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Partie I
Vous avez dit « adultes » ?
Why ?
1
Les « Y »
et la double contrainte
« réussis et épanouis-toi »
Qui sont les parents des générations X et Y ? Le Big Bang a-t-il
réellement eu lieu en 1968 ? Un peu d’histoire s’impose.
À l’époque de nos grands-parents, et jusqu’à la fin des années 50, pour
être considéré comme quelqu’un qui avait réussi, c’était simple. Il suffisait
d’être un des « notables » de son village, donc de bénéficier d’un certain
confort bourgeois, de participer à la vie de sa commune, par exemple en
tant que maire, industriel financeur d’équipements municipaux, bénévole
d’une association « de bon ton »… de faire acte de présence à l’église (ou
aux tournois de pétanque) et, de temps à autre, d’organiser de généreuses
réceptions (bien arrosées) chez soi. Il n’y avait qu’à suivre le mode d’emploi
appliqué depuis des siècles. Mais les « soixante-huitards », ces enfants
terribles, ont tout bousculé.
Renversant les massives horloges comtoises qui avaient jusque-là rythmé
la vie de l’humanité, les soixante-huitards ont introduit le concept du fun, du
plaisir systématique, du développement personnel. Désormais, pour réussir,
il ne faudrait plus seulement que « ça se voie », il faudrait « s’éclater », en
profiter, en parler sur son blog, en stakhanoviste du plaisir.
Génération Y : Droit de réponse
On ne pourrait plus jamais fumer tranquillement sa pipe ou tricoter au coin
du feu : il faudrait être professionnellement, familialement et sexuellement
« épanoui ». Les slogans « Tout, tout de suite » et « Jouis sans entraves », en
apparence inoffensifs, avaient définitivement troublé la paix des chaumières.
L’essayiste Pascal Bruckner le résume avec brio dans L’euphorie perpétuelle.
Shootés au dogme du bonheur, éternels insatisfaits oscillant entre l’euphorie
et l’angoisse, « nous sommes la première société dans l’histoire à rendre les
gens malheureux de ne pas être heureux ». Il faudrait avant tout, coûte que
coûte, que « la fête continue ». Prenons quelques cas concrets :
►►
Vous n’êtes pas partis en vacances (par manque d’argent) : faites-vous
bronzer (à cinq euros la séance).
►►
Vous n’avez pas de travail : fabriquez-vous en un (auto-entrepreneur,
consultant, inventeur…).
►►
Vous êtes retraité (donc sans emploi) : soyez débordé et injoignable.
►►
Vous avez subi une baisse de forme dernièrement : surtout, taisez-vous.
Si cela se sait, vous serez rétrogradé, vous risquez même la mort sociale
si vous êtes étiqueté senior. Boostez-vous à la vitamine C.
►►
Vous avez dû vous arrêter plusieurs mois ou années (pour cause de
maladie, dépression, séjour en prison, tour du monde…) : cela vous a permis
d’accéder à un autre « niveau de conscience », de vous ressourcer, de vous
retrouver.
►►
Vous vous sentez vieux : faites-vous liposucer, lifter, teindre les cheveux
(sur les plaquettes de « com » des grandes entreprises, ils ne mettent
pas les vraies têtes des gens, sinon personne ne viendrait). Choisissezvous un loisir branché, habillez-vous « jeunes créateurs ».
►►
Vous n’avez plus de vie sociale ni sexuelle car vous êtes crevé : ayez
mille amis sur Facebook. Soyons clairs : aujourd’hui, être vieux ne fait
plus rêver personne, car il nous faudra continuer à travailler (encore et
encore). Finies les rêvasseries devant la télé ou à la fraîche en sirotant
une anisette. Finies les croisières aux Bahamas, et les petits jeunes
ébahis qui rêvent de vivre la même vie que vous.
Selon les baby-boomers, nous (les X et les Y) devrions être confits de
reconnais­sance de vivre dans cette nouvelle ère. À les entendre, l’histoire
de l’humanité a commencé en 1968. Avant eux, l’univers était plongé dans
le noir intersidéral : les gens, abrutis par leur travail, ne pensaient pas, ils
avaient une sexualité minable et vivaient comme des bêtes craintives, sous
le joug du patronat cupide.
