenu,
le condamnant d’emblée à une unicité forcément réductrice et donc vite intransmissible. Sa vision
d’une histoire sitôt consommé, périssable est assez désespérante et la littérature est également
perdante : condamnée à n’être qu’une illustratrice elle semble n’avoir à faire valoir aucune
compétence propre, dotée du seul pouvoir de retranscrire faute d’écrire.
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Or si l’on questionne les potentialités de l’écriture littéraire, s’il y a bien quelque chose qu’elle
a à apporter, par rapport aux autres discours (comme le discours informatif), c’est bien la capacité à
s’émanciper des buts et fonctions assignés. N’était-ce pas Maupassant qui revendiquait en 1886 dans
sa préface à Pierre et Jean, la valeur d’entre les valeurs artistiques, c’est-à-dire la liberté ? L’œuvre
littéraire sait s’affranchir, car elle a les moyens techniques, des cadres, y compris du cadre qui semble
le plus naturel, à savoir le cadre spatio-temporel. Elle peut même convertir son ennemi en allié, ou si
l’on pense les choses en termes de hiérarchie comme Montherlant semble le faire, elle est tout à fait
à même de faire de la sacro-sainte Histoire, cet absolu typiquement réaliste et naturaliste, censée être
le gage de vérité, le meilleur atout du mensonge et de la fiction. Le détournement intelligent de la
notion d’historicité en littérature est possible et l’Histoire bien manipulée est alors là pour renforcer
la littérature comme jamais. C’est après tout déjà le cas, lorsque l’Histoire n’est plus qu’un décor
symbolique, sans importance pour lui-même, et qu’il ne prend finalement toute sa signification que
lorsqu’on l’inscrit dans la logique intellectuelle et philosophique qui traverse l’œuvre littéraire. La Paris
décadent fin de siècle des romans de Huysmans n’acquiert toute sa signification que lorsqu’on la
comprend à l’aune de la lassitude existentielle du héros. Autrement dit, ce n’est peut-être pas tant le
héros qu’il faut comprendre comme un symptôme de l’époque dans laquelle il est placé, mais il faut
comprendre plutôt c’est l’époque dépeinte qui est à lire comme une énième clef d’explication de
l’identité du héros.
L’œuvre littéraire peut aussi brandir l’absence de cadre réel et vérifiable, comme une preuve éclatante
de son autonomie et en faire une force supplémentaire d’attraction sur le lecteur aimant l’originalité,
l’audace et l’inventivité. Cela aussi peut devenir en soi significatif, que de placer l’histoire (au sens
d’intrigue) dans un non-lieu et de la même façon, dans un non-temps qui sera interprété comme une
marque évidente d’échec, servant le propos central de l’œuvre. Le refus de rattacher l’œuvre à un
espace-temps, à une époque fixée, doit alors être compris comme le refus de voir le propos central
distrait par quoi que ce soit. Certains sujets ne souffrant aucune distraction, pas même par les
indications de temps ou de lieu. Ainsi lorsque Pérec ancre son récit dans un non-lieu qu’est l’île de W,
non seulement cela sert la dystopie, au sens où ce lieu inhabitable se révèle en effet invivable, et cela
ravive également le sentiment d’angoisse ou de claustrophobie du lecteur, pris dans un lieu d’autant
plus étouffant que parce qu’il n’existe dans aucune cartographie, ne se voit doté d’aucune frontière et
envahit à loisir l’esprit du lecteur qui ne peut pas lui échapper puisqu’il ne sait pas comment en sortir.
