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lundi 18 février 2013 LE FIGARO 16 société Gommer les différences homme-femme ? Des députés UMP veulent la création d’une commission d’enquête sur l’introduction et la diffusion de la « gender theory » en France. AGNÈS LECLAIR FAMILLE Le « gender » est-il en train de gagner la société française ? En 2010, Sciences Po créait l’événement avec la mise en place d’un enseignement obligatoire des études de genre. À la rentrée 2011, des manuels scolaires de SVT (science et vie de la terre) faisaient scandale en XAVIER BRETON DÉPUTÉ UMP ▼ ▼ « C’est un bouleversement de notre contrat social » « Il faut établir un véritable état des lieux de la pénétration de cette théorie dans l’ensemble de notre pays : politique de l’éducation, enseignement scolaire, enseignement supérieur, droits des femmes, droit de la famille, droit social, administration, justice… Les conséquences qu’elle implique représentent un tel bouleversement de notre contrat social que les Français sont en droit d’en être informés. » abordant l’identité sexuelle sous le prisme du genre. Cet été, la nouvelle loi sur le harcèlement sexuel prenait en compte des circonstances aggravantes liées à l’identité de genre. Le 7 septembre dernier, Najat VallaudBelkacem, ministre pour le Droit des femmes, et Dominique Bertinotti visitaient la crèche Bourdarias, à Saint-Ouen (SeineSaint-Denis), qui ne fait pas la différence entre fillettes et garçonnets au nom du combat contre les « clichés ». Et, depuis la rentrée, les opposants au texte sur le mariage pour tous dénoncent un projet de loi fondé sur l’idéologie du genre et remettant en cause l’altérité sexuelle. De quoi s’agit-il au juste ? Les « gender studies » se penchent sur les fonctions de l’homme et de la femme dans la société en raison de leur différence sexuelle et les situations d’inégalité qui en découlent. Dans leur sillage, la théorie du genre, popularisée par la philosophe féministe américaine Judith Butler, établit une distinction entre l’identité sexuelle biologique et l’orientation sexuelle qui résulte d’une construction sociale et de choix personnels. Ainsi, hommes et femmes se définiraient comme tels après en avoir décidé et en fonction de leurs pratiques. ge pour tous dénoncent un basculement des études de genre vers la théorie, voire l’idéologie du genre. Autrement dit, un passage de l’étude des stéréotypes à un dogme sur l’orientation sexuelle. « Ce n’est pas la lutte contre les discriminations qui nous pose question, mais la négation de l’altérité sexuelle », précise le député UMP Xavier Breton, animateur de l’Entente parlementaire pour la famille. Et de citer la disparition des termes sexués « pèree » it et « mère » au profit de celui, neutre, de «parent». Ou encore la proposition d’une députée PS de débaptiser l’école « maternelle », terme « genré », pour lee remplacer par celui de « petite école » ou « première école ». « Il faut établir un véritable état des lieux de la pénétration de cette théorie dans l’ensemble de notre pays : politique de l’éducation, enseignement scolaire, enseignement supérieur, droits des femmes, droit de la famille, droit social, administration, justice… Les conséquences qu’elle implique représentent un tel bouleverse- ment de notre contrat social que les Français sont en droit d’en être informés », plaident Xavier Breton et la députée UMP Virginie Duby-Muller. Tous deux ont déposé en décembre une demande de création d’une commission d’enquête sur l’introduction et la diffusion de la théorie du «gender» en France. Leurs inquiétudes portent également sur la petite enfance et la diffusion de structures d’accueil qui, à l’instar de la crèche Bourdarias, gomme les différences entre petites filles et petits garçons. Cette expérience, lancée en 2009, inspirée du modèle suédois, se garde d’aller jusqu’aux pratiques de nos voisins telles que la disparition des pronoms « il » ou « elle » ou l’élimination de jouets trop sexués. Le gouvernement, intéressé par cette lutte contre le sexisme dès le berceau, réfléchit à sa diffusion. Dominique Bertinotti projette même de faire évoluer la formation de tous les professionnels de la petite enfance pour les sensibiliser à la question. ■ «Négation de l’altérité sexuelle» Aujourd’hui, une grande partie