syllabus_1e_2016dv

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2015-2016 - Unité d'enseignement UE-I 1-13
ISALT - 1 - Tourisme et patrimoine belge
Code :
Catégorie :
Section :
Option :
Mise à jour :
UE-I 1-13
Formation générale, culturelle et humaine
ISALT
30/06/2014
Nbre d'heures :
Crédits ECTS :
Année :
Niveau du CFC :
Périodicité :
75
6
1
Niveau 6
Quadrimestre II
Langue d'enseignement et d'évaluation
français
Activités d'apprentissage
Anthropologie
Géographie touristique II
Culture artistique
Enseignants responsables
Martine Dustin - Claire le Paige - Thierry Marres
Acquis d'apprentissage de l'UE
Au terme de l’UE, l’étudiant aura développé les compétences suivantes :
- Mobiliser les savoirs et savoir-faire liés aux patrimoines naturel, culturel matériel et immatériel de Belgique,
- Rechercher, analyser et traiter les informations nécessaires dans les contenus enseignés et acquérir une approche transversale,
- Adopter une approche responsable, critique et réflexive dans les contenus enseignés,
- Devenir conseiller en Tourisme et Loisirs en Belgique.
Méthode(s) d'enseignement
L’UE est construite suivant 2 méthodes d’enseignement :
1/ Cours magistraux en anthropologie, culture artistique et géographie touristique à raison de 2/3 des séances du quadrimestre,
2/activités pratiques sous forme de workshop à raison de 1/3 des séances du quadrimestre.
Le workshop est un atelier de travail et d’échange par petits groupes d’étudiants (2 max) sur un sujet choisi.
L’objectif est de présenter les produits touristiques majeurs et reconnus par thème, par période et dans les principales villes belges
et leurs environs.
Il se déroule comme un « Salon des Vacances » où chaque groupe d’étudiants occupe un stand de présentation.
Evaluation et pondération au sein de l'UE
1-Participation obligatoire à toutes les activités et toutes les épreuves du workshop,
2-Obtenir 50% dans chacune des matières de base (anthropologie, culture artistique et géographie touristique)
et dans l’évaluation du workshop.
Evaluation workshop : 60 pts (30 pts participation au workshop / 30 pts examen à livre ouvert).
Evaluation cours de base : 60 pts (20 pts chacun)
En cas de 2e session, l’évaluation du workshop portera sur une présentation orale sous forme d’un workshop par groupe de 3 étudiants
et une évaluation écrite à livre ouvert.
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ISALT – 1 année – culture artistique
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2015-2016 - Activité d'apprentissage 02 14 TOU1 Comm1 0304
ISALT - 1 - Culture artistique
Acquis d'apprentissage spécifiques
Acquis d’apprentissage globaux :
A l’issue de cette activité d’enseignement, l’étudiant sera capable de :
- de présenter, conseiller et promouvoir le patrimoine culturel artistique belge (architecture-peinture-sculpture),
- maîtriser une méthode de lecture d’une œuvre d’art
Acquis d’apprentissage spécifiques:
1. Acquis spécifiques liés à la compétence « Mobiliser des savoirs théoriques et pratiques » :
A l’issue de cette activité d’enseignement, l’étudiant sera capable de :
- Comprendre et utiliser le vocabulaire et la méthodologie spécifique à la lecture d’une œuvre d’art
- Connaître le contexte chronologique des grands courants de création
- Connaître la localisation des principaux musées et lieux d’exposition en Belgique
- Comparer la démarche de création des principaux courants d’art belge et de plasticiens belges de notoriété
2. Acquis spécifiques liés à la compétence « Analyser les données utiles à la réalisation de sa mission » :
A l’issue de cette activité d’enseignement, l’étudiant sera capable de :
- Rechercher, identifier et exploiter l’information et la documentation en lien avec la création artistique belge
- Analyser une œuvre d’art
- Développer un esprit critique devant à une œuvre d’art
3. Acquis spécifiques liés à la compétence « Communiquer : écouter, informer et conseiller la clientèle touristique » :
- Conseiller un public averti ou non de la spécificité et des atouts du patrimoine artistique belge
Contenu de l'activité
-
Définition de la notion de patrimoine culturel matériel,
Localisation et identification des principaux musées et lieux d'exposition,
Notions d'esthétique et critères d'analyse pour la lecture d'une peinture, architecture,sculpture,
Patrimoine architectural : architecture romane et gothique,
Ars Nova et le 15e siècle dans nos régions,
Peinture au 16e siècle : l'atelier de Pierre Bruegel,
Rubens et l'art baroque dans les Pays-Bas du Sud,
Architecture 19e & 20e siècles : entre Eclectisme et Art Nouveau /Art Déco et modernité,
Introduction à la peinture belge de la fin du 19e à aujourd'hui.
Méthode de l'enseignement de l'activité
Cours magistral :
Approche à la fois chronologique et thématique.
Lectures et analyses esthétiques d'oeuvres d'art avec supports visuels
Visites guidées sur le terrain
Mode d'évaluation de l'activité
Examen oral : 20 points sur 90
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ISALT – 1 année – culture artistique
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Table des matières
chap. 1 :
Notions d'esthétique
p.
chap. 2 :
Critères d'analyse pour l'étude d'une peinture,
d'une sculpture, d'une architecture
p. 10
chap. 3 :
Patrimoine de l'UNESCO
p. 17
chap. 4 :
Fin du 19e siècle / époque contemporaine :
Tendances de la peinture en Belgique
p. 20
chap. 5 :
Belgique romane
p. 51
chap. 6 :
Belgique gothique
p. 61
chap. 7 :
L’Ars Nova ou
Peinture dans les anciens Pays-Bas au 15e siècle
p. 67
chap. 8 :
Introduction à l'histoire des anciens Pays-Bas
p. 76
chap. 9 :
Jérôme Bosch
p. 81
chap. 10 :
Pierre Bruegel l'Ancien
p. 84
chap. 11 :
17e siècle: le baroque dans les Pays-Bas du Sud
p. 89
chap. 12 :
Architecture : le néo-classicisme et l’éclectisme
p. 99
chap. 13 :
Architecture : l'Art Nouveau
p. 100
chap. 14 :
Architecture : l'Art Déco et le modernisme
p. 105
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« Je ne peins pas ce que je vois, je peins ce que je pense. »
« La peinture n’est pas faite pour décorer les appartements.
C’est une arme de guerre offensive contre l’ennemi. »
PICASSO (1881-1973)
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Chap. 1
Notions d'esthétique
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1.1. questions sur l'art :
- l’art est-il luxe ou nécessité ?
- à quoi sert l'art ?
- le beau est-il l’agréable ?
- l'art est-il en rapport avec le sacré ?
- le beau est-il une affaire de goût personnel ?
- y a-t-il un progrès dans l'art (évolution historique) ?
- la peinture est-elle une affaire de beauté ?
- l'art est-il représentation (imite-t-il la nature) ?
___________________________________________________________________________
1.2. Introduction :
C’est au 17e siècle que se pose la question du sens du beau. Le beau ne va
pas de soi, il est ce qui touche à la sensibilité.
Comprise comme la « science du beau », l’esthétique est une partie de la
philosophie qui consiste en un ensemble de réflexions théoriques concernant
le beau et l’art depuis l’origine platonicienne de la philosophie jusqu’à nos
jours.
L’esthétique nous informe sur l’évolution historique des critères rationnels de la
beauté au sein de la société occidentale.
Aujourd'hui, une œuvre contemporaine s’apprécie à partir de critères issus de
la subjectivité.
Du point de vue de l’esthétique (aisthesis/sensation), l’art est ce qui plaît à la
sensibilité du spectateur au travers de sa subjectivité absolue.
1.3. Le sens de l'art :
Depuis toujours la vocation profonde de l’art a été d’incarner dans un
matériau sensible une vérité tenue pour supérieure à l’homme : l’idée du
Beau.
1) dans l’Antiquité grecque, dire la vérité dans l’art c’était exprimer
l’harmonie du cosmos.
L’art est l’incarnation dans un matériau sensible (sonore pour la musique,
plastique pour la sculpture, picturale pour la peinture) d’une vérité cosmique,
de l’harmonie du grand tout. Platon a toujours associé l’idée du Beau ave
celle d’un ordre où doit régner « la mesure des proportions ».
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2) Au Moyen Age, le but de l’art devient l’expression de la splendeur divine,
de la vérité de Dieu. La valeur essentiellement morale du concept de Beauté
prend une importance capitale.
Tout art religieux a cette ambition. L’artiste est un intercesseur, un
intermédiaire entre un monde supérieur et extérieur aux êtres humains.
En tant qu’intercesseur, son nom n’a aucune importance ; l’artiste n’est pas
vraiment un "inventeur", il peut d’ailleurs répéter les mêmes oeuvres, exploiter
les mêmes thématiques.
3) Avec l’apparition au 17e siècle de la notion de goût, c’est-à-dire la
capacité subjective de distinguer le beau du laid, toutes les certitudes
objectives s’écroulent. Dans les sociétés modernes, l’art va devenir
l’expression d’une personnalité : celle d’un individu (l’artiste) libéré de son
rapport exclusif au monde ou à Dieu.
Cette version moderne de l’art s’inscrit dans le contexte de la Révolution
française avec la naissance de la laïcité et la sécularisation du monde.
Dès ce moment, la loi, au sens juridique du terme va trouver sa source dans
les êtres humains réunis en assemblée nationale.
La loi est engendrée par les êtres humains et non plus par transcendance
cosmique comme chez les Grecs ou religieuse comme dans toutes les
civilisations connues à ce jour. On assiste à la naissance de l’humanisme
politique.
Le même phénomène se développe dans l’univers de la culture.
La notion d’artiste libre apparaît avec l’idée que l’œuvre n’est plus le reflet
ou l’imitation d’un ordre cosmique extérieur aux hommes comme elle l’était
chez les Grecs ni non plus le reflet ou, l’imitation d’un ordre divin extérieur aux
hommes comme elle l’est dans tout l’art chrétien mais aussi dans tout l’art
hindouiste, musulman, …
L’œuvre devient le produit de la personnalité ou l’expression complexe d’un
individu.
Cet humanisme esthétique fait le lien entre le particulier et l’universel.
4) Quant au 20e siècle, il a réalisé l’hypothèse de Nietzsche pour qui « la vérité
d’une œuvre d’art se trouve dans l’artiste, non plus dans la nature ou la
divinité ».
1.4. L’esthétique comme discipline " moderne " :
C‘est à la fin du 18e siècle que l’esthétique se définit comme discipline à part
entière, chargée d’établir des règles universelles du jugement de goût, par
l’étude systématique des critères d’identification de la valeur esthétique
d’une œuvre.
En publiant Aesthetica en 1750, le philosophe allemand Baumgarten (17141762) défend l’autonomie du sensible d’où le divin se retire sans cesse
davantage au profit de l’humain.
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Au 18esiècle, Kant et Hegel théoriseront la problématique du beau en une
véritable science de l’art, une esthétique.
L'art doit participer à l'élévation morale.
1.5. Qu'est-ce que le beau ?
Comme le note B. Vergely, " le beau n'est pas l'agréable.
L'agréable est subjectif car il est une affaire de goût purement sensible.
Pourquoi préfère-t-on les glaces à la fraise aux glaces à la pistache ou le vin
de Bordeaux au vin de Bourgogne ? C'est là une affaire de réactions propres
à chacun plongeant leurs racines dans l'histoire de chaque sensibilité."
Avec le beau il en va autrement. Quand on dit : "c'est beau", on prononce un
jugement. On ne se contente pas de sentir, on relie ce qui est ainsi senti à une
pensée.
Le beau nous donne à penser, il est un approfondissement de la réalité; un
paysage, une musique, un poème nous laissent songeurs.
Ils nous ont fait sentir qu'il y a quelque chose dans la vie de plus fort que le
simple plaisir de vivre.
La vie a une âme et cette âme est la profondeur de la vie. Voilà ce que le
beau signifie.
Le beau n'est pas relatif, il est au contraire rapport à l'absolu sous la forme de
l'esprit qui donne une âme et une vie à la réalité.
1.6. La beauté et l'élévation de l'âme vont de pair :
Platon (428-348 av J.-C.), dans Le banquet, énonce la vérité du beau : "le
beau est élévation, par une contemplation progressive et ascendante qui fait
passer de la beauté des corps à la beauté des âmes, de la beauté des âmes
à la beauté des actions, de la beauté des actions à la beauté des discours et
de la beauté des discours à la beauté de l'idée qui les inspire.
Lorsque la lumière de l'esprit illumine la vie de l'intérieur, nous sommes en
présence du beau."
1.7. La peinture est-elle affaire de beauté ? :
On a pensé la peinture comme représentation d'une belle chose, puis
comme belle représentation d'une chose.
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La trahison des images
(Ceci n'est pas une pipe)
René Magritte
1928/29 - huile sur toile - 62,2 x 81 cm - Los Angeles - County Museum.
Il existe 17 versions différentes de cette œuvre ; 10 à l’huile, 4 à la gouache.
René Magritte, peintre surréaliste belge (1898 - 1967) a peint un tableau
représentant une pipe parfaitement imitée au-dessous de laquelle était écrit
"ceci n'est pas une pipe".
Paradoxe ?
Pourquoi écrire au-dessous de cette image de la pipe" ceci n'est pas une
pipe" alors qu'il s'agit d'une pipe ?
Parce qu'il s'agit pour Magritte, de dire la vérité de la peinture dont le but
n'est pas tant d'imiter la réalité que d'ouvrir l'espace qui va du réel au surréel.
Magritte a raison : une pipe que l'on peint n'est pas une pipe. C'est une
image d'une pipe. En outre ce n'est même pas une image d'une pipe. C'est
l'image d'une pipe qui n'existe pas et qui n'existera jamais.
Le peintre peint le monde tel qu'il l'imagine et non tel qu'il le voit. Même
quand il peint à la perfection.
Le peintre ne nous montre pas le monde reproduit à l'identique, le tableau
décrit par Magritte n'est que pure illusion.
En fait, dans ce tableau nous avons affaire à trois choses : à l'irréalité d'une
illusion bien montée, à la vérité du réel tel qu'il est et à un jeu de va et vient
entre les deux.
1.8. A quoi sert l'art ?
L'art est souvent vu comme un luxe qui vient après le nécessaire.
Mais est-il sûr que l'art ne soit qu'un luxe ?
Bergson a eu raison de souligner que l'art est au service de la liberté. Nous ne
savons plus, en effet, regarder le monde dans sa liberté tant notre regard est
obscurci par la quête de l'utile.
Au nom de l'efficacité et du profit, on en arrive à sacrifier la poésie et l'art en
découvrant parfois trop tard qu'un monde sans pensée et sans art est un
monde humainement absurde.
L'art et la pensée ont une mission spirituelle qui consiste à vivre de l'intérieur.
Ils sont une nécessité intérieure.
L'art se présente donc d'une manière paradoxale. Haut lieu de subjectivité
qui est celle de l'artiste mais aussi de chaque spectateur, il vise cependant à
l'universalité. Il dépasse l’individuel et tend à l’universel.
Témoin de son temps et de l'époque qui l'a vu naître, l'art s'en échappe
néanmoins pour témoigner à sa manière d'une certaine idée de l'humanité.
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1.9. définitions : in Les grandes interrogations esthétiques, B. Vergely
agréable : c'est ce qui agrée la sensibilité de chacun. L'agréable qui relève
du plaisir délivré par le sensible n'est pas le beau qui est un sens émanant du
sensible.
art : si la culture est ce que l'homme introduit dans la nature en cultivant
celle-ci, l'art est ce que le génie humain introduit dans la culture en
transformant celle-ci.
beau : le beau désigne ce qui est idéal, harmonieux, éclatant. Loin d'être
subjectif, il renvoie à la part de sens qui, se dégageant de la sensibilité, fait
vivre une sensibilité universelle.
1.10. références bibliographiques :
HAAR, M.
1994
L’œuvre d’art, Optiques philosophie, éd Hatier,
HUISMAN, D.
1954
L’esthétique, Que sais-je, PUF,
VERGELY, B. Les grandes interrogations esthétiques, Les Essentiels de Milan,
1999
LENOIR, B.
1999
L’œuvre d’art, Corpus, éd Flammarion,
FERRY, L.
1998
Le sens du beau, éd Cercle d’art,
BEGEL, F.
1999
La philosophie de l’art, Mémo, Seuil,
KANDINSKY, W.
1954
Du spirituel dans l’art, Folio,
BALZAC, H.
1981
Le chef d'oeuvre inconnu, Flammarion
REZA, Y.
1998
Théâtre, Art, éd. Le Livre de Poche, Albin Michel
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Chap. 2
Clés de lecture pour l'analyse d'une peinture, d'une
sculpture, d'une architecture.
____________________________________________________________
2.1. Introduction :
L'histoire de l'art envisage l'étude d'une oeuvre, son analyse esthétique,
l'étude de son époque et de son esprit,
C'est aussi une recherche sur les circonstances dans lesquelles une oeuvre est
créée: qui en a eu l'idée, qui l'a commandée et payée, quels étaient les
critères de goût, les directives reçues par l'artiste, la destination de l'oeuvre.
L'art constitue un langage en soi fait comme tous les langages de signes
ayant une charge culturelle, allégorique.
La peinture s'efforce de créer par un jeu combiné de formes, lumières et
couleurs, un paysage, un portrait, une idée.
L'artiste selon sa conception personnelle met l'accent sur la forme et le dessin,
sur la couleur.
Les formes s'expriment par des lignes (et donc aussi par des surfaces et des
volumes), des couleurs, des valeurs (lumière), une matière.
"Se rappeler avant tout qu'un tableau avant d'être un cheval de bataille, une
femme nue ou un quelconque objet est une surface plane recouverte de
couleurs en un certain ordre assemblé" (M. Denis).
2.2. Clés de lecture pour l'analyse d'une peinture
A/ identification
1. nom de l'oeuvre - nom de l'artiste - lieu de conservation – dimensions date.
Devant un tableau, il faut situer l'oeuvre dans l'évolution générale de l'art.
Se rappeler les grandes lignes de la biographie de l'artiste (très souvent les
étapes de la vie permettent de mieux comprendre l'évolution artistique du
peintre).
Rechercher les diverses influences qui ont marqué l'artiste, l'influence d'une
époque, d'autres artistes...
Rechercher les procédés personnels de l'artiste : comment il nous
communique ses impressions. Ici interviennent non seulement le dessin,
l'attitude, la composition, mais aussi les couleurs et la technique picturale.
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2. sujet :
La peinture est liée au sujet. Traditionnellement, les sujets, au nombre de 4,
sont imposés à l'artiste;
- la peinture d'histoire
- le portrait
- le nu
- le paysage
Dès la deuxième moitié du 19e siècle, la modernité délaisse le sujet au profit
de l'acte de peindre.
Au travers de ses tableaux, le peintre exprime sa vision personnelle : un même
sujet sera interprété selon la personnalité de chacun, de manière différente.
Chaque artiste trouve des procédés qui forment son propre mode
d'expression, résultat de nombreuses années de recherches et de
tâtonnements.
B/ données esthétiques
1 - techniques et matériaux :
Deux procédés sont fréquents :
1) techniques à l'eau:
- a tempera qui signifie en italien à la détrempe désigne toute peinture dont
le diluant est l’eau. Le liant peut être une gomme, une colle, du jaune d’œuf,
de la caséine, …
- gouache: pour éclaircir les couleurs, le peintre utilise du blanc.
- aquarelle: la couleur est éclaircie par addition d'eau; le blanc n'est pas
utilisé, les zones blanches sont laissées vierges.
- fresque (de l'italien fresco, frais), peinture à l'eau appliquée sur un enduit
frais, couvrant un mur; la qualité de l'enduit est primordiale pour la bonne
conservation de la fresque. L'eau séchant très vite, cette technique permet
un travail rapide, très minutieux, mais le nombre de retouches est limité, et les
dégradés sont difficiles à obtenir.
2) technique à l'huile:
Elle est apparue au 15e siècle. Technique qui utilise un mélange de pigments
et d’huile siccative permettant d’obtenir une pâte plus ou moins consistante.
L’huile utilisée est généralement l’huile de lin. S'étalant facilement, elle
permet d'obtenir des dégradés et des glacis, c'est-à-dire des effets de
transparence.
2 - dessin / couleur :
Deux tendances :
- prédominance du dessin, de la ligne, dans ce cas les tons seront
généralement froids, contrastants; ils soulignent les lignes essentielles et
mettent en relief des formes sculpturales.
- prédominance de la couleur : les tons sont plus vibrants, ils forment une
harmonie délicate où chaque couleur semble réagir sur sa voisine; les
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contours sont quelquefois noyés; le modelé est obtenu par des tons dégradés
où l'ombre entoure la forme.
La couleur: la source de lumière première est le soleil qui produit une lumière
blanche.
Les couleurs apparaissent lorsqu'un faisceau de lumière blanche traverse un
prisme.
Il y a 6 couleurs fondamentales: rouge, orangé, jaune, vert, bleu, violet.
Parmi ces 6 couleurs, 3 sont primaires car leur mélange permet de retrouver
les autres: bleu, jaune, rouge.
Les 3 autres sont secondaires et obtenues à partir du mélange de 2 couleurs
primaires
violet = rouge + bleu
vert = jaune + bleu
orangé = jaune + rouge
La couleur complémentaire d'une couleur est celle qui n'entre pas dans sa
composition:
- le jaune a pour complémentaire le violet
- le rouge a pour complémentaire le vert
- le bleu a pour complémentaire l'orangé
Deux couleurs complémentaires s'exaltent mutuellement, se mettent en
valeur.
Un couple de complémentaires est formé d'une couleur chaude et d'une
couleur froide.
couleurs froides: vert, bleu, violet / couleurs chaudes: rouge, orangé, jaune
Sur un tableau, une couleur chaude donne l'impression d'avancer, une
couleur froide l'impression de reculer, créant ainsi une notion de spatialité.
Il y a les couleurs neutres: blanc, gris, noir.
Attention, le marron n'est pas une couleur, c'est une teinte obtenue à partir
de rouge, d'orangé, donc à analyser comme une couleur chaude.
Le choix des couleurs est important : il est à lui seul un moyen d'expression.
3 - espace - profondeur - relief :
Il s'agit de préciser la conception de la profondeur.
L'espace peut être rendu par la perspective linéaire centrée sur un point de
fuite ou par la perspective chromatique basée sur la juxtaposition de couleurs
chaudes et froides.
L'espace peut être rétréci, on parle alors de bidimensionalité, unité fond et
forme, impression de planéité.
La perspective obtenue par le dessin, peut être intensifiée par les coloris :
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1) dégradé de couleurs : la lumière varie selon la profondeur : au premier
plan les couleurs sont accentuées dans les lointains, les tons tendent à
s'uniformiser pour atteindre un bleu ou un gris très pâle = perspective
atmosphérique.
2) les plans sont bien marqués par le dessin et les lignes de perspective, les
couleurs étalées en tons opposés les accentuent.
remarque : perspective morale
A certaines époques, les personnages importants ne sont pas représentés
avec la grandeur qui correspond à la place qu'ils occupent dans l'espace,
mais selon leur importance sociale ou religieuse : exemple un dieu, un roi sera
plus grand que les simples hommes même s'il est sur un même plan.
4 - construction :
Il s'agit de préciser la conception de la composition ; selon les époques, selon
les écoles, les artistes utilisent une composition pyramidale, symétrique,
diagonale, asymétrique, centrée, dynamique...
L'utilisation d'une composition est souvent déterminée par le sujet.
- composition classique :
*symétrique, les lignes convergent vers le centre
*l'attention du spectateur est attirée vers le thème essentiel du tableau
* le ou les personnages principaux occupent le centre vers lequel convergent
toutes les lignes du décor
* certaines compositions sont rigoureusement symétriques, dans chaque ligne
; d'autres peuvent présenter une simple symétrie de masse.
- composition diagonale :
* la scène est présentée sur une ligne oblique, pour accentuer le thème du
tableau (montée, ascension, descente, chute)
*disposition utilisée pour un thème à tendance héroïque, dramatique.
- composition ouverte :
*la mise en page se fait sur une ligne verticale ou oblique, sans fin : la scène
semble se prolonger au-delà du tableau
*il n'y a plus un seul personnage important mais un ensemble,
*cette composition est utilisée pour des sujets dynamiques.
- composition asymétrique :
*fait valoir des effets de déséquilibre, de discordance,
* accentue les différences entre les personnages, les oppositions de masses,
*suscite une impression d'angoisse, de déséquilibre.
5 - forme :
Elle peut être ouverte (plus libre, plus spontanée) ou fermée (plan
géométrique, volumes nettement définis).
6 - ligne:
préciser comment la ligne est conçue.
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7 - matière, touche :
Il faut distinguer l'emploi des pinceaux, brosses ou couteaux, l'utilisation de la
touche de couleur non apparente, très petite ou au contraire très marquée,
de forme carrée ou ronde, pour mieux construire un paysage.
La pâte peut être fine, unie ou épaisse avec des effets de lumière qui
s'accrochent.
8 - valeur, lumière:
Comment la lumière est-elle traitée ? Vient-elle de l'extérieur (clair-obscur) de
la couleur ?
C/ appréciation personnelle
L'analyse sera terminée par une appréciation personnelle : il faut laisser le
spectateur s'exprimer librement, le forcer à énoncer ce qu'il ressent; cet effort
aiguisera sa sensibilité.
D/ bibliographie
2.3. Clés de lecture pour l'analyse d'une sculpture :
La sculpture est un art de l'espace comme l'architecture; elle occupe et
déplace l'espace et se distingue ainsi de la peinture.
A/ identification
1 - nom de l'oeuvre - nom de l'artiste - lieu de conservation - date.
Retracer l'évolution des oeuvres de l'artiste, les passages essentiels de sa
biographie, ses modèles, ses références, les tendances, les influences qu'il a
connues.
2 - Sujet :
source d'inspiration, oeuvre commandée ou suggérée à l'artiste par sa
volonté de conserver une émotion artistique.
Destination : varie selon les milieux, les époques, les civilisations : l'oeuvre peut
avoir un but religieux, civil ou être simplement pour l'artiste un moyen de se
libérer.
B/ données esthétiques :
1 - proportions :
Pour la représentation de la figure humaine les proportions ont varié selon les
époques, les styles.
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Les Grecs à la recherche d'une esthétique humaine ont établi des proportions
idéales de la beauté parfaite (évaluée par rapport à la tête qui doit être
contenue 7,5 fois dans le corps).
Mais selon les époques, les écoles, on trouve des dimensions plus trapues ou
plus élancées.