Dès lors qu’il s’agit du récit des entrainements et de la vie à W, après avoir dû supporter un
amoncellement de dates et de noms propres, le lecteur se retrouve soudain et pour le reste des
chapitres du roman, catapulté dans un lieu sans localisation et dans une époque sans date. Le choc est
brutal et le sentiment d’abandon que ressent le lecteur est vif. Rien ne peut le sortir de ce non-lieu et
de cette non-époque et au lieu de libérer le lecteur, un tel espace-temps sans borne aucune se révèle
plus oppressant ; à W, le lecteur se trouve projeté dans une époque qui ne dit jamais son nom, plus
marquante qu’un temps qui, s’il était limité à un moment, serait heureusement anecdotique, vécu
mais vite révolu. L’absence de temporalité ne résout rien, et de fait, Pérec nous dit avec ce long passage
sans époque ni lieu identifiables que le problème du nazisme et de l’asservissement des individus n’a
pas besoin de cadre strict pour être posé : le problème est dans l’être humain, il lui est inhérent et
durera autant que l’être humain durera, puisque le problème de cette sélection des « plus forts » va
de pair avec le désir d’existence et d’accomplissement des hommes. La perversion de cet élan vital en
instinct de domination restera donc irrésolu et c’est non pas la fixation dans une époque mais la
fixation dans une délibérée absence d’époque qui fait mesurer toute l’horreur.
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En réduisant la littérature à une simple traductrice de son époque Montherlant néglige toute la
richesse et la complexité des relations pouvant s’établir entre histoire et littérature. Les auteurs
peuvent être très conscients de cette relation très dynamique qui peut se nouer entre la notion
d’époque et l’œuvre et dépassant habilement cette fausse opposition entre histoire réelle, ancrage
dans l’époque et vivacité de l’œuvre intellectuelle, certains auteurs peuvent choisir d’associer les
attentes réalistes et la logique de création littéraire, en offrant certes un décor historique mais
intelligemment remanié pour les besoins du contenu littéraire. Dans le cas de la science-fiction, le
dépaysant peut s’avérer rentable ; il peut masquer aussi dans le cas plus particulier encore des
apologues des ancrages risqués et l’écrivain qui sait se référer à l’histoire oui, mais une histoire
habilement déplacée pourra d’autant mieux affirmer son propos. Dans le cas des apologues, le référent
sous-entendu est plus fort que le cadre historique manifeste. C’est le cas des œuvres «déplacées »,
comme les œuvres de Jean Anouilh ou Brecht, qui en plaçant leur écrit dans une Antiquité (dans leurs
variations sur le mythe d’Antigone, par exemple) à laquelle personne ne croit, détournent les soupçons
éventuels des autorités et font passer leur vision critique du monde qui les entoure alors, celui du
début du XXe siècle dangereusement pris dans les filets nazi.
Afin de répondre à Montherlant, qui sans doute en bon héritier du réalisme du 19e, ne voyait
dans l’œuvre littéraire qu’une expression toujours dépendante de son cadre historique, nous avons
d’abord montré le caractère jusqu’à un certain point inéluctable de la rencontre entre Histoire et
littérature, puis nous avons démontré que la littérature avait en elle de quoi faire valoir une histoire
au très long cours, en faisant valoir l’universalité dont elle était capable, pour enfin revenir sur le lien
moins naïf et plus consenti que ce n’en croit Montherlant entre nos deux protagonistes, cadre
historique et littérature. Le lien entre les deux peut non seulement être consenti mais aussi
protéiforme, et s’inscrire avec souplesse dans une stratégie délibérée au net bénéfice de la littérature.
On peut se demander si le véritable enjeu de la littérature n’est pas, en tant que machine à générer
du faux qui soit vraisemblable, de générer à son tour sa propre temporalité. Tout un courant récent (le
Nouveau Roman) a définitivement claqué la porte au nez des Montherlant et de tous les post-réalistes
encore dépendants de cette vision de la littérature aux prises avec son époque, pour s’attacher à
rendre compte d’un temps non plus objectif et extérieur, mais intérieur. Le fond du problème est alors
moins la gestion de l’Histoire que l’apprivoisement d’un temps subjectif, chez les Sarraute, Butor,
Robbe-Grillet, Duras. Avec cette dernière, le temps, l’histoire, la vie intérieure du personnage et le
rythme du récit ne forment d’ailleurs plus qu’une seule entité complexe. Qui peut dire, par exemple,
dans Hiroshima mon amour si l’époque ponctuelle (l’après-guerre) est plus ou bien moins importante
que le temps (cycliquement traumatique) de l’héroïne ? Dès le titre (Hiroshima/mon amour) où
l’oxymore formé par les deux termes s’apaise instantanément par la mise en apposition des termes
entre eux, ces deux partenaires de jeu se trouvent liés, jusqu’à la fin et surtout, accolés d’égal à égal.
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