de la droite et les opposants au texte du maria- STÉPHANE KOVACS ENVOYÉE SPÉCIALE À STOCKHOLM DANS cette crèche d’un nouveau genre, il n’y a pas de petits garçons ni de petites filles. Mais rien que des « amis ». Au nom de l’égalité entre les sexes, à Nicolaigarden, mi-crèche, mi-école maternelle, qui accueille 115 enfants entre 1 et 6 ans, on a décidé de bannir toute référence masculine ou féminine. Une expérience qui s’étend aujourd’hui à Stockholm, où cinq établissements certifiés LGBT (Lesbiennes, gays, bi et trans) ont déjà ouvert leurs portes. Première leçon, supprimer les pronoms personnels « lui » et « elle » (« han » et « hon » en suédois). Deuxième leçon, adopter « hen », un terme neutre qui n’existait pas en suédois il y a quelques années encore, mais qui s’est développé dans les milieux homosexuels. Troisième leçon, « laissons chacun être comme il veut », comme le proclame, sur un poster, un petit blond virevoltant dans une robe rose. « Nous ne disons jamais “les filles” ou “les garçons”, explique Lotta Rajalin, initiatrice de cette méthode, qui supervise les cinq établissements. Et par exemple, quand un docteur ou un plombier vient à l’école, nous employons le terme “hen”. Les enfants peuvent donc imaginer un homme ou une femme. Cela élargit leurs vues. » « Ce n’est pas sur le sexe biologique, mais sur le sexe social que porte notre travail » A 1 LOTTA RAJALIN, INITIATRICE DE LA MÉTHODE Dans son bureau pavoisé de petits drapeaux arc-en-ciel, la directrice va même plus loin, en prenant une pomme : « Et pourquoi on ne dirait pas “hen äpple” ?, lance-t-elle. On emprunte des mots aux Américains, aux Finlandais, le langage évolue tous les jours ! Et rien qu’avec les mots, on peut changer beaucoup de choses… » De plus en plus utilisé, notamment à l’université, le mot « hen » vient de faire son entrée dans l’encyclopédie suédoise. N’est-ce pas dangereux de « neutraliser » ainsi le sexe d’un enfant ? « Ce n’est pas sur le sexe biologique, mais sur le sexe social que porte notre travail, répond la directrice. Nous ne voulons pas transformer les filles en garçons, mais seulement les laisser devenir homo, bi ou trans si elles le veulent. C’est ça, les droits des êtres humains ! » À Nicolaigarden, les poupées côtoient les tracteurs, les jeux de construction sont rangés près des cuisines en plastique, de manière à encourager indistinctement garçons et filles à se les approprier. Cendrillon, « truffé de clichés sexistes » « Comme nous les appelons “les enfants”, ou “les amis”, ils peuvent choisir leur activité sans subir la pression du genre, précise la directrice. On veut leur faire découvrir tout ce À Stockholm, l’établissement Nicolaigarden, certifié LGBT, accueille que la vie peut avoir à offrir, 115 enfants entre 1 et 6 ans. CASPER HEDBERG/NYT-REDUX/REA et pas seulement la moitié ! Car que vous soyez un de grand-père, on leur cord avec les méthodes de Lotta Rajagarçon, une fille, ou quelexplique que c’était il y a lin... « C’est important pour construire que part entre les deux, très très longtemps et que notre identité de savoir si on est un vous avez le droit d’avoir d’euros alloués pour éliminer les le monde est différent garçon ou une fille !, s’exclame Kajsa les mêmes sentiments ». Wahlström, chercheuse spécialisée « Parfois, ils jouent à stéréotypes sexistes maintenant… » Quant aux en Suède comptines, on peut bien les dans les questions de genre. Moi, je “comme à la maison”, raconréécrire un peu, « pour les renpréfère dire, “Tu es un garçon et tu te encore Lotta Rajalin, et le rôle dre un peu plus neutres… » peux aussi faire la vaisselle”. Effacer de la maman est déjà pris. Eh bien, on Depuis 1998, la loi impose aux écoles sexes, c’est une autre forme de disleur suggère qu’il y ait trois ou quatre les et même aux jardins d’enfants crimination… » mamans… » Autre variante, « papa, l’école commence à six ans en Suède Présidente de l’Inter-LGBT suédoipapa, et enfant adopté ». de promouvoir l’égalité entre garçons se, Ulrika Westerlund ne veut pas non Ne cherchez pas Cendrillon, La Petiplus « supprimer les genres ». « Beaute Sirène ni d’autres contes « truffés de coup de gens veulent être appelés “hen” clichés sexistes » dans la bibliothèque. car ils ne s’identifient pas à “han” ou Sur les rayonnages, on trouve plutôt « Parfois, ils jouent “hon”, affirme-t-elle. Nous pensons des livres « modernes » traitant de à “comme à la maison”, que toutes les identités doivent être resl’homosexualité, de la transsexualité et le rôle de la maman est pectées et nous demandons juste que ou de l’adoption… Comme cette série chaque enfant puisse grandir comme il « innovante » qui décrit, en utilisant le déjà pris. Eh bien, on leur le veut. » pronom « hen », les aventures d’un suggère qu’il y ait trois Les parents, en tout cas, ne semlutin asexué. Ou l’histoire des deux ou quatre mamans… » blent pas avoir de scrupules. La liste papas girafes, qui finissent par adopter d’attente, pour rentrer dans une de ces un bébé crocodile. et filles. En 2008, c’est un programme écoles, est très longue. Et personne « Les contes classiques, on présume de 12 millions d’euros qui fut mis en n’en a jamais retiré son enfant. « Une que les enfants les ont chez eux, se jusplace, afin d’éliminer les stéréotypes. fois seulement, raconte la directrice, un tifie Lotta Rajalin. Il peut nous arriver Il est désormais courant de faire appel père n’a pas digéré le fait que je lui dise d’en lire certains, comme Le Petit à des « pédagogues de genre » pour que si son fils voulait venir à l’école en Prince, par exemple, pour leurs qualiaider les instituteurs dans cette misrobe, c’était tout à fait OK. Je n’ai plus tés littéraires. » « Mais alors, poursion. Mais ils ne sont pas tous d’acjamais eu de nouvelles. » ■ suit-elle en prenant une grosse voix 12 millions Pop, 6 ans, l’enfant sans sexe FILLE ou garçon ? On ne sait toujours pas. En 2009, un couple de Suédois déclenchait une polémique en indiquant qu’il ne voulait pas révéler le sexe de son enfant de 2 ans. «Nous voulons que Pop grandisse librement, et non dans un moule d’un genre spécifique, ont raconté ses parents au quotidien Svenska Dagbladet. C’est cruel de mettre au monde un enfant avec un timbre bleu ou rose sur le front. Aussi longtemps que le genre de Pop restera neutre, il ne sera pas influencé par la façon dont les gens traitent les garçons ou les filles. » Les deux parents, qui ont eu Pop à 21 ans, ont décidé de travailler à mi-temps, pour pouvoir s’occuper de lui, plutôt que de l’envoyer à l’école maternelle. L’enfant, décrit comme « confiant et stable », choisit lui-même ses habits. Parfois une robe, parfois un pantalon. Pour la coiffure, c’est également variable. « Pour moi, Pop n’est ni une fille ni un garçon, c’est seulement Pop », explique sa mère. « De nombreux parents en Suède élèvent leurs enfants de façon aussi neutre que possible, dans le but de leur donner plus de possibilités, au lieu de les limiter », souligne Mia Sjöström, la journaliste qui a révélé l’affaire. Les parents de Pop ont fait quelques émules dans le monde : en 2011, un couple canadien décidait de taire le sexe de son bébé, Storm. L’an dernier, Sasha, 5 ans, entrait à l’école. Ses parents, britanniques, lui ont appris qu’il était un garçon : « Les filles et les garçons ? S. K. C’est pareil », a-t-il répondu. en bref ▼ Un couple de commerçants tué par arme à feu à son domicile dans le pays de Caux Un couple de commerçants a été trouvé mort tué par arme à feu dans sa propriété samedi aprèsmidi à Angerville-la-Martel, non loin de Fécamp (Seine-Maritime), a-t-on appris dimanche de source proche de l’enquête. Sortir de la précarité les familles monoparentales La fondation K d’Urgences, spécialisée dans l’aide aux familles monoparentales, a remis à l’Élysée dix propositions visant à « sortir de l’impasse » ces familles. Leur taux de pauvreté est évalué à 35 % par l’Observatoire national de la pauvreté et de l’exclusion sociale, soit 2,5 fois plus que l’ensemble des familles. Une fillette de 10 ans se pend devant sa sœur âgée de 4 ans Samedi, une fillette s’est donné la mort devant sa petite sœur à Vesoul. La mère a déclaré aux enquêteurs avoir découvert sa fille pendue à la poignée d’une fenêtre avec un foulard. Une autopsie doit être pratiquée en début de semaine et l’enquête devra déterminer s’il s’agissait d’un jeu ou d’un suicide. Mercredi s’ouvre à Lyon le procès du père d’un bébé secoué Un homme de 56 ans comparaîtra devant les assises du Rhône mercredi pour avoir violemment secoué en 2009 son bébé de deux mois qui avait par la suite trouvé la mort.