Proportion élancée : silhouette humaine étirée.
-but religieux (sculpture du moyen âge), suggérer l'âme qui s'élance vers le
ciel, son impatience.
-évocation du mouvement, de l'agilité, de l'émotion qui agite le personnage;
-recherche de l'élégance, accentuer l'effet gracieux d'une silhouette.
Proportion trapue : ces formes suggèrent la force, la pesanteur, la stabilité.
2 - techniques et matériaux:
Une sculpture peut être modelée ou taillée. Elle est en ronde-bosse ou en
relief.
Une sculpture en ronde-bosse est indépendante, le spectateur peut tourner
autour de l'oeuvre.
Une sculpture en relief est solidaire du support. Suivant sa profondeur, on
parle de :
- méplat, faible relief aplati;
- bas-relief, la forme se détache à peine du fond;
- moyen-relief, la forme se détache à moitié du fond;
- haut-relief, la forme se détache presque totalement du fond.
- la gravure: le trait est en creux.
3 - axes ou directions des mouvements
4 - profils c'est-à-dire les dessins de la sculpture dans l'espace, série de dessins
qui s'organisent dans l'espace
5 - modelé
6 - volume et espace
espace limite: espace qui pèse sur les formes, qui empêche les excès de
mouvements, de saillies, qui tend à bloquer ces volumes dans une forme
unique.
espace milieu ou espace partenaire: espace où les volumes se libèrent. La
sculpture et l'espace cohabitent, l'air circule.
7 - détails stylistiques et décoratifs.
C/ appréciation personnelle:
- rechercher si l'impression que l'artiste a voulu évoquer est ressentie.
- voir si l'harmonie idéale est atteinte par l'équilibre du balancement des
masses et par les lignes d'ensemble.
La forme ne doit pas nécessairement être symétrique, de chaque côté d'un
axe central des volumes de même importance doivent correspondre.
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ISALT – 1 année – culture artistique
16
- remarquer l'influence de la matière sur la forme: les réalisations en bois et
bronze peuvent avoir des attitudes très libres : danse, mouvement...
La pierre exige des formes plus ramassées, plus globales, plus massives.
Une forme sera adaptée à la matière s'il faut pas utiliser de faux procédés de
stabilité (tenons...).
D/ bibliographie:
2.4. Clés de lecture pour l'analyse d'une architecture :
A /données historiques:
1 - nom de l'oeuvre
2 - nom de l'architecte: retracer l'évolution de son oeuvre, les passages
essentiels de sa biographie, ses références, ses tendances.
3 - lieu
4 - date
B / données esthétiques:
1 - programme : L'adaptation de la construction à sa fonction
2 - matériaux, techniques :
3 - analyse formelle :
- plan
- coupe, élévation, axe
- structure
- masses
- recherche d'effets
- espace
- échelle
- liaison avec paysage, l'environnement.
C/ appréciation personnelle
D/ bibliographie
e
ISALT – 1 année – culture artistique
17
Chap. 3
Le patrimoine mondial de l’UNESCO :
Les sites matériels classés en Belgique
___________________________________________________________________________
L’Unesco1 développe son action dans les domaines de l’Education, des
Sciences naturelles et exactes, des Sciences humaines et sociales, de la
Culture, de la Communication et de l’Information.
L’Unesco distingue le patrimoine matériel du patrimoine immatériel :
Le patrimoine immatériel - ou patrimoine vivant, inclut les traditions
orales, les arts du spectacle, des pratiques sociales, des rituels et
événements festifs, l’artisanat traditionnel, en résumé, il s’agit des
manifestations des cultures dites traditionnelles et des savoir-faire.
La Belgique compte 9 pratiques et expressions culturelles inscrites au
patrimoine culturel immatériel de l’humanité par l’Unesco.
Le carnaval de Binche (2003), le carnaval d’Alost (2010), la procession
du Saint-Sang à Bruges (2009), la fauconnerie(2010),la foire annuelle
d’hiver et marché au bestiaux à Hautem-Saint-Liévin (2010), la fête du
feu et du pain de la fin de l’hiver à Grammont (2010), les géants et
dragons processionnels (2008), les répertoires du rituel des classes
d’âge à Louvain (2011), les marches de l’Entre-Sambre-et-Meuse
(2012).
Le patrimoine matériel rassemble le patrimoine culturel et le patrimoine
naturel.
Signée en 1972, la Convention de l’Unesco2 a défini une liste du
patrimoine matériel mondial qui comptait déjà 754 biens : 1 au
Botswana, 1 en Azerbaïdjan, 1 en Gambie, 2 en Irak, 31 en Chine, 8 en
Belgique, 37 en Espagne, 18 aux Etats-Unis, 27 en France, 37 en Italie...
Pour figurer sur la liste du patrimoine mondial, les sites doivent avoir une
valeur universelles exceptionnelle et satisfaire à au moins un des 10
critères de sélection définis par la Convention de l’Unesco.
Cette liste est sans cesse modifiée et nombreux sont les sites ajoutés.
1
whc.unesco.org
2
UNESCO : L'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture est une
institution spécialisée du Système des Nations Unies créée le 16 novembre 1945.
UNESCO signifie United Nations Educational, Scientific and Cultural Organisation.
e
ISALT – 1 année – culture artistique
18
Avec ses 11 sites classés, la Belgique est bien placée dans ce classement.
Sites matériels du patrimoine mondial de l'Unesco en Belgique : 3
(liste établie par l'Unesco entre 1998 et 2012)
1- Bruges : centre historique : exemple exceptionnel d’habitat médiéval qui
atteste du rayonnement international d’une capitale commerciale et
culturelle de l’époque.
2 - Béguinages flamands : ensembles architecturaux qui témoignent de la
vie de religieuses indépendantes, une tradition remontant au Moyen Age
qu’on trouve uniquement dans le nord-ouest d el’Europe.
3 - Cathédrale Notre-Dame de Tournai : construite dans la première moitié
du XIIe siècle, elle se distingue par une nef romane d’une ampleur
exceptionnelle et par un chœur gothique.
4 - Bruxelles : Grand-Place
L’Hôtel de ville est construit entre 1400 et 1450. Devenue centre politique de
la ville, la place attire les corporations qui voient dans la construction de leurs
maisons respectives un moyen d’affirmer et de défendre leurs privilèges. En
1695, la place est presque entièrement détruite par les bombardements
ordonnés par Louis XIV. Elle sera reconstruite dès 1696, les magistrats de la ville
voulant effacer au plus vite les traces de cet affront.
5 - Bruxelles : les maisons particulières de l'architecte Victor HORTA, initiateur
de l’Art Nouveau en Belgique
6 - Bruxelles : maison STOCLET (Woluwé-Saint-Pierre) entièrement
imaginée et réalisée par l’architecte viennois Joseph Hoffmann et les
« ateliers viennois » entre 1905 et 1911. Chef d’œuvre de la Sécession
viennoise conçu comme une œuvre d’art total.
7 - La Louvière/ Le Roeulx : les 4 ascenseurs du Canal du Centre : Ces
monuments industriels de la fin du 19e siècle sont les seuls au monde à
fonctionner selon le mécanisme d’origine.
8 - Les beffrois de Flandre et de Wallonie,
Ils sont les symboles du passage du féodalisme à une société urbaine
marchande.
9 - Anvers : Musée Plantin Moretus (2005) : maison et ateliers
10 -Mons : les minières néolithiques de silex de Spiennes
3
www.opt.be
e
ISALT – 1 année – culture artistique
19
11 - 4 sites miniers : Grand-Hornu,
Bois du Cazier,
Bois-du-Luc,
Blegny-Mine.
Ces 4 sites représentent les lieux les mieux conservés de l’exploitation
charbonnière en Belgique, du début du 19e à la seconde moitié du
20e. Complémentaires, ces 4 sites miniers forment un ensemble
cohérent.
Grand-Hornu compte parmi les plus beaux lieux du patrimoine néo-classique
d’Europe. Développé en 1810, sous l’impulsion d’Henri De Gorge, il couvre
une superficie de 6 hectares et se compose d’un complexe industriel et
urbanistique. Ce charbonnage est l’un des premiers à fermer ses portes dans
le Borinage en 1954.
Aujourd’hui, le site du Grand-Hornu, entièrement reconverti, est dédié à l’art
contemporain. Implanté sur le site du charbonnage, le Mac’s (Musée des Arts
Contemporains de la Communauté française) se présente comme un nouvel
espace conçu par l’architecte Pierre Hebbelinck.
Bois-du-Luc : situé au cœur du bassin industriel du Centre, entre Borinage et
le bassin de Charleroi, il recouvre l’ensemble des réalisations techniques et
sociales de l’une des plus anciennes houillères d’Europe.
Dès 1853, la cité ouvrière sera le noyau d’un exceptionnel village ouvrier qui
comprend, outre une cité, une série d’infrastructures collectives, telles des
écoles, un hospice, un hôpital, une église, un parc, une épicerie, une salle de
fêtes… L’ensemble forme un microcosme au sein duquel les lieux de vie sont
fusionnés aux lieux de travail.
Bois du Cazier : Situé à Marcinelle, il est depuis 2002, un lieu de mémoire
dédié aux victimes de l’accident survenu en 1956.
Blegny-Mine : Encore exploité au début des années 1980, le site
témoigne de l’activité charbonnière liégeoise
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ISALT – 1 année – culture artistique
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Chap. 4
fin du 19e siècle / époque contemporaine :
tendances de la peinture en Belgique
___________________________________________________________________________
4.1. introduction
Les 2 dernières décennies du 19e siècle sont pour l’art belge une période de
renouveau : le travail de pionnier de James Ensor, la sculpture de George
Minne, les procédés pointillistes, les mouvements symboliste et réaliste.
En architecture, Paul Hankar, Victor Horta, Gustave Serrurier-Bovy et Henry
Van de Velde sont parmi les précurseurs de l’Art Nouveau.
La poésie d’Emile Verhaeren, les œuvres de Maurice Maeterlinck et les
romans de Georges Rodenbach constituent les œuvres majeures de la
littérature symboliste.
Dans le domaine musical, César Frank et Guillaume Lekeu composent des
œuvres de renommée.
Le Théâtre de la Monnaie fait référence en matière d'opéras wagnériens.
Des compositeurs français viennent créer leurs oeuvres à Bruxelles.
Un des violonistes les plus connus est Eugène Ysaÿe. Il se consacre avec
passion à faire connaître les oeuvres de musique de chambre composées
pour lui par César Frank, Guillaume Lekeu et Joseph Jongen.
L'influence des écrivains symbolistes belges sur la musique française de
l'époque est importante.
L'exemple le plus célèbre est sans aucun doute "Pelléas et Mélisandre" de
Claude Debussy, inspiré par la pièce homonyme de Maeterlinck (Prix Nobel
de littérature –1911).
En 1884, la première exposition du groupe des Vingt constitue un événement.
Le groupe des XX est une association de vingt artistes belges pour la plupart,
dont l’unique programme consiste à organiser des expositions annuelles
(salons) auxquelles chaque membre est chargé d’inviter un certain nombre
d’artistes.
Ils organisent également des concerts et des conférences.
Leur volonté est de faire de Bruxelles un centre d’avant-garde aussi important
que Paris.
Des revues artistiques telles L’Art Moderne soutiennent ce projet.
Soutenus par les trois principaux promoteurs de l’art moderne en Belgique,
Octave Maus, Edmond Picard et Emile Verhaeren, les XX demeurent jusqu’à
la dissolution du groupe en 1893, le vecteur principal de l’avant-garde belge.
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ISALT – 1 année – culture artistique
21
Cette période de révolution industrielle place la Belgique au premier rang des
pays industrialisés.
Ce contexte entraîne l’extension d’une bourgeoisie aisée ; Salons, galeries,
sociétés d’expositions abondent.
Mais la richesse industrielle est inégalement répartie ; les tensions sociales sont
avivées par des injustices sociales telle la restriction du droit de vote à une
minorité.
Maus, Picard, Verhaeren et d’autres représentants de la vie culturelle et
intellectuelle sont des réformateurs convaincus aux idées de gauche. On
assiste à une rencontre entre de nombreux artistes et le parti socialiste (le
parti Ouvrier belge est fondé en 1885).
En 1908, l’annexion par l’Etat belge du Congo, précédemment propriété
personnelle de Léopold II contribue à accroître les ressources et les richesses
du pays.
A partir de 1912, les galeries d’art jouent un rôle croissant dans la promotion
des artistes belges ; galerie Giroux - Sélection – Le Centaure - galerie
Schwarzenberg.
Entre 1880 et 1940, les styles et les courants artistiques sont nombreux ; au
réalisme succède l’impressionnisme, le néo-impressionnisme, le symbolisme, le
luminisme. Puis apparaissent le futurisme, l’abstraction, l’expressionnisme le
dadaïsme et le surréalisme.
Mouvements et groupes vont et viennent en l’espace de quelques années.
4.2. James ENSOR (1860 - 1949)
En peinture, la modernité apparaît avec l'oeuvre d'Ensor.
Partant du réalisme, sa peinture s'inscrit dans le courant impressionniste puis
symboliste et annonce l'expressionnisme.
Né à Ostende, sa mère est d'origine flamande, son père d'origine anglaise. Sa
famille possède une boutique de souvenirs (coquillages, objets exotiques,
masques) qui deviendront ses thèmes d'inspiration favoris.
De 1877 à 1880, il suit des cours à l'Académie de Bruxelles mais est déçu de
l’enseignement : « Une boîte à myopes, des professeurs mal embouchés,… ».
Il se lie d'amitié avec la famille du professeur Rousseau qui l'introduit dans les
milieux intellectuels et artistiques bruxellois.
En 1880, il s'installe définitivement à Ostende.
*Le lampiste -1880 – 151 x 91 cm – Musées Royaux des Beaux-Arts –
Bruxelles
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ISALT – 1 année – culture artistique
22
Ses premières oeuvres sont des études académiques, des petits paysages des
environs d'Ostende qui s'inscrivent dans la tradition naturaliste.
Ses marines sont remarquables par la justesse des notations atmosphériques
et le rendu des effets lumineux.
Il s’efforce d’interpréter les effets de la lumière sur les objets.
Dans ses "intérieurs bourgeois", les sujets et les objets sont empruntés à son
entourage, à son milieu familial ; sa mère, son père, sa sœur sont ses modèles,
les pièces de la maison, le décor. Ces scènes intimistes évoquent par leur
atmosphère feutrée et leur chromatisme austère, l'art de Bonnard et Vuillard.
Sous l'influence des impressionnistes, il éclaircit progressivement sa palette et
utilise une touche plus légère.
Membre fondateur du groupe de XX, il expose chaque année malgré de
nombreux différents et ce, jusqu'à 1893, date de la dissolution du cercle.
* La dame en noir 1881 – 100 x 80 –Musées Royaux des Beaux-Arts Bruxelles
* La mangeuse d’huîtres,
1882 – 207 x 105 cm - Musée des Beaux-Arts - Anvers.
Vers la fin des années 1880 les couleurs d’Ensor explosent.
Masques, marionnettes, crânes et squelettes entrent peu à peu dans l’univers
pictural de J. Ensor qui critique la bourgeoisie. Ses figures sont cupides,
stupides et ridicules.
Les masques deviennent des figures réelles qui dérangent le spectateur. C’est
la revanche d’Ensor envers une société qui l’a mésestimé.
* Les masques scandalisés - 1893 – 135 x 112 cm - Musées Royaux des
Beaux-Arts - Bruxelles
* Les masques singuliers – 1892 – 100 x 80 cm - Musées Royaux des
Beaux-Arts - Bruxelles
* L’entrée du Christ à Bruxelles
(252,5 cm x 430,5cm) 1888 - Fondation Getty, Malibu, Los Angeles
Oeuvre-manifeste de la peinture d’Ensor.
Le Christ, sous les traits d’Ensor, et monté sur un âne presque perdu dans une
foule est reconnaissable à son auréole dorée.
« Jésus roi de Bruxelles » proclame l’image, cela signifie-t-il « Ensor, Roi des
peintres » ?
Une immense banderole rouge reprend le slogan « Vive la sociale », étalant
ainsi les opinions politiques de l’artiste en faveur des réformes sociales et du
suffrage universel. Jésus est devenu le réformateur Christ/Ensor.
Cette œuvre s’inscrit dans la tradition iconographique des joyeuses entrées
historiques des princes des anciens Pays-Bas. L’élément neuf réside dans le
fait du déferlement frontal de la foule des masques dont l’impact est si fort
que la frontière entre l’espace réel et l’espace pictural s’efface.
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ISALT – 1 année – culture artistique
23
Cette toile ouvre la voie à l'expressionniste.
Natures mortes et marines constituent d’autres éléments importants de
l’œuvre d’Ensor.
* Squelettes se disputant un hareng-saur 1891 – 16 x 21,5 cm – Musées
Royaux des Beaux-Arts – Bruxelles
* La raie - 1892 – 100 x 80 cm - Musées Royaux des Beaux-Arts – Bruxelles
Ensor invente un monde entièrement neuf où la lumière modifie les objets. Il
utilise la couleur posée par taches de tons purs, uniques et sans mélange :
crus, vibrants et violents.
La notoriété vient peu à peu grâce notamment à la famille Frank, mécènes
anversois .
1929 : rétrospective au Palais des Beaux-Arts de Bruxelles.
à retenir :
Maison James Ensor - Vlaanderenstraat 27 - 8400 Ostende
Musée des Beaux-Arts d’Ostende
4.3. le réalisme - 1850
Désigne à la fois l'école littéraire qui met en avant la description objective des
faits et des personnages de la réalité quotidienne et sociale (naturalisme de
Flaubert, Zola) et l'école picturale qui s'oppose à l'art officiel pour décrire la
réalité contemporaine et trouver une ressemblance exacte avec le modèle.
En France, Gustave Courbet (Ornans 1819-1877) principal représentant du
réalisme provoque une révolution dans la peinture.
Son tableau manifeste L'Enterrement à Ornans -1849 - musée d'Orsay -Paris,
fait scandale à cause du caractère populaire du cortège funèbre.
Courbet rompt avec la tradition officielle de la peinture. En 1861, il écrit : "la
peinture est un art concret ", "le sujet doit appartenir au domaine des choses
existantes et réelles".
Courbet n’est pas novateur dans le domaine de la peinture mais ses sujets
sont révolutionnaires.
Il s'intéresse à la condition humaine ce qui dans l'esprit classique n'est pas le
rôle du peintre.
Ses sujets ne sont plus traditionnellement mythologiques ou mondains mais
choisis empruntés à la vie réelle, à la société de son temps.
Pour comprendre la nouveauté de la peinture de Courbet, il faut savoir qu’à
cette époque, l'art officiel se base sur les principes de l’art classique définis
par l'Académie des Beaux-Arts : perspective linéaire, clair-obscur, couleur
locale, ...
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ISALT – 1 année – culture artistique
24
Les sujets sont définis par genre :
1/la peinture d'histoire
2/le portrait
3/le nu
4/ la nature morte.
Les peintres sont classés selon des critères définis une fois pour toute :
portraitistes, peintres d'histoire, paysagistes, ...
La figure humaine est le sujet par excellence.
Il est considéré comme contraire à la beauté de se tourner vers des sujets
différents.
le réalisme belge s’inspire de Courbet, Corot, Millet et de l’école française
de Barbizon.
Le réalisme indispose le goût établi pour un art néo-classique, romantique ou
historique.
Paul De Braekeleer (1840 -1888)
Jan Stobbaerts (1838 -1914)
Eugène Laermans (1864 -1940)
Peint des scènes de la vie industrielle des faubourgs de Bruxelles et du
Brabant. Les souffrances des ouvriers, des paysans, des grévistes, des réfugiés
et plus généralement de tous les défavorisés donnent à son œuvre un
caractère sombre.
Ces thèmes sont traités avec compassion dans des compositions anguleuses
aux contrastes marqués entre tons sombres et clairs.
Constantin Meunier (1831-1905)
Tant dans la peinture que dans la sculpture, l’originalité de Meunier réside
dans son habilité à métamorphoser la figure de l’ouvrier en sujet digne d’être
peint ou sculpté. Dans leur simplification expressive, les hommes et les
femmes de Meunier constituent un hymne inédit au travail.
* Le Grisou -1889 - Bronze -151 x 212 x 108 cm - Musées Royaux des
Beaux-Arts - Bruxelles
à retenir : Musée Constantin Meunier à Bruxelles - rue de l'Abbaye 59 ,1050
Bruxelles.
4.4. l’impressionnisme - 1874
La recherche de la lumière est une composante essentielle des recherches
de la peinture du 19e siècle.
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ISALT – 1 année – culture artistique
25
En France, les impressionnistes ont en commun les mêmes objectifs, ils
réagissent contre les conventions académiques et le système officiel
d’expositions du Salon.
En 1874, a lieu la première exposition des artistes Monet, Sisley, Pissarro, Renoir,
Cézanne, Morisot, Degas, ... dans l'atelier du photographe Nadar.
Le groupe impressionniste exposera dans divers lieux jusqu'à sa dislocation en
1884.
Le journaliste Louis Leroy attaché au journal Le Charivari ironise sur le titre du
tableau de Claude Monet intitulé « Impression levant » et qualifie les oeuvres
exposées "d'impressionnistes".
Rejetant l’objectivité du réalisme, les impressionnistes choisissent un seul
élément de la réalité, la lumière, pour interpréter la nature toute entière.
Cette nouvelle approche de la nature incite les peintres à se créer une
nouvelle palette de couleurs et à inventer une nouvelle technique répondant
à leur tentative de retenir la fluidité du jeu de la lumière.
Tableaux exécutés en plein air, sur le motif (grâce aux innovations dans le
domaine du matériel pour artistes : chevalet léger, couleur en tube de zinc
facilitant le transport).
Goût de l'instantané : désir d'immobiliser l'instant, de saisir les manifestations
fugitives de l'atmosphère.
L’observation attentive de la lumière les pousse à abandonner des ombres
noires et à adopter des couleurs claires. Juxtaposition des couleurs
complémentaires (rouge-vert, bleu-orange, jaune -violet)
Ils abandonnent les couleurs locales au profit d'un effet atmosphérique
général.
En appliquant la couleur en touches divisées, ils sont parvenus à estomper les
contours des objets et à les fondre dans leur environnement.
Abandon du point de vue frontal et de l'illusion de la profondeur.
L'estampe japonaise et la photographie influencent la mise en page.
Originalité des cadrages (plongé, contre-plongé).
La multitude des touches divisées et leurs contrastes contribuent à suggérer le
scintillement de la lumière.
En Belgique, les termes impressionnisme, néo-impressionnisme, divisionnisme et
luminisme se confondent.
Chez nous, la peinture reste fidèle à la tradition du sujet et tente d’atteindre à
un compromis entre la recherche de la lumière et le désir de réaliser un
tableau fini.
Pour les impressionnistes français, le sujet est prétexte aux effets de pinceau
ou de lumière alors que pour les peintres belges, le sujet est aussi important
que la manière dont il est rendu.
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ISALT – 1 année – culture artistique
26
Louis Artan (1837-1890)
Les paysages marins le fascinent. Au départ d’une technique réaliste, il
développe une peinture fluide et libre. A travers une gamme de couleurs où
dominent les beiges et le gris, cette technique lui permet de rendre les
changements et les effets de lumière de la mer qu’il dépeint dans toute sa
puissance. Le ciel et la mer se confondent souvent.
Alfred Stevens (1823 -1906)
Hippolyte Boulanger (1837 -1874)
Guillaume Vogels (1836 -1896)
Isidore Verheyen (1846 -1905)
Adrien-Joseph Heymans (1839 -1921)
Frans Courtens (1854 -1943)
Périclès Pantazis (1849 – 1884)
Anna Boch (1848 – 1933)
4.5. Henri Evenepoel (1872 – 1899)
Disparu à 27 ans, sa carrière se limite aux 5 années qui précèdent 1899.
Coloriste exceptionnel, il a le don d’orchestrer instinctivement les couleurs.
Son oeuvre est empreinte d'une tendre mélancolie.
A Paris, l'atelier de G. Moreau où il fait son apprentissage est le berceau du
fauvisme.
Admirateur de Manet et de Toulouse-Lautrec, il est aussi influencé par le
japonisme. Sa santé l'oblige à s'installer en Algérie (1897-1898) où la
confrontation avec une lumière inconnue transforme son oeuvre.
Conception synthétique par grands aplats, études d'après photographies,
simplification des formes qui annoncent le fauvisme.
* Charles au jersey rayé (1898 - Musées Royaux des Beaux-Arts Bruxelles)
* L’Espagnol à Paris (1899 – musée d’Ixelles)
4.6. Le néo-impressionnisme
En France, Georges Seurat chef de file du néo-impressionnisme (appelé aussi
divisionnisme ou pointillisme) veut donner à l'impressionnisme une méthode
plus rigoureuse en s'appuyant sur des données scientifiques relatives à la
perception des couleurs, notamment De la loi du contraste simultané (1839)
du chimiste M-E Chevreul.
Théorie du mélange optique des couleurs : juxtaposition des touches de
couleur pure c’est l'oeil opère la synthèse. Les pigments conservent ainsi leur
éclat et confèrent un effet vibrant au tableau.
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Touches "points" proportionnés à la dimension du tableau.
Il développe une technique basée sur l’interpénétration des couleurs et des
tons purs, laissant à l’œil le soin de réaliser un mélange optique où se
rassemblent les couleurs.
Pas de transcription de l'émotion du moment.
En Belgique, le groupe des XX a pour objectif d'ouvrir l'art belge à la
modernité de l'impressionnisme, du néo-impressionnisme.
Invité par les XX à Bruxelles en 1887, Seurat présente son tableau Dimanche
après-midi à la Grande Jatte qui produit un véritable choc esthétique sur
Emile Verhaeren , Octave Maus, Théo van Rysselberghe et de nombreux
autres artistes belges.
Bruxelles devient un centre du divisionnisme.
Chez nous, la peinture néo-impressionniste entretient un contact plus étroit
avec la réalité, la gamme des couleurs est plus étendue et les portraits
présentent une intensité psychologique.
Georges Lemmen (1865 – 1916)
Alfred William Finch (1854 – 1930)
Henry Van de Velde (1863 – 1957)
Jan Toorop (1868 – 1928)
Théo Van Rysselberghe (1862 – 1926), peintre de la clarté
Membre fondateur du groupe des XX. Ami d’Octave Maus et d’Emile
Verhaeren.
Les contrastes de couleur, de lumière et d’ombre caractérisent son œuvre.
Il met l’accent sur le sujet ; la technique divisionniste est au service du sujet.