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Les « Y » et la double contrainte « réussis et épanouis-toi »
Les femmes, ainsi que la planète, étaient surexploitées, et l’humanité fonçait
dans le mur. Mais ce n’est pas tout à fait exact : dès les années quarante,
des voix contestataires se firent entendre… bien avant 68.
Chronologie générationnelle
Pour ceux qui auraient déjà décroché, voici un petit mémo :
>> Baby-boomers : ceux nés entre 1943 et 1959.
>> Génération X : ceux nés entre 1960 et 1977.
>> Génération Y : ceux nés entre 1978 et 1994.
>> Génération Z : ceux nés entre 1994 et 2004.
Bien entendu ces dates sont indicatives, certains sociologues font commencer la
génération Y quelques années plus tôt ou plus tard. Il s’agit plutôt de périodes ou de
générations sociologiques (et non biologiques), à interpréter comme : un « ensemble de
personnes ayant approximativement le même âge ».
Les précurseurs furent les « hipsters », dans les années 40. Ce vocable désignait
alors les amateurs de jazz, plus particulièrement du bebop, qui commençait à
être populaire.
Le « hipster » était celui qui choisissait le mode de vie du musicien de jazz,
c’est-à-dire ses codes vestimentaires, son langage argotique, la consommation
de drogue, l’attitude cool, un humour détaché, une certaine pauvreté, et une vie
sexuelle libre. Les premiers hipsters étaient essentiellement de jeunes blancs
« copiant » le style des noirs (oups… des blacks) urbains.
Aujourd’hui, les nouveaux hipsters se définissent comme à contre-courant
(non-mainstream) et évoluent dans les milieux underground anglo-saxons.
Ce terme reste assez peu utilisé en Europe.
La population hipster favorise plutôt les professions freelance, artistiques.
Elle chérit les films d’auteurs, suit les dernières tendances en matière de
jeux vidéo, de webculture. Elle a une bonne culture générale, elle vote plutôt
à gauche, et s’habille en unisexe (ou en style pseudo-négligé). Elle roule en
vélo électrique ou en scooter. Quand les premiers hipsters commencèrent à
prendre de l’âge (ceux des années 40), ils inventèrent le diminutif « hippie »
pour désigner la relève hipster.
Les médias confondent assez souvent les termes « beatniks » et « hippies ».
C’est simple : les beatniks ont précédé les hippies. Les beatniks étaient
issus de milieux moins bourgeois que les hippies, ils ne croyaient pas en
Dieu, et leur mouvement fut principalement actif aux États-Unis.
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Génération Y : Droit de réponse
Les années 50 furent marquées par le mouvement beatnik, avec les écrivains
Jack Kerouac, Allen Ginsberg et William Burroughs :
►►
L’adjectif « beat » (proposé par Herbert Huncke) avait initialement le sens
de fatigué ou cassé, en argot américain.
►►
Le « nik » de beatnik venait du fait que leurs détracteurs les accusaient
d’être pro-communistes, d’où le rapprochement avec le mot « spoutnik ».
Les beatniks rejetaient la société rigide et codifiée des squares (bourgeois).
Ce mot est passé dans le langage courant et désigne aujourd’hui des
« jeunes hommes ou jeunes filles manifestant, par leur tenue délibérément
négligée, leur vie errante et leur conception générale du bonheur, leur révolte
contre la société dite de consommation1 ».
Le mouvement hippie, né dans les années 60 à San Francisco, contestait
le matérialisme des « yuppies », les cols blancs, leur culte de l’argent et des
« valeurs bourgeoises ». Il prônait la vie en communauté et la libération
sexuelle. Loin de se désintéresser de la politique, les hippies ont notamment
participé à des manifestations pacifiques contre la pollution ou la guerre du
Vietnam (les hippies les plus politisés constituant les « yippies »). Cependant,
certains dérapèrent dans la drogue et le psychédélisme. Le film de Terry
Gilliam, Las Vegas Parano, qui se déroule en 1971, dresse un portrait acide
et désenchanté de ces dérives.
