Consulter l`intégralité du discours de Jacques Chanut
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Paris, le 18 septembre 2015 Conférence de presse Intervention de Jacques CHANUT, Président de la FFB Mesdames, Messieurs, La seule question qui vaut en cette rentrée s’énonce ainsi : le Bâtiment est-il sorti de crise ? Pour mieux comprendre la réponse qui peut paraître complexe, l’image du conducteur automobile paraît la mieux adaptée. De fait, le chef d’entreprise doit contrôler ses rétroviseurs tout en maintenant son attention sur la route devant lui. Dans ses rétroviseurs, il constate que le bâtiment connaît une crise plus profonde et plus durable que les précédentes. Amorcée il y a huit ans, elle n’a pas encore atteint son terme. En effet, du côté du logement neuf, le bilan des sept premiers mois de 2015, rapportés aux mêmes mois de 2014, affiche des reculs de 7,9 % pour les autorisations et 5,8 % pour les mises en chantier. Si la tendance se confirme, l’année en cours se soldera par 334 000 logements commencés contre 355 000 en 2014. Du côté du non-résidentiel neuf, l’orientation ressort moins bonne encore avec -11,8 % et -11,7 % pour les surfaces de plancher autorisées et commencées, hors hôtellerie et locaux agricoles. On peut même qualifier de chute vertigineuse les évolutions relevées pour les bâtiments administratifs, dont les permis et ouvertures de chantier baissent respectivement de 16,7 % et 22,1 %. Les locaux commerciaux suivent de près, avec -8,8 % et -23,2 %. Quant au marché de l’amélioration-entretien, les évolutions demeurent clairement baissières. Avec un tel freinage, les entreprises n’ont pu que rétrograder. De fait, en termes d’emploi, le premier semestre affiche le plus mauvais score enregistré depuis l’entrée dans la Grande récession de 2008 : avec l’intérim en équivalents temps plein, 44 600 postes de travail ont été perdus entre les premiers semestres 2014 et 2015, soit -3,8 %. Quant aux défaillances d’entreprises du bâtiment, malgré une nette baisse au deuxième trimestre, elles progressent encore de 2,4 % en glissement annuel sur l’ensemble du premier semestre 2015. FEDERATION FRANCAISE DU BATIMENT 33 avenue Kléber 75784 PARIS Cedex 16 Téléphone : 01 40 69 51 00 – Télécopie : 01 45 53 58 77 1/3 Mais le chef d’entreprise doit regarder avec autant d’attention la route qui s’ouvre devant lui. Et plusieurs indicateurs lui signalent une possible, voire probable, accélération à venir. Du côté du logement neuf, il faut citer le dynamisme du crédit immobilier, mais aussi des ventes des constructeurs de maisons individuelles (CMIstes) ou des promoteurs, qui progressent de l’ordre de 20 % en glissement annuel sur le premier semestre. Du côté du non-résidentiel neuf, la vigueur du crédit à l’investissement, mais aussi la progressive amélioration des mises en chantier de locaux industriels et assimilés s’avèrent de bon augure. Il n’en va malheureusement pas de même pour l’amélioration-entretien en général et pour la rénovation énergétique en particulier, segments sur lesquels on ne distingue pas de véritable mouvement, malgré la proximité de la Conférence sur le climat qui se tient à Paris à la fin de l’année (COP21). Ce qui permet de réconcilier ces deux visions, passée et immédiate, ce sont les délais de construction. Même dans la maison individuelle en diffus, entre une vente et la mise en chantier correspondante, il faut compter environ deux-cents jours selon la société de caution CGI Bat. Le délai est évidemment beaucoup plus long encore en collectif ou en non-résidentiel. En d’autres termes, les marchés du logement neuf devraient tout juste commencer à enregistrer les effets de la reprise des ventes et ces effets se renforceraient durant l’hiver 20152016. Ceci impose aux chefs d’entreprise un grand écart entre, d’une part, son tableau de bord actuel, qui décrit une érosion de sa trésorerie, un allongement des délais de paiement client, un écrasement des marges et, d’autre part, l’anticipation de la reprise avec les besoins de trésorerie qu’elle va générer. Comme l’a répété à de nombreuses reprises déjà la FFB, cela suppose d’anticiper car nous savons que la période de reprise est souvent mortifère. Pour y pallier, il faudra aussi une mobilisation générale de toute la filière : les fournisseurs et les négociants, bien