* La lecture – 1903 – Musée des Beaux-Arts – Gand.
* La promenade – 1901 – 90 x 130 cm – huile sur toile - Musées Royaux
des Beaux-Arts – Bruxelles.
4.7. le luminisme - 1904
La Libre Esthétique présente une rétrospective de l’impressionnisme et du
néo-impressionnisme français.
Cette initiative est suivie la même année par la création du groupe Vie et
Lumière d’Emile Claus qui donne priorité à la lumière solaire elle-même et
moins aux impressions laissées par le jeu de la lumière.
Le but est de plonger le paysage et le portrait dans un bain de lumière
solaire. Cette forme tardive de l’impressionnisme connaît un grand succès.
Emile Claus (1849 – 1924)
Dans sa peinture, Claus parvient à un compromis entre les reflets fugitifs de la
lumière et la cohérence d’une composition picturale rigoureuse. Son
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28
impressionnisme est tempéré par le réalisme. La lumière solaire dans laquelle
baignent tous ses paysages, leur donne éclat et brillant.
Jenny Montigny (1875 – 1937)
* à retenir : Musée Dhondt-Daenens, Museumlaan 14 - Deurle
4.8. le symbolisme - 1886
A la fin du 19e siècle, le symbolisme se définit par l’idéalisme d’artistes qui
réagissent à un monde trop matérialiste, celui issu de la révolution industrielle.
Ils privilégient le subjectif, valorisent l’imaginaire, le rêve, les hallucinations.
Face au naturalisme et à l'impressionnisme s'affirme un retour au monde
intérieur, volontiers empreint de mysticisme.
Le symbolisme emprunte ses sujets aux grands mythes, cultive le vague à
l'âme, la mélancolie, la nostalgie d'une nature identifiée au passé idyllique. Il
se présente comme le prolongement du romantisme.
Le symbolisme s'oppose radicalement aux conceptions scientifiques, au
climat positiviste du 19e siècle, au réalisme de Courbet, à l'impressionnisme.
En France, Jean Moréas publie un manifeste symboliste (1886).
Le symbolisme littéraire (Baudelaire, Mallarmé, Rimbaud, Verlaine) s’intéresse
aux idées, aux sentiments, aux émotions plutôt qu’à la description de la
réalité et aux apparences.
L’idée, l’imagination prime sur le fait, l’objet.
Dans la peinture, le symbolisme trouve ses précurseurs chez William Blake,
Gustave Doré et J.H. Füssli ainsi que chez les peintres allemands de l’école
nazaréenne.
En France, Puvis de Chavannes, Gustave Moreau et Odilon Redon sont les
principaux artistes de ce courant.
En Grande-Bretagne, les Préraphaélites et en particulier E. Burne-Jones et
Dante Gabriel Rossetti font figure de prophètes du mouvement.
La peinture tout comme la littérature symboliste est influencée par le
mysticisme de Richard Wagner et par l’écrivain E. A. Poe.
Autre source importante du symbolisme, la société ésotérique « La RoseCroix » et les idées du maître Sâr Péladan qui la dirige.
Sa philosophie fondée sur l’application des lois cosmiques et naturelles exalte
l’hermaphrodisme et prône un art basé sur la magie et la musique.
Les idées symbolistes sont nettement opposées à l’art officiel et constitue une
réaction contre le réalisme et l’impressionnisme.
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ISALT – 1 année – culture artistique
29
Les symbolistes belges considèrent que les effets picturaux des
impressionnistes détournent l’attention de l’importance de l’idée et de
l’image.
Fernand KHNOPFF (1858 -1921)
Personnalité majeure du symbolisme belge.
Elève de Mellery, admirateur de G. Moreau et des préraphaélites, membre
fondateur du groupe des XX en 1884, il est très sensible à la musique et à la
littérature (Baudelaire, Mallarmé, Verhaeren, Rodenbach).
Peintre de la vie intérieure, il évoque les émotions les plus profondes.
Passe les premières années de sa vie à Bruges, dont l’atmosphère à la fois
mélancolique, mystérieuses et éteinte restera à jamais gravée dans sa
mémoire.
Le mysticisme de la peinture de Khnopff est parallèle à son intérêt pour la
Rose-Croix.
Le portrait est son sujet de prédilection.
Sa soeur Marguerite occupe une place importante dans l’imaginaire de
l’artiste ; elle est son modèle privilégié.
Khnopff travaille souvent à partir de mises en scène photographiées qu’il
transforme et idéalise. Il estompe les traits distinctifs de la personnalité. Sa
peinture est fondée sur le souvenir, l’idéalisation, l’âme, le monde du silence.
Il peint les plafonds de l’hôtel de ville de St-Gilles ainsi qu’un salon du palais
Stoclet.
* L’art ou Les caresses
1896 – Musées Royaux des Beaux-Arts de Bruxelles – 50,5 x 151 cm
* Memories
1889 –pastel - 127 x 200 cm - Musées Royaux des Beaux-Arts de Bruxelles.
L’action est suspendue, chacune des figures est murée dans son silence. Il
s’agit d’un rêve (les corps n’ont aucune ombre). Le reflet du monde
intérieur est le véritable sujet. L’image de sa sœur se répète 7 x comme
dans une séquence filmée.
* La dame en blanc
* La ville abandonnée
Félicien ROPS (1833 – 1898)
Homme de rupture, Rops fuit le moralisme bourgeois de son époque. Il rejette
les principes académiques de l'enseignement du dessin et de la peinture.
Passionnément, il cherche à inventer des voies nouvelles dans son art de
dessinateur, de peintre et de graveur, se laissant guider par le bouillonnement
qui allait donner naissance au symbolisme et à la modernité.
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ISALT – 1 année – culture artistique
30
Inclassable, il trouvera dans l'effervescence de la vie parisienne ses thèmes
de prédilection : la femme, l'érotisme, le satanisme, la satire sociale.
Lorsqu'il se fixera à Paris en 1874, il deviendra un illustrateur recherché par les
plus grands écrivains de sa génération ; Baudelaire, Péladan, Verlaine,
Mallarmé,...
* Pornokrates (La dame au cochon)- 1878 – 75 x 48 cm – Namur
à retenir : Musée provincial Félicien Rops à Namur
William Degouve de Nuncques (1867 – 1935)
L’étrangeté de ses images provient de sa vision particulière de la banalité,
une vision extraordinaire de l’ordinaire.
Jean Delville (1867 – 1953)
Delville croit en Dieu, dans l’immortalité, la magie et les mystères anciens. Il
croit également à la réincarnation. Pour lui, l’essence divine, les forces
magnétiques, l’influence des étoiles sont des facteurs déterminants dans la
vie humaine. Les peintures de Delville se nourrissent de magie.
* Tristan et Yseult
Emile Fabry (1865 – 1966)
Constant Montald (1862 – 1944)
Léon Frédéric (1856 – 1940)
Henri De Groux (1867 – 1930)
Xavier Mellery (1845 – 1921)
4.9. Laethem-Saint-Martin – 1890/1914
Sur les rives de la Lys s’étend un petit village, refuge de 2 générations de
peintres.
Entre 1890 et 1914, de jeunes artistes s’installent à Laethem (10km de Gand)
et fondent une communauté d’artistes indépendants désireux de travailler
dans la paix de la campagne et partageant une approche méditative de
l’art.
Albijn Van den Abeele est considéré comme le fondateur du premier groupe
de Laethem-Saint-Martin.
En 1893, Valerius de Saedeleer s’installe à Laethem. Il y est suivi par George
Minne en 1899 et Karel et Gustave van de Woestijne en 1900 et Albert Servaes
en 1904.
Les artistes de Laethem forment une communauté. Ils se rencontrent à
intervalles réguliers, écoutent des lectures du poète Karel van de Woestijne et
participent à des discussions philosophiques.
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ISALT – 1 année – culture artistique
31
Leur abandon de la vie citadine et leur retraite à Laethem va de pair avec
leur refus délibéré de participer aux mouvements d’avant-garde comme le
fauvisme et le cubisme.
Ils demeurent fidèles à un symbolisme inspiré par le christianisme, la littérature
et par-dessus tout la vie et les travaux de la campagne.
Le premier groupe de Laethem prend fin avec l’éclatement de la première
guerre mondiale.
Les artistes du premier groupe de Laethem-Saint-Martin sont symbolistes.
C’est un art empreint de spiritualité. C’est aussi un art fondé sur le travail
quotidien et les coutumes de la vie villageoise.
Les peintres du premier groupe de Laethem font aussi référence à la peinture
de Bruegel l’ancien et des Primitifs flamands suite à l’exposition de Bruges en
1902.
George MINNE (1866 - 1914)
* L'agenouillé de la fontaine - 1898 - bronze - Musée d'Ixelles à
Bruxelles.
Cette oeuvre exprime douleur, angoisse et repli sur soi. Grande épuration de
la forme. C'est dans le gothique que Minne puise son goût pour l'élongation
du corps qui perd peu à peu son aspect charnel.
Minne regroupera autour d'une margelle de puits 5 de ses agenouillés
formant un ensemble dont le plâtre original est conservé au Musée des BeauArts de Gand. L'architecte Van de Velde intégrera la version en marbre à
l'architecture du Musée Folkwang à Essen.
Héritier spirituel de Rodin, contemplateur de la vie intérieure, Minne est une
figure incontournable du symbolisme en Belgique.
4.10. l’expressionnisme flamand du second groupe de LaethemSaint-Martin
Si le symbolisme constitue le courant principal du premier groupe de
Laethem-Saint-Martin, c’est l’expressionnisme qui caractérise le mieux les
membres du second.
L’expressionnisme est un courant qui se développe sous l’influence d’Ensor et
de Munch.
Les peintres expressionnistes s’efforcent d’exprimer, souvent à travers la
distorsion et des couleurs violemment émotives, la signification intérieure ou
spirituelle des personnages, des objets et de la nature.
L’expressionnisme peut prendre des formes sauvages, déchiquetées, brutales
où le sujet est disloqué par l’énergie explosive de l’artiste.
Les expressionnistes flamands se distinguent par une technique d’expression
plus sobre et plus fruste.
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ISALT – 1 année – culture artistique
32
Gens et objets, construits à l'aide de volumes simplifiés, s’identifient à de
simples symboles, le plus souvent peints dans des couleurs terreuses, éclairées
par de furtifs rayons de lumière.
Les œuvres de ces 3 artistes : Constant Permeke (1886 – 1952), Gustave De
Smet (1877 – 1943) et Frits Van den Berghe (1883 – 1939) sont empreintes
d’une lourde tristesse mais aussi d’une majesté et d’une force imposante.
* à retenir : Musée Constant Permeke - Gistelsteenweg 341 - 8220 Jabbeke
4.11. Léon SPILLIAERT (1881-1946)
Une des personnalités charnières entre le symbolisme et l’expressionnisme, il
n’appartient à aucun mouvement artistique.
En dépit d’un séjour de quelques mois à l ‘Académie de Bruges, Spilliaert est
fondamentalement autodidacte.
Parmi ses amis et admirateurs, il compte Stefan Zweig, Rik Wouters et Emile
Verhaeren.
A partir de 1909, il participe à des expositions collectives importantes dans les
galeries Giroux et Le Centaure.
Mystère, angoisse, solitude habitent ses peintures, pastels, gouaches,
aquarelles et dessins à la plume.
Les noirs et les gris sont ses couleurs favorites ; il les utilise de façon saisissante
dans des aquarelles presque monochromes. Ligne et couleur fusionnent en
de petites compositions synthétiques caractérisées par de grandes
diagonales fuyantes, silhouettes schématisées et perspective en plongée.
Les autoportraits de Spilliaert sont parmi ses œuvres les plus angoissées et les
plus dérangeantes. Souvent des miroirs sont utilisés pour multiplier l’image du
peintre et répéter la question « qui suis-je ? »
La mer constitue un autre thème majeur. Il la représente en bandes
horizontales d’étranges couleurs. Les vagues sont apaisées en une vision
quasi abstraite.
Ostende vu de nuit et déserte constitue un autre sujet favori. La digue et le
casino prennent des proportions gigantesques et inquiétantes.
Les arbres constituent aussi un sujet de prédilection.
* Femme sur la digue -1907- 37 x 73 cm – Musées Royaux Beaux-Arts Bruxelles
* Digue et Kursaal d’Ostende – 1908 – 50 x65 cm - encre de chine et
pastel sur papier
* Boîtes devant une glace
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ISALT – 1 année – culture artistique
33
4.12. le fauvisme brabançon
En Belgique, le fauvisme fait ses débuts en 1906 avec l’exposition à la Libre
esthétique d’un ensemble de peintures de Matisse, Marquet, Manguin,
Vlaminck, Derain.
On appelle « fauves brabançons », les peintres belges qui, à partir de 1912,
exposent à la galerie Giroux des œuvres modernes.
Ces peintres utilisent une palette claire pour dépeindre les plaisirs de la vie
domestique avec des intérieurs aux nus féminins, des tables chargées de
coupes de fruits ou de vases remplis de fleurs. Une chaleur domestique au
charme indéfinissable émane de ces œuvres.
Rik WOUTERS (Malines 1882 – Amsterdam 1916)
Une des figures marquantes du renouveau artistique que connaît la Belgique
au début du 20e siècle.
Fils d'un sculpteur sur bois, il suit les cours de sculpture à l'Académie des
Beaux-Arts de Bruxelles. Il apprend la peinture en autodidacte avec une
liberté incroyable, atteignant une fluidité des couleurs extraordinaire.
Toute son oeuvre jouit d'une forte cohérence même d'une technique à
l'autre: ainsi, les dessins soutiennent la sculpture et les aquarelles
conditionnent l'évolution de la peinture.
Au contact de l'oeuvre de James Ensor auquel il voue une admiration sans
borne, il peint quelques portraits ou scènes d'intérieurs dans une gamme
chromatique encore sourde.
De même, à partir de l'observation des oeuvres de Rodin, il établit les
principes de base de son métier de sculpteur.
A partir de 1911, sa palette s'enrichit progressivement de tons plus solaires,
probablement sous l'influence de Schirren.
Cette même année, le marchand Georges Giroux que la Vierge folle a
enthousiasmé, signe avec Wouters un contrat qui le libère de tout souci
matériel et lui permet de se rendre à Paris où il découvre enfin l'oeuvre de
Cézanne qu'il admire tant. Par l'oeuvre de Cézanne, il apprend la structure et
le sens de la composition en travaillant par plan. Grâce à lui, il comprend que
le plus important est de peindre d'après ses sensations. Il dilue la matière et
abandonne progressivement le couteau à palette.
Il crée une oeuvre attachante, emplie de poésie où rayonne la joie de vivre.
Toujours, il a modelé, dessiné, peint son épouse et sa muse, Nel, une jeune
femme blonde et sensuelle devenue l'icône de la féminité.
Son exposition personnelle à la Galerie Giroux en 1914 est un succès.
guerre met un terme à une production d'une grande maturité.
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La
ISALT – 1 année – culture artistique
34
*La Vierge folle - 1909 – bronze – ht. 195 x L. 135 x l.120cm
Il ébauche la Vierge folle après avoir admiré au Théâtre royal de la Monnaie,
la danseuse Isadora Duncan interprétant la danse scythe. Soucieux de rendre
avec véracité la véhémence du mouvement, il demande à Nel, de longues
et fastidieuses séances de pose puis abandonne le projet.
En 1911, devant l'intérêt que manifeste G. Giroux, il achève la sculpture qui
sera exposée dans la galerie Giroux dès 1912. C'est une de ses oeuvres la plus
aboutie, pleine d'expression de joie de vivre. La frénésie de la femme aux
chairs amples et fermes exprime la vie.
La gestuelle, le dynamisme du mouvement et les irrégularités du bronze qui
vibre au contact de la lumière participent à la modernité de cette sculpture.
Ferdinand Schirren (1872 – 1944)
Auguste Oleffe (1867 – 1931)
Anne-Pierre De Kat (1881 – 1968)
* à retenir : Musée communal d'Ixelles - rue Van Volsem 71 - 1050 Bruxelles
4.13. l'abstraction
L’art abstrait belge est issu de la synthèse du cubisme, du futurisme, du néoplasticisme, et du constructivisme russe. Il s'affirme à Anvers et à Bruxelles sous
le signe de la Plastique Pure.
Cette tendance rassemble Georges Vantongerloo (1886 – 1965), Victor
Servranckx (1897 – 1965), Josef Peeters (1895 – 1960), Michel Seuphor, PierreLouis Flouquet (1900-1967).
Rejetant la représentation de la réalité, ils considèrent que l’œuvre d’art est
une construction réalisée de manière ordonnée et précise dont les éléments
constitutifs sont liés par une logique interne.
4.14. le dadaïsme (1917)
Par opposition à la tradition et aux règles du passé, les dadaïstes veulent
créer un monde nouveau et différent à travers l’anarchie, le hasard, l’intuition
et l’irrationnel.
L’humour de dada, le dessin automatique, association de mots et musique
automatique ne constitue qu’un seul élément de la remise en question de la
signification de l’art, une remise en question qui va jusqu’à l’anti-art.
Le dadaïsme est avant tout d’essence littéraire
protagonistes des écrivains, Aragon, Eluard, Breton.
et
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ses
principaux
ISALT – 1 année – culture artistique
35
En Belgique, la dimension littéraire du dadaïsme est prépondérante ; écrivains
et artistes s’unissent dans la publication de périodiques et d’articles destinés à
la promotion du dadaïsme.
Michel Seuphor publie des textes, Mesens et Magritte collaborent à la
publication de l’unique numéro de la revue dadaïste Œsophage.
Paul Joostens (18689– 1960) est l’artiste belge qui apporte la contribution la
plus significative au dadaïsme.
Champion de l’anti-art, créateur d’objets tridimensionnels intrigants et
perturbants, il est un artiste original.
4.15. le surréalisme - 1924
Comme le dadaïsme, le surréalisme est un mouvement littéraire ayant à sa
tête des poètes qui voient en lui un mouvement révolutionnaire. Pareil à
dada, le surréalisme rejette le monde de la raison qui a mené à la boucherie
de la Première Guerre mondiale.
Mais contrastant avec l’esprit destructeur de dada, le surréalisme est une
vision poétique, une philosophie de la vie.
Guillaume Apollinaire est le premier, en 1917, à utiliser le mot « surréaliste » en
qualifiant sa pièce de théâtre Les mamelles de Tirésias de drame surréaliste.
Dans son Manifeste du Surréalisme, André Breton en donne en 1924 cette
définition : « automatisme psychique pur par lequel on se propose d’exprimer,
soit verbalement, soit par écrit, soit de toute autre manière, le fonctionnement
réel de la pensée. Dictée de la pensée, en l’absence de tout contrôle exercé
par la raison, en dehors de toute préoccupation esthétique ou morale ».
Médecin préoccupé de psychanalyse, Breton a remarqué combien
l'imagerie symbolique proposée par le rêve peut constituer une source
poétique.
La littérature surréaliste intègre l’écriture automatique dont le but est d'écrire
sans sujet préconçu, sans contrôle logique, esthétique ou moral, afin
d'extérioriser ce qui en nous tend à devenir langage et s'en trouve empêché
par notre censure consciente.
Le jeu du hasard est également employé par les surréalistes, exemple "les
cadavres exquis".
Une dimension importante du surréalisme est son engagement social et
politique intervenu peu après la formation du groupe. En 1925, Breton
annonce l'adhésion officielle du surréalisme au communisme.
Les peintres surréalistes utilisent les rêves, le subconscient, le hasard, l’étrange
et le magique et rejettent la raison.
La première exposition surréaliste est présentée à la galerie Pierre à Paris en
1925. Tous les dadaïstes sont précurseurs du surréalisme et incluent dans leurs
œuvres certains éléments surréalistes.
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ISALT – 1 année – culture artistique
36
Gestes de contestation, provocation et irréalité sont communs aux deux
mouvements.
Les surréalistes belges se retrouvent en partie à Bruxelles, en partie à La
Louvière.
Paul DELVAUX (1897 – 1994)
Etudes à l'Académie des Beaux-Arts de Bruxelles.
De 1925 à 1934, sa peinture est influencée par l'expressionnisme de Gustave
De Smet.
L'influence du surréalisme lui révèle la puissance du choc poétique provenant
du déplacement insolite des objets hors de leur contexte logique.
Delvaux n'a jamais adhéré au mouvement surréaliste créé par Breton qu'il
découvre en 1934 lors de l'exposition Minotaure, organisée au Palais des
Beaux-Arts de Bruxelles par Breton et Eluard.
C'est au contact de Chirico et de Magritte qu'il prend conscience de sa
propre identité et met en scène son univers personnel où règne la femme, les
personnages de Jules Verne, les trains, les squelettes, l'architecture classique
et bien d'autres souvenirs.
* Le musée Spitzner (1943 - Musée des Beaux-Arts - Bruxelles) se réfère
au souvenir du peintre devant la baraque foraine où était présentée avec
ostentation la réalité anatomique et physiologique du corps féminin.
• à retenir : Musée Paul Delvaux - Delvauxlaan 42 - 8670 Koksijde
René MAGRITTE (1898 Lessines – 1967)
C’est en découvrant en 1923, le tableau « Chant d’amour » (1914) du peintre
italien Giorgio de Chirico que Magritte prend conscience que l’esthétique
n‘est finalement qu’accessoire et que seule prime l’idée. Magritte est
bouleversé par la peinture métaphysique de Chirico qui introduit dans le
monde des apparences un mystère poétique.
Magritte abandonne dès lors la peinture abstraite : « la forme ne m’intéresse
pas, je peins des idées » et développe un système de représentation objectif
pour mieux exprimer son idée poétique.
Il s’interroge sur les rapports qui unissent peinture et réalité trouve des
correspondances entre les objets qu'il appelle les "affinités électives".
Il joue et interroge les mots et les images dans la tradition d’Ensor et
Ghelderode.
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ISALT – 1 année – culture artistique
37
Magritte nous rappelle que toute peinture est un objet par elle-même et ne
peut être qu'un substitut de la réalité. "Tout tend à faire penser qu'il y a peu
de relation entre un objet et ce qu'il représente".
Ce thème est évoqué dans la * Tentation de l'impossible (Magritte se
représente peignant un nu qui devient réalité devant lui), dans * La Condition
humaine (un tableau de chevalet se confond avec le paysage situé derrière
lui) et dans le célèbre * La trahison des images (Ceci n'est pas une pipe).
Un passage par la publicité (sa seule ressource alimentaire pendant des
années) l’encourage à expérimenter de nouvelles stratégies visuelles. Seul lui
importe le choc que peut produire un assemblage inattendu.
Les ressorts poétiques utilisés le plus souvent par Magritte sont la
métamorphose (conférer aux objets et au corps humain la possibilité de
devenir graduellement autre chose), la dé-contextualisation et les
changements de proportions.
Selon Magritte, sa peinture évoque le mystère du monde. Pour le révéler,
l’artiste procède souvent à une collision de 2 objets qui, du réel auxquels ils
appartiennent, nous amène au rêve ; du visible à l’invisible.
Toute l’œuvre de Magritte tourne autour de ces deux notions ; ses images
tentent de rendre visible l’invisible.
Chez Magritte le titre d’un tableau n’explique pas l’image, au contraire le
titre augmente la surprise, attire le regard et stimule la réflexion. Comme le
note l’artiste : » les titres ne sont pas des explications et les tableaux ne sont
pas des illustrations des titres. La relation entre le titre et le tableau est
poétique. Magritte attachait une grande importance aux titres devait être le
moins explicite et le plus intrigant pour le spectateur.
Magritte explore le domaine du hasard, de l’illusion, du rêve et du
fantastique. Il est attiré par le monde « mystérieux » et passionné par
Fantomas, les auteurs de romans policiers comme Edgard Allan Poe, Maurice
Leblanc.
* L’empire des lumières – 1954 – toile - 146 x 114 cm – Musées royaux des
Beaux-Arts – Bruxelles
Dont il existe pas moins de 11 versions.
E.L.T. Mesens (1903 – 1971)
Marcel Mariën (1920 – 1993)
* à retenir : Musée et maison René Magritte - rue Esseghem 135 - Bruxelles
Musées Royaux des Beaux-Arts – Bruxelles –
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ISALT – 1 année – culture artistique
38
APRES LA SECONDE GUERRE MONDIALE :
4.16. la jeune peinture belge
Fondée en 1945, la jeune peinture belge regroupe des artistes impliqués dans
la recherche abstraite.
Robert Delevoy est le promoteur des artistes belges modernes Gaston
Bertrand, Anne Bonnet, Louis Van Lint, Luc Peire
4.17. COBRA " mouvement de liberté et d’expérimentation"
1948-1951
Premier mouvement artistique et littéraire international apparu en Europe
après la Seconde Guerre mondiale.
COBRA tire son nom du rapprochement de 3 capitales COpenhague,
BRuxelles, Amsterdam et réunit principalement des artistes danois, belges et
hollandais. L'aventure commence en 1948; c'est un mouvement sans
programme autoritaire qui se veut expérimental et international.
Pas d'esthétique mais une volonté d'expérimentation mêlant l'art et la vie
dans une recherche d'invention permanente menée dans un esprit
délibérément ludique.
Cobra est né "d'un immense dégoût du bavardage, de la discussion
discutante et du dogmatisme" comme l’écrivait Christian Dotremont en
réponse à l’autosatisfaction des artistes de l’Ecole de Paris.
Cobra se situe au confluent de l'abstraction gestuelle américaine (Pollock &
De Kooning) et de l'imaginaire expressionniste.
Cobra est un cri pur où le geste de peindre prédomine sur son résultat.
1ère grande exposition Cobra en 1949 au Stedelijk à Amsterdam. L'exposition
coïncide avec la parution du n° 4 de la revue Cobra (qui en comptera au
total 10) qui n'a cessé d'affirmer son non-conformisme et son souci de
pluridisciplinarité.
Cobra a eu l'intuition de certaines données qui ont jalonné l'histoire du
comportement et des idées au cours des dernières décennies :
1) rôle fondamental de la spontanéité,
2) objectifs communautaires,
3) caractère collectif de la créativité,
4) notion de pluridisciplinarité (rapports étroits avec la poésie, la littérature, le
folklore),
5) désir de voir s'élargir l'art à la création populaire.
Cobra tient du graffiti, du barbouillage excessif, de l'humour, de la caricature,
de l'agressivité. Comme l'art populaire, la peinture de Cobra utilise des
symboles, figures et motifs empruntés à la nature, aux bons et aux mauvais
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esprits, parlant de fertilité, de vie, de mort, de sexualité rapprochant l'homme
des fondements de l'univers par le moyen du mythe.
