Une proposition quant à la législation pénale du mariage – 29 juin
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Une proposition quant à la législation pénale du mariage – 29 juin
Une proposition quant à la législation pénale du mariage – 29 juin 1894 Une proposition vient d’être faite qui passionne en ce moment les jurisconsultes, les journalistes, les écrivains, les prêtres aussi, et les femmes. Il s’agit de l’initiative de parlementaire de M. Viviani, qui voudrait faire supprimer les articles du code pénal qui frappent d’une peine d’emprisonnement ou d’une amende l’infidélité constatée d’un des époux. M. Viviani est un jeune député socialiste, ambitieux et hardi, qui ne dédaignerait pas d’attacher son nom à cette réforme comme M. Naquet attacha le sien à la réforme du divorce. Car l’une n’est que la conséquence de l’autre et la continuation de cette désorganisation du mariage tel que l’esprit chrétien l’avait organisé. Avec celui-ci le mariage était un serment, un engagement indissoluble, et les fautes contre lui étaient le péché, péché contre le prochain, péché contre la société. La loi du divorce que M. Naquet obtint après tant de campagne et de prosélytisme a fait du mariage en France un contrat civil qu’on peut rompre, et voilà pourquoi M. Viviani aujourd’hui propose de supprimer les articles du code qui assimilent à un délire et frappent de peines légales les manquements au mariage. Ceux-ci dit-il, ne sont que des manquements à un contrat et, comme pour les contrats ordinaires, les pouvoirs publics n’ont pas à intervenir. C’est au contractant lésé à demander seulement la résolution du contrat (c’est-à-dire le divorce et la séparation) et, s’il le veut, à s’adresser aux tribunaux, mais aux tribunaux civils et pour une faute civile, des dommages-intérêts. Voilà le raisonnement tenu par M. Viviani qui sera porté un jour par le parlement, tandis qu’en ce moment il est déjà l’objet de vives discussions. Il est peu probable que cette campagne aboutisse, et on entendra à la tribune des paroles éloquentes, comme celle de Mgr d’Hulst, proclamer le mariage chrétien et dénoncer cette notion moderne et périlleuse du mariage assimilé à un contrat civil dont l’inexécution n’entraînerait plus que des conséquences civiles. Dans la série d’interviews auxquelles on s’est livré à ce sujet, il est piquant de voir que la police, souvent appelée à des constatations ne cette matière reconnaît elle-même que supprimer le délit et toute pénalité, ce sera excuser l’adultère et presque l’autoriser dans les mœurs. A moins que ce soient les mœurs qui déterminent les lois. Et, en cette matière, il faut reconnaître que la pratique avait déjà presque réalisé ce que M. Viviani veut faire ériger en tête de loi par le Parlement. En effet, depuis des années nos tribunaux parisiens se montrent pour ces sortes d’affaires d’une indulgence extrême. Presque jamais la peine de l’emprisonnement n’est prononcée ; on se contente d’appliquer le minimum de l’amende. A l’action pénale M. Viviani et ses amis du Parlement veulent maintenant substituer l’action civile. On plaidera en dommages-intérêts. Voilà de quoi alimenter la verve de nos vaudevillistes qui s’épuise, tandis que nos moralistes y verront avec raison un indice grave de cette transformation, de cette désorganisation du mariage chrétien que le divorce a commencée et que l’état des mœurs parisiennes achève.