sûr ; mais aussi les banques et les assureurs-crédit. Ce constat général appelle bien évidemment des nuances selon les métiers, les tailles d’entreprises ou les territoires. À cet égard, il convient de souligner le cas particulier des zones rurales et des espaces faiblement urbanisés. Dans cette large fraction du territoire qui regroupe plus de la moitié de nos concitoyens, la commande privée, structurellement faible, souffre particulièrement de la période de crise qui s’est ouverte en 2008. Et l’on ne décèle guère de signes encourageants en ce domaine. De plus, à la différence du passé, la commande publique a fortement reculé depuis 2014, donc au plus mauvais moment. Plusieurs raisons expliquent cela. Certaines sont conjoncturelles, telles les élections locales de 2014-2015, les atermoiements autour de la révision des compétences dans le cadre de la loi NOTRe ou le report d’un an et demi des Contrats de plan État-Régions. D’autres sont plus durables, comme la perte d’une ingénierie publique interne ou partagée (ex DDE), la transformation de la taxe professionnelle en contribution économique territoriale plus cyclique ou la baisse en cours des dotations de l’Etat. Il n’en reste pas moins que ces territoires, faute de redressement de l’investissement public, risquent de subir à brève échéance une saignée à blanc de l’appareil de production du bâtiment. Aussi, la FFB souhaite qu’une attention toute particulière soit apportée aux territoires ruraux ou faiblement urbanisés à l’occasion des débats en Loi de finances pour 2016 sur les dispositifs qui viennent d’être annoncés par le gouvernement .Elle salue d’ailleurs l’extension aux petits bourgs du PTZ+ avec travaux dans l’ancien, ainsi que l’élargissement annoncé du champ des dépenses éligibles au FCTVA (Fonds de compensation pour la TVA) aux travaux d’amélioration-entretien des équipements publics. En complément, la FFB réitère son souhait d’un soutien renforcé à la primo-accession via le PTZ+, comme le demande l’ensemble des acteurs de la filière. Mais il doit s’agir d’une mesure simple et à portée immédiate, afin de ne pas casser la dynamique en cours. 2/3 Il ne faudrait pas toutefois que, dans le même temps, on charge trop la barque. Or le projet de loi relatif à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine rouvre la boîte de Pandore de la généralisation de l’intervention de l’architecte, y compris en deçà de 170 m² et pour la réalisation des lotissements. Depuis plus de 10 ans, les professions unanimes soulignent les surcoûts associés à de telles mesures, en particulier pour les opérations d’accession en individuel par les ménages les plus modestes. Enfin, dans le but de dynamiser le marché de la rénovation énergétique qui en a bien besoin, la FFB souhaite, à titre d’opération « coup de poing », une extension du crédit d’impôt pour la transition énergétique (CITE) aux résidences secondaires pour un an. Cette mesure, facile à mettre en œuvre et d’un coût limité, serait d’effet rapide. Dans le même temps, il importe que l’objectif parfaitement justifié de la transition énergétique ne débouche pas sur des obligations insupportables pour les acteurs de l’immobilier, au risque d’éteindre une demande déjà atone. Il faut être clair : l’appareil de production est prêt, il s’est adapté et continuera de le faire. Le chaînon manquant se situe bien côté demande. À ce titre, l’annonce mercredi par le ministre des Finances du report en 2016 de trois mois des allègements de cotisations pour les entreprises est une catastrophe pour tous les industriels qui pensaient lancer des investissements. On reste coi devant de telles annonces dont les conséquences n’ont pu être pesées avec tout le sérieux nécessaire. Pour conclure, un point rapide sur la COP21. Bien évidemment la FFB répondra présent. Ce sera l’occasion pour nous de faire passer nos messages liés à l’environnement car le bâtiment sera au cœur des discussions : les logements, usines, bureaux, écoles, etc. représentant plus de 40% des consommations d’énergie et plus de 20% des émissions de gaz à effets de serre. Nous ne pouvons donc pas être absents de ces débats. D’ailleurs nous attendons avec impatience la confirmation de la journée dédiée au Bâtiment, annoncée cet été par le gouvernement. Je vous remercie de votre attention. 3/3