Matière dense et riche, gamme chromatique violente où s'enchevêtrent
lignes et signes emportant le geste pictural dans des rythmes turbulents.
influences :
- la philosophie de Gaston Bachelard. Les artistes belges sont passionnés par
les conceptions de Bachelard, par ses idées sur le cosmos, l'âme universelle,
l'intuition du moment et les 4 éléments de la nature.
- l'art populaire,
- l'art primitif
- les otages de Fautrier
- les hautes pâtes de Dubuffet.
Christian DOTREMONT (Tervuren 1922 - Buizingen 1979)
A maintenu l'esprit Cobra avec le plus d'intransigeance.
Poète en recherche, il rencontre Magritte, Ubac, Scutenaire en 1940.
A Paris, en 1941/42, il prend contact avec Eluard et Picasso.
Fonde en 1948, le surréalisme révolutionnaire et ensuite le groupe COBRA.
Crée aussitôt des dessins-mots et des peintures-mots d'abord avec Asger
Jorn puis avec Alechinsky, Appel, Atlan, Corneille, H. Claus.
Nombreux séjours dans le grand nord.
Dès 1962, expérimente le logogramme "naturel mélange plastique verbal",
« danses réelles qui sont des mots, qui sont des textes, ... dansés à l'encre de
Chine sur papier blanc ».
S'intéresse de plus en plus au pouvoir expressif et poétique de l'écriture
manuscrite.
S'affranchit de la contrainte de la lisibilité du texte.
Pierre ALECHINSKY (Bruxelles1927)
Cobra a apporté à Alechinsky une leçon de vitalité, une poésie entre écriture
et peinture.
Ecrivain, cinéaste, illustrateur, peintre de la tache-morsure, inventeur de
l'éruption lithographique, calligraphe du délire et ambidextre !
Etudes à la Cambre – atelier d’illustration, il a collaboré à la rédaction de
plusieurs revues de Cobra.
D'abord influencé par Klee et par l'abstraction lyrique de la Jeune Peinture
belge, Alechinsky s'approprie tout ce qui échappe à la raison : mythes,
contes, visions. Il cultive dans son monde imaginaire la fibre ethnique,
mythologique, topographique et historique de ses propres expériences.
Le voyage et les cycles sont des éléments récurrents.
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La philosophie de Gaston Bachelard, le carnaval de Binche et Alice au pays
des merveilles de Lewis Caroll lui ont fait comprendre les richesses du folklore
et des fables.
Alechinsky cherche le langage qui convient le mieux à sa souplesse d'esprit.
Attiré par les procédés de l'écriture automatique qu'il approfondira de
manière personnelle en s’initiant à la calligraphie japonaise.
Cette fascination se traduit par un voyage d'études en Orient en 1955 où il
réalise avec Ferenk Haar un film "la calligraphie japonaise". Expérience
décisive qui laissera des traces dans son oeuvre.
La peinture à l'encre lui permet de donner libre cours à la création de son
univers trépident.
Lors d'un séjour aux Etats-Unis (années 60') le peintre Wallace Ting initie
Alechinsky à la peinture acrylique sur papier : la légèreté du support et la
fluidité du matériau lui procurent une liberté nouvelle en plein accord avec
l'esprit de la calligraphie orientale.
Utilisation du papier qu'il apprend à maroufler sur toile.
* Central Park (1965) sa première peinture acrylique à "remarques marginales"
(terme utilisé en typographie)
Composition avec contraste prononcé entre l'image centrale et un
encadrement d'images dites "remarques marginales"(en référence à la
prédelle des retables du moyen-âge).
Le tableau s'entoure de dessins dont chacun est une sorte de commentaire
du sujet principal. Crée un mouvement de va-et-vient ; il y a le centre du
tableau et le reste.
La "marge" considérée comme un élargissement du tableau; on y retrouve
une foule d'êtres étranges et d'éléments chers à l'artiste : la mer, le carnaval,
le serpent, le volcan, la roue, le tireur de langue, ... ces éléments se
juxtaposent, se métamorphosent l'un en l'autre au sein d'une chaîne
d'attirances formelles.
Depuis 1982, Alechinsky a inversé le processus des centres et des marges en
réservant le blanc et le noir pour les parties centrales.
4.18. introduction à l’époque contemporaine :
L'art contemporain s'est libéré de tout mouvement; il peut être abstrait,
figuratif, minimaliste, conceptuel, expressionniste, post-pop, hyperréaliste. Il
peut être esthétique, indifférent ou opposé à la notion de beauté.
Le monde n'est pas beau pourquoi l'art devrait-il l'être ?
L’artiste plasticien peut être provocateur ou consensuel ; il peut choisir la
terre, la pierre, la plastique, la peinture, le crayon, le bic, la photo, la vidéo
comme moyens d'expression, ou tout à la fois.
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Aujourd'hui l'art est libéré de toute école ou de tout mouvement, il n'a plus de
credo. Il ne se vit plus au travers de courants stylistiques ou d'écoles.
L'art contemporain est individuel, réduit à l'expression de chaque artiste, et
donc multiple.
Nous vivons une période très éclatée depuis la fin des idéologies et cet
éclatement se retrouve dans l'art, qui n'est plus dominé par certaines
tendances.
L'art est le reflet de la société; il est aujourd'hui philosophique, politique,
esthétique, social, écologique, égocentrique,...
Cette multiplicité se retrouve au niveau de l'artiste lui-même, qui est de moins
en moins identifiable.
Mais dans l'effervescence artistique, il y a des tendances qui émergent. Ainsi
la peinture revient en force. Si, ces dernières années, la photo était la
vedette des salons et foires d'art contemporain, aujourd'hui, c'est la peinture
qui a les faveurs de nombreux artistes.
Autre nouvelle tendance, plus importante : le mixage des techniques
artistiques. Libérés de toutes règles et conventions, les artistes n'hésitent pas à
mêler la gravure à la sculpture, la peinture à la photo, la vidéo à
l'infographie, la danse à la vidéo, ...
Marcel BROODTHAERS (1924 -1976)
Poète résolument surréaliste, Marcel Broodthaers est particulièrement
intéressé par les relations entre langage et image. Il développe une réflexion
très pertinente sur l'art et la politique qui aujourd'hui encore influence les
artistes contemporains.
Admirateur inconditionnel de Stéphane Mallarmé et de René Magritte, il
publie des recueils de poèmes. En 1963, il coule son dernier recueil dans le
plâtre et l'expose comme sculpture. « moi aussi je suis demandé si je ne
pouvais pas vendre quelque chose et réussir ma vie … »
De 1964 à 1970, son oeuvre se nourrit d'objets les plus banals, d'accumulations
les plus inattendues : coquilles d'oeufs, briques, moules, ... Humour et
absurdité définissent au mieux sa démarche.
Toujours ironique, dadaïste dans l'esprit, jonglant avec les mots, il s'institue à
partir de 1968 et pour 4 ans, conservateur du Musée d'Art moderne,
département des Aigles. Ce "musée virtuel" qu'il crée de toute pièce exprime
une critique féroce de la politique muséale belge. Il propose des installations,
des fictions de musées et des sortes de ready-made (objets déjà fabriqués)
en référence à des écrivains, poètes ou maîtres anciens.
Il conçoit cette parodie comme un moyen de subvertir la notion d’art.
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Ainsi, la première section (19e siècle) de son musée est composée de caisses
vides et de quelques reproductions de tableaux épinglés au mur. Sous
chaque objet, il place la légende " ceci n'est pas un objet". Il établit ce
faisant la relation contradictoire entre langage et image, mot écrit et objet
représenté.
Véritable entrepreneur de démolition d'une certaine vision de la culture
belge, son oeuvre piège autant les mots que le spectateur.
Il s’intéresse à la réalité ambivalente des mots en jouant sur l’homonymie de
la moule et du moule. Il cherche à exposer que le mot est une coquille vide
et construit son œuvre sur ce vide qu’il considère comme un langage en soi.
Il fait de la moule, le parfait emblème de son propos plastique et poétique.
Pure tautologie car induisant à la fois les notions de contenant et de contenu
et étant elle-même son propre positif/négatif. Sur le mode de la dérision, la
moule véhicule en outre une identité belge.
Jouant sur le sens des mots, la moule renvoie aussi bien au coquillage qu'au
moule qui définit la matrice où vient se couler la matière pour prendre forme
et sens. Sous cette acceptation, le moule rejoint l'oeuf qui lui aussi "moule"
l'être.
Broodthaers engage un véritable questionnement sur le statut de l’œuvre
d’art et le processus qui fait qu’elle en devient une.
PANAMARENKO (1940, vit à Anvers)
Créateur de machines d’utopies, de poésie et de rêve, il est l’héritier des
années ’60.
Influencé par Marcel Broodthaers et Josef Beuys.
Etudiant à l'Académie d'Anvers, il dévore des ouvrages consacrés aux
sciences naturelles. Il décide de devenir « artiste technologue ».
La liberté, le rêve de se mouvoir librement et sans contrainte et l’esthétique
de l’analyse scientifique sont au centre de la création de Panamarenko. Ces
thèmes habitent toutes ses oeuvres. L'aspiration à voler de l'homme, voilà ce
qui l'inspire.
Il crée une utopie poétique comme si, grâce à lui, nous pouvions voyager.
Depuis son premier avion en 1967, son oeuvre est marquée par la volonté de
refaire la synthèse entre l'art et la science. Il insiste fréquemment sur le fait que
la science est née de l'art.
Ses autos ludiques, ses avions poétiques et ses vaisseaux spatiaux ne sont pas
conçus pour fonctionner mais pour rayonner une beauté construite,
scientifique.
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Pol BURY (1922 - 2005)
C'est en 1950 que Bury découvre A. Calder et ses mobiles (plaques
métalliques suspendues se déplaçant dans l'espace).
Dès 1961, il réalise ses premiers volumes mobiles et participe aux
manifestations du mouvement d'art cinétique.
La sculpture de Bury s'appuie sur 3 principes : le mouvement, le temps et la
gravité mais il jongle aussi ave la réflexion de la lumière et la distorsion.
Il défie le temps : les parties mobiles de ses sculptures obéissent à un rythme
très lent, quasi imperceptible.
Bury joue avec la mesure du temps, selon des modes mystérieux et
imprévisibles qui provoquent la surprise du spectateur. Le côté aléatoire
accentue l'impression de mystère.
Il fait usage de matériaux différents (bois massif, acier inoxydable, cuivre poli).
Les surfaces deviennent alors des miroirs reflétant la lumière. Le passage au
métal le pousse à s'engager dans de vastes projets d'extérieur, dans le cadre
d'ensemble architecturaux, par exemple des fontaines ou des groupes de
grands cylindres implantés face à des bâtiments.
* Station de métro Bourse à Bruxelles : suspend 75 éléments cylindriques
mobiles en acier inoxydable, couvrant une surface de 200m2.
Jan FABRE (né en 1958 à Anvers où il vit et travaille)
Plasticien, metteur en scène, scénographe, auteur dramatique, il a
également réalisé quelques films.
Artiste multiple, il aime jouer avec les ambivalences (caresse/violence,
beauté/laideur, homme/animal,…)
La création plastique de Fabre s'oriente vers deux pôles ; le monde bleu et le
monde des insectes de l'autre.
Depuis son plus jeune âge, Jan Fabre manifeste une curiosité insatiable pour
le monde naturel et ses créatures en procédant à des expériences sur le
vivant.
De son aïeul fictif, le célèbre entomologiste français JH Fabre (1853-1925), il
héritera une passion toute particulière pour les insectes. Tout le travail Jan
Fabre suit le modèle de la concilience : il s’agit d’un concept philosophique
visant à réunir les diverses disciplines - sciences naturelles, politiques,
humaines, sociales – afin d’aboutir à une avancée simultanée de la
connaissance détachée des frontières établies entre les branches du savoir.
Son observation accrue et sa connaissance de la nature lui ont permis de
créer au sein de son œuvre plastique un abondant bestiaire symbolique
composé de son insecte fétiche, le scarabée et sa boule de bouse (alter ego
de l’artiste, métaphore du guerrier en armure, mémoire du temps humain,
symbole de la métamorphose et de passage entre le vie et la mort), de
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l’agneau mystique (Christ sacrifié), du hibou et de la chouette (animaux
nocturnes, symboles de sagesse et de folie), du ver de terre (symbole de
fertilité et de putrescibilité), du perroquet (symbole de la parole divine) et du
paon (alter ego vaniteux).
Le langage poétique et symbolique qu’il associe à son bestiaire lui permet
d’appréhender le monde dans toute sa complexité et d’explorer les
similitudes de comportements entre le monde humain et animal.
Il promène son stylo à bille partout ; née de l’observation du ballet de certains
insectes sur un feuille de papier, l’utilisation du Bic le conduit à recouvrir des
surfaces toujours plus grandes (meubles, panneaux, pièces, château,…) de
cette couleur bleue si chargée de symboles : l’heure bleue, moment de
silence entre la nuit et le jour, moment de tous les possibles.
L'insecte a envahi et colonisé l'univers de Fabre. Le bousier ou scarabée thaïs
constitue son matériau de prédilection ; cet insecte est un symbole de mort
et de régénérescence dans les cultures anciennes.
Les créations de Fabre exercent un pouvoir de fascination entre répulsion et
attraction. Ses créations luisent et resplendissent grâce à la carapace
émaillée de ces cadavres d'insectes. Il s'en dégage une beauté froide et
macabre liée étroitement à la mort, à la métamorphose, à la décomposition.
La beauté la plus séduisante côtoie la désintégration et la putréfaction ; elles
coexistent.
Mais c’est le corps qui demeure l’une de ses principales sources d’inspiration :
le corps avec ses fluides et ses humeurs. De nombreuses œuvres évoquent sa
présence mais aussi son absence voire sa disparition. Fabre nous montre ce
que l’on a tendance à occulter : l’intérieur fait d’eau, de sang, de chair, d’os,
d’urine.
Wim DELVOYE (1965 - vit et travaille à Gand et à Londres)
www.wimdelvoye.be
Plasticien intéressé au premier chef par les idées, il joue volontiers de l'autocontradiction, de l’inconciliable.
Son oeuvre, * Cement truck (1990 bois de teck sculpté 325 x 670 x 225 cm),
par exemple, a bien la forme d'une bétonnière mais en réalité, elle n'a rien
d'une machine, elle n'est que sa réplique taillée dans le bois, décorée de
fines ciselures dorées. C'est de l'art. Elle est strictement inutile. Elle ne sert à
rien.
La recherche du faux-semblant, le détournement de l’objet visant à
déconcerter le public, à le faire réfléchir, est au centre de la réflexion de Wim
Delvoye.
* série Cloaca (2000)
* tatouage Art Farm (2010)
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Michel FRANCOIS (1956 - vit à Bruxelles)
Le terme de conceptuel est celui qui qualifie le mieux son travail.
Il crée une oeuvre multiforme qui utilise des techniques (vidéo et film,
sculpture, installation, photographie) et des matériaux les plus divers (métal,
plastique, eau, verre, argile, fleurs séchées, ...).
Michel François interroge les relations entre l'homme et son environnement,
entre le noyau et son enveloppe, l'extérieur et l'intérieur. Les réponses à ces
questions sur l'expérience de l'homme, sur la façon dont le monde est ressenti
et sur la manière sont ces sensations sont liées à notre façon de penser et de
percevoir constituent l'axe de tout son travail. Michel François déclare
volontiers que l'art est indissociable de la vie. Dans ses oeuvres tout se
complète et s'organise en un langage homogène.
Michel François est un artiste qui n'arrête pas d'inventer et de creuser de
nouveaux problèmes en aiguillonnant, provoquant et fascinant son public.
Il nous apprend à regarder... Il nous oblige à penser.
Anne Veronica JANSSEN (1956 à Folkestone (GB) vit et travaille à Bruxelles).
Explore plusieurs médiums dont la sculpture et les environnements. Ses
matériaux de prédileciton sont la lumière et les brouillards artificiels. Ses
recherchent se fondent sur l’expérience sensorielle et questionnent la relation
du corps à l’espace.
Dans son œuvre, la lumière est une matière diffuse et éphémère ; les
situations d’éblouissements, de vertige,d’instabilité visuelle sont au centre de
ses propositions. Dans sa démarche expérimentale elle a mis au point
l’Aérogel, silicate translucide, matériau le plus léger.
Son travail consiste à révéler l’expérience de la couleur.
* NN6 : blue-red-yellow - Brouillard artificiel et lumière naturelle - 2001
Johan MUYLE (Charleroi, 1956 - vit et travaille à Liège)
Johan Muyle se définit comme un « sculpteur d’assemblage ».
Récupère et s’accapare les objets des autres, souvent trouvés sur les marchés
aux puces, en les assemblant et les détournant. A chaque installation, Muyle
suscite la réflexion plutôt critique qui interroge avec humour, la marche du
monde et notre condition humaine.
L’artiste exprime sa fascination pour le kitsch du ‘Bollywood’ indien à travers
des panneaux en couleur reprenant des figures réalistes, des portraits
agrandis et des portraits d’amis. Ces panneaux sont pourvus de fragments de
textes et de slogans.
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Sa création intègre ces nouveaux codes plastiques dans des machineries
souvent spectaculaires. Un œil pleure, des lèvres remuent, une hélice tourne ;
imprévisible, l’installation appartient au chaos mondial auquel nous prenons
part.
Vibrant de dérision, le travail de Johan Muyle laisse pourtant le spectateur
joyeux ; car l’humour ne fait jamais défaut.
* I promise you(‘r) a miracle 2003 - 1600m2 - fresque animée de la station
d’autobus de la gare du Nord à Bruxelles Véritable portrait de famille d’une quarantaine de créateurs issus de sa
génération et de divers domaines ; danse, littérature, cinéma, arts plastiques,
théâtre.
Muyle dresse un état des lieux imagé et métaphorique de la scène culturelle
contemporaine belge, il « fixe sa génération ».
On y retrouve entre autres Arno, Mousta Largo, Wim Mertens, Marc Ysaye
Thierry Zéno, Benoît Peolvoorde, Philippe van Kessel, François Schuiten,
Camille de Taeye, Michèle Anne De Mey, Ann-Veronica Janssen, Elvis
Pompilio…
Cette fresque associe culture indienne et occidentale ; Johan Muyle et une
équipe de peintres indiens.
C’est aussi une fresque animée et sonore ; certains portraits pleurent, d’autres
ont les yeux mobiles et si on tend l’oreille, on peut entendre des murmures qui
s’en échappent ! Une dizaine de voix anonymes s’expriment dans diverses
langues, soulignant le caractère multiculturel des personnages représentés et
répètent inlassablement cette phrase, le nom donné à l’œuvre : je te
promets un miracle.
* B. au bord des lèvres : dispositif en forme de fontaine qui se sert d’une
boîte à biscuits et qui représente le roi Baudouin en l’érigeant en martyr selon
l’iconographie religieuse espagnole.
Berlinde DE BRUYCKERE (Gand,1964)
A fait de la souffrance anatomique sa marque de fabrique. Son travail sur le
corps humain, les arbres et les chevaux dépeint un univers tourmenté et
angoissant. La vulnérabilité, la fragilité et la solitude marquent son travail tel
un fil conducteur.
Silhouettes féminines debouts ensevelies sous des couvertures ou sous une
longue chevelure de crin, chevaux pendus dans des arbres, végétation
emballée dans des rubans de laine, les sculptures de B. De Bruyckere
développent une réflexion sur le corps. Ces formes hybrides, humaines ou
animales naissent de la fusion et de la contorsions des corps.
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Elle utilise de la cire mêlée de pigments pour retrouver le grain de la peau,
traite souvent le corps des chevaux, assemble des peluches à des
couvertures élimées pour accroître le trouble du spectateur.
Influencée dans ses premières années par une éducation religeuse stricte et
l’atmosphère de la boucherie familiale, son travail évoque la douleur et le
désir qui habitent la chair.
En 2013, Berlinde De Bruyckere a représenté la Belgique à la 55e Biennale de
Venise avec son installation « Kreupelhout-Cripplewood (fourré) » - 20m de
long - exposée dans le Pavillon belge.
Inspirée par le thème du martyre de St Sébastien (saint le plus vénéré et
représenté à Venise, ville souvent frappée par la mort noire, il est le saint de la
peste par excellence).
Enchevêtrements de troncs et de branches obtenus par moulages puis
teintés aux couleurs de la peau, l’artiste découvre le mouvement d’un corps
marqué dans la forme du vieil orme. L’arbre dépouillé devient un corps
démembré.
4.19. à retenir : quelques musées en Belgique :
Bruxelles :
Musées royaux des Beaux-Arts, rue de la Régence 3, 1000 Bruxelles
www.fine-arts-museum.be
Musée communal d'Ixelles, rue Van Volsem 71, 1050 Bruxelles
Musée Constantin Meunier, rue de l'Abbaye 59, 1050 Bruxelles
Musée Antoine Wiertz, rue Vautier 62, 1040 Bruxelles
Maison Magritte, rue Esseghem 135
Anvers :
MUHKA, Musée d'art contemporain, Leuvenstraat, 2000 Antwerpen
(museum van Hedendaagse kunst Antwerpen) www.muhka.be
Inauguré en 1986, le musée né de la volonté de nombreux artistes
contemporains. Installé dans un site industriel, un ancien silo à grain rénové et
adapté à sa nouvelle fonction.
La politique du Muhka se résume en 4 points : exposer l’art contemporain ;
nourrir le débat par la recherche, les conférences et les publications ; gérer et
enrichir ses collections ; s’ouvrir au public et participer à son éducation.
Le Muhka organise chaque année 4 expositions majeures.
Présentée partiellement selon un roulement trimestriel, la collection comporte
des œuvres des années ’70 à nos jours.
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Middelheim, Musée de sculptures en plein air,
Gand :
Musée des Beaux-Arts
S.M.A.K., Stedelijke Museum voor Aktuele Kunst – Gent Citadelpark
(Stedelijke Museum voor Actuele Kunst) .
Créé en 1975, le musée gantois pour l’art contemporain est le premier fondé
en Belgique (logé sous le toit du Musée des Beaux-Arts). Il devra attendre 20
ans pour disposer d’un bâtiment autonome(inauguré en 1999).
Le SMAK doit sa réputation actuelle à la personnalité visionnaire de Jan Hoet,
conservateur de 1975 à 2003 qui a rassemblé une collection de niveau
international.
Ostende :
PMMK, Musée d'art moderne, Romestraat 11, 8400 Ostende
Musée des Beaux-Arts,
Musée James Ensor, Vlaanderenstraat 27, 8400 Ostende
Saint-Idesbald - Koksyde :
Fondation Delvaux, Delvauxlaan 42, 8670 Koksijde
http:www.delvauxmuseum.com
Namur :
Musée Félicien Rops, rue Fumal 12, 5000 Namur - 00 32 81 22 01 10
http:www.ciger.be/rops
http:www.lesmuseesenwallonie.be
Liège :
Musée d'Art moderne et d'Art contemporain de Liège (MAMAC), parc de la
Boverie 3, 4000 Liège
Espace 251 Nord, rue Vivegnis 251, 4000 Liège
Jabbeke :
Musée Constant Permeke, Gistelsteenweg 341, 8220 Jabbeke
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Province de Hainaut :
Centre de la Gravure et de l’Image imprimée de la Communauté française
de Belgique Wallonie-Bruxelles – rue des amours 10 – 7100 La Louvière.
Musée de la Photographie à Mont-sur-Marchienne.
Installé dans les espaces d’un ancien carmel, le musée propose une histoire
de la photo en 50.000 images.
Le musée de Seneffe installé dans un château du 18e siècle propose une
belle collection d’orfèvrerie et un calendrier d’expositions-événements.
Le Musée royal de Mariemont
Le Mac's, Musée des Arts Contemporains de la Communauté française, rue
Sainte-Louise 82, 7301 Hornu
Installé dans les espaces industriels du Grand-Hornu génialement repensé par
l’architecte Hebbelinck.
Laethem-Saint-Martin :
Musée Dhondt-Daenens, Museumlaan 14, Deurle
références bibliographiques :
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2001
Alechinsky, P., in Magazine De Facto,
2000
Paris-Bruxelles, in magazine De Facto,
1997
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Bruxelles, catalogue de l'exposition,
1981
Van Bellingen, S. & Kochanek, S., Stedelijk Museum voor actuele Kunst Gent,
1999
GEIRLANDT, K.J.,
L'art en Belgique depuis 1945, éd. Fonds Mercator,
1983
Paul Delvaux, Peintures - Dessins 1922 - 1982, catalogue du Salon des
Indépendants, Grand Palais, éd Cercle d'Art, Paris,
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1991
Delvaux,P., in Arts Antiques Auctions, Hors série,
L'art en Belgique 1880-1950, Hommage à Luc et Paul Hasaerts, catalogue de
l'exposition du Palais des Beaux-Arts de Bruxelles,
1978
LEGRAND, F-Cl., Ensor, éd Renaissance de l'art,
1971
Paris-Bruxelles, un aller-retour pour la modernité, in Muséart,
1997
PALMER, M. L’art belge, éd. Racines
2002
LANGUI, E., L'Expressionnisme en Belgique, Collection Belgique-Art du temps,
éd. Laconti,
1970
Rik Wouters, Catalogue d'exposition, Palais des Beaux-Arts de Bruxelles,
2002
MEURIS, J., Magritte, éd. Taschen,
1992
Du réalisme à l'expressionnisme dans l'art belge, catalogue d'exposition,
Collection du Crédit communal,
1981
LEGRAND, F-Cl., Le symbolisme en Belgique, Collection Belgique-Art du
temps, éd Laconti,
1971
Le Musée d'Ixelles sans réserve, in De Facto Art magazine,
2001
Le premier groupe de Laethem-Saint-Martin, catalogue d'exposition, Musée
des Beaux-Arts de Bruxelles,
1988
GOYENS de HEUSCH, S., L'impressionnisme et le fauvisme en Belgique,
catalogue d'exposition, Musée d'Ixelles,
1990
DE WILDE, El., Les Musées Royaux des Beaux-Arts de Belgique, le guide des
collections d’art ancien et d’art moderne, éd. Alice,
1999
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Chap. 5
Belgique romane
___________________________________________________________________________
5.1. un art qui unifie l'Europe
L'art roman fleurit en Europe dès le début du 11e siècle, après les temps
troublés des invasions : Normands venus d'Angleterre, Hongrois originaires des
Steppes, Vikings descendant de Scandinavie, Arabes en Espagne et en
Méditerranée.
Lorsque les invasions cessent, vers l'an 1000, se profile une expansion
démographique et économique qui durera jusqu’aux environs de 1350.