En France fleurissaient des slogans qui sont restés dans toutes les mémoires :
les murs se refaisaient une jeunesse. On pouvait y lire : « L’imagination prend
le pouvoir. Le rêve est réalité. Désirer la réalité, c’est bien ! Réaliser ses désirs,
c’est mieux ! », ainsi que le tant récupéré : « Soyez réalistes, demandez
l’impossible ! », ou encore « Ouvrons les portes des asiles, des prisons et
autres facultés ».
Mais déjà, sous ces grandes phrases, perçait la future nonchalance désinvolte
des bobos :
►►
Comme dans beaucoup de métiers, les révolutionnaires ferment
à 18 heures : « Une révolution qui demande que l’on se sacrifie pour elle
est une révolution à papa. Les gens qui travaillent s’ennuient quand ils ne
travaillent pas. Les gens qui ne travaillent pas ne s’ennuient jamais. Je
prends mes désirs pour la réalité car je crois en la réalité de mes désirs.
Plus je fais l’amour, plus j’ai envie de faire la révolution. Plus je fais la
révolution, plus j’ai envie de faire l’amour »…
1 Source : http://www.cnrtl.fr/lexicographie/beatnik/
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Les « Y » et la double contrainte « réussis et épanouis-toi »
►►
Avec la société de consommation en arrière-plan : « Consommez plus,
vous vivrez moins ».
►►
Et aussi, quelques flashs prémonitoires de la vie des futurs Y : « Nous
refusons d’être HLMisés, diplômés, recensés, endoctrinés, sarcellisés,
sermonnés, matraqués, télémanipulés, gazés, fichés… ».
►►
Ou encore : « Vous finirez tous par crever du confort ». (Les Y auront échappé
à cette lugubre prophétie – crever du confort – en grande majorité !)
Ces slogans indélébiles, même s’ils ont été effacés des murs, résonnent
toujours avec force dans l’inconscient collectif. En mars 2006, les éditions
Terrenoire de Lyon publient Sous la plage, des ruines, un recueil de slogans
faisant écho à ceux de 1968, détournés : mai 68 détricoté, règlement de
comptes à ciel ouvert, sur fond de nostalgie affichée (« l’éphémère est sans
lendemains »)…
Les anti-slogans foisonnent :
►►
« Au menu de ma génération : pâtes recuites. »
►►
« Pour vous aider à retrouver ce que nous avons vécu, nous avons
repavé les rues. »
►►
« Jouir sans entraves, piétiner autrui sans limitations. »
►►
« Défense de ne pas afficher mon logo, ma marque, mon code, le nom
de mon club de gym. »
►►
« La vie n’est pas un spectacle. »
►►
« Vous avez emmerdé ouvertement la société, et elle vous a choyés. »
►►
« La véritable aliénation, c’est être dirigé par sa libido. »
►►
« Ceux qui prétendent avoir ouvert la société en ont confisqué les clés. »
►►
« Vous avez fait table rase, nous ramassons les miettes. »
►►
« La fin de l’histoire, c’est vous. »
►►
« Chômage, précarité, culte de l’ego. »
►►
« Vous honnissiez tellement la valeur ‘’travail‘’, que vous n’en avez pas
laissé à vos enfants. »
►►
« Les ouvriers n’ont jamais été dupes de vos intentions. »
►►
« Refus de vieillir = civilisation décadente. »
Les concepteurs-rédacteurs de ces anti-slogans ont de toute évidence une
« culture 68 » approfondie, et ce travail méticuleux de recherche peut être
lu comme un hommage de descendants déçus que… la fête soit déjà finie.
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Génération Y : Droit de réponse
« C’est pas fini ! Show must go on. Avez-vous compris ? », clame la dernière
page du livre. Une envie de ne pas rester sur une impression d’inachevé ?
De reprendre le flambeau, en empruntant d’autres chemins ?
Aujourd’hui, on assiste à un « retour de bâton » ingrat contre les ex-hippies,
qui font l’objet de sentiments mêlés. À mon sens, les hippies ont tenté des
alter­natives, que l’on jugera comme on voudra. Mais pourquoi tant leur en
vouloir ?
