Le chevalier Régis
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Le chevalier Régis
La légende du chevalier Régis Jadis il y avait un preux chevalier nommé Régis. Il était l'un des plus fidèles chevaliers du roi, parce que c'était un des amis d'enfance. Régis était courageux, pieux et loyal mais il n'avait pas une très haute estime de lui même et manquait donc parfois de confiance en lui, ce qui lui valut beaucoup de mésaventures avec son destrier Blaze, qui était très têtu, caractère commun avec son maître. Le chevalier rencontra son compagnon lorsqu'il n'était qu'un jeune poulain, et ne l'avait plus quitté depuis, bien que le cheval obéissait rarement à Régis. Blaze était un cheval à la robe marron qui possédait une belle crinière soyeuse. On voyait à son allure que c'était un animal fier, portant dignement le blason de son maître : un fond azur décoré de fleurs de lys. Ce symbole était présent sur l'armure métallique du chevalier. Régis se lassait de sa routine habituelle au château. Il profita du fait que le seigneur se repose pour partir dans la forêt, en quête de divertissement. Sur son beau destrier, il chevauchait au galop, se perdant dans les verdures de la forêt abritée par d'étranges créatures. Le chevalier aperçut une chaumière et s'y avança. Plusieurs rondins de bois étaient disposés devant la chaumière, et Régis vit une créature d'une telle laideur qu'il en tomba à même le sol, se provoquant les foudres de Blaze. Il examina attentivement la créature qui était en train de sculpter un morceau de bois de ses mains aussi grosses qu'un heaume. Le drôle de personnage sifflotait un air d'une voix aussi aiguë que celle d'un rossignol, qui contrastait avec sa carrure aussi massive que celle d'un ours. Il était si velu qu'on ne pouvait distinguer les poils de son corps et de ses cheveux crépus emmêlés qui dissimulaient ses yeux. On apercevait des dents aussi noires que du charbon, et des plus longues qu'on ne puisse imaginer, dépassant largement celles d'un castor ou d'un lapin. La créature était habillée de haillons encore plus laids que ceux des esclaves du château, et elle dégageait une odeur des plus nauséabondes qu'il ne puisse exister. Les lèvres, si c'en était, étaient aussi sèches qu'un désert et se rapprochaient de la couleur blanche. On pouvait apercevoir quelques éclats verts près de l'endroit où devraient se situer les yeux. Peut-être que ces éclats étaient la seule chose qui n'était pas immonde chez cette personne si horrible d'apparence. Soudainement, la chose se leva du rondin où il était assis et des gros morceaux de terres s’échappaient de ses haillons. La créature était encore plus imposante quand elle était debout. De ses grosses mains, le monstre enleva les mèches qui dissimulaient ses yeux et laissa Régis découvrir deux cavités extrêmement creuses, où trônaient deux orbites avec des yeux de couleur émeraude. D'une voix aiguë, l'être monstrueux s'adressa à Régis : " Bonjour chevalier, n'aie pas peur de moi, je suis horrible d'apparence, mais sache que l'extérieur ne reflète pas l'intérieur des gens. - Bonjour, euh... je ne sais pas ce que tu es, mais passons. Alors, peux-tu me guider? demanda le chevalier. - Bien sûr! répondit la créature, que cherches-tu exactement? - Je cherche aventure, gloire, renommée! Mais cette forêt si vaste m'empêche d'atteindre mon but! Aide-moi! implore Régis. - Je vais t'aider, chevalier. On dit que, commença le monstre, il y a dans cette forêt un sentier qui mène à une grotte, où on aperçoit des choses extraordinaires, qui peuvent entraîner le bonheur... comme le malheur. - Et où est donc ce sentier? s'exclame d'une voix enjouée Régis. - En continuant tout droit, expliqua la bête, tu vas apercevoir un arbre marqué d'un symbole gravé. Une fois que tu auras atteint cet arbre, trois chemins s'ouvriront à toi, un te semblera court et agréable, un autre calme, et le dernier périlleux et complexe. C'est le dernier que tu devras suivre. Longtemps tu marcheras, mais tu finiras par trouver l'entrée de cette grotte. - Merci beaucoup, je te salue. - Adieu, chevalier. " La créature retourna à ses occupations tandis que Régis monta sur son destrier. Il partit au grand galop, excité par ce nouveau divertissement que lui apportera cette grotte. Comme le lui a indiqué la créature, en continuant tout droit, il distingue parmi les grands arbres un vieux chêne, marqué