Sur le plan politique, dès le 9e et 10e siècle, se multiplient les principautés
indépendantes et les seigneuries.
A partir de l'an 1000 environ, le pouvoir de l'église s'accroît jusqu'à pénétrer
tous les aspects de la vie.
La culture latine crée, au sein de l'église et de ses clercs, une unification ;
l'idéal chrétien s'incarne dans la société, notamment sous la forme de la
chevalerie (épopée, romans de chevalerie, chanson de Roland).
La fondation de nouveaux ordres religieux s'intensifie :
La vie religieuse connaît une forte impulsion avec la réforme de Cluny (SaintBenoît).
Les moines apportent l'amour de Dieu, l'amour du travail bien fait ; ils sont
bâtisseurs, professeurs, copistes, artisans, hôteliers.
De nouveaux sanctuaires s’érigent partout en Europe : géographiquement,
l'art roman s'étend de l'Espagne à la Pologne et de l'Italie à la GrandeBretagne.
Il est le premier art européen.
Sous la conduite du clergé, une ferveur religieuse nouvelle pousse les fidèles
sur les routes de pèlerinages.
Au moyen-âge, le pèlerinage est le principal moyen de communication
culturelle.
Saint-Jacques de Compostelle (nord-ouest de l'Espagne) est un des
principaux centres de pèlerinage de la chrétienté occidentale, après Rome
et Jérusalem.
On peut l'atteindre depuis Chartres, par Orléans, Tours, Poitiers, Saintes; depuis
Vézelay, par Le Puy et Conques ou par Périgueux et Moissac jusqu'en
Espagne.
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Voies de circulation pour les hommes, c'est par les routes de pèlerinage que
sont véhiculées et transmises les idées nouvelles et les découvertes
techniques.
L'édifice majeur pour la diffusion de la dévotion est l'abbaye, créée par les
ordres religieux (bénédictins ou cisterciens).
5.2. architecture religieuse
L'église romane est généralement sobre. Les architectes n'osent pas encore
faire de trop hautes élévations, ni de trop grandes ouvertures.
L'église symbolise Dieu qui s'est fait homme et est descendu parmi eux.
caractéristiques d'une église type :
- l'église type est de plan cruciforme (croix latine) liturgiquement orientée. Le
chœur (ou chevet) est orienté vers l'est, dans la direction du soleil levant qui
symbolise la résurrection du Christ et est donc la première partie à être
éclairée chaque jour. Il est souvent surélevé ; l'autel surplombant une crypte.
- le chœur est une simple abside demi-circulaire, voûtée en cul-de-four.
- l'affluence des pèlerins et le développement du culte des saints sont à
l'origine du déambulatoire (voie de circulation autour du chœur).
Le culte des reliques devenant de plus en plus important, on aménage dans
le mur de soutènement du chœur une petite fenêtre, la fenestrella qui
permet aux pèlerins de voir les reliquaires.
- la coutume de faire dire la messe par plusieurs prêtres explique la
construction et le développement de chapelles rayonnantes.
- la nef centrale est flanquée de bas-côtés ou de collatéraux.
- la porte principale est orientée vers l'ouest.
On entre généralement par le narthex, partie plus basse que la nef que l'on
continue à construire par tradition.
- la caractéristique la plus évidente des édifices romans réside dans la
combinaison d'un aspect fermé et massif joint à une verticalité manifeste.
- le mur entier est portant; toute la technique architecturale consiste à contrebuter une poussée par une autre. Le mur est épais et percé de peu de
fenêtres.
Ce problème est à l'origine du contrefort.
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- la tour généralement située à la croisée du transept devient, pour la
première fois dans l'histoire de l'architecture, est un élément formel de
première importance.
- l'arc en plein cintre et la voûte en berceau sont les éléments structurels de
l'architecture romane.
Les voûtes en berceau sont lourdes et réclament murs et contreforts massifs.
- l'architecture romane présente une organisation stéréométrique de
l'espace; la travée est une unité d'espace entre 4 piles.
- dans la deuxième moitié du 11e siècle, le besoin de voûter se généralise. La
nef centrale est généralement couverte d'une voûte en berceau, les bascôtés de voûtes en demi-berceau ou de voûtes d'arêtes (entrecroisement de
2 voûtes en berceau).
- des arcs doubleaux peuvent scander la nef.
- en élévation, on distingue 2 types d'églises : celles avec tribunes (galerie de
circulation) et celles sans tribunes mais avec triforium (galerie aveugle
ménagée dans l'épaisseur du mur).
- dès le 11e siècle; 2 plans sont définitivement établis; le plan bénédictin ou
rayonnant et le plan cistercien ou en échelon.
Les bénédictins glorifient Dieu par la richesse de leur architecture.
Le module est la courbe et le cercle, plus riches en possibilités esthétiques. Les
Bénédictins accordent une importance considérable au faste liturgique.
Le plan cistercien se caractérise par une extrême sobriété (prédilection pour
les formes rectilignes). Absence de déambulatoire et juxtaposition de
chapelles parallèles d'où le nom de plan en échelon.
Les cisterciens s'opposent aux Bénédictins par leur goût de l'austérité et leur
rigueur mathématique. Le module est le rectangle
L'austérité de la règle cistercienne se reflète dans la construction; il n'y a pas
de sculptures, les vitraux sont incolores.
Alors que les églises bénédictines sont couvertes d'or et de peintures, les
églises cisterciennes sont blanches. On laisse la pierre nue.
5.3. différentes écoles d'art roman :
Le style roman s'exprime différemment selon les régions.
Il existe différentes écoles d'architecture romane en France, dans le monde
germanique, en Italie, en Espagne et dans nos régions, c’est donc un art
régional.
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5.4. l'art roman dans nos régions :
Au cœur des mutations artistiques et culturelles, les territoires qui formeront
quelques dix siècles plus tard la Belgique, occupent une place de choix.
Situés à la rencontre de deux pays, la France et l’Empire, ils en subissent
l’influence sans perdre pour autant leur personnalité.
Deux écoles d'art roman apparaissent dans nos régions : l’école scaldienne
et l’école mosane.
Les fleuves, la Meuse et l'Escaut, délimitent deux domaines artistiques
importants : Liège rayonne sur la région mosane, Tournai sur la région
scaldienne.
L'art mosan subit des influences allemandes (Liège et Maastricht dépendent
de l'archevêché de Cologne), l'art scaldien subit des influences françaises
(Tournai et Cambrai dépendent de l'archevêché de Reims).
5.6. deux architectures bien distinctes :
Si les courants architecturaux scaldien et mosan procèdent d'une même
esthétique générale, leur manière de traiter l'espace les différencie
sensiblement : les deux écoles s'inspirent du plan basilical : une nef (ou
vaisseau) épaulée de bas-côtés, barrée par un transept et terminée par un
choeur prolongé par une abside.
Cependant, chacune des deux écoles combine différemment ces divers
éléments.
en pays scaldien, l'accent est porté sur la croisée, c’est-à-dire la rencontre
de la nef et du transept. A cet endroit s'élève généralement une tourlanterne qui éclaire la croisée.
Habituellement cette tour est flanquée de 2 tourelles d'escaliers.
A la cathédrale de Tournai, la croisée est tellement développée qu'elle a
donné naissance à une énorme tour-lanterne enserrée entre 4 hautes tours
indépendantes.
La cathédrale est inscrite au "Patrimoine mondial de l'humanité" par l'Unesco
depuis l'an 2000.
Elle combine 2 styles : une nef et un transept surmonté de 5 clochers, de style
roman (12e) et un choeur gothique (13e), le tout d'une qualité architecturale
et de dimensions impressionnantes. Avec une longueur de 134 m (pour 83m
de haut), elle devance Saint-Michel-et-Gudule à Bruxelles et Notre-Dame de
Paris.
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Cette taille est à mettre en rapport avec l'importance du diocèse de
l'époque qui couvrait la majeure partie du comté de Flandre, jusqu'à Bruges
et Arras.
Dans les églises rurales de l'Escaut dont les dimensions sont plus modestes, la
croisée du transept est surmontée d'une tour octogonale ou carrée.
en pays mosan, les églises ne possèdent pas de tour de croisée. En
revanche, la façade occidentale est dominée par un puissant massif appelé
avant-corps, construit devant la nef (Saint-Barthélemy à Liège, la collégiale
de Nivelles).
Les églises rurales se contentent d'une simple tour de façade.
Les tours ne sont pas les seuls éléments qui différencient les architectures
scaldienne et mosane.
Les tribunes, vastes galeries de circulation surmontant les bas-côtés et
ouvertes vers la nef par un jeu d'arcatures épousant le rythme des arcades
séparant le vaisseau des bas-côtés sont des éléments fréquents dans le
domaine scaldien (Tournai, Soignies) et absents en pays mosan.
Les cryptes sont habituelles dans le pays mosan et sont presque inconnues le
long de l'Escaut.
Le seul élément rapprochant mosan et scaldien est le fait que les nefs ne
soient jamais voûtées mais couvertes d'un plafond plat.
en pays mosan, les constructions se multiplient rapidement : Lobbes, Liège
(Saint-Denis), Stavelot, Saint-Trond, Nivelles, Celles, Hastière, Amay, Fosses… le
passé roman est profondément enraciné dans ces territoires.
la région scaldienne est aussi richement peuplée de sanctuaires romans.
Tournai avec sa cathédrale est sans doute la cité la plus romane du pays.
Malheureusement ces régions, voies d'invasion souvent mises à sac, ont
perdu la plupart de leurs monuments romans.
Subsistent la collégiale Saint-Vincent de Soignies, la cathédrale de Tournai, la
petite chapelle Saint-Basile de la place du Bourg à Bruges.
Tournai devient un évêché à part entière et un lieu de pèlerinage réputé.
L'extraction du calcaire gris dit "pierre de Tournai" dans les carrières de la
région prend rapidement de l'extension et procure une grande prospérité à
la ville.
5.7. les architecture civiles et militaires :
Les édifices civils romans sont quasi inexistants en Belgique.
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ISALT – 1 année – culture artistique
56
Tournai et Gand possèdent toutefois de beaux exemples de maisons
romanes, témoins précieux d'une bourgeoisie commerciale naissante.
A Tournai, elles sont 2 dans la rue barre Sainte-Brice.
A Gand, il n'y en a qu'une, la Maison de l'Etape du Blé : Spijker, datée de
1200, le long du Quai aux Herbes,
Ces demeures patriciennes présentent un pignon à gradins.
L'architecture militaire n'est pas mieux représentée. Quelques donjons,
quelques tours (tour Burbant à Ath, donjon de Moriensart à Céroux-Mousty,
tour Baudouin à Audenaerde) sont les principaux vestiges.
Le château de Comtes à Gand, forteresse des comtes de Flandres (construit
par Philippe d'Alsace), impressionne par son ampleur et sa robustesse. Inspiré
du Krak des Chevaliers croisés en Syrie, son décor est emprunté aux édifices
religieux de l'époque.
Le château fort roman trouve son origine dans le vieux castellum, une
fortification primitive où fossés et palissades cernent une tour de bois. Au fil du
temps s'ajoute une salle d'armes, une chapelle et des communs. Les
palissades font place à une enceinte de pierre; meurtrières et pont-levis
permettent de garder l'ennemi à distance.
Entièrement restauré au 19e siècle, il présente un bâtiment principal ceint par
un donjon puissant entouré par un chemin de ronde.
5.8. la taille, la fonte, la ciselure et l'émaillerie :
C'est à l'orfèvrerie que l'art mosan doit une grande part de sa renommée.
Châsses, reliquaires, ambons, croix de procession, objets liturgiques de toute
espèce sortent en masse des ateliers de la Meuse. Quelques-unes de ces
pièces sont de véritables chefs-d'œuvre de l'art occidental.
Le métal précieux travaillé au repoussé était généralement incrusté de pierres
précieuses ou de cabochons et décoré d'émaux où dominent les tonalités
bleues et vertes.
Le plus célèbre orfèvre mosan est certainement Godefroid de Claire,
originaire de Huy. Il travailla au milieu du 12e siècle, tant en pays mosan qu'à
l'étranger. Il est sans doute l'auteur du chef-reliquaire du pape saint
Alexandre, un des joyaux des Musées Royaux d'Art et d'Histoire (Parc du
Cinquantenaire à Bruxelles).
Au début du 13e siècle, époque où en pays mosan, le gothique s'impose
lentement, Hugo d'Oignies façonne des pièces admirables à l'ornementation
très raffinée.
En pays de Meuse, l'art du bronze produira la prestigieuse cuve baptismale
(1107-1118) conservée à l'église Saint-Barthelémy, oeuvre d'un fondeur Renier
de Huy.
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ISALT – 1 année – culture artistique
57
Dans le diocèse de Liège, la taille de la pierre et du bois n'a rien à envier à
l'orfèvrerie. Des oeuvres comme le Christ de Tancrémont, de Tongres ou du
musée diocésain de Liège sont des oeuvres remarquables. Les innombrables
Sedes Sapientes (ou madone en bois) participent aussi à l'essor de la
statuaire religieuse.
5.9. Tournai et la sculpture scaldienne :
Les régions de l'Escaut ne connaissent pas l'essor prestigieux de l'orfèvrerie qui
caractérise l'art mosan.
L'art scaldien s'attache surtout à la sculpture sur pierre.
Au 12e siècle, l'industrie est florissante Les chantiers de la métropole se
peuplent d'artisans qui taillent et ornent les édifices. Ainsi, la cathédrale se
pare de portails et de centaines de chapiteaux.
Grâce à l'Escaut sur lequel Tournai entretenait une flottille de péniches, la
sculpture tournaisienne est largement diffusée.
5.10. des fresques disparues et des manuscrits dispersés :
En France et en Espagne, l'art roman a laissé d'admirables peintures murales.
En Belgique, il ne demeure pratiquement rien de la peinture murale.
En revanche, l'art de la miniature est très florissant. Plusieurs monastères se
distinguent dans la production d'enluminures et de lettrines : les abbayes de
Gand, de Lobbes, de Saint-Laurent à Liège et de Saint-Remacle à Stavelot
possèdent les plus brillants scriptoria.
C'est aux 11e et 12 e siècles que l'art de la miniature connaît son apogée.
Chaque abbaye a besoin de son propre psautier, de sa propre Bible. L'art de
la miniature est en plein épanouissement.
5.11. les béguinages :
Par ses origines, son rôle social et économique, son étendue, son
organisation, le béguinisme est un phénomène religieux particulier à nos
régions, même si les Pays-Bas du Nord, l'Allemagne, l'Autriche et le nord de la
France en possèdent.
Sur les origines du mouvement, les opinions divergent. Pour certains, ces
communautés de femmes ont été initiées par Sainte-Begge, fille de Pépin de
Landen, fondatrice d'un monastère au 7e siècle à Andenne.
Pour d'autres, le prêtre liégeois Lambert le Bègue, par réaction contre les
moeurs dissolues de son époque, crée le premier béguinage pour les femmes
désireuses d'échapper au monde extérieur.
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Enfin dernière hypothèse : sous la contraintes des conditions socioéconomiques et politiques du 12e siècle (croisades, fondations des villes),
nombre de femmes célibataires ou veuves n'ont pas d'autre recours que de
se grouper pour se consacrer à Dieu et aux malheurs de leurs semblables,
sans cependant prononcer de voeux monastiques qu'elles refusaient.
Au 12e et 13e, fondation de nombreux béguinages dans nos régions (près de
100).
Ils adoptent la forme d'enclos indépendants en milieu urbain, relevant de leur
propre église.
Tous les béguinages belges présentent essentiellement 2 formules
d'implantation. Certains ont leurs ruelles et cours disposés autour du noyau
central de l'église (Lierre) et d'autres ont les bâtiments d'habitation précédé
d'un jardinet et entourant une cour centrale (Bruges et Termonde).
Parmi ces bâtiments, on découvre la maison de la Grande Dame régnant sur
la communauté, les maisons individuelles et les demeures collectives
réservées aux moins favorisées. Viennent s'ajouter l'église, le cimetière,
l'infirmerie, le tout à l'abri de murs que ferme un porche monumental clos le
soir.
La béguine qui habite dans cette "cité dans la cité" n'a pas de voeux définitifs
à prononcer, à la différence des religieuses mais elle se soumet à un certain
nombre de règles librement acceptées. Par exemple ne pas sortir la nuit et
participer aux offices du chapelain. Pour le reste chacune est libre de
disposer des revenus de ses biens ou de son travail (dentellerie,
enseignement, soins aux malades). Mais dans certaines communautés
relativement pauvres, les gains étaient mis en commun et les tâches
journalières réparties en fonction des qualités de chacune. C'est là une des
caractéristiques ; on y rencontrait autant des membres fortunés que de
membres dans le besoin. La solidarité pouvait s'y épanouir.
En dehors de leurs activités propres, qui touchaient aussi à l'art musical ou
littéraire, les béguinages étaient un réservoir inépuisable d'assistance en cas
de catastrophes (guerres, épidémies, famines). Là était leur véritable
vocation.
Au 17e siècle, l'archiduchesse Isabelle favorise les béguinages qui bénéficient
de nombreuses libéralités. Pendant près de 2 siècles, les béguinages
connaissent une grande prospérité.
Mais la Révolution française marque un brusque coup d'arrêt dans cet
épanouissement.
à retenir ...
- béguinage de la Vigne à Bruges
- béguinages de Lierre, de Courtrai, de Gand, Anvers, Hoogstraten, Turnhout,
Saint-Trond, Diest, Aarschot, Louvain et Hasselt.
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- Paradoxalement, le sud de notre pays, qui vit naître les premiers
béguinages, n'en conserve que des vestiges fort dénaturés, si ce n'est à
Liège, Binche,, Tournai et Mons.
5.12. les abbayes :
Orval, Villers-la-Ville, Aulne, Grimbergen, Westvleteren, Floreffe, les abbayes
représentent l’une des plus grandes richesses de notre patrimoine historique,
culturel, artistique et touristique.
De la contemplation à l’enseignement : les premiers monastères occidentaux
apparaissent vers la fin du 4e siècle. Les communautés monastiques mènent
une existence essentiellement contemplative jusqu’en 590, date à laquelle le
pape Grégoire Ier propage la règle de Saint-Benoît.
Cette règle donne à la vie monastique sa forme définitive : elle oblige les
moines à demeurer dans un monastère, elle organise leur journée de façon
très stricte entre le travail et la prière, leur impose de pratiquer la charité et de
prononcer des vœux de pauvreté, de chasteté et d’obéissance à l’abbé.
Les moines édifient de vastes complexes monastiques dans lesquels ils
accueillent les plus démunis et s’occupent d’élevage et d’agriculture. Les
abbayes de Stavelot, Gand, Malmédy sont fondées dès le 7e siècle.
Charlemagne achève d’imposer la règle de Saint-Benoît en Occident. Il
charge les moines de l’enseignement et les monastères deviennent des
centres culturels où l’on recueille la littérature antique.
Des réformes à l’âge d’or : les souverains exercent une influence de plus en
plus importante sur la vie monastique. A partir du 9e siècle ils nomment les
abbés et les évêques. La laïcisation progressive de ces fonctions entraîne le
déclin de l’institution monastique.
Au 11e siècle, le mouvement dit de Cluny réforme l’économie monastique,
place les monastères sous l’autorité du pape et réduit le travail manuel au
profit de l’étude et de la prière.
En 1098, Robert de Molesme prône un retour strict à la règle de Saint-Benoît et
fonde l’ordre des cisterciens (du nom de l’abbaye de Cîteaux en
Bourgogne). Fondation des abbayes d’Aulne, Koksijde et Villers-la-Ville au 12e
siècle.
La période la plus noire : lors de la Révolution française, les communautés
religieuses sont chassées, leurs abbayes et leurs biens détruits ou confisqués.
Aujourd’hui : la plupart des abbayes ont développé une série d’activités pour
assurer la subsistance de leur communauté ; certaines abbayes organisent
des « séjours à l’abbaye », d’autres sont spécialisées dans la fabrication de
produits locaux.
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ISALT – 1 année – culture artistique
60
5.13. lexique :
église : (grec : ekklêsia, assemblée), édifice où se réunissent les
chrétiens pour célébrer leur culte.
église-halle : église médiévale à plusieurs vaisseaux de même hauteur,
largement ouverts les uns sur les autres.
abbatiale : église d'une abbaye.
collégiale : qui possède un chapitre collégial.
cathédrale : église épiscopale d'un diocèse.
14. références bibliographiques :
GRABAR, A.,
Formes,
1961
Le premier art chrétien, Paris, Gallimard, Univers des
FOCILLON, H.,
1965
L’art d’Occident, Paris, Le livre de Poche,
BRIGODE, S.,
1971
Les églises gothiques de Belgique, Bruxelles,
DURAND, J.,
1989
L’art au Moyen Age, Connaissances artistiques, Bordas,
de VISSCHER, A.,
1983
La Belgique buissonnière, éd. Reader Digest,
NUTTGENS, P.,
2002
Histoire de l'architecture, éd. Phaidon,
FOULON, P-J., & HAUMONT, C., Découvrir la Belgique romane, Guide
Marabout,
1975
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Chap. 6
Belgique gothique
____________________________________________________________
6.1. l'art gothique ; une nouvelle culture
Apparu en France (église abbatiale de Saint-Denis, près de Paris) au milieu du
12e siècle, l'art gothique exerce une influence esthétique jusqu'à la fin du
moyen-âge.
Utilisé pour la première fois à la Renaissance par Giorgio Vasari, premier
historien de l'art, le terme gothique désigne l'art médiéval au nord des Alpes.
Si l'art roman est essentiellement lié à l'expansion des ordres religieux
(bénédictin et cistercien), l'art gothique est indissociable de l'affermissement
du pouvoir royal en France (Philippe-Auguste et de Saint-Louis).
L'art gothique marque la fin du monopole qu'exerçaient les monastères sur la
vie artistique et intellectuelle.
L'essor de l'art gothique est en relation avec la formation territoriale de la
France : d'abord strictement localisée à l'intérieur et autour du domaine royal
(l'actuelle Ile-de-France), l'art gothique gagne progressivement les autres
provinces françaises rattachées à la Couronne, puis l'Europe (Angleterre,
Pays-Bas, Allemagne).
Au 13e siècle, la France, politiquement forte grâce à la dynastie capétienne,
devient une puissance respectée dont le rayonnement s'étend bientôt sur
toute l'Europe.
Paris est reconnue comme la capitale intellectuelle et artistique du monde
occidental et conserve cette suprématie jusqu'à la fin du moyen-âge.
L'essor des villes et l'ascension d'une nouvelle classe sociale, la bourgeoisie,
font naître des besoins nouveaux.
A partir du 12e siècle, l'essor économique des villes conduit à la formation de
communes.
Les privilèges et franchises des cités marchandes (Bruges avait le monopole
de la laine, Gand celui du blé, Damme celui du commerce du vin et du sel
avec toute l'Europe du Nord) principalement économiques se transforment
en franchises politiques.
L'essor communal repose sur le développement du commerce et de
l'industrie qui engendre une nouvelle classe sociale, la bourgeoisie urbaine.
Dans des villes en plein essor, la bourgeoisie commerçante et industrielle,
groupée en corporations de métiers, s'affirme de plus en plus comme une
classe sociale nouvelle.
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Le régime seigneurial décline et à une civilisation jusqu'alors essentiellement
rurale succède une civilisation urbaine marquant la fin du monde féodal.
En fait, le gothique est la première manifestation d'une culture bourgeoise
fondée sur la population urbaine.
Son développement est favorisé par un intense mouvement d'urbanisation.
Les villes deviennent les centres privilégiés de la vie économique, sociale,
spirituelle et artistique, et la cathédrale en est le symbole.
Lieu de culte et des fêtes solennelles, elle est également le théâtre de la
représentation des premiers mystères.
6.2. l'architecture religieuse:
Dès le 12e siècle, l'Ile-de-France apparaît comme le foyer de l'art gothique
(1125 - double déambulatoire de l'abbaye de Saint-Denis).
Structurellement, il supprime la maçonnerie massive, permettant des murs plus
hauts et des voûtes plus variées.
Les murs ainsi libérés peuvent être employés à l'éducation des fidèles par le
biais de la sculpture et du vitrail.
L'architecture gothique se caractérise par l'emploi de trois éléments
structurels : la voûte d'ogives, l'arc brisé et l'arc-boutant.
L'église gothique type se caractérise par :
- plan en croix latine, le transept déborde souvent très peu, le long des bascôtés, présence de chapelles qui élargissent la nef.
- orientation est toujours à l'est.
- narthex est remplacé par l'avant-nef ou massif antérieur qui se distingue de
moins en moins de l'église.
- tribune est remplacée par le triforium, simple passage auquel les fidèles
n'ont pas accès.
- arcs brisés.
- voûtes sur croisée d'ogives contrebutées par des murs boutants et des arcs
boutants. Les voûtes sur croisée d'ogives sont des voûtes sur plan carré ou
rectangulaire disposées dans un encadrement formé de 4 arcs: 2 arcs
transversaux à la nef dit doubleaux et 2 arcs latéraux dits formerets.
Les nervures sont les diagonales partant des angles se coupant à la clé de
voûte et délimitant 4 compartiments appelés voûtains. Ces différents arcs
constituent la carcasse de la voûte et l'ensemble détermine une travée.
- arc boutant retient la poussée de la voûte d'ogives. Cet arc s'applique à
l'extérieur de l'édifice aux points de retombée des voûtes, enjambe les bascôtés et transmet les poussées du vaisseau central à un contrefort situé à
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ISALT – 1 année – culture artistique
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l'extérieur de l'édifice: la culée (souvent surmontées de petits édicules
appelés pinacles).
Le contrebutement est ainsi assuré par un jeu de forces obliques dans lequel
l'arc-boutant exerce le rôle de raidisseur.
- la croisée du transept est voûtée d'ogives.
- le choeur est ceinturé du déambulatoire menant aux chapelles
rayonnantes; le culte marial étant très répandu à cette époque, il peut y
avoir une chapelle axiale (donc dédiée à la Vierge) même si l'église est déjà
dédiée à la Vierge.
- l'église peut avoir un chevet plat.
- dès l'origine, l'art du vitrail est associé à l'histoire de l'architecture gothique et
représente ce que la peinture murale était à l'art roman, en reprenant à
l'intérieur l'enseignement dispensé au dehors par la sculpture des portails.
Paroi translucide de verre coloré dans la masse, le vitrail donne à la lumière
une tonalité changeante avec l'heure du jour et le rythme des saisons,
conférant à ces images un aspect toujours renouvelé.
