IMMOBILIER CONSTRUCTION

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IMMOBILIER CONSTRUCTION
IMMOBILIER CONSTRUCTION
mars 2016
ACTUALITE DE LA CONSTRUCTION
La garantie de bon fonctionnement de deux ans
réservée aux éléments d’équipement dissociables de l’immeuble destinés à fonctionner :
l’exclusion du revêtement végétal de toiture-terrasse.
de désolidarisation du plancher support, puis plus explicitement dans un arrêt du 18 février 2016 (n°1510750), la troisième chambre civile confirme la restriction apportée au champ d’application de la garantie de
bon fonctionnement, au sujet cette fois-ci du revêtement
végétal d’une étanchéité.
Aux termes de l’article 1792-3 du Code civil, les constructeurs sont tenus, envers le maître ou l’acquéreur de l’ou-
Dans ce dernier arrêt, elle considère ainsi que « des dé-
vrage, d’une garantie de bon fonctionnement d’une durée
sordres qui affectent le revêtement végétal d’une étanchéité,
minimale de deux ans, pour tous les éléments d’équipe-
ne compromettant pas la solidité de l’ouvrage ni ne le ren-
ments dissociables des ouvrages de viabilité, de fondation,
dant impropre à sa destination et concernant un élément dis-
d’ossature, de clos ou de couvert. Son application était
sociable de l’immeuble non destiné à fonctionner, ne relè-
déjà résiduelle puisqu’elle ne concerne que les éléments
vent pas de la garantie de bon fonctionnement ».
d’équipement dissociables de l’ouvrage, à l’exclusion de
ceux dont la fonction exclusive est de permettre l’exercice
Dans cette affaire, un syndicat des copropriétaires sollicitait
d’une activité professionnelle dans l’ouvrage, et est écar-
l’indemnisation, par le vendeur en l’état futur d’achèvement,
tée au profit de la garantie décennale lorsque la défaillance
de désordres consistant dans le fait que la végétation mise
de l’élément d’équipement rend l’ouvrage entier impropre
en œuvre sur le complexe d’étanchéité d’une toiture ter-
à sa destination.
rasse, n’avait pas réellement pris et présentait l’apparence
de touffes qui ne recouvraient pas l’intégralité des surfaces.
Interprétant à la lettre le texte de l’article 1792-3 du Code
civil, la troisième chambre civile de la Cour de cassation a
La Cour d’appel (CA Bordeaux, 17 novembre 2014, RG
initié, à partir d’un arrêt du 11 septembre 2013 (n°12-
n°13/01040) avait accueilli l’action du syndicat sur le fonde-
19483), une jurisprudence tendant à restreindre le champ
ment de la garantie de bon fonctionnement, après avoir re-
d’application de la garantie de bon fonctionnement, aux
levé que le revêtement végétal constituait un élément d’équi-
seuls éléments d’équipement « destinés à fonctionner ».
pement dissociable de l’ouvrage, susceptible d’engager la
Dans son arrêt du 11 septembre 2013, elle avait ainsi
garantie de bon fonctionnement du vendeur en l’état futur
écarté cette garantie, au profit du régime de la responsa-
d’achèvement.
bilité de droit commun, dans une affaire de fissurations de
carrelage, après avoir relevé : « Mais attendu que (…) les
A la suite de l’arrêt, un pourvoi est formé par l’entreprise qui
désordres ne compromettant pas la solidité de l’ouvrage ni
critique les seuls motifs de ayant qualifié le revêtement vé-
ne le rendant impropre à sa destination, affectant un élément dissociable de l’immeuble, non destiné à fonctionner,
relèvent de la garantie de droit commun ».
gétal d’élément d’équipement dissociable susceptible d’engager la garantie biennale de l’article 1792-3 du Code civil.
Saisie de cette seule question, la Cour de cassation con-
Quoique publié au bulletin, l’arrêt demandait néanmoins à
firme la restriction apportée au champ d’application de la ga-
être confirmé. C’est chose faite. Dans un arrêt du 26 no-
rantie de bon fonctionnement, qui semble ainsi se limiter dé-
vembre 2015 (n°14-19835) rendu au sujet d’une chape
sormais aux seuls appareils ou éléments mobiles, pourvus
liquide mise en œuvre avec une couche
d’un mécanisme permettant un fonctionnement.
