Les Amis de la Fabrique du Sud (ex

Transcription

Les Amis de la Fabrique du Sud (ex
Les Amis de la Fabrique du Sud
(ex-Pilpa, Carcassonne, France)
Intervention de Michel Mas
A mon tour de vous livrer quelques éléments tirés de l'expérience
collective que nous menons sur le Carcassonnais avec d'une part les
coopérateurs de La Fabrique du Sud, qui produisent les glaces artisanales
La Belle Aude et d'autre part avec les 800 adhérents de l'association Les
Amis de La fabrique du Sud qui vont à la rencontre de la population dans
une démarche d'éducation populaire sur les questions du goût, de la santé,
des modes de consommation et sur les alternatives de développement
économique, social et environnemental.
Bref historique
La création de la Fabrique du Sud c'est le fruit d'une histoire toute simple,
presque banale, l'histoire d'une fabrique de crèmes glacées Pilpa basée à
Carcassonne. Une entreprise innovante, qui tournait depuis 40 ans quand,
en 2011, un fonds de pension américain OAKTREE pesant 100 milliards
de dollars jette son dévolu dessus. L’entreprise est alors rachetée par R&R,
filiale de ce fonds . 9 mois plus tard, l’unité de Carcassonne, la plus
rentable, est sacrifiée sur l'autel du profit.
Une mécanique bien huilée, se met en place en quelques mois :
Rachat de Pilpa, transfert et centralisation des services recherche et
développement, du commercial, de la gestion au siège.
Annonce d'un marché en décroissance, d'un déficit budgétaire et de la
fermeture de l'entreprise.
Refus de céder l'entreprise a quiconque malgré trois offres de reprise !
Ainsi, avec l'achat de PILPA le groupe R&R a ce qu'il voulait : il est en
position dominante sur le marché français des marques distributeurs
( glaces vendues sous le nom distributeur : Auchan, Carrefour,
Leclerc....). Et OAKTREE aspire des masses financières !
En effet, pour racheter ses concurrents (dont Pilpa), le fonds prête de
l'argent à 10% à son groupe industriel qu'il a lui, sur le marché à 3%.
Les entreprises et filiales industrielles sont mises en déficit
artificiellement. Les comptes officiels du groupe affichent un déficit de
25 millions, quand 58 millions remontent au fonds sous forme de frais
financiers. L'activité crèmes glacées dégage donc, 33 millions de
bénéfices! Mais ce n'est pas assez pour les actionnaires qui en veulent
plus! Et ils vendent le groupe à PAI Partner autre fonds d'investissement
850 millions d'euros.
Lutte et création de la SCOP
Mais face à cela, face à cette injustice, face à ce vol manifeste, des savoirs
faire, des licences, des richesses, face à cette casse de l'outil industriel, des
des femmes et des hommes vont relever la tête. Déterminés, organisés avec
leur syndicat CGT, forts de leurs savoir faire, en pleine lutte, ils ne lâchent
rien. Ainsi, après des semaines d'inspections, ils obtiennent les plus hautes
normes en matière sanitaire alimentaire. Conscients de la part prise dans
les 33 millions d'euros de bénéfices réalisés, forts de leur unité et de
nombreux soutiens, les 125 salariés vont alors s’engager dans 18 mois de
lutte.
Alternant actions juridiques et mobilisations, interpellations des politiques
et des pouvoirs publics, par 2 fois, ils feront annuler les soi-disant plans de
sauvegarde de l’emploi et exigeront que le site soit laissé en capacité de
produire et les machines rendues aux salariés.
Ainsi ils gagneront les moyens de pouvoir s'engager dans la relance de
l'activité sur le site de Carcassonne, en obtenant que les collectivités
rachètent l'ensemble du site industriel, (6,5 hectares, 22000 m2), ils
obtiendront que R&R cède une ligne de production, verse 815 000 euros
pour les investissements matériel, 200000 euros pour la formation.
En quelques mois, ils monteront une entreprise de A à Z, avec un nouveau
process de production, de nouveaux fournisseurs et clients, un nouveau
statut juridique, une Société Coopérative Participative La Fabrique du Sud
et créeront leur marque de crèmes glacées artisanales « La Belle Aude ».
Leur objectif est simple :
Créer des emplois, maintenir et développer les savoir-faire, et fabriquer
des produits respectant
• les consommateurs par une transparence sur la qualité et l'origine des
produits ;
• les producteurs pour qu'ils puissent vivre de leur travail et investir
dans leurs exploitations; (en favorisant prioritairement
l'approvisionnement de proximité)
•
•
les salariés coopérateurs en garantissant des salaires décents, des
bénéfices redistribués à parts égales et de bonnes conditions de
travail ;
l’environnement en devenant des fabricants éco-responsables
(déchets, énergie, emballages, …)
Aujourd’hui, 27 coopérateurs (19 salariés) ont investi financièrement dans
la SCOP et y apportent leur savoir faire. Depuis le 17 avril la production
est lancée et les glaces artisanales La belle Aude sont présentes dans les
principales grandes surfaces de la région, chez certains restaurateurs,
plébiscitées même par certains chefs étoilés. On les retrouve aussi dans des
restaurants d'entreprises, des centre de vacances, notamment ceux gérés
par des CE.