A côté de l'iconographie religieuse apparaît une iconographie profane
grâce aux corporations qui offrent des vitraux aux églises et se font
représenter avec leurs attributs. Les scènes sont enfermées dans des
quadrilobes, sur fonds végétaux, géométriques ou héraldiques.
En façade, les roses placées très haut sont difficiles à lire; au centre on
représente la Vierge ou le Christ, et autour des angelots et différents attributs.
- la décoration sculptée envahit toute la cathédrale à l'extérieur. La
cathédrale représente une véritable encyclopédie de la culture de l'époque.
Comme la sculpture romane, la sculpture gothique est liée à l'architecture. Le
lien est cependant nouveau: exemple des statues-colonnes où le corps
humain n'est plus traité en fonction du cadre mais avec un souci
d'individualisation, apparition de l'humanisme gothique.
L'art religieux s'est développé en 4 temps :
- gothique primitif (1150-1230) aussi appelé style de transition ou gothique
roman. en France ; Notre-dame de Paris, Noyon, Sens.
Plan et élévation des premières cathédrales gothiques se développent à
partir des formules romanes, mais avec une recherche dynamique qui se
traduit dans la verticalité et l'accélération du rythme.
- gothique classique (1230-1300) : en France : Chartres - Reims - Amiens Beauvais - Sainte-Chapelle de Paris.
La reconstruction de la cathédrale de Chartres, détruite par un incendie en
1194, ouvre une nouvelle époque de l'architecture gothique créant le type
de la cathédrale gothique.
La grande nouveauté est la suppression des tribunes et l'élévation des bascôtés ce qui contribue à unifier davantage visuellement l'ensemble de
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l'église. L'élan ascensionnel de l'édifice augmente (exemple: Reims 38m,
Amiens 42m, Beauvais 48m20).
Ainsi définie, la cathédrale gothique n'a plus évolué aux époques suivantes.
L'art rayonnant et flamboyant ne représente plus qu'un stade de
perfectionnement et de raffinement décoratif, une somptueuse parure
plaquée sur une structure mise en place au 13e siècle.
Le vocabulaire ornemental se charge de motifs nouveaux fondés sur des
combinaisons d'ellipses aiguës, avec des jeux de courbes et de contrecourbes simples ou redentées. Affectant d'abord le remplage des baies, des
rosaces et des arcatures du triforium, ce style curvilinéaire envahit bientôt les
voûtes compliquées de liernes et de tiercerons.
L'enveloppe extérieure des édifices n'échappe pas non plus à cette profusion
décorative.
- gothique rayonnant (14e siècle)
- gothique flamboyant (15e siècle) en France : Brou à Bourg-en-Bresse Vendôme.
Nouvelle période de gloire pour l'architecture gothique. Toute l'Europe sera
touchée par ce style.
en Belgique : Bruxelles ; Notre-Dame du Sablon, Saint-Michel et Gudule, SaintGuidon
6.3. l'architecture gothique dans nos régions :
a) architecture religieuse :
Les premiers exemples de style gothique dans nos régions sont les abbayes
cisterciennes d'Orval, Villers -la-Ville et Aulne, l'église des Dominicains à
Louvain et la nouvelle nef gothique de la cathédrale romane de Tournai.
Cette fois l'architecture mosane et l'architecture scaldienne subissent toutes
deux l'influence française.
Le gothique conquiert la Belgique à partir de Tournai. En 1198, l'évêque
Etienne se fait construire une chapelle privée dont les nouvelles conceptions
architecturales provoquent un tel enthousiasme que l'année suivante on
détruit le choeur roman de la cathédrale pour le remplacer par une nouvelle
abside gothique qui se caractérise par une abside polygonale, un triforium
d'une extrême élégance où alterne une colonne simple et une colonne
double, une tour à la croisée du transept et surtout les fenêtres triples dont la
baie médiane dépasse les deux autres en hauteur.
Les églises les plus représentatives sont Notre-dame de Pamele à
Audenaerde, Saint-Nicolas à Gand, et Saint-Martin à Ypres.
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ISALT – 1 année – culture artistique
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Dans la zone côtière apparaît l'église-halle (Hallenkirche) qui se distingue par
3 larges nefs de hauteur égale, une tour trapue avec contreforts à l'ouest et
une prédilection pour les arcs aveugles.
Les églises de Damme, Lisseweghe et Notre-dame de Bruges sont les témoins
actuels de ce style.
Le gothique mosan est moins caractéristique : son motif ornemental le plus
fréquent est le chapiteau à feuillage.
Deux choses frappent dans ce style : l'éclairage du choeur par des baies de
très grandes dimensions et la justesse des perspectives. Notre-dame de Huy,
Notre-Dame de Tongres, Saint-Paul à Liège.
b) architecture civile :
Au moyen âge, les enceintes des villes sont percées de portes, elles-mêmes
fortifiées dont le nom est souvent celui de la localité d'où venait la route
d'accès.
Le château-fort médiéval (pont-levis, meurtrières, créneaux et donjon) se
retrouve surtout dans la vallée de la Meuse mais aussi en Brabant (Beersel).
Des tours monumentales s'élèvent également à proximité des ponts ainsi le
pont des Trous à Tournai (13e siècle), les tours de Broel à Courtrai et le rabot à
Gand.
Pour affirmer leur indépendance, les communes font édifier des beffrois, soit
conçus comme un donjon de château-fort et abritant la cloche communale,
soit indépendant comme à Tournai et à Gand. Parfois, le beffroi s'élève au
point central de la Halle aux draps, comme à Bruges et à Termonde.
Les beffrois se concentrent en Belgique et dans le nord de la France.
*A l'origine, le mot beffroi désigne une tour en bois montée sur roues et utilisée
pour l'attaque d'une place forte.
Le rôle du beffroi est d’abriter la cloche communale. Ce droit de posséder la
cloche était le premier pas vers l’autonomie communale, un droit acquis par
rapport à l’autonomie du prince et de l’Eglise.
Posséder la cloche, c’est posséder le droit de communiquer, d’annoncer les
réunions des échevins, l’ouverture et la fermeture des portes de la ville, de
l’approche d’un danger.
Par la suite, le beffroi désigne la tour qui abrite les chartes et privilèges d'une
ville. Véritable symbole ; celui de l'autonomie communale mais aussi celui
de la richesse et de la puissance de la ville.
La construction des premiers beffrois correspond à l’émergence du
mouvement communal. Au 11e siècle, la fin des invasions normandes et les
progrès agricoles permettent des échanges et la reprise de l’urbanisation.
L’essor économique et démographique donne naissance à de villes
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drapières rayonnantes. Les marchands se constituent en associations et
organisent la cité. Ils revendiquent des privilèges et obtiennent du suzerain
une charte leur conférant une autonomie administrative, juridique et
commerciale. Cette preuve écrite de leurs droits institue la « commune »
dirigée par des échevins élus. L’indépendance se matérialise par un sceau.
Depuis 1999, 32 beffrois de Flandre et de Wallonie sont classés au Patrimoine
Mondial.
références bibliographiques :
FOCILLON, H.,
1965
L’art d’Occident, Paris, Le livre de Poche,
BRIGODE, S.,
1971
Les églises gothiques de Belgique, Bruxelles,
DURAND, J.,
1989
L’art au Moyen Age, Connaissances artistiques, Bordas,
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ISALT – 1 année – culture artistique
67
Chap. 7
L’ARS NOVA ou la peinture des Primitifs flamands dans les
anciens Pays-Bas au 15e siècle
___________________________________________________________________________
La peinture sur mur, parchemin ou panneau existe depuis longtemps mais
c’est seulement au 15e siècle que les peintres flamands atteignent dans la
peinture sur panneau à un réalisme exceptionnel dans la représentation de
leur environnement.
Avec un sens du détail, les peintres commencent à reproduire le monde réel
avec minutie abandonnant le recours au fond doré. Ce nouveau style
pictural est appelé l’ars nova.
Le terme de "Primitif flamand" apparaît à Bruges, en 1902 dans le titre d'une
exposition immense et légendaire : "Les Primitifs flamands à Bruges".
Evénement sans pareil qui reste un jalon dans la redécouverte de la peinture
flamande du 15e siècle.
L’ars nova reflète l'essor des anciens Pays-Bas au 15e siècle.
Période passionnante où le Moyen Age touche à sa fin et l'humanisme
s'annonce.
Economie, politique, religion, culture sont en pleine révolution.
La Bourgogne, état florissant, redessine le paysage politique et culturel de
l'Europe.
De nombreux peintres s'installent à proximité de la Cour de Bourgogne ou
dans les villes prospères des Flandres (Bruges, Tournai, Bruxelles) où de riches
marchands (industries drapières) sont susceptibles de devenir leurs mécènes.
L’ars nova qui se développe dans nos régions aux environs de 1420 révèle
une nouvelle mentalité.
Il rompt avec la tradition du gothique international (élégance de cour,
raffinement) et se fonde sur les principes nouveaux de l'humanisme où
l'homme par son raisonnement accède à la connaissance et à l’amour de
Dieu. Les valeurs religieuses conservent tous leurs droits, elles ne dominent plus
toutes les autres disciplines.
L’humanisme propose une conception nouvelle de l’homme, considéré
comme la « mesure » de toute chose d’où le développement de
l’individualisme.
L’art s’achemine vers une autonomie où le culte de la Beauté en se
confondant avec celui de la Vérité, finira par se substituer à lui.
Héritière de l'art de la miniature, la peinture devient un miroir du monde visible
qui reflète le monde spirituel.
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Cette peinture privilégie le silence, la contemplation, la vérité et l'observation
de la réalité visible.
Les peintres s'intéressent à la réalité et tentent de représenter fidèlement les
êtres et les choses.
Ils découvrent l'espace infini comme principe de structuration de l'image. Ils
utilisent la "perspective atmosphérique" - "aérienne" où, comme dans la
réalité, l'air atténue les contours des objets les plus éloignés. Les valeurs des
couleurs s'estompent, la lumière joue un rôle très important.
A la différence de la peinture de la Renaissance italienne où la perspective
linéaire se fonde sur des lignes se rejoignant en un point de fuite, Ies Primitifs
flamands inventent une nouvelle conception de l'espace pictural où les
objets et les personnages précèdent l'unification de l'espace. Se crée alors un
espace-ambiance enveloppant toutes choses, y compris le spectateur luimême.
Van Eyck et le Maître de Flémalle ne recourent pas au principe de la
perspective linéaire avec point de fuite unique, mis en place par la
Renaissance italienne (et acquis plus tard dans nos régions par Bouts et Petrus
Christus).
Chaque figure possède sa réalité propre, souci de donner à chaque chose la
réalité de la vie.
D'où cette présence immobile des choses enveloppées par le milieu
ambiant, image d'une intériorité qui s'unifie sans se centrer sur l'activité de la
personne.
Tout le développement de la peinture flamande du 15e siècle implique un
subtil dialogue entre deux pôles, l'espace ouvert et en dilatation et l'espace
écrasé (plan-limite).
L'image flamande est transparence.
La densité chromatique est caractéristique des figures flamandes.
Le spectateur est inclus dans l'image.
Le sujet est absorbé dans la fiction picturale. Le spectateur plane au milieu de
la scène.
Recours généralisé à un horizon haut qui suscite un effet de vue plongeante
contredit par des verticales.
La saisie directe des choses par le détail répond au même souci d'instaurer
une présence réelle de l'objet.
Dans la conception flamande une distance s'insinue entre la conscience et le
geste. L'action se fige dans une signification symbolique = schéma liturgique.
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Les fondateurs :
Les deux initiateurs du développement de l'espace pictural flamand au 15e
siècle sont le Maître de Flémalle et les frères Van Eyck.
- MAITRE DE FLEMALLE généralement identifié à Robert Campin, né vers 1375,
régulièrement cité dans les archives de Tournai de1406 à sa mort en 1444.
L'intuition du Maître de Flémalle est essentiellement sculpturale. Il pense
directement la forme en termes de relief.
L'image se structure à la manière d'un relief où les figures et les choses se
situent entre un plan de pose constitué par le fond et le plan limite qui
s'intensifie à la surface du tableau.
Il y a contraction de l'espace.
Affirme l'espace du tableau comme un plan limite transparent contre lequel
viennent s'écraser les figures. Les plis des drapés se brisent et les formes se
tordent.
Par rapport au détail, le Maître de Flémalle attire l'attention sur les accidents
isolés de l'objet.
- étalement des figures en largeur
- écrasement des formes
- torsion des contours
* La Nativité - (Dijon)
Dans ce tableau, les figures (anges, bergers) sont autant de reliefs individuels
étalés entre 2 plans qui les compriment.
Le premier plan du pignon ouvert de l'étable s'écrase à son tour contre la
colline.
* Triptyque de l'Annonciation - 1425/30 - Metropolitan Museum - New York bois 64 x 63 x 27 cm - (autre version aux Musées Royaux des Beaux-Arts - Bruxelles)
La construction perspective n'unifie l'espace qu'en suscitant une forte
pression des plans obliques (parois et sol) contre le plan de pose et une vue
plongeante sur la table et le banc.
L'ange et la vierge étalent leur relief entre le sol qui monte et le plan-limite.
Le Maître de Flémalle aère le relief en creusant l'espace autour des corps
(rôle des ombres portées).
- Hubert VAN EYCK est le frère aîné de Jan. Il décède en 1426. Suivant
l'inscription sur le cadre de l'Agneau Mystique, Hubert van Eyck était "le plus
grand peintre qui ait jamais vécu". Il commence le polyptique qui sera
terminé en 1432 par son frère Jan.
- Jan VAN EYCK, prodigieux observateur
Né vers 1390, probablement à Maaseyck, près de Maastricht.
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ISALT – 1 année – culture artistique
70
Après avoir travaillé pour le comte de Hollande Jean de Bavière, il entre en
1425 au service de Philippe le Bon comme peintre, cartographe, décorateur
des résidences princières, créateur de costumes, d'accessoires. Il effectue des
missions diplomatiques en Espagne et au Portugal.
Vers 1430, il se fixe à Bruges où il meurt en 1441.
Héritier du Maître de Flémalle et de son frère Hubert, Jan Van Eyck est resté
étranger à l'italianisme du 14e siècle.
Van Eyck conçoit un espace en dilatation de l'infiniment petit à l'infiniment
grand et tend à abolir le plan du tableau pour dépasser les limites du cadre.
Sens presque cosmique de conquête du visible
Tend à réduire l'action et aboutit à l'immobilité d'un état.
Il réduit toute action à un état pour réaliser un espace de pure présence.
Il obtient l'illusion de la réalité en ajoutant patiemment détail sur détail jusqu'à
ce que la somme de son tableau soit devenue comme le miroir du monde
visible (mise en abyme).
Il est considéré comme le fondateur du réalisme optique.
Technique :
Pour réussir dans sa volonté de saisir le monde comme en un miroir avec les
moindres détails de la réalité, Van Eyck perfectionne la technique de la
peinture à l'huile.
Il utilise l'huile de lin mélangée à de l'essence de térébenthine pour lier les
terres de couleur.
Cette technique permet de rectifier ou reprendre l'oeuvre pendant que les
couleurs sèchent, sans risque de les diluer; les couleurs gardent toute leur
fraîcheur et le tableau sèche à l'ombre sans aucun problème.
A cette époque, les peintres préparent eux-mêmes les matières colorantes
extraites de certaines plantes et de certains minéraux. Ils les broyent dans un
mortier et en font une pâte par addition d'un liant.
* Les époux Arnolfini - 1434 - Londres - National Gallery - bois - 81,8 x 59,7 cm
Marchand lucquois, établi à Bruges depuis 1420 et devenu conseiller de
Philippe le Bon. Ce tableau a pour thème la commémoration du
consentement de mariage par l'échange des mains.
Nombreux symboles insérés dans la composition.
Solennité de la scène. Symétrie rigoureuse de la composition. Mise en abyme.
*L'Homme au turban - 1433 - National Gallery - Londres - bois - 26 x 19 cm
Pour la première fois dans l'histoire de la peinture, le regard du modèle,
détourné du vide, se fixe sur le spectateur le modèle.
* Polyptique de l'Agneau Mystique 1432 (ouvert 3,50m x 4,61m) - Saint Bavon
-Gand
12 panneaux dont 8 peints sur les deux faces.
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ISALT – 1 année – culture artistique
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thème : le retable ouvert glorifie le Mystère de l'Agneau, symbole de la
Rédemption, sujet tiré de l'Apocalypse.
* Vierge au Chancelier Rolin - vers 1433 - Le Louvre - Paris - bois - 62 x 66 cm
Unification parfaite de l'espace. Le passage des 2 plans horizontaux est assuré
par la triple arcade et par le parapet du pont.
La vue télescopique des lointains et la vue microscopique du premier plan
s'intègre sans césure.
Multiplication à l'infini des images dans l'image. Intérêt de Van Eyck pour les
reflets, pour le jeu varié de la lumière sur la texture des choses et pour les
miroirs.
Toute trace de facture s'efface pour faire place à la pure présence des
choses comme révélation de l'infini tandis que toute action, toute expression
se résout en état.
La représentation trouve son intériorité dans son objectivité même.
Les figures de Van Eyck ont un regard qui, parce qu'il n'est pas centré donc
pas dirigé, devient pure présence et ne s'arrête à aucun objet déterminé.
Première œuvre qui met sur le même plan d’égalité la Vierge et l’homme.
* Vierge au chanoine van der Paele - 1436 - Bruges - Groeninge Museum bois - 122 x 157 cm
Tout mouvement est suspendu; une symétrie rigoureuse régit l'ensemble de la
composition?
- ROGIER VAN DER WEYDEN (1399-1464) : maître de la Passion et de
l’expression retenue
Né à Tournai en 1399-1400 et généralement identifié à Roger de la Pasture. Il
fait son apprentissage de 1427 à 1432 dans l'atelier du Maître de Flémalle.
Travaille pour la cour de Philippe le Bon.
Mentionné à Bruxelles en 1435 comme peintre de la ville. Il y poursuit sa
carrière et y meurt en 1464, après avoir probablement effectué en 1450 un
voyage en Italie (Rome).
Artiste passé maître dans l’expression des émotions, son génie est d'avoir
débloqué l'objectivisme des fondateurs en lui imprimant un élan expressif.
La représentation se charge d'expression.
Importance de la verticalité qui conditionne l'unification nouvelle de
l'espace.
Dans la peinture de Van der Weyden, le relief étalé du Maître de Flémalle se
contracte; l'espace immobile de Van Eyck s'anime, le rythme sculptural
assoupli fonde une nouvelle organisation de l'image.
*Miniature : Chronique du Hainaut – 1477
* Descente de croix - vers 1435 - Madrid - Prado -bois 220 x 262 cm
La peinture est conçue comme un bas-relief peint.
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ISALT – 1 année – culture artistique
72
Cette peinture ne donne pas l'illusion de la réalité; peu d'intérêt pour le
paysage.
Les figures sont dispersées sur une sorte de plate-forme sans profondeur, se
détachant sur un fond neutre.
Sa conception de la vie est toute chrétienne; elle est renoncement et
mortification. Il exprime avec une émotion intense les souffrances de la
passion (douleur de la Vierge).
Composition claire.
corps du Christ = centre de la composition - Saint-Jean se penche vers la
vierge évanouie faisant pendant à Marie-Madeleine. //le corps affaissé de la
vierge et corps du Christ .
Il influence les peintres de la deuxième moitié du 15e siècle dont P. Christus,
D. Bouts, H. Memling.
- PETRUS CHRISTUS (vers 1410 – 1475)
Venu du nord du Brabant, Petrus Christus s'installe à Bruges en 1444 et meurt
dans cette ville en 1472 ou en 1473.
Son style est influencé par Jan Van Eyck et Van der Weyden.
A l'approche frontale du relief, il oppose ce qu'on pourrait appeler une vision
oblique, qui enrichit l'enveloppement du volume. P. Christus cherche à
accuser la profondeur.
Les figures se présentent comme de trois quarts : un trois quarts sans
raccourci. De là le goût de Petrus Christus pour les figures penchées en avant
comme pour mieux plonger sans l'espace qui les entoure.
Etendu à l'ensemble de la composition, ce principe engendre les
groupements obliques et les enchaînements diagonaux.
Inclinaison du sol qui accroît la profondeur des groupes de l'avant-plan.
A l'avant- plan les corps reçoivent une profondeur oblique souvent excessive
alors que les personnages repoussés vers le fond se situent à une hauteur
inattendue.
Il met en évidence la géométrisation de l'espace. Schématisation des pans
d'ombre et de lumière qui articulent la profondeur.
Cette géométrisation a pour rançon un appauvrissement du détail et de
l'espace.
P.Christus tente de réintroduire le mouvement et les relations des figures. Mais
décalage entre les figures qui apparaissent rêveuses, distantes et l'action.
- DIERIC BOUTS
Avec lui s'ouvre la dernière phase du 15e siècle flamand qui se concentre
toujours davantage sur la vie intérieure du sujet.
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ISALT – 1 année – culture artistique
73
Né à Haarlem entre 1410 et 1420, Bouts s'établit à Louvain vers 1448. Sa
carrière semble s'être toute entière déroulée dans cette ville où il meurt en
1475.
Il se forme sur les leçons de Van Eyck, Van der Weyden et Petrus Christus
(géométrisation de l'espace, disposition des figures sur des diagonales
ascendantes qui s'enfoncent dans la composition).
Les figures de Bouts se contractent dans des contours toujours plus rectilignes
où se multiplient les cassures anguleuses.
L'espace chez Bouts est essentiellement distance entre les choses; il naît de la
contraction et de la verticalité qui suscitent le "vide".
Echelonnées sur les obliques ascendantes qui les relient, les figures isolées et
refermées sur elles-mêmes se dressent à distance l'une de l'autre comme
autant de jalons dans la profondeur de l'espace.
* Dernière Cène - église Saint-Pierre - Louvain - 1464/68 - bois - 180 x 294 cm
Bouts souligne les horizontales autant que les verticales et fait converger les
lignes en un point de fuite unique.
L'évolution stylistique de Bouts s'inscrit clairement dans la contraction et la
verticalité croissantes des volumes dictées par le géométrisation toujours plus
rigoureuse des formes en vue de susciter l'espace.
* La Justice d'Othon (Epreuve du Feu) 1465-1475 - Bruxelles
Dans cette oeuvre les formes s'étirent jusqu'à un ascétisme sévère.
La ligne est tendue et suggère le tranchant d'un rasoir.
Effort constant pour susciter le vide autour des choses.
- HANS MEMLING (1430-1494)
Originaire de Francfort, il acquiert le droit de bourgeoisie à Bruges en 1465 ce
qui lui permet d’exercer son métier dans le très prospère port flamand. A
travaillé dans l’atelier de Roger Van der Weyden à Bruxelles avant son arrivée
à Bruges.
Memling est avant tout un portraitiste remarquable. Si ses vierges sont toutes
peintes sur le même modèle, les portraits des saints et donateurs sont
individualisés.
* Diptyque Marteen Van Nieuwenhove
1478 – huile sur bois – Hôpital St Jean à Bruges
Issu d’une grande famille brugeoise au service des ducs de Bourgogne,
l’homme représenté de trois quarts est en prière devant son missel ouvert.
Son regard se détourne de la Vierge, sa bouche entrouverte murmure
l’oraison.
Derrière lui, représenté en perspective fuyante, un mur percé de 2 fenêtres
laisse entrer une lumière abondante. La fenêtre la plus proche du cadre est
ouverte dans sa partie basse, laissant entrevoir un jardin verdoyant.
Au-dessus un vitrail tamise la lumière.
Sur l’autre panneau, la Vierge est représentée de face et le mur qui ferme la
composition est lui-même parallèle au cadre du tableau.
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Par ce détail de pure géométrie, Memling marque la distance qui sépare le
monde divin (vision frontale) du monde des humains (perspective fuyante et
profil qui matérialisent le règne éphémère de l’homme).
Memling unifie les deux espaces ; en effet derrière la Vierge, un miroir reflète
le portrait du donateur attestant la présence de celui-ci dans la même salle.
La technique des Primitifs flamands :
L'étrange fascination qu'exercent sur ces oeuvres est liée à leur remarquable
qualité picturale.
Analyse scientifique des chefs-d'oeuvre = infra-rouge, UV, rayon X
Mais les connaissances restent limitées (pas de traité ancien de la peinture
flamande)
1 - le support
Le chêne, le saule largement répandus en Europe sont les bois utilisés par les
maîtres flamands du 15e.
2 - le cadre
joue un rôle important dans le maintien du support et n'a pas seulement une
fonction esthétique.
3 - la préparation
préparation blanche, à base de craie et de colle animale posée en 2 ou
plusieurs couches, d'abord au pinceau ensuite au couteau pour obtenir une
surface parfaitement lisse qui a l'aspect d'une dalle de marbre poli.
Double fonction :
a) préparer le panneau et niveler les irrégularités b) réfléchir la lumière
4 - le dessin préparatoire ou sous-jacent
Le dessin peut être incisé dans la préparation, tracé à sec ou au pinceau.
5 - couches d'imperméabilisation à base d'huile siccative
6 - couches picturales
Généralement le procédé est d'appliquer une première couche de couleur
claire qui détermine le ton de base.
Les couleurs suivantes sont des couches de glacis transparent (le glacis est
une couche picturale translucide).
C'est la succession des glacis qui détermine les ombres. Les tons clairs sont
obtenus par l'adjonction de blanc de plomb.
Les minces couches se laissent pénétrer par les rayons lumineux qui sont
renvoyés par la couche préparation.
Les principaux liants sont l'huile de lin ou de noix pour la peinture à l'huile et
l'oeuf (oeuf entier, le jaune ou le blanc) pour la tempera.
Les pigments : l'azurite et le lapis-lazuli constituent les pigments des bleus, le
vermillon et la garance déterminent les rouges les verts sont réalisés à base
de malachite et de résinats de cuivre.
7 - couche protectrice - vernis
a pour but d'unifier, de rendre dense et de protéger les couleurs contre les
agents atmosphériques
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75
références bibliographiques :
FRIEDLANDER, M-J.,
1964
De Van Eyck à Breughel, les primitifs flamands, Paris,
PANOFSKY, E.,
1992
Les Primitifs Flamands, Hazan,
PHILIPPOT, P.,
1994
La peinture dans les Anciens Pays-Bas, Flammarion,
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Chap. 8
introduction à l'histoire des anciens Pays-Bas
____________________________________________________________
1 / L’Etat bourguignon (1384 - 1477) :
A partir du 15e siècle, les territoires de nos régions sauf la Principauté de liège
qui est autonome, sont regroupés sous l’autorité d’un même souverain et
rattachés à des ensembles politiques plus vastes.