Sur certains forums, en réponse à la question : « Que sont les hippies
devenus ? », on peut lire des propos sans pitié, tels que : « Ils sont, pour
la plupart, restés des débris de la société. Les nostalgiques fréquentent
les plages nudistes et les boîtes échangistes. Les maoïstes vivants sont
devenus dirigeants de la ligue communiste révolutionnaire (LCR). Les moins
paresseux se sont mis à bosser. Ceux qui n’ont pas renié leurs idéaux sont
fleuristes ».
C’est injuste : les hippies avaient le sens du collectif et des notions d’écologie
(pas tous, certes – aujourd’hui on dit : développement durable), ils ne se
prenaient pas trop au sérieux, ils ont eu le courage de critiquer l’idéologie
productiviste et le culte de la croissance infinie, d’ailleurs beaucoup d’entre
eux n’ont été que des hippies « temporaires », ou à temps partiel.
« Les gens de cette génération étaient en vérité très courageux : ils ne
voulaient pas de jobs, ils n’entendaient pas s’offrir une année sabbatique
avant de revenir au bercail, ils rêvaient vraiment de tout changer2 », explique
Olivier Assayas, réalisateur du film Après mai, où il revit ses années de
lycéen puis, d’étudiant aux Beaux-Arts à Paris, début des années 70, dans
une interview au Nouvel Observateur du 14 novembre 2012.
Les enfants des soixante-huitards afficheront une attitude beaucoup plus
introvertie que leurs géniteurs : la génération X, la « génération sacrifiée »,
celle qui est entrée sur le marché du travail dans les années 80, et qui
englobe les enfants nés du milieu des années 60 à la fin des années 1970,
était avant tout désabusée, engluée dans une « punk attitude », dans le « no
future ».
L’expression « Génération X » a été popularisée par l’écrivain canadien Douglas
Coupland, qui a publié, en 1991, le livre Génération X 3 , faisant allusion aux
noirs analphabètes qui signaient leur nom d’une croix (un X).
2 Article de Pascal Mérigeau, site : http://cinema.nouvelobs.com/articles/21933-interviewsolivier-assayas-les-gens-de-cette-generation-revaient-vraiment-de-tout-changer?page=1.
3 Paru aux Éditions 10 18, 2004.
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Les « Y » et la double contrainte « réussis et épanouis-toi »
Cette fiction retrace les vies de trois trentenaires, qui se réfugient dans une
petite ville, Palm Springs, fuyant les jobs de publicitaires ou de courtiers
qui les attendent, et partagent leurs journées entre « mac jobs » à temps
partiel, soirées pique-niques dans le désert, et longues heures passées à
refaire le monde. Sans plan de carrière, sans crédit immobilier sur le dos,
ces anti-héros forgent eux aussi leurs slogans, chacun constituant un titre
de chapitre du livre, ou des encadrés à droite du texte : « Acheter n’est pas
créer / Il faut choisir entre souffrir et bosser / Ne t’accepte pas / Érotiser
l’intelligence / Les expériences achetées ne comptent pas / Réinventer la
classe moyenne / Accepte tes parents / Réduis-distille-purifie-enseigne /
Moins est une possibilité / L’aventure sans risques, c’est à Disneyland / Le
plastique ne se décompose jamais… ».
Ces slogans génération X sont à mi-chemin entre ceux de 68 et les messages de
la « pub » d’aujourd’hui – en tout cas, ils ont fait de ce « manifeste » un livre culte.
Le film à succès Into the Wild, de Sean Penn, sorti en 2007, nous plonge au
cœur des interrogations écolo-philosophiques d’un jeune « génération X » de
22 ans, diplômé d’une grande université américaine, fils d’un cadre dirigeant
de la NASA, qui traverse seul les États-Unis, du Dakota au Colorado, sur
les pas des anciens hippies. Il meurt seul, mais « accompli », au milieu de la
forêt, au grand désespoir de ses parents (divorcés), eux-mêmes en crise, et
totalement dépassés par les évènements.
