La Société européenne de cardiologie s`attaque aux

La Soci€t€ europ€enne de cardiologie s'attaque aux lacunes de la
prise en charge des femmes ayant des maladies cardiovasculaires
STOCKHOLM, 5 septembre (APM) - Les femmes souffrant de maladies cardiovasculaires
sont insuffisamment diagnostiqu€es et insuffisamment trait€es, alors que leur risque de
d€c•s est parfois plus important que celui des hommes, montrent de nombreux travaux
pr€sent€s au cours du congr•s de la Soci€t€ europ€enne de cardiologie (ESC) ‚ Stockholm.
Si ce congr•s qui rassemble environ 18.000 participants traite de tous les domaines de la
cardiologie, la sant€ cardiovasculaire des femmes constitue le th•me principalement mis en
avant cette ann€e par l'ESC, sous l'appellation "Women at Heart", grƒce ‚ une s€rie d'€tudes
montrant les insuffisances de la prise en charge des femmes cardiaques. Notamment, 8
sessions sont sp€cifiquement d€di€es aux femmes et aux diff€rences entre les maladies
cardiovasculaires selon le sexe.
La question de la prise en charge cardiovasculaire des femmes n'est pas totalement
nouvelle. R€guli•rement des €tudes sont pr€sent€es sur le sujet, mais jusqu'‚ pr€sent elles
€taient surtout nord-am€ricaines. L'analyse des donn€es des €tudes conduites par l'ESC, les
Euro Heart Surveys, permet de constater qu'il y a €galement beaucoup ‚ faire en Europe.
Ces lacunes dans la prise en charge cardiovasculaire des femmes ont probablement une
origine dans l'id€e re„ue d'une protection des femmes au niveau cardiaque. Ainsi, une
enqu…te qui vient d'…tre r€alis€e en Su•de montre que 80% de la population interrog€e sur
ce qui tue le plus les femmes r€pond le cancer, alors que si l'on compte ensemble les
maladies cardio- et c€r€brovasculaires, elles sont responsables de 10 fois plus de d€c•s que
les cancers du sein et 2 fois plus que l'ensemble des cancers.
"C'est une illusion de croire que les femmes sont prot€g€es au niveau cardiovasculaire", a
affirm€ lors d'une conf€rence de presse le Pr Ian Graham de l'h†pital Adelaide & Meath ‚
Dublin. "Elles ont seulement un d€lai, d'environ 10 ans, dans l'apparition des maladies". Le
risque d'une femme de 65 ans est €quivalent ‚ celui d'un homme de 55 ans.
DES MALADIES PLUS TARDIVES, MAIS PLUS MORTELLES
Mais ensuite, une fois qu'elles sont l‚, les maladies cardiovasculaires sont
proportionnellement plus mortelles chez les femmes. Ainsi, la mortalit€ un an apr•s un
infarctus est de 42% chez les femmes contre 24% chez les hommes.
Or, la Euro Heart Survey sur l'angor stable montre par exemple que les femmes angoreuses
sont moins bien prises en charge en mati•re de diagnostic : elles ont 40% moins de chances
de b€n€ficier d'une coronarographie et 20% moins de chances d'avoir une €preuve d'effort
que les hommes. Au niveau du traitement, elles ont 32% moins de chances de b€n€ficier
d'une angioplastie, et les taux de prescriptions d'anti-agr€gants plaquettaires et
d'hypolip€miants sont plus faibles chez les femmes.
C'est d'autant plus grave que durant l'ann€e de suivi des patientes enr†l€es dans l'€tude,
elles ont €t€ 13% ‚ d€c€der alors que seulement 5% des hommes d€c€daient, constate
Caroline Daly du Royal Brompton Hospital ‚ Londres.
Les r€sultats du registre international REACH, pr€sent€s ‚ Stockholm par Gabriel Steg de
l'h†pital Bichat ‚ Paris, vont dans le m…me sens. Bien qu'ayant plus de facteurs de risque
(ƒge, diab•te, hypertension, hypercholest€rol€mie, ob€sit€), les femmes souffrant de
maladie ath€rothrombotique €taient revascularis€es dans 34,9% des cas contre 42,3% des
hommes. Elles €taient €galement moins bien suivies car la proportion de femmes dont la
pression art€rielle et les lipides €taient non contr†l€s €tait plus importante.
Une €tude canadienne pr€sent€e au congr•s de l'ESC pointe un des probl•mes qui pourrait
…tre li€ ‚ ce manque de prise en charge des femmes coronariennes. Dans cette €tude sur
plus de 10.000 femmes et 22.000 hommes ayant subi une angiographie pour des douleurs
thoraciques, 23,3% des femmes pr€sentaient des coronaires normales contre 7,1% des
hommes. Mais ces femmes ‚ coronaires normales, suppos€es non coronariennes malgr€
leurs douleurs, avaient 2,7 fois plus de risque d'…tre r€hospitalis€es pour angor ou infarctus
dans l'ann€e, que les hommes.
Il doit donc y avoir une sp€cificit€ de la maladie coronaire chez certaines femmes et celles
qui ont des douleurs thoraciques mais des coronaires normales devraient probablement
subir d'autres examens, sugg•re Karin Humphries du St Paul's Hospital ‚ Vancouver.
La Euro Heart Survey montre €galement que les caract€ristiques des femmes coronariennes
ne sont pas forc€ment les m…mes que celles des hommes. En particulier, elles sont plus
souvent diab€tiques, m…me jeunes, et le diab•te majore leur risque de d€c•s de fa„on plus
importante qu'il ne le majore chez les hommes, montre Silvia Giuliana Priori de la Fondation
Salvatore Maugeri ‚ Pavie en Italie, responsable ‚ l'ESC du programme "Women at heart".
On trouve des diff€rences dans les autres pathologies. Par exemple, dans l'insuffisance
cardiaque, les femmes sont plus souvent hypertendues et ont plus souvent une insuffisance
cardiaque diastolique, alors que les hommes ont principalement une insuffisance cardiaque
d'origine isch€mique. Elles sont aussi plus diab€tiques et plus an€mi€es.
Elles peuvent aussi r€pondre diff€remment aux traitements, comme le montre une m€taanalyse des €tudes de traitement par les anti-agr€gants plaquettaires anti-Gp IIb/IIIa : alors
qu'il y a une r€duction des d€c•s et infarctus chez les hommes, chez les femmes au
contraire ces m€dicaments augmentent le risque.
Mais pour identifier ces diff€rences, il faut que plus de femmes soient incluses dans les
€tudes cliniques. Or, comme l'a rappel€ Mattie Lenzen de l'Erasmus Medical Center ‚
Rotterdam, elles sont bien trop peu nombreuses : entre 20 et 35% des patients dans les
€tudes sur l'insuffisance cardiaque et seulement autour de 20% des patients dans les €tudes
de revascularisation.
Pour tenter d'am€liorer la situation, l'ESC, qui a re„u un financement de la fondation BristolMyers Squibb, a €tabli un programme de sensibilisation des cardiologues, qui passe
notamment par l'analyse des Euro Heart Surveys et l'accent mis sur ce th•me au congr•s
mais aussi par des messages ‚ destination de la communaut€ m€dicale, via les soci€t€s
savantes de chaque pays.