L'unification politique des territoires des anciens Pays-Bas trouve son origine
dans le mariage de PHILIPPE LE HARDI, fils cadet du roi de France Jean II le
Bon et duc de Bourgogne, avec MARGUERITE DE MAELE, fille héritière du
dernier comte de Flandre.
Le règne de Jean Sans Peur assassiné à Monterreau en 1419, est trop court et
troublé pour permettre une expansion territoriale.
Le jeu des alliances et l'habilité politique vont permettre à son successeur,
PHILIPPE LE BON, d'acquérir (de 1419 à 1467) la plupart des principautés
constitutives des Anciens Pays-Bas :
- le marquisat de Namur,
- le Hainaut avec Tournai et Valenciennes,
- la Hollande, la Zélande et la Frise,
- le Brabant, le Limbourg et le Luxembourg.
En 1430, lors de son mariage avec Isabelle de Portugal, Philippe le Bon fonde
l'ordre de la Toison d'Or, ordre de chevalerie. Il mène une constante politique
de centralisation et d'unification que son fils CHARLES LE TEMERAIRE (14331477) complète par l'annexion de la Gueldre et de Zutphen sur le Rhin
inférieur.
Avec la constitution de l'Etat bourguignon, le centre d'attraction se déplace
vers les grandes villes des Pays-Bas : Tournai, Bruges, Gand, Bruxelles, Louvain.
Tout en laissant une large autonomie aux pouvoirs régionaux traditionnels,
Philippe le Bon et son successeur, Charles le Téméraire entreprennent de leur
superposer des institutions centrales.
L'ambition naît de faire un Etat unitaire et indépendant.
Dès 1435, Philippe le Bon obtient de Charles VII au traité d'Arras d'être
personnellement libéré des liens de vassalité à son égard.
La Flandre et le Brabant connaissent depuis le 13e siècle une grande
prospérité.
Des industries y fleurissent dans les grandes villes, régies par une forte
organisation des métiers en corporations.
Les villes de Bruxelles, d'Ypres, de Gand et de Bruges sont extrêmement
prospères.
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77
Bruges devient le plus grand centre de transit du moyen-âge.
Le libre échange et le capitalisme naissent avec la fondation du premier
marché des changes : la bourse est née (du nom de l'aubergiste et courtier
Van Beurs, spécialisé dans la conversion de la monnaie).
L'établissement libre de "comptoirs commerciaux" de toutes les nations voit
affluer des marchands des quatre coins de l'Europe. L'import-export est leur
apanage, les Brugeois se réservant la vente de détail et la transformation du
drap.
Des navires (jusqu'à 150 à la fois dans le bassin du Minnewater) débarquent
des marchandises de toutes natures ; vin, tapis, oranges, fourrures, huiles,
cuirs, soies, métaux, épices, laines, animaux exotiques, ...
Le 14e siècle marque le début de l'âge d'or de Bruges mais aussi l'amorce de
son déclin. Le Zwin commence à s'ensabler, il lui reste encore un siècle de
fastes à vivre.
Sur le plan intellectuel et culturel, la période est florissante, outre la fondation
de l'Université de Louvain, Anvers devient le premier port d'Europe à la place
de Bruges (en déclin à cause de l'ensablement de son accès vers la mer).
Le style gothique flamboie et, grâce au perfectionnement de la technique
de la peinture à l'huile, des artistes comme les frères Van Eyck, Memling,
Rogier Van der Weyden, Van der Goes et Bouts réalisent les chefs-d'oeuvre
de l'école flamande du 15e siècle.
Les commandes émanent de sources diverses : le duc lui-même, l'aristocratie,
le clergé et la nouvelle classe constituée par les grands administrateurs, les
diplomates et la riche bourgeoisie.
Les villes font décorer leurs tribunaux de représentations du Jugement dernier
ou de tableaux de Justice (Van der Weyden à Bruxelles - Bouts à Louvain).
Enfin les corporations et les confréries religieuses commandent des retables
pour leurs chapelles.
Le prestige des productions flamandes suscite bientôt des commandes de
l'étranger, entraînant une exportation vers l'Italie, l'Espagne, le Portugal,
l'Allemagne.
Ces conditions attirent vers les grandes villes du Sud de nombreux artistes du
Nord.
Les grandes découvertes déplaçant l'activité économique mondiale de la
Méditerranée vers l'Atlantique, Anvers devient, dès le début du 16e siècle, un
lieu d'échange important entre le Nord et le Sud.
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Cette expansion et les activités commerciales font d'Anvers le centre
financier le plus important d'Europe et favorisent le développement
d'industries de luxe et notamment de la peinture.
Le monde cosmopolite de la métropole offre aux artistes de nouveaux
commanditaires. La ville devient aussi un grand centre européen de l'édition
(Plantin).
Charles le Téméraire rêve de constituer ses Etats en royaume, mais ses projets
sont mis en échec par l'habilité de Louis XI et sa mort en 1477 devant Nancy
conduit sa fille, Marie de Bourgogne à épouser Maximilien de Habsourg pour
sauver l'héritage.
Les 17 "provinces réunies" bourguignonnes passent aux Habsbourg. Ceux-ci
vont les appeler « pays d’en bas » (Pays-Bas) par opposition à leurs « terres
hautes » celles d’Allemagne du sud et d’Autriche.
2 / Sous les Habsbourg d’Espagne (144770-1713) :
A la mort de Marie de Bourgogne (1482), Maximilien devient régent des PaysBas mais il les abandonne à son fils Philippe le Beau en 1494. Il épouse une
princesse espagnole, Jeanne de Castille (dite Jeanne la Folle), fille des Rois
catholiques, héritière du trône d’Espagne. C’est ainsi que les Pays-Bas
tombent pour 2 siècles dans les possessions espagnoles.
Fils de Philippe le Beau et de Jeanne de Castille, Charles Quint naît en 1500, à
Gand. Il devient roi d’Espagne et des Colonies d’Amérique, puis recueille
l’héritage de Maximilien d’Autriche et se fait élire empereur en 1519.
Entre temps MARGUERITE D'AUTRICHE est devenue régente des Pays-Bas à la
mort de Philippe le Beau, en raison de la minorité de son neveu Charles, futur
Charles-Quint.
En installant son gouvernement à Malines, Marguerite, princesse ouverte au
mouvement humaniste s'assure les services de quelques-uns des artistes les
plus novateurs de l'époque: Jan Gossaert, Van Orley, le grand tapissier
bruxellois Pieter van Aelst.
MARIE DE HONGRIE (sœur de Charles Quint) lui succède et devient
gouverneur des Pays-Bas espagnols de 1531 à 1555. Elle déplace le
gouvernement à Bruxelles.
Flamand de naissance, CHARLES-QUINT (1500-1558), hérite de l'Espagne et
des Pays-Bas puis devient empereur germanique. Il gouverne un "empire où le
soleil ne se couche jamais".
Il poursuit aux Pays-Bas l'oeuvre des ducs de Bourgogne par de nouvelles
acquisitions dans le nord et par un renforcement du pouvoir central.
Cette oeuvre est consolidée en 1549 par la Pragmatique Sanction
d'Augsbourg qui fait des 17 provinces ainsi réunies un ensemble indivisible
parmi les Etats des Habsbourg.
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L'empire colonial de l'Espagne fait affluer les richesses, un renouveau des
idées voit le jour tourné vers la découverte et le désir de connaissances.
La philosophie avec Erasme, la géographie avec Mercator et Ortélius,
l'anatomie avec Vésale, l'astronomie et la botanique trouvent avec
l'imprimeur Plantin l'occasion de diffuser les bases d'un nouvel humanisme.
Entre-temps, les idées luthériennes pénètrent dans nos régions et y trouvent
un accueil favorable. Les premiers placards sont publiés dès 1520.
La réaction ne se fait pas attendre. Pour contrer la propagande des idées
luthériennes, Charles-Quint importe le tribunal de l'Inquisition (1522) qui sonne
le glas de l'unité des 17 provinces et marque le début de siècles de malheur...
La première exécution a lieu à Bruxelles en 1523.
L'esprit de modération et de tolérance de régions fortement imprégnées par
les idées d'Erasme se trouve confronté à une montée des tensions avec
l'infiltration vers 1530 de l'anabaptisme, venu de Frise, puis du calvinisme, venu
de France, tensions qui s'aggravent avec l'accession au pouvoir de PHILIPPE II
(1527-1598), qui succède à son père en 1555.
Eduqué en Espagne et étranger aux traditions du pays, Philippe II gère ses
Provinces des Pays-Bas depuis Madrid, par l'intermédiaire de la gouvernante
MARGUERITE DE PARME (1522-1586 /fille naturelle de Charles Quint), flanquée
de la consulta, collège secret composé de 3 membres entièrement inféodés
à sa politique.
Champion de la cause catholique, Philippe II entreprend une répression sans
merci et se donne pour mission d'extirper l'hérésie.
Les progrès du calvinisme, répandu depuis 1543, multiplient les troubles, qui
culminent en 1566 lorsque déferle une vague d'iconoclasme qui gagne
Ypres, Gand, Anvers et se répand en Zélande, Hollande et en Frise.
La répression est rapide et brutale.
Philippe II envoie aux Pays-Bas le duc d'Albe avec une armée de
mercenaires.
Les tentatives de conciliation échouent, un tribunal d'exception, le Conseil
des troubles entreprend de mettre le pays au pas, multipliant les
condamnations (80.000 dont celles des comtes d'Egmont et de Hornes,
décapités sur la Grand-Place de Bruxelles).
C'est alors que le Prince d'Orange, GUILLAUME DE NASSAU, voué à la cause
de la liberté et de la tolérance, prend la tête d'une opposition armée.
Hollande et Zélande font sécession.
Cette lutte pour l'indépendance politique et religieuse vis-à-vis du pouvoir
espagnol débouche en 1579 sur la formation de 2 blocs : au nord, l'Union
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d'Utrecht qui devient la République des Provinces-Unies en 1581 (protestante)
et au sud, les Pays-Bas espagnols (catholiques).
Brillant homme de guerre, ALEXANDRE FARNESE, nommé gouverneur des
Pays-Bas espagnols, reconquiert en 1585 les villes du Sud, Bruxelles, Anvers et
Gand où s'était installé un pouvoir calviniste, récupérant un territoire
correspondant approximativement à la Belgique actuelle.
Plus ouvert que le duc d'Albe, il donne aux protestants deux ans pour se
convertir ou émigrer.
Les troubles d'abord, la reconquête ensuite, provoquent une émigration
considérable.
Nombre d'artistes et d'artisans préfèrent l'exil vers l'Angleterre, l'Allemagne, les
Provinces-Unies.
Avec la tutelle des archiducs Albert et Isabelle (fille de Philippe II), la trève
s'installe. L'église catholique entreprend le mouvement de la Contre-Réforme
soutenue par les collèges jésuites.
L'art baroque émerge comme l'expression de cette foi nouvelle faite de
dévotion exubérante et de triomphale.
Rubens, artiste officiel à la cour des archiducs, devient ambassadeur et fonde
son atelier à Anvers.
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Chap. 9
Jérôme Bosch
(vers 1450 - 1516)
____________________________________________________________
Jérôme Bosch est le contemporain de Grünewald et de Botticelli.
Philippe II (1556-1598), fils et successeur de Charles-Quint, collectionnait ses
oeuvres. Et, aujourd'hui encore, c'est au musée du Prado (Madrid) que l'on
peut le mieux étudier la peinture de Bosch.
Jérôme (Hieronymus) van Aaken est né vers 1450 à s'Hertogenbosch (Bois-leDuc), dans le Brabant septentrional (actuels Pays-Bas). Son père et son grandpère exercent le métier de peintre.
Il signe ses oeuvres du nom de Bosch, abréviation du nom de sa ville natale
qu'il semble n'avoir jamais quitté.
Très apprécié de son vivant, on ne sait cependant que peu de choses de sa
vie.
Dès 1486, il est cité comme membre de la confrérie de Notre-Dame, guilde
regroupant ecclésiastiques et laïques qui pratiquent le culte de la vierge
Marie et jouent un rôle dans la vie religieuse et sociale de la cité.
Influencée par les lectures mystiques, son oeuvre traduit sous une forme
inattendue et visionnaire le courant de religiosité moralisatrice de son
époque.
Sa peinture est une traduction visuelle de jeux de mots et de métaphores
verbales.
Il faut rechercher les sources de Bosch dans les dogmes religieux, dans le
langage et les rites populaires de son époque.
Influence constante des enluminures, des poèmes satiriques sur les
égarements de l'humanité, des traités de morale ou d'édification spirituelle.
Bosch pose sur le monde un regard lucide et narquois, substitue à la
contemplation idéale, l'observation satirique et démasque à sa manière les
travers quotidiens, l'hypocrisie des clercs, les superstitions des laïcs,
l'inconscience et l'immoralité de tous.
Il semble obsédé par la contagion de la folie et des vices qui mène le monde
médiéval à sa perte. Il traite souvent le thème des 7 péchés capitaux ;
avarice, luxure, gourmandise, orgueil, paresse, envie, colère.
L'inconscience lui semble le mal le plus constant et le plus répandu, source de
tous les errements qu'aucune médecine ne peut guérir et qui conduit
l'humanité à sa perte.
Deux sujets dominent l'art de Bosch : l'allégorie morale et l'idéal monastique.
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ISALT – 1 année – culture artistique
82
Il critique certaines classes sociales, dénonce charlatans et faux médecins
ainsi que la stupidité de leurs victimes; moines et nonnes aux moeurs dissolues;
le riche plus inquiet de sa fortune que de son âme; thèmes présents dans les
sermons et les écrits satiriques de l'époque.
Ses tableaux sont peuplés de scènes grotesques où des créatures
fantastiques succombent à toutes sortes d’angoisses, de désirs et de
fantasmes humains ;
Bosch innove en faisant sortir les drôleries (représentations pittoresques et
figuratives utilisant le monstrueux et le grotesque pour illustrer le mal et le
péché) des marges des manuscrits enluminés pour les traiter sur des
panneaux de grands formats.
Sa palette est dominée par le rose, l'ocre et les verts tendres. Bosch construit
ses surfaces à l'aide de minces couches de peintures, souvent transparentes,
qu'il éclaire de rehauts appliqués à coups de pinceau rapides.
* l'escamoteur (huile sur bois - 53 x 65 cm - Musée de Saint-Germain-en-Laye) :
sujet prétexte à montrer la folie de l'humanité; sa crédulité.
* l'extraction de la pierre de la folie (huile sur bois - 48 x 35 cm - Musée du
Prado, Madrid) illustre le thème de la stupidité et de la folie. Dénonce la
vanité de toute médecine profane.
* la nef des fous (huile sur bois - 57,8 x 32,5 cm - Musée du Louvre, Paris)
représente un moine et deux nonnes qui s'amusent avec un groupe de
paysans dans une barque. Cette barque est bizarrement construite; son mât
est un arbre feuillu qui évoque peut-être le mât de cocagne ou l'arbre de
mai des fêtes populaires de printemps, période de licence pour la population
comme pour le clergé.
Bosch dénonce la folie qu'il assimile au péché et conduit en enfer.
La mort, autant que la folie, était une préoccupation importante à la fin du
moyen âge. Les poètes en faveur à la cour méditaient sur la mort, le
pourrissement de la chair, les souffrances éternelles de l'âme dans les enfers.
* le Jugement dernier (huile sur bois - triptyque - Musée de Vienne) thème très
populaire au moyen âge, occupe une grande place dans son oeuvre.
Les déformations grotesques concrétisent les hantises de la vie intérieure,
l'expression du désarroi spirituel et social de son temps.
Certains monstres sont inspirés des traditions littéraires ou iconographiques
(crapauds, vipères, serpents qui rampent). Cependant Bosch enrichit cette
faune de l'enfer en créant de nouvelles espèces encore plus effrayantes.
Bosch semble avoir été le premier artiste à puiser dans le répertoire décoratif
des enlumineurs pour une peinture de grandes dimensions.
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83
- Comme les * Sept Péchés capitaux (huile sur bois - 120 x 150 cm - Musée du
Prado), le * Chariot de foin (huile sur bois 147 x 232 - El Escorial, Monasterio
San Lorenezo), montre l'humanité se livrant au péché.
Si le Chariot de foin est une peinture sur les biens de la terre ou l'avarice, le *
Jardin des délices (huile sur bois - 220 x 389cm - Musée du Prado - Madrid)
représente la sensualité et plus particulièrement la luxure, un péché capital.
Ce triptyque présente un miroir où se reflète la folie de l'homme. Bosch nous
donne à voir un faux paradis dont l'éphémère beauté mène les hommes à
leur perte et à la damnation.
Avec ce tableau, Bosch atteint le sommet de son rôle d'artiste moraliste. Pour
cette raison, il faut situer ce triptyque assez tard dans la carrière de Bosch,
certainement bien après 1500.
Bien que Bosch ait introduit de nombreux thèmes nouveaux dans la peinture,
il ne faut pas oublier que plus de la moitié de son oeuvre traite de sujets
traditionnels de la chrétienté ; scènes de la vie des saints, de celle du Christ
et, en particulier, les épisodes de la passion.
Bosch est aussi un peintre de paysages, des paysages vastes ayant l'horizon
très élevé.
Aujourd’hui, seuls 20 tableaux et 8 dessins lui sont officiellement attribués.
références bibliographiques :
GIBSON, W. S.,
1995
Jérôme Bosch, éd. Thames et Hudson,
BOSING,W., Jérôme Bosch, Entre le ciel et l'enfer, éd.Taschen,
1992
à voir ... dans nos musées :
- * La Tentation de Saint-Antoine ( huile sur bois - 133 x 224 cm - d'après H.
Bosch - Musées Royaux des Beaux-Arts de Bruxelles)
- * La Crucifixion (huile sur bois - 73,5 x 61,3 cm - Musées Royaux des BeauxArts de Bruxelles)
- * Le Chemin de croix - huile sur bois - 76,7 x 83,5 cm - Musée des Beaux-Arts
de Gand)
- * Saint Jérôme en prière ( huile sur bois - 77 x 59 cm - Musée des Beaux-Arts
de Gand)
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ISALT – 1 année – culture artistique
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Chap. 10
Pierre Bruegel l'Ancien
(1525 – 1569)
___________________________________________________________________________
Artiste de la Renaissance, Bruegel crée une peinture nouvelle qui s'éloigne de
la tradition médiévale pour plus de liberté.
Il inaugure une façon "moderne" de voir le monde, de le penser, de le
recréer.
Peintre, dessinateur, inventeur d'estampes, on connaît peu de choses de sa
vie; quelques archives, des dessins, des gravures, des peintures et une
biographie ancienne et imprécise écrite par Karel van Mander en 1604
éclairent quelque peu les étapes de son existence.
Probablement né entre 1525 et 1530 soit en Brabant septentrional, non loin de
Breda, soit au nord d'Eindhoven, soit encore au Limbourg.
Il est inscrit en 1551 à la guilde de Saint-Luc, la corporation des artistes
d'Anvers.
Bruegel a vécu pendant l'une des périodes les plus agitées de l'histoire des
Flandres.
A ce moment, le règne de Charles-Quint s'achève. L'empereur abdique en
1555 et laisse à son fils Philippe II la possession des Pays-Bas qui réunit alors les
17 Provinces, territoires s'étendant d'Arras à Groningue et de Bruges à
Luxembourg.
Les guerres de religion éclatent. Le mouvement de la Réforme mené par
Luther, Calvin inquiète l'église catholique.
Des mesures répressives sont prises contre la liberté de conscience et
d'expression. L'Inquisition est conduite dans nos régions par le duc d'Albe.
Sur le plan des idées, c'est le temps d'Erasme et de L'Eloge de la Folie, de
Rabelais et Gargantua mais aussi du traité d'anatomie de Vésale ou des atlas
de Mercator.
Formé à Anvers, dans l'atelier du peintre Pieter Coecke Van Aalst (1502-1550),
artiste cultivé qui a voyagé en Turquie et en Italie, a étudié l'architecture et
qui succède à Bernard van Orley comme peintre de la cour à Bruxelles.
La maison van Aalst était reconnue comme un atelier important.
A cette époque la ville d'Anvers est la ville la plus riche et la plus cosmopolite
des Pays-Bas, centre commercial, culturel et financier, son port assure une
grande partie du trafic européen.
Anvers a succédé à Bruges comme capitale artistique des Pays-Bas. Elle est
en relation intellectuelle avec l'Europe entière.
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ISALT – 1 année – culture artistique
85
La ville était célèbre pour ses imprimeries florissantes.
A la mort de Van Aalst, Bruegel entre au service d'un graveur et éditeur
d'estampes, Hieronymus Cock qui l'encourage à entreprendre le traditionnel
voyage en Italie (1553), complément indispensable à toute formation
artistique.
Des dessins permettent de se faire une idée de son itinéraire : descendu par
la vallée du Rhône, il voyage jusqu'à Naples et Messine.
Cependant ce voyage ne laisse quasi aucune trace dans sa peinture où l'on
ne trouve aucune référence à Raphaël ou Michel-Ange, aucune citation de
monument antique sauf peut-être du Colisée, transposé dans sa Tout de
Babel (1563).
Par contre, il est fasciné par la mer, les bateaux et les ports qu'il peint dans de
nombreux tableaux.
De retour à Anvers, il poursuit son activité dans l’atelier de Cock. Influencé
par la peinture de J. Bosch, il réalise des dessins destinés à la gravure.
1563 est une date capitale dans la vie et l’art de Bruegel : il se marie avec
Mayken Coecke, la fille de Pieter Coecke Van Aalst , et s’installe à Bruxelles.
Il change de sujets et de style en s’ouvrant à une vision plus paisible du
monde.
Bruegel a peut-être choisi de quitter Anvers à cause du climat dangereux de
persécutions politiques et religieuses instauré en Flandres vers 1560.
Les humanistes influencés par la pensée d’Erasme étaient assimilés à des
hérétiques. Les bûchers de l’Inquisition envahissent les places et les
représailles espagnoles impitoyables.
La période bruxelloise sera brève.
Il peint la série des Mois dont il ne reste que 5 scènes représentant les mois de
janvier (* Chasseurs dans la neige), de février (*Journée sombre),de juillet (*La
fenaison),d’août (*La moisson) et d’octobre et novembre (*La rentrée de
troupeaux).
Ils ont pour thème la nature, mais dans son rapport avec l’homme, et
l’homme dans son rapport avec la nature.
De 1566 à 1568, Bruegel peint une série de scènes de la vie paysanne.
Peintures d’une vitalité extraordinaire et d’un réalisme féroce, réalisées
d’après nature.
Ces scènes populaires témoignent d’une volonté de vivre face à la misère et
aux événements tragiques qui secouent nos régions.
Les peintures de ces années sont habitées de foules miséreuses comme pour
signifier que le monde est abandonné de Dieu.
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ISALT – 1 année – culture artistique
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A première vue, la lecture des œuvres de Bruegel semble facile et limpide. Le
peintre est un narrateur extraordinaire : ses tableaux-récits sont remplis de
personnages et de détails décrivant les us et coutumes de l’époque.
Mais cette œuvre possède une portée philosophique, allégorique ; elle
traduit les joies et la sagesse de l’homme mais aussi ses faiblesses et les fléaux
qui l’accablent. Son art a un aspect tragique.
La peinture de Bruegel propose souvent une vision panoramique, sorte de
contemplation à vol d'oiseau.
C'est un microcosme dans lequel se raconte une histoire en plusieurs
épisodes. Chaque épisode s’articule en une série de détails, de personnages
qu’il faut lire en allant du particulier au général. C’est au spectateur à
reconstruire détail par détail l’ensemble fini du tableau.
Bruegel oppose le rythme et la beauté sereine de ses paysages cosmiques à
l’agitation de la foule humaine ce qui lui permet de porter un regard
pessimiste sur le destin de l’humanité.
Bruegel simplifie les formes pour créer une harmonie de volumes et de
couleurs. De grandes taches rouges et bleues forment des masses et créent
un certain rythme visuel.
Il crée la profondeur par l'enchaînement des plans.
Il meurt en 1569 et repose en l’église Notre-Dame de la Chapelle (Sablon) où
son fils Jan a fait ériger un monument. Une peinture de Rubens La remise des
clés à Saint-Pierre ornait le lieu mais elle a été enlevée en 1765.
Son épouse meurt en 1578, laissant 2 jeunes enfants ;
- Pierre Bruegel dit le Jeune né en 1564 qui se spécialise dans la copie
des œuvres de son père,
- Jean Bruegel dit de Velours né en 1568, peintre à la cour des archiducs
Albert et Isabelle. A peint de nombreuses natures mortes et a souvent
collaboré avec Rubens.
Les tableaux de Bruegel conservés de nos jours sont peu nombreux.
C’est le Kunst Historische Museum de Vienne qui rassemble le plus d’œuvres
de Bruegel l’Ancien : 14 toiles !
Bruegel a laissé 120 dessins généralement signés et datés.
* Les jeux d’enfants – 1560 – huile sur panneau – 118 x 161 cm - Vienne Kunsthistorisches Museum.
Le tableau constitue d’une part une sorte d‘encyclopédie des jeux d’enfants
et d’autre part une allégorie de l’enfance.
La confusion et le désordre des groupes d’enfants ne sont qu’apparents. La
composition s’appuie sur les lignes de fuite d’une perspective rigoureuse. Les
lignes convergent en haut et à droite.
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87
* Le combat de Carnaval et Carême (1559) huile sur panneau – 118 x 164,5
cm Vienne – Kunsthistorisches Museum.
* Le triomphe de la mort (1562) huile sur panneau – 117 x 162 cm – Madrid musée du Prado
La mort triomphe de la vie : chaque épisode confirme la défaite de l’homme
* Les chasseurs dans la neige – 1665 – huile sur panneau – 117 x 162 cm –
Vienne Kunsthistorisches Museum
Fait partie de la série des Mois, thème populaire ancien.
* La parabole des aveugles – 1568
Bruegel réussit à représenter l’errance de l’homme qui cherche à tâtons sa
route avant de tomber dans les ténèbres.
Message terriblement pessimiste.
* Paysage d’hiver avec patineurs et trappe aux oiseaux - huile sur bois - 38 x
56 cm - Bruxelles - Musées royaux des Beaux-Arts
Scène hivernale d'un village brabançon (Pede-saint-Anne). Cette oeuvre
traduit une atmosphère de quiétude menacée par la présence de la trappe.
A l'avant-plan, la glace déjà brisée suggère l'insouciance des hommes et leur
fragilité.