d'un triangle gravé sur son tronc. Régis s'approche prudemment, et frôla à peine le triangle que le sol se mit à trembler, puis apparurent trois chemins, un lisse et propre, un autre se confondant avec la forêt, et un dernier à l'allure sombre et sinistre, qui dégageait une atmosphère malveillante. Ce fut sans hésitations que Régis s'élança au grand galop vers le troisième chemin, sans ressentir la moindre appréhension. De nombreux bruits inquiétant surgissaient régulièrement sur le sentier, et il était laborieux d'y marcher, encore plus pour un cheval. Le sentier semblait ne pas avoir de fin, et s'y avancer devenait de plus en plus pénible. Mais pas une fois la volonté du chevalier ne vacilla et sa patience fut récompensée : il aperçut enfin l'entrée de la grotte. Alors qu'il s'apprêtait à y entrer, son destrier fit halte précipitamment et refusa de bouger. Après de vains efforts, Régis se décida à laisser Blaze à l'extérieur, et, armé de son épée, pénétra dans le lieu sombre. Une odeur très désagréable s'incrusta dans ses narines, et l'obscurité rendait les pas et la vision de Régis très incertains. En avançant à tâtons dans ce lieu si obscur, le chevalier heurta à plusieurs reprises une substance visqueuse qui recouvrait les parois bossues de la grotte. Un silence inquiétant régnait, mais le courage du chevalier ne faiblissait pas. Soudain, plusieurs flammes jaillirent à des recoins de la grotte, l'éclairant. Ce que vit Régis le surprit : un loup aussi gros qu'un ours et un chien se battaient violemment. Les deux animaux étaient de force égale et on remarquait la haine que chacun vouait à l'autre. La grotte, au début silencieuse, était maintenant envahie des hurlements des deux animaux, qui menaient un combat sans limite. Régis réfléchit , car il était hésitant, il ne savait pas qui aider. Il compara mentalement les qualités morales de chacun des deux animaux : le chien était fidèle, loyal et ami de l'homme alors que le loup voulait être maître. Le chien plus méritant fut alors aidé par Régis. Alors que le loup plantait ses crocs dans l'épaule du chien et que celui-ci poussa un cri perçant, Régis court, sort son épée et tranche le loup en deux. Surpris, l'animal hurle avant de s'effondrer au sol, des flots de sang coulant sur tout ce qui entourait la bête. Régis s'approcha du loup et s'assura que celui-ci était bien mort. Il se tourna ensuite vers le chien. Pendant un moment, les deux se fixent en silence, puis le chien s'approche du chevalier qui s'est baissé et lui lèche sa joue, signe de reconnaissance. L'homme et le chien ne se quittèrent plus. Régis sortit de la grotte, son gros chien l'accompagnant joyeusement. Un nouveau sentier avait fait son apparition. Le chevalier le suivit et marcha une petite distance avant d'arriver devant un château de pierre, assez vaste. Aucun son ne se faisait entendre, et Régis s'y avança. Il passa un long pont et pénétra à l'intérieur. Si de l'extérieur le château paraissait, c'était tout le contraire à l'intérieur. En effet, on entendait de longs hurlements stridents ainsi que des pleurs déchirants. Régis descendit de sa monture et chercha du regard la cause de ce grand vacarme. Il aperçut alors deux jeunes filles. Leur ressemblance laissait penser qu'elles étaient sœurs : elles étaient belles, possédaient une longue chevelure dorée qui malheureusement était défaite et de magnifiques yeux bleus aussi clairs que le ciel un beau jour d'été, mais ceux-ci étaient noyés de larme. Leurs vêtements étaient un peu abîmés, et les deux sœurs se lamentaient sans cesse. Le chevalier s'avança alors à leur rencontre : "Bonjour gentes demoiselles, puis-je connaître la cause de vos lamentations?" La première des deux sœurs, la plus grande de taille, s'essuya les yeux, et répondit d'une voix plein de chagrin : "Bonjour à toi chevalier. Ma sœur et moi nous lamentons d'un grand malheur. -Oui, continua l'autre, nous sommes victimes d'une grande peine... -Puis savoir laquelle? s'enquit Régis. -Il y a encore quelques jours, nous étions trois sœurs à vivre dans ce château, entourées de notre famille, propriétaire de ce lieu, et de la cour de père, commença la première. -Un jour, continua la deuxième, un sorcier est arrivé et a demandé à notre père la main de l'une d'entre nous trois. Le seigneur refusa, et le sorcier entra dans une terrible colère. Il affirma que puisque le seigneur