Après 6 mois de fonctionnement, le prévisionnel est respecté, de nouveaux
investissements réalisés, 3 intérimaires ont été recrutés pour la saison et la
production a été multipliée par 2 ! La saison d'hiver est lancée avec la
production des bûches glacées !
L'association
Mais ce beau projet ne pouvait rester seul. Au dela des salariés de la SCOP,
cette appropriation sociale revêt un enjeu territorial tres fort!
En travaillant en partenariat avec des producteurs de lait et de fruits
régionaux, des fournisseurs et prestataires essentiellement de proximité, en
s'adressant à la restauration collective, c'est toute une dynamique
économique qui se met en place à partir de valeurs, dépassant le seul cadre
comptable et marchand pour donner du sens à l'acte de production.
C'est ainsi que, dès la création de la SCOP, l’association Les Amis De L
Fabrique Du Sud a été créée pour aider au rayonnement et au
développement de la Fabrique du Sud, lui apporter un soutien matériel
grâce à l’engagement de ses bénévoles et aux dons qu’elle récolte.
Mais aussi pour promouvoir l'Economie Sociale et Solidaire dans une
démarche d'éducation populaire comme alternative de développement
économique qui respecte les femmes et les hommes et qui crée des
richesses au bénéfice des territoires de production.
L’association veut être un acteur de médiation culturelle, elle sensibilise
les populations sur le bon sens et la pertinence de l’économie sociale et
solidaire, sur les modes de consommation, les pratiques alimentaires et ses
conséquences en matière de santé, d'économie et de social ! Elle a réalisé
une exposition retraçant cette aventure humaine, support à débats et
échanges pour aller à la rencontre des populations.
En obtenant le re municipalisation de tout le site industriel c'est un bien
commun qui a été crée et qui maintenant est à disposition de toute la
population, un bien qui doit servir l’intérêt général de tout un territoire et
qui doit être géré démocratiquement.
C'est pourquoi les Amis de LFDS préconisent la création d'une SCIC
associant collectivités, coopérateurs , porteurs de projets pour gérer ce site
sous le contrôle direct de la population.
De même en proposant de devenir une association de portée nationale,
nous voulons pointer l'importance du nombre d'adhérents avec l'objectif de
100000 adhérents dans les prochaines années, pour viser l'indépendance
financière et l'autonomie des circuits de distribution.
En effet avec une cotisation modique de 5 euros, accessible au plus grand
nombre, avec 100000 adhérents, nous nous affranchissons des banquescette question de s'extraire des circuits traditionnels financiers nous semble
essentielle pour pérenniser la SCOP et les valeurs qui s'y pratiquent- c'est
d'ailleurs pour cela que nous avons choisi pour cette année de démarrage
de lancer également une souscription nationaleMais dans le même temps s'extirper des logiques financières dominantes
exige que nous maîtrisions nos propres réseaux de distribution. En ce sens
100000 adhérents/ bénéficiaires associés nous permettraient de développer
un réseau de distribution alternatif, citoyen et militant, maillant le territoire
et .nous affranchissant de la dépendance à l'égard des multinationales de la
grande distributionOui, tout ceci est à notre portée ! Car avec ce socle de citoyens engagés,
nous pourrons aussi multiplier les rencontres, les débats, les apprentissages
et nous inscrire dans cette démarche d'éducation populaire sur les
questions de pratiques alimentaires et de consommation, de santé,
d'économie, de vivre ensemble !
Notre association est aujourd'hui, sociétaire de la SCOP. A ce titre les
adhérents/ bénéficiaires associés sont représentés par l'un des leurs au sein
de l'AG des coopérateurs. Ils ont leur mot à dire sur le produit, les
conditions d'approvisionnement, de distribution, les tarifs pratiqués...
100000 adhérents en mouvements! Quelle force agissante ! autant de
sentinelles éveillées soucieuses de faire vivre les valeurs qui nous
rassemblent autour de ce projet de transformation sociale !
Mettre à la disposition de chacune, de chacun c'est outil lui permettant de
s'engager concrètement dans une démarche citoyenne et de devenir un des
maillons essentiels de la transformation sociale ! C'est ce que nous visons !
Vous le voyez, ce ne sont pas les projets ni la détermination qui nous
manquent ! D'autant que les soutiens sont multiples, que nos produits et
notre démarche rencontrent un écho de plus en plus large parmi la
population, qui en a de plus en plus assez de ce système aberrant, de cette
chape de plomb de la finance qui étouffe chacun, et qui tue les plus
fragiles !
Alors oui, multiplions les initiatives d'appropriation sociale, nous
multiplierons le champ ds possibles en produisant des valeurs certes sans
dimension mais combien enrichissantes !!!