Portrait-robot des « génération X »
Le marché de l’emploi fut meilleur dans les années 80 que dans les années
2000, mais les X sont néanmoins confrontés à une double difficulté : si leur
ascension (sociale) a été rapide dans les 10-15 premières années de leur
carrière, ils font maintenant du surplace professionnel, les plus hauts postes
étant toujours brigués par les baby-boomers. Les X se sentent moins à l’aise
avec les « nouvelles » technologies que les Y. Ils ont l’impression d’avoir
été la génération laborieuse, beaucoup plus « pressurisée » que leurs
parents hippies, et envient en secret les grasses matinées que leurs « petits
frères » Y peuvent s’autoriser entre deux CDD. Ils se plaignent d’être « les
dindons de la farce », peinent à gérer leurs parents (baby-boomers) et leurs
subordonnés (Y). La question récurrente des X est : « Ai-je fait le bon choix
(professionnel, de couple…) ? »
Quand ils ont vraiment le blues, ils ressortent des cartons les grandes signa­
tures musicales de leurs années lycée, aux tonalités brumeuses : Nirvana,
The Cure, Rage Against the Machine, et le groupe Generation X.
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Génération Y : Droit de réponse
Lorsque l’on voit leurs films cultes, aux générations X, rien qu’aux titres, on
comprend que l’époque n’a pas dû être très festive :
►►
Un monde sans pitié d’Éric Rochant (1989) où un trentenaire survit grâce
au deal de shit de son frère, et tombe amoureux d’une normalienne qui
finit par le laisser tomber pour aller vivre à Boston. Le générique annonce
les lendemains de fête : « On a que dalle. On a plus qu’à être amoureux
comme des cons. Et ça, c’est pire que tout ».
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Les Nuits fauves de Cyril Collard (1992) dans lequel Jean, un chef « op »
bisexuel, a une relation passionnelle avec une jeune femme de 17 ans,
qui, anéantie par la jalousie, en perd la raison, et se fait interner. Ce
dernier, qui ne sait pas choisir, et brûle la vie par les deux bouts, apprend
à aimer. Mais c’est déjà trop tard pour lui.
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Le Cercle des poètes disparus, de Peter Weir (1989) où un jeune étudiant
de la prestigieuse et rigide académie Welton, décide de se consacrer au
théâtre, fasciné par les enseignements de son professeur de lettres. Un
choix que son père refuse. Le conflit père-fils aura pour point d’orgue
le suicide du jeune homme, et le licenciement du professeur, élevé au
rang de « dieu vivant » par ses élèves (« Capitaine, ô mon capitaine »
clament-ils bouleversés).
Ils ont du mal à trouver leur place, les « Gen X », même à 40-45 ans passés.
Certains se disent « sans identité », effacés, au bout du rouleau. Même fringants
managers (ou salariés-modèles), ils ne rêvent secrètement que d’une chose :
traîner le week-end en sweat-shirt à capuche, jouer avec leurs enfants qu’ils
voient trop peu. Ce sont, à la fois, des soixante-huitards du week-end, et des Y
non assumés, des « ni-ni ». La génération X, une génération-tampon, qui n’a
« pas choisi son camp » ? (« Je suis en train de me faire des ennemis, aïe ! »)
Certains porte-parole de la génération X « vieillissent mal », et optent, aigris,
pour une attitude peu respectueuse envers la génération Y : c’est regrettable.
Ils accusent les Y d’être paresseux, sans ambition, des « parasites », des antihéros incultes, mous, bons à rien… Pourquoi, au contraire, ne pas soutenir
leurs cadets, leurs compagnons d’infortune ?
Envers et contre toutes les divergences intergénérationnelles, « l’esprit
de 68 » était promis à une belle longévité. Il résista au blues néopunk de la
génération X, et ne pouvait manquer de refaire surface, en la personne des
bobos. L’expression « bobos » : bourgeois bohèmes, apparaît dès 1978 dans
les bandes dessinées de Claire Bretécher4.
4 Dernier strip du tome 3 de la bande dessinée Les Frustrés, publiée en 1978…, année de
naissance de votre dévouée auteure.
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