refusait, il transformerait toute l'assemblée en petites bêtes qu'on écrase facilement, et reviendrait chaque jour prendre une d'entre nous trois pour nous réduire en esclavage. A peine eut-il prononcé ses menaces qu'elles se réalisèrent. Il a déjà emmené notre sœur, et il reviendra ce soir. " Et les deux sœurs s'effondrèrent en larmes. Le noble chevalier s'exclame alors : "Je vaincrai ce sorcier!Vous feriez ça pour nous! s'enjoue une des sœurs. - Quel homme serais-je si je refusais d'aider quelconque personne!" Les deux sœurs recouvrent espoir, bien qu'elles aient toujours un peu peur. Les trois personnages attendent alors l'arrivée du sorcier, qui se produit quelques heures plus tard. Un homme tout de noir vêtu se matérialisa soudainement dans la grande salle. Son nez est crochu, ses yeux aussi noirs que du charbon, ses cheveux sombres et possède un côté assez inquiétant. Il affiche un sourire sournois, puis parle d'une voix qui fait frissonner : « Je vois qu'un chevalier plaide la cause de ces demoiselles... Qu'il en soit ainsi ! » Régis sort son épée et fonce sur le sorcier. Il l'atteint au coude d'où un peu de sang sort. Le sorcier se métamorphose alors en un gros ours, il s'agite et lacère la cotte de maille de Régis. Celui-ci essaie alors de planter son épée dans le cœur de la bête. Il atteint presque son but, mais l'ours change d'apparence et devient un tigre. Régis le poursuit et l'attaque de son épée, le blessant à plusieurs reprises. Du sang coule abondamment. Le tigre attaque aussi le chevalier, le faisant tomber à plusieurs reprises, mais Régis ne perd pas espoir et finit par enfoncer son épée dans le cœur du tigre. L'animal, dans un dernier souffle, redevient ours, puis sorcier, et finit en cendres. Régis avait vaincu le sorcier. Aussitôt, de nombreuses personnes apparurent dans la grande salle : la malédiction lancée par le sorcier venait d'être rompue. Des acclamations de joie se firent entendre dans tout le château. Les gens allaient vers Régis, l'embrassant et le remerciant. Certains même pleuraient de joie. Le chevalier fut entraîné par une pièce à l'écart afin d'être soigné de ses blessures. Les deux sœurs le rejoignirent. La plus âgée s'adressa à lui : « Bonjour chevalier, nous venons t'annoncer que notre sœur, Lise, est de retour parmi nous. - C'est elle qui va te prodiguer les soins nécessaires à ta guérison, et elle souhaite te rencontrer. - Avec plaisir, répondit Régis. » Les deux sœurs quittent la pièce. Quelques minutes plus tard, c'est une jeune fille qui y pénètre. Le chevalier est bouleversé : c'est la plus belle personne qu'il n'ait jamais vue. Il reste ébahi devant l'innocence marquée sur le visage de la demoiselle, ses traits sont purs et parfaits, sa peau pâle, ses yeux bleu océan profonds d'où émane une lueur de reconnaissance, et de magnifiques cheveux aussi dorés que le soleil, assemblés en une coiffure complexe et magnifique. La demoiselle s'avance de pas aussi gracieux que ceux d'une biche, et s'adresse à Régis d'une voix qui résonne à ses oreilles comme un carillon : « Enchantée de vous connaître, chevalier Régis. - Tout le plaisir est partagé, surtout avec une demoiselle aussi belle que vous. -Vous me flattez... Je tenais à vous remercier de m'avoir sauvée des griffes de ce sorcier. - Il n'y a aucun problème, c'est moi qui vous remercie de m'accorder l'honneur de votre présence à mes côtés... - Qu'insinuez vous donc, mon cher ? - J'entends par là que vous êtes la plus belle créature qu'il ne puisse exister sur terre. Quand je vous vois, j'ai l'impression d'entendre le chant des anges. - Vraiment ? - Tout à fait, de nouvelles sensations agrémentent mon être, jamais encore je ne me suis senti autant capable de chérir une personne... Mais pour vous, je suis prêt à tout, même à me donner la mort. - Vous m'étonnez... - Pourtant je n'affirme que la vérité. Mon cœur vous appartient désormais. - Je ne sais trop quoi dire... Vos paroles me vont droit au cœur mais de nos jours, la sincérité est si rare que je ne suis point capable de distinguer le vrai du faux... - Comment puis-je vous prouver la sincérité de mes mots ? - Et bien, je pense que si vous êtes capable de m'apporter l'écaille du dragon qui sommeille au dessus de la montagne, je serais satisfaite. On dit qu'une écaille de couleur rose se distingue parmi les autres, et que si un chevalier assez brave parvient à la