Extrait du chapitre 11 de « Comment le chat de mon ex est devenu

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Extrait du chapitre 11 de « Comment le chat de mon ex est devenu
Extrait du chapitre 11 de « Comment le chat de mon ex est devenu mon ex-chat » :
"Le claquement net et sans écho de la chatière ramène soudain Benoit D à la réalité et sonne
le début de l’opération. Sans plus attendre, Benoit D enfile sa veste, ouvre la porte, sort, et la
referme derrière lui, en essayant d’être le plus discret possible. Dans la cuisine à présent
plongée dans la pénombre, le micro-ondes affiche : « 23 : 49 ».
Longeant le trottoir avec un certain flegme, la bête est en vue, à une dizaine de mètres devant
Benoit D, qui la suit en respectant, par pure intuition, cette distance de sécurité. « Pourvu qu’il
ne me remarque pas, pense-t-il. J’aurais l’air malin, moi. Qu’est-ce que je lui dirais ? Que je
suis là par hasard ? Mais enfin ! Qu’est-ce qu’il me prend ? Je n’ai quand même aucun
compte à rendre à cette sale bique ! Je le suis si cela me plait et puis c’est tout ! Et d’ailleurs,
ce serait bien plutôt à moi de lui demander ce qu’il fait là, en pleine nuit, non ? C’est lui qui
vit chez moi et pas l’inverse ! »
L’animal se dirige droit vers l’arrêt de tram et l’excitation de Benoit D monte d’un cran. Ses
sens s’aiguisent dans les derniers mètres, mais ce n’était qu’une fausse alerte, car voilà que le
chat poursuit sa route. Au passage, Benoit D en profite pour vérifier le tableau horaire fixé sur
le poteau : « Le prochain tram passe donc à vingt-trois heures cinquante-huit et le dernier à
minuit vingt-huit. Mais pourquoi ne l’attend-il donc pas ici, tout simplement ? Je ne
comprends pas. Est-ce parce qu’il est conscient de ma présence et qu’il a décidé de me faire
tourner en bourrique ? Ou préfère-t-il monter à un autre arrêt ? Ou prendre un autre numéro ?
Il doit avoir ses habitudes et cela doit dépendre de sa destination finale… En tout cas, cette
bête semble connaitre le réseau mieux que moi… »
Et c’est maintenant vers une rue perpendiculaire qui mène directement au parc voisin que la
bête se dirige. Il fait très sombre dans ce quartier résidentiel et Benoit D n’a d’autre choix que
de poser ses lunettes de soleil au bout de son nez afin de pouvoir regarder par-dessus.
Au fond de la rue, le chat pénètre dans le parc en traversant un buisson épineux. Par chance, le
portique d’entrée est juste quelques mètres sur le côté et Benoit D l’enjambe sans devoir
ramper. « Cette sécurité ne pourrait empêcher que les mamies, qui seraient de toute façon les
dernières à s’aventurer dans un parc pendant la nuit… Mais… Où est-il passé ? Merde, on n’y
voit rien ici. Pourquoi ne l’ai-je pas recouvert d’une petite veste pour chien fluorescente ?
Mais peut-être que ce dispositif lui aurait mis la puce à l’oreille et aurait influencé son
comportement ? En même temps, je lui ai déjà accroché une caméra sur la tête et ça n’a pas eu
l’air de trop le déranger… »
Dans une pénombre presque totale, tandis que Benoit D tourne sur lui-même, à la recherche
d’une quelconque ombre féline, il a soudain l’impression de l’apercevoir partir par l’un des
sentiers qui mènent vers l’intérieur de l’enceinte. Faute de mieux, il se lance à la poursuite de
cette tache mouvante qui est ce qui ressemble le plus à un chat dans cet univers hostile. Le
sentier traverse d’abord une plaine et, plus haut, longe une petite aire de jeux qui, dans le noir
et sans enfant, parait bien lugubre avec ses chaines de balançoires qui grincent. Une drôle de
sensation s’empare soudain de Benoit D. Comme s’il n’était pas à sa place. Comme s’il était
emprisonné dans le corps d’un autre. Comme si tout ceci n’était pas vrai. Comme si.
Après quelques minutes d’errance, dans un noir presque absolu, un hurlement strident
transperce le silence relatif de la nuit. D’instinct, Benoit D court vers l’origine supposée du
cri. Au bout du sentier, il tombe sur une plaine légèrement vallonnée au milieu de laquelle
deux petites ombres noires s’agitent. Il s’approche, sur la pointe des pieds. Et là, sous la
lumière réfléchissante d’une lune à moitié pleine, ses yeux voient ce qu’ils auraient préféré ne
jamais voir : son chat appuyé sur l’arrière-train d’un autre animal de la même espèce mais du
sexe opposé. En attendant que cette scène de copulation improvisée soit finalisée, Benoit D se
cache derrière un buisson."

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