La responsabilité personnelle du dirigeant de
l’entreprise de construction à raison du défaut
de souscription d’une assurance responsabilité
décennale.
de responsabilité n’était pas séparable des fonctions de dirigeant », et ne pouvait dès lors engager la responsabilité personnelle du dirigeant.
Par un arrêt du 10 mars 2016 (n°14-15326), la troisième
Dans son arrêt du 20 mai 2003 (n°99-17092), la chambre
chambre civile opère un revirement, considérant que le « gé-
commerciale de la Cour de Cassation, ayant à connaître
rant (…), qui n’avait pas souscrit d’assurance décennale,
de la responsabilité des dirigeants de sociétés commer-
avait commis une faute intentionnelle, constitutive d’une in-
ciales, a défini la faute séparable des fonctions du dirigeant
fraction pénale » et avait ainsi commis une faute séparable
social, nécessaire pour engager sa responsabilité person-
de ses fonctions et engagé sa responsabilité personnelle.
nelle, comme la faute commise intentionnellement, d’une
particulière gravité et incompatible avec l’exercice normal
La troisième chambre civile tend donc à s’aligner sur la po-
des fonctions sociales.
sition de la chambre commerciale. Qu’ils soient dirigeants
de sociétés civiles comme de sociétés commerciales, la res-
Dans la lignée de cette décision, la chambre commerciale
ponsabilité personnelle des dirigeants est susceptible d’être
a consacré, par un arrêt du 28 septembre 2010 (n°09-
engagée, à raison du défaut de souscription des assurances
66255), l’existence d’une telle faute séparable des fonc-
obligatoires en matière de construction.
tions, dans le cas du défaut de souscription d’une assurance obligatoire de responsabilité décennale par le gérant
Reste que l’attendu de l’arrêt pose question.
d’une entreprise de bâtiment, considérant que « le gérant
(…) qui commet une faute constitutive d’une infraction pé-
En effet, sur la base de la jurisprudence de la chambre cri-
nale intentionnelle, séparable comme telle de ses fonc-
minelle décidant que la violation en connaissance de cause
tions sociales, engage sa responsabilité civile à l’égard des
d’une prescription légale ou réglementaire implique l’inten-
tiers ». Elle a, depuis lors, réaffirmé sa position (Cass.
tion coupable, la chambre commerciale avait pris soin de re-
Com., 9 décembre 2014, n°13-26298).
lever, dans son arrêt précité du 28 septembre 2010, que le
dirigeant avait « sciemment » méconnu l’obligation d’assu-
La troisième chambre civile de la Cour, ayant à connaître
rance, ce dont il résultait une faute constitutive d’une infrac-
de la responsabilité des dirigeants de sociétés civiles et
tion pénale intentionnelle, séparable comme telle de ses
commerciales dans le domaine de la construction, avait,
fonctions sociales.
quant à elle, adopté une solution contraire dans un arrêt
du 4 janvier 2006 (n°04-14731), considérant que « même
Dans son arrêt du 10 mars 2016, la troisième chambre re-
constitutif du délit prévu et réprimé par les articles L. 111-
tient quant à elle l’existence d’une « faute intentionnelle,
34 du Code de de la construction et de l'habitation et L.
constitutive d’une infraction pénale », sans toutefois carac-
243-3 du Code des assurances, et caractérisant une abs-
tériser, dans les motifs de sa décision, l’intention délibérée
tention fautive imputable au dirigeant (…) , le défaut de
de commettre la faute. Il faut espérer qu’il s’agisse d’une
souscription des assurances obligatoires de dommages et
simple omission…
DROIT IMMOBILIER
GÉRALD LAGIER A S S O C I É
PHILIPPE MATHURIN A S S O C I É
NATHALIE DUPUY-LOUP O F C O U N S E L
FAHIMA GASMI O F C O U N S E L
NADINE GHORAYEB A V O C A T S E N I O R
EDITH DEL-BUFALO A V O C A T
SYLVAIN DUBOIS A V O C A T
STEPHANIE LEPERLIER A V O C A T
AURELIE REBIBO A V O C A T
XAVIER TERCQ A V O C A T
la construction et de l’habitation et L. 243-3 du Code des