prendre et à l'offrir à sa demoiselle, l'écaille deviendra rouge, signe d'amour véritable. - Qu'à cela ne tienne! Je vais vous rapporter cette écaille sur le champ, et vous aurez conscience de tout l'amour que je vous porte est le plus puissant qu'il existe sur cette terre ! » Lise termina donc de soigner le chevalier impatient. Il la contemple sans se lasser, puis dès qu'elle termine, se lève précipitamment. Le chevalier alla à toute vitesse rejoindre son destrier Blaze, son chien le suivant, partageant l'excitation de son maître. Régis partit au galop vers la montagne, ne se souciant guère des exclamations des habitants du château. Le sentier menant à la montagne ne fut pas trop long, aussi le chevalier fut au pied de la montagne en moins d'une demi-heure. Si le sentier était facile à parcourir, la montagne, elle, était beaucoup plus dangereuse. Régis eut conscience qu'il ne pourrait pas monter avec son destrier, alors il descendit de sa monture. Il observa les alentours, et remarqua un creux dans la montagne d'où s'échappait de la fumée et où on entendait de lourds ronflements: c'était sûrement là que sommeillait le dragon. Le chevalier escalada donc la montagne, manquant de tomber à plusieurs reprises. Pourtant, il ne céda pas, et finit par arriver à l'endroit où dormait le dragon, suivi par son chien qui par on ne sait quel miracle avait réussi à grimper. L'endroit était une sorte de grotte, mais sans plafond, un fossé. Un immense dragon y était allongé et on devinait qu'il était assoupi à cause des longs ronflements sonores qu'il émettait. De la fumée sortait de ses grosses narines. Régis l'observa attentivement: il avait deux grandes ailes repliées, et des écailles aussi vertes que la mousse des arbres. Au-dessus des yeux clos du monstre, on apercevait l'écaille rose pâle dont parlait la demoiselle Lise. L'objet convoité était un peu détaché : Régis l'aperçut et avança vers la tête du monstre. Celui-ci s'agita dans son sommeil. Le chevalier se tourna vers son chien et lui indiqua par des signes d'être totalement silencieux et de ne pas bouger. Il avança une fois de plus vers le dragon, en s'efforçant de suivre la première indication qu'il ait donné à son chien : ne pas faire de bruit. Il se trouvait tout près de l'écaille et s'apprêtait à la saisir, quand le dragon se réveilla soudainement, ayant senti la présence de Régis. Il rugit et lança d'impressionnantes flammes. Le chevalier les esquiva, de justesse. Le dragon battit des ailes et s'envola pour foncer sur celui qui l'avait tiré de son sommeil. Régis se retrouva sous le dragon et faillit être écrasé. Il tenta de se débattre mais en vain. Soudain on entend des aboiements. Le chien attire l'attention du monstre. Le chevalier en profite : il sort son épée et l'enfonce dans le ventre du dragon. Il s'échappe en roulant tandis que la bête tombe sur le sol, en lançant une dernière flamme. Régis s'empare de l'écaille et descend très rapidement de la montagne pour rejoindre sa belle, toujours suivi par son chien. Il monte sur son cheval aussi vite qu'il est descendu de la montagne, et galope à une vitesse incroyable jusqu'au château. Il arrive encore plus rapidement qu'à l'aller et rejoint sa demoiselle. Il lui prend les mains et lui dit : " Ma douce, ma bien-aimée, je viens vous prouver l'amour que je vous porte. Observez attentivement. " Il retire doucement la main de la demoiselle, puis il tend sa main et l'ouvre, laissant apercevoir l'écaille. La demoiselle est très étonnée et regarde Régis avec tendresse et bienveillance. Le chevalier lui sourit et lui tend l'écaille. Celle-ci devient écarlate. La demoiselle déclare alors : " Chevalier Régis, tous mes doutes se sont estompés au sujet de votre amour. Vous avez triomphé de mon épreuve, c'est pourquoi je vous accorde toute mon affection. -Ma chère amie, vous venez de faire le plus heureux des hommes. Je promets de ne jamais vous peiner, et d'accomplir le moindre de vos désirs. " Les deux amants se regardent souriants, avec amour. Régis pose délicatement ses lèvres sur la main de sa demoiselle. Régis demanda plus tard la main de Lise à son père. Celui-ci accepta immédiatement. Les deux amants se marièrent alors. Le chevalier emmena sa belle la cour de son roi, à qui il raconta toute son histoire. Ainsi il vécut dans la joie et le bonheur, acquérant amour, gloire et une grande renommée. FIN Inès GHIAT 5D