Exemple de lettre aux parents au sujet des rythmes scolaires
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Exemple de lettre aux parents au sujet des rythmes scolaires
Exemple de lettre aux parents au sujet des rythmes scolaires Depuis quelque temps, le gouvernement ainsi que certains médias essayent de faire passer les personnes opposées à ce décret pour des égoïstes, des conservateurs et des corporatistes. Personnellement, je ne me reconnais aucunement dans ces critiques. Si je suis opposé au projet proposé par M.Peillon, c’est parce que j’estime qu’il n’est pas à la hauteur des enjeux affichés. Au contraire, je pense qu’il alourdit la semaine des enfants sans alléger leur journée, qu’il il n’améliore en rien leurs conditions d’apprentissages, qu’il ne garantit pas d'activités sportives et culturelles dans toutes les écoles et qu’il accroît les inégalités sur le territoire. I - Petit décryptage du décret Ambition n° 1 du décret : « Alléger la journée de l’enfant » La journée de classe sera allégée de 45 minutes mais ce temps sera transformé en temps périscolaire. Les enfants passeront donc autant de temps à l’école, leur journée ne sera en rien allégée. Quant à la semaine, elle sera allongée avec l’ajout du mercredi matin ou (si les mairies demandent pour cela une dérogation) du samedi matin. Enfin, le temps hebdomadaire de classe reste de 24 heures. Vingt-quatre heures donc pour faire le même programme basé sur 26h et avec des effectifs toujours aussi chargés (de plus en plus de classes avoisinent les 30 élèves). Les conditions d’accueil et d’apprentissages ne sont en rien améliorées. Ambition n° 2 du décret : « Permettre une meilleure articulation des temps scolaire et périscolaire s’accompagnant d’une prise en charge des élèves jusqu’à 16h30 au moins » Ambition 3 du décret : « Les élèves pourront accéder à des activités sportives, culturelles, artistiques qui contribueront à développer leur curiosité intellectuelle et à renforcer le plaisir d’apprendre et d’être à l’école » Les communes auront donc en charge en moyenne 45 minutes de temps périscolaire par jour. Elles pourront le placer après la classe de 15h45 à 16h30 et proposer des activités dites « éducatives, culturelles et sportives ». Mais, même si ce ne sera pas le cas à Villeneuve d’Ascq, beaucoup de communes sont tentées de placer ce temps dans le cadre de la pause méridienne. Or, cette pause du midi est rarement un temps permettant aux élèves de se détendre afin de revenir en classe disponibles pour de nouveaux apprentissages. Au contraire elle est un temps pendant lequel les enfants sont dehors ou confinés dans des salles bruyantes : ils s’énervent, s’agitent, se fatiguent, font preuve d’incivilités. D’autre part, le gouvernement prépare un décret abaissant le taux d’encadrement des enfants pour les activités périscolaires dans le cadre des Projets Éducatif Territoriaux (PEDT). Pour les moins de 6 ans, on passera d’1 adulte pour 10 à 1 adulte pour 14 et, pour les plus de 6 ans, on passera d’1 adulte pour 14 à 1 adulte pour 18. Moins d’adultes pour encadrer les enfants, c’est moins d’activités, moins de disponibilités, une surveillance moins pointue et des soucis et incivilités en hausse. Par ailleurs, si l’on décompte les temps nécessaires au démarrage et de conclusion de ces activités et, d’autre part, si l’on prend en compte le manque de formation des vacataires qui seront recrutés par la mairie pour les encadrer et les animer, on peut avoir des doutes sur leur mise en œuvre pratique et leur pertinence éducative. Enfin, quid des élèves fréquentant des écoles rurales avec peu de moyens et difficiles d’accès qui ne trouveront pas de personnel qualifié d’encadrement ? Ce décret renforce les inégalités sur le territoire ainsi que les inégalités sociales. II - Pour en savoir plus 1) Vidéos de la conférence de Claire Leconte, psychologue de l’éducation et chercheuse en chronobiologie (rythmes biologiques, emplois du temps école/hors école, critiques de la réforme actuelle, obligation de réfléchir avec tous les acteurs, ouverture de l’école, responsabilité des élus) : http://www.dailymotion.com/playlist/x2hu54_ADEPPR74_adep-claire-leconte-reforme-des-tempsscolaires/1#video=xxnz48 2) Lettre ouverte de Claire Leconte au Ministre de l’Éducation nationale : http://claire-leconte.e-monsite.com/pages/lettre-ouverte-a-vincent-peillon/lettre-ouverte-au-ministrede-l-education-nationale.html 3) Étude sur l’attention des élèves : Si les analyses et propositions de Claire Leconte sont très intéressantes, elles ne font pas l’unanimité chez les psychologues de l’éducation et les chronobiologistes. En effet, en matière de rythmes scolaires, les études menées aboutissent parfois à des constats très contradictoires. Citons par exemple l’enquête sur l’attention des élèves réalisée en mars 1994 à Paris par « L’école pour demain » (collectif regroupant l’académie de Paris, la mairie de Paris, la CPAM de Paris, l’UNESCO, etc.) sous la direction du docteur Didier Lagarde (Centre d’Etudes et de Recherches en Médecine Aérospatiale) et Denis Batejat (psychologue au CERMA) avec la collaboration des docteurs Michel Binder (pédiatre à la Clinique du sport) et André Bouvet (neuro-psychiatre à Annecy). Extraits de cette étude : Le samedi matin n’est pas la demi-journée où les enfants sont le plus attentifs / L’attention des élèves est statistiquement supérieure la semaine suivant une semaine de 4 jours / La coupure du weekend entier (48 heures) est davantage bénéfique pour l’attention des élèves qu’une coupure d’un jour et demi (36 heures) / Les coupures du mercredi et du weekend ont un effet bénéfique sur l’attention. Pour télécharger l’étude au format pdf : http://www.questionsdeclasses.org/IMG/pdf/etude-sur-l-attention-des-eleves-paris-mars-1994.pdf III - Conclusion À l’aune du décryptage et des contributions présentées ci-dessus, on s’aperçoit que la question des rythmes scolaires est un sujet particulièrement complexe. Pour ma part, je ne suis pas opposé à toute réforme dans ce domaine. Mais je pense que la mise en place d’une telle réforme nécessite un temps de réflexion supplémentaire et l’organisation d’un véritable débat démocratique, cela afin que soit pris réellement en compte l’intérêt des élèves.