* Le dénombrement de Bethléem - bois - 115,5 x 163,5 cm - Bruxelles - Musées
Royaux des Beaux-Arts
La scène ne se passe pas en Judée mais dans un village brabançon.
Les détails de la vie quotidienne sont nombreux.
Au thème du dénombrement se superpose celui du paiement de la dîme.
* Paysage avec la chute d’Icare (1558) – huile sur toile – 73,5 x 112 cm Bruxelles – Musées royaux des Beaux-Arts - attribué à Bruegel et son atelier
Seul exemple d'inspiration mythologique dans la peinture de Bruegel, il illustre
un passage des Métamorphoses d'Ovide.
Icare qui, avec son père Dédale, s’était élevé dans les airs grâce à des ailes
de plumes maintenues par de la cire, est évoqué ici par 2 jambes qui
s’abîment dans les flots. Cet épisode est cependant réduit à peu de chose
par rapport au majestueux paysage maritime baigné d’un soleil couché sur
l’horizon.
Le climat méditerranéen s'impose.
L’accent est mis au premier plan sur le laboureur, le berger et le pêcheur qui
ne prêtent aucune attention à l ‘événement.
Expression de l’indifférence du monde devant le sort de l’individu, aussi
exceptionnel soit-il.
Et l’idée se renforce par le proverbe qui veut qu’aucune charrue ne s’arrête
pour un homme qui meurt.
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à lire:
L'oeuvre au noir, roman sur le 16e siècle flamand écrit par de Marguerite
Yourcenar
références bibliographiques :
Bruegel, une dynastie de peintres, catalogue de l'exposition Europalia 80
Belgique, Palais des Beaux -Arts, 1980
Roberts-Jones, Ph., Bruegel, La chute d'Icare, Office du Livre, Fribourg, 1974
Fierens, P., Bruegel, éd. Les Oeuvres, Bruxelles, 1942
Philippot, P., La peinture dans les Anciens Pays-Bas, Flammarion, Paris, 1994
Radar, Ed., Le jeu, le folklore et l'art dans la peinture de P. Bruegel, in La Revue
Générale, n°3, 1994
Bergamaschi, G., Bruegel, coll. Regards sur la peinture, n°21, éd. Fabri, 1988
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Chap. 11
le 17e siècle : le baroque dans les Pays-Bas du Sud
___________________________________________________________________________
Introduction au baroque :
Les éléments nouveaux de l’art du 17e siècle s'élaborent à partir des principes
définis par la Renaissance italienne.
Annoncé par le maniérisme de la fin du 16e siècle, l’art baroque accentue
l’ornement, les lignes courbes, les formes ondulantes, le mouvement, le
pittoresque dans les décors intérieurs, le côté théâtral.
Rome s’affirme de plus en plus comme la capitale artistique de l’Italie et
même de l’Europe entière. Nouveau lieu de rencontre des talents de
l’époque, Rome devient le centre le plus actif du commerce de l’art.
A Rome sont passés Rubens, Van Dijck, Velasquez, Claude Lorrain, Poussin.
Rome domine l’art de son temps.
Les conditions politiques, sociales et spirituelles influencent ce renouvellement
esthétique.
Sur bien des plans, la Renaissance avait entraîné un recul du pouvoir de
l’Eglise. L’essor des sciences modernes et rationnelles avait réfuté des dogmes
anciens, comme la forme de la terre ou sa position dans l’univers.
Dès 1520, Martin Luther rompt toute relation avec l’autorité du Pape.
Conséquence de la Réforme introduite par Luther et Calvin; une partie de
l’Europe devient protestante.
L’Eglise réagit à la Réforme, par la Contre-Réforme et le Concile de Trente
(1545-1563) qui a pour but de restaurer la discipline et la foi dans l’Eglise
Catholique.
Rome rend public un Index des livres prohibés par l’Eglise.
A partir de 1562, de violentes guerres de religion entraînent la persécutions
des protestants.
L’Eglise catholique, sous l’influence de la Congrégation des Jésuites fondée
par l’espagnol, Ignace de Loyola, réalise l’importance de la richesse, de
l’ostentation sur l’opinion publique.
Elle favorise une expression centrée sur l’image, le spectacle et le faste à
l’inverse du protestantisme qui se fonde sur un retour aux textes, à l’écriture.
La notion d’œuvre d’art totale est au centre du style baroque qui utilise les
relations entre toutes les formes artistiques, littéraires et plastiques.
Le baroque est la libération spatiale, la libération de la géométrie et de l’état
statique au profit de l'équilibre instable.
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90
La perfection du cercle symbolisait la Renaissance ; le Baroque s’incarne
dans l’ovale, forme dynamique, tendue, en équilibre instable que l’on
retrouve souvent dans les plans des édifices.
L’art baroque exprime une conception théocratique de la société : il est épris
de majesté, exalte la gloire divine et/ou monarchique.
Au-delà d’un style architectural, c’est une sensation qui imprègne tous les
domaines de la société : on vit d’une manière baroque.
La vie comme œuvre d’art totale, la mise en scène, le souci du spectacle et
du faste trouve son expression totale en art sous la forme de l’OPERA.
A l’origine, le terme baroque est employé péjorativement pour qualifier un
style bizarre, surchargé, confus et désordonné, artificiel et surfait.
« barrueco » en portugais désigne une perle de forme irrégulière.
Au 19e siècle, H. Wöllflin (1864-1945) auteur de Principes fondamentaux de
l’histoire de l’art (1915) définit les traits caractéristiques du baroque.
« Le baroque est pictural ; sa composition est ouverte, elle se déploie
dans toutes les directions, est traversée par des formes en mouvement.
Le baroque séduit par la multiplicité, toutes les formes sont
interdépendantes et visent à un effet d’ensemble ».
En architecture cela signifie que la préférence est donnée aux courbes
sur les droites, opposition des courbes et des contre-courbes.
Recherche de décrochements permettant des oppositions ombres et
lumières ; abondance de la décoration.
Le Baroque est perçu comme un désir de participation au monde extérieur et
d’expression par le mouvement.
L’architecture baroque estompe la clarté des contours, ajoute des éléments
architectoniques aux murs décorés de formes élancées et mouvementées.
Les façades sont galbées ; les portes et les fenêtres sont couronnés de
frontons triangulaires ou en arc de cercle, souvent brisés, contournés, courbés
comme sur la façade du Gésu à Rome, prototype d’un nouveau type
d’église.
Les Pays-Bas du Sud
Les Pays-Bas du Sud, c’est-à-dire nos régions, restent soumis à l’Espagne au
17e siècle, tant sur le plan politique que religieux.
Le rôle des Jésuites est important dans le développement artistique.
Le pouvoir civil en la personne de gouverneurs tels Albert et Isabelle
encourage les arts.
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Nos régions passeront sous la domination autrichienne en 1715.
Quant au Nord des Pays-Bas, il forme les Provinces-Unies, reconnues par
l’Espagne en 1609 et jouit d’un système politique fédératif et est de religion
protestante.
en peinture :
Pierre Paul RUBENS (Siegen 1577 – Anvers 1640)
L’écrivain Marguerite Yourcenar note dans ses Archives du Nord que "Rubens
eut la vocation du bonheur".
Artiste le plus représentatif de la peinture baroque par la composition, la
couleur, la technique et le sens de l’espace.
Il a exercé une influence considérable qui s’est étendue bien au-delà de son
propre siècle ; il est le maître de Watteau pour le 18e siècle et de Delacroix
pour le 19e siècle.
De copiste il devient peintre de cour, puis ouvre un atelier où affluent de
toute l'Europe des commandes prestigieuses.
Rubens a l'art de nouer avec les puissants des liens qui assurent sa renommée,
favorisent sa fortune et l'entraînent dans des missions diplomatiques.
Né dans une famille aisée, au coeur du 16e siècle qui voit les Flandres
déchirées par les conflits religieux et l'occupation espagnole sa famille
connaît des moments dramatiques.
Son père, échevin de la ville d'Anvers, vit dans un climat de tension politique
et religieuse qui l'oblige à masquer ses convictions religieuses.
A cette époque, les 17 provinces des Pays-Bas dépendent de l'autorité de
Philippe II, roi d'Espagne, fils de l'empereur Charles-Quint.
Depuis longtemps les doctrines de Calvin trouvent dans ces provinces un
terrain favorable.
Philippe II entend imposer partout la religion de l'Eglise catholique et affirmer
la puissance de l'Espagne.
Il mène cette politique avec une telle intransigeance que les calvinistes se
révoltent. La première insurrection a lieu à Anvers, en 1566. Philippe II mène
dès lors une répression brutale avec l'aide de l'Inquisition.
Fuyant les persécutions religieuses, la famille de Rubens décide de s'expatrier
à Cologne où se trouve Guillaume d'Orange qui dirige la résistance contre
l'occupant espagnol.
Pierre Paul naît en 1577 à Siegen, il est le sixième enfant de la famille.
A la mort de son père en 1587, la famille Rubens rentre à Anvers. Pierre Paul a
10 ans.
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D'abord page à la cour de la Princesse de Ligne, il s'oriente très vite vers sa
véritable vocation : la peinture
Formé à la tradition de la peinture flamande dans les ateliers de Tobias
Verhaecht, d'Adam Van Noort et d'Otto Venius, il acquiert un dessin, une
maîtrise et un savoir-faire inspiré de l'art italien. Il copie beaucoup et
longtemps.
Rubens éduqué à la culture antique, affectionne la mythologie.
Il puise ses thèmes chez Virgile, Ovide ou dans l'Ancien Testament.
Copier, c'est son apprentissage, la mise au point de ses techniques, la
découverte de son vocabulaire dans lequel il puisera durant toute sa
carrière.
A 21 ans, il obtient la qualité de franc-maître.
De 1600 à 1608, il voyage en Italie ; assimile l’influence des Vénitiens, des
Bolonais, copie Michel-Ange, observe les nouveautés des Carrache et de
Caravage.
Il séjourne à Venise, à Mantoue où il entre au service du duc Vincent de
Gonzague et à Rome où il étudie, peint et reçoit ses premières commandes.
Ces années sont essentielles à sa formation.
Rubens est un grand admirateur de la peinture du Titien.
En 1608, apprenant que sa mère est mourante, il rentre à Anvers et décide de
s'y installer.
Il se marie en 1609 avec Isabelle Brandt.
Il ne tarde pas à devenir le peintre officiel des Archiducs Albert et Isabelle qui
assurent la régence des Pays-Bas.
La Trève de Douze-Ans signée en 1609
permet un regain d'activité
économique dans nos régions et favorise le développement des arts.
Rubens obtient un salaire mensuel élevé, exempt de taxes et d'impôts mais
qui n'est pas un à-valoir sur sa production future. Le contrat précise que
chaque toile est payée à part.
Rubens achète une maison bourgeoise le long du canal du Wapper, dans le
quartier du Meir. Il transforme cette demeure en un double palais de style
renaissance comprenant la maison de famille et son atelier.
Précédé de sa renommée et par sa qualité de peintre de la cour, il reçoit très
vite de nombreuses commandes
De 1610 à 1613 peint l’ * Erection de la Croix (Cathédrale d’Anvers) et de
1611 à 1614 la * descente de Croix son premier chef-d’oeuvre qui fera
d’Anvers un des pôles de l’Europe artistique.
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ISALT – 1 année – culture artistique
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Chaque artiste possède son langage :
Chez Rubens, la peinture est synonyme de « vitalité » : les corps s'imbriquent,
les couleurs s'opposent, les lignes dynamiques s'emballent.
L'oeuvre de Rubens explose d'exubérance et de ferveur.
La torsion semble être le geste dominant qui exprime les contradictions de
l'âme, les tiraillements entre les forces contraires.
Aux torsions qui animent les corps correspondent des compositions en
diagonale.
La composition baroque suppose un " hors champ " contrairement au
tableau classique fermé sur lui-même. Autrement dit, l'oeuvre n'est qu'un
moment choisi dans une longue histoire.
Comme la plupart des artistes baroques, Rubens n'isole pas les motifs, les
scènes ou les personnages qu'il représente et restitue un espace mouvant en
expansion perpétuelle.
Composition en grappe de raisin.
Rubens n'a pas son pareil pour imbriquer les corps, pour organiser des
systèmes de courbes et de contre-courbes et créer de nombreux raccourcis.
Contrairement au cercle qui est clos et figé, la spirale se déploie en
constante expansion vers le haut.
La musculature des corps qui rappelle Michel-Ange fait beaucoup pour
l'impression d'énergie et de vitalité.
Son atelier est une entreprise d'où sortiront près de 2.000 oeuvres en 20 ans.
Il est divisé en trois : un petit bureau qu'il se réserve, un grand atelier où
travaillent ses collaborateurs de plus en plus nombreux et une vaste galerie
d'exposition où sont reçus les commanditaires.
Rubens réalise les esquisses des compositions qu'il a en commande ensuite
ses aides les reportent sur des toiles.
Lorsqu'elles sont presque achevées, il y ajoute sa touche personnelle et sa
signature pour les authentifier.
Tout est fixé à l'avance avec ses commanditaires : le thème, les dimensions,
l'ordonnance des figures, les gammes de couleurs, la date de livraison et le
prix.
Rubens réalise toujours une esquisse rapide au lavis à l'encre brune, un
bozzetto (brouillon), sur lequel il mentionne parfois les couleurs, la lumière. Sa
taille est généralement de 20 à 40 cm.
A partir de là, Rubens réalise un modello en couleurs, un peu plus grand, de
60 x 80 cm.
C'est ce qu'il montre au commanditaire. Il préfère toujours garder ces études
préparatoires, car il a peur d'être plagié.
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Le "style Rubens" fonctionne comme une marque de fabrique ; il faut qu'il soit
identifié au premier coup d'oeil.
A partir de ces projets esquissés ou dessinés, les peintres de l'atelier entrent en
jeu. Les processus de réalisations sont très variables.
Certaines toiles sont dites autographes : elles sont entièrement de la main de
Rubens, comme par exemple * La chasse au tigre, au lion et au léopard du
Musée de Rennes, ou * La descente de croix de Lille.
Autre cas de figure, les "Rubens et atelier" : un ou plusieurs peintres employés
à demeure réalisent le tableau d'après l'esquisse préparatoire du maître qui
termine quelques détails ou retouche ici et là.
Un peu moins cotés sont les tableaux mentionnés de "l'atelier" où des peintres
travaillent toujours d'après un modèle du maître sans que celui-ci ne vienne y
apporter sa touche finale.
La notion d'attribution exacte est apparue au 20e siècle. Un certain purisme a
vu le jour et a rendu le travail en atelier inacceptable.
Aujourd'hui l'immense production de Rubens est passé au crible. Il en résultera
en 2015, un catalogue raisonné de 27 volumes.
Rubens est cher : pour que ses toiles soient dignes de sa réputation, il lui faut
des collaborateurs compétents; Jordaens, Snyders, les frères Teniers, Van Dijck
comptent parmi ses assistants.
Les commandes sont de plus en plus impressionnantes tant par le nombre
que par leurs dimensions.
- En 1620, 39 peintures plafonnantes (parties en fumée dans un incendie en
1718) pour l'église des jésuites d'Anvers, Saint-Charles-Borromée, première
façade baroque d’Anvers inspirée de l’église du Gesù à Rome.
- En 1621, 24 tableaux retraçant la vie de Marie de Médicis.
- La même année, 12 cartons pour une série de tapisseries commandées par
le roi Louis XIII évoquant l'histoire de Constantin.
- En 1627, 17 tableaux consacrés au Triomphe de l'Eucharistie pour les
carmélites de Madrid.
- En 1630, une immense composition commandée par le roi d'Angleterre,
Charles Ier, pour le plafond de Whitehall de Londres.
- En 1635, la "joyeuse entrée" de l'infant Ferdinand d'Espagne à Anvers où il
décore la ville entière de tableaux, sculptures et d'arcs de triomphe.
Toutes ces commandes l'obligent à voyager énormément dans toutes les
cours d'Europe.
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ISALT – 1 année – culture artistique
95
Esprit européen lui-même polyglotte, entretenant une
correspondance, il est intimement mêlé à la vie de son époque.
importante
Il joue un rôle prépondérant tout au long de sa vie dans le domaine pictural,
graphique plastique, architectural et décoratif.
Son oeuvre est abondante ; sujets religieux, mythologiques, allégoriques,
portraits, paysages, ...
Mais le ciel s'assombrit brusquement, lorsqu'en 1626, meurt Isabelle.
Il délaisse quelque peu son atelier, accepte des missions diplomatiques que
lui confie l'archiduchesse Isabelle.
La première le mène à Madrid où il s'émerveille à nouveau des 70 tableaux
de Titien conservés à l'Escurial, s'entretient longuement avec Velasquez et
réalise de nombreux portraits.
La seconde mission confidentielle le mène à Londres où Charles Ier lui
commande une composition pour la plafond de Whitehall.
En 1630, il renonce à ses missions diplomatiques, rentre à Anvers car il est
amoureux. Elle s'appelle Hélène Fourment, elle a 16 ans.
Il l'épouse.
C'est à ce moment qu'il peint le bouleversant tableau de la * Petite Pelisse vers 1638 Musée de Vienne - 176 x 83 cm.
* Portrait intime d'Hélène.
Le nu chez Rubens ne s'inspire plus de la statuaire antique mais bien de la
présence charnelle. Les femmes sont "en chair", le sang coule sous leur
carnation, la peau souple se creuse de plis, de fossettes. La gestuelle se fait
plus libre plus provocante.
Rubens peint dans la femme, une amante. Pour Rubens, l'acte de peindre
n'est pas chaste, celui de regarder la peinture ne l'est pas davantage.
Il veut créer l'impression d'une présence physique. Les femmes de Rubens
sont presque toujours peintes grandeur nature.
Ils auront 5 enfants. Ils se retirent à la campagne, séjournent dans leurs petits
châteaux d'Eeckeren et d'Elewijt.
Les portraits et les paysages de cette époque s'enrichissent d'un lyrisme
sentimental, intime et très doux.
Ses coloris brillants s'affinent et deviennent encore plus précieux.
Philippe IV lui commande une centaine de toiles inspirées des
métamorphoses d'Ovide pour décorer son pavillon de la Torre de la Parada
aux environs de Madrid.
Rubens exécute les esquisses mais sa santé est vacillante et il meurt le 30 mai
1640.
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ISALT – 1 année – culture artistique
96
- « poussinistes et rubénistes » … à propos de la querelle du coloris :
A la fondation de l'Académie Royale de Peinture et de Sculpture en 1648, les
peintres français tentent de définir les principes picturaux.
L'un des théoriciens, Félibien prône un art qui repose sur la composition, sur
l'étude de l'antique et sur l'édification morale avec une attention particulière
pour la ligne et le dessin.
Ce mouvement rassemble des peintres comme Nicolas Poussin, Philippe de
Champaigne, Charles Le Brun.
Face aux défenseurs du classicisme s’oppose une autre tendance, menée
par Roger de Piles, défenseur de Rubens, de la fluidité des matières et des
couleurs.
à voir :
* La descente de Croix - Cathédrale d’Anvers
* L’enlèvement des filles de Leucippe - Pinacothèque de Munich - vers 1618
Oeuvre baroque par sa composition en tourbillon. La lumière est intégrée à
la forme.
Vie de Marie de Médicis - Musée du Louvre (depuis 1815), Paris
En 1662, Marie de Médicis, veuve d'Henri IV et mère de Louis XIII, commande
24 tableaux pour décorer la galerie occidentale du 1er étage de son Palais
du Luxembourg. Il s'agit d'un vaste cycle narratif illustrant les "histoires de la
très illustre Marie de Médicis".
* Bethsabée à la fontaine - Pinacothèque de Dresde (vers 1635)
* Chute d’Icare -1558 - Musées Royaux des Beaux-Arts de Bruxelles (73,5 x 112
cm).
Esquisse typique de la technique de l’imprimitura qui consiste à recouvrir la
préparation d’une couche tonale uniforme qui sert de ton de base général à
l’œuvre et sur laquelle la virtuosité de l’artiste se donne libre cours.
Il baisse la tonalité pour obtenir les ombres et la hausse pour obtenir de la
lumière.
Anton VAN DYCK et Jacob JORDAENS comptent parmi les collaborateurs les plus
remarquables de l'atelier de Rubens.
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en architecture :
A/ - architecture religieuse :
Il s’agit le plus souvent d’un décor baroque superposé à une structure
gothique.
Bien que les Jésuites essaient d'introduire le style caractéristique de la ContreRéforme, la majeure partie des églises reste fidèle à la traditionnelle division
en 3 nefs et conserve l'élancement vertical du gothique.
* église de la Trinité à Bruxelles (architecte Jacques Francart)
Style sobre, équilibre des verticales et des horizontales ; des colonnes animent
la surface ainsi que deux frontons coupés, l’un cintré, l’autre triangulaire,
volutes.
* église Saint-Charles Borromée à Anvers (Frère Pierre Huyssens)
Chef d’œuvre du baroque flamand (1615-1621), réalisée avec la
collaboration de Rubens pour les plafonds et en partie pour la façade, pour
laquelle il fournit des dessins.
Façade très ornementée avec de nombreux reliefs sculptés, tourelles en
retrait, cartouche avec monogramme du Christ.
Campanile à l’arrière. Intérieur à 3 nefs
L’église sera partiellement détruite par un incendie en 1718.
* abbatiale de Grimbergen (commencée en 1660)
Chœur allongé avec coupole à la croisée du transept, soutenue par des
pilastres.
* Saint-Michel à Louvain
B/ - architecture civile :
* Grand-Place de Bruxelles
« place médiévale en habits baroques » reconstruite en 1696 à la suite du
bombardement du maréchal de Villeroy en 1695.
Passage insensible du gothique flamboyant au baroque (maisons de
corporations).
La structure demeure essentiellement gothique mais l'esprit baroque apparaît
dans la décoration qui se complique avec l'introduction de festons, de
cariatides. Les ornements se déploient surtout au sommet des bâtiments.
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références bibliographiques :
TOMAN, R.
1998
L'art du baroque, éd. Könemann,
TAPIE, V.L.,
1980
Baroque et classicisme, coll. Pluriel, éd. Le Livre de Poche,
Catalogue de l'exposition Rubens, Lille, Musées des Beaux-Arts, 2004
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Chap. 12
architecture : l’Eclectisme
___________________________________________________________________
L'éclectisme se développe à partir de la seconde moitié du 19e siècle et
s’associe à l'émergence d'une architecture bourgeoise.
Caractéristique de la seconde moitié du 19è s, l’éclectisme ou l’historicisme
emprunte aux diverses traditions architecturales sans en inventer de
nouvelles, il devient un art de la citation et de la référence.
Le choix du style dépend de la nature de l'édifice : églises néo-gothiques,
néo-romanes, néo-byzantines, édifices civils néo-Renaissance ou néoclassiques.
Exemples : * Palais de Justice de Bruxelles (arch. J.Poelaert)
Vers 1860, sous l'influence de l'éclectisme, le néo-classicisme bruxellois
s'enrichit de décors antiquisants dans le traitement du soubassement
(bossages), des allèges et de l'entablement.
Les étages sont souvent devancés d'un balcon, signe extérieur de richesse, et
parfois, au tournant du 20e siècle, d'une logette.
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ISALT – 1 année – culture artistique
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Chap. 13
architecture : Art Nouveau
____________________________________________________________
Rénovateur et original, l'Art Nouveau libère l'architecture de son carcan
historiciste et rompt définitivement avec toutes références aux styles du
passé.
L'Art Nouveau, tout en courbes sinueuses et dynamiques est aussi appelé Art
1900, Modern Style (Grande-Bretagne), Liberty (Italie), Jugendstil (Allemagne)
ou Sécession (Autriche).
Il se développe dès 1890, un peu partout en Europe.
Au tournant du 20e siècle, la Belgique est la deuxième puissance industrielle
au monde (après la Grande-Bretagne), premier pays accomplissant une
révolution industrielle : charbon, fer laine, lin, les productions locales sont
traitées à grandes échelle et mécanisées.
Bruxelles, connaît une effervescence sans pareille ; Léopold II, « roi bâtisseur »,
richissime puise généreusement dans sa cassette personnelle pour embellir la
capitale.
De nouveaux quartiers sont lotis dans des communes autrefois périphériques
comme Ixelles, Saint-Gilles, ou Schaerbeek.
Des bourgeois, des commerçants, des artistes choisissent tout naturellement
de construire leurs maisons dans le style à la mode : l’Art Nouveau.
Commencés en 1893, l’hôtel Tassel de Victor Horta et la maison personnelle
de Paul Hankar (rue Defacqz 71 à Saint-Gilles) sont les premiers signes d’une
nouvelle esthétique qui remodèle l'architecture par ses formes souples
inspirées du monde végétal et l’affirmation de nouveaux matériaux
(fer/verre)…
Des centaines de maisons mais aussi des écoles, des cafés, des magasins
rivalisent d’originalité.
Le travail artisanal de la ferronnerie, du bois, du vitrail, de la mosaïque atteint
des sommets de qualité.
Les constructions de Van de Velde, Strauven, Cauchie, Brunfaut, Saintenoy et
bien d’autres font de Bruxelles une des capitales européennes de l’Art
Nouveau, à côté de Vienne ou Barcelone.
A noter, 3 quartiers Art Nouveau à Bruxelles : le quartier des squares, le
quartier des étangs d’Ixelles et le quartier Louise où se nichent bon nombre
de chefs-d’œuvre, hôtels de maîtres construits pour une certaine intelligentsia
bruxelloise audacieuse et nantie.
- L’Art Nouveau affirme l’usage de nouveaux matériaux : le fer et le verre.
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ISALT – 1 année – culture artistique
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L’emploi de structures métalliques autorise des audaces inouïes car il permet
d’ouvrir largement les façades et les intérieurs pour laisser la lumière circuler à
flots.
- L’Art Nouveau choisit comme source d’inspiration la nature (la flore et la
faune).
Trois types de motifs prédominent : l’arabesque, la plante ou l’animal et la
silhouette féminine.
Horta voit dans la nature le modèle à suivre et donne naissance à un style
inspiré par le règne végétal :
"...Ce n'est pas la fleur, moi que j'aime à prendre comme élément de décor,
c'est la tige..."
- L’Art Nouveau est une œuvre d’art total qui se préoccupe de la conception
entière de la maison. Pour les architectes, la façade devait être considérée
comme une œuvre à laquelle tous les artistes et artisans étaient invités à
participer.
- L’Art Nouveau modifie radicalement le plan traditionnel de la maison
bruxelloise "des 3 pièces en enfilade" au profit d’une architecture
personnalisée et d’une organisation non symétrique de la façade.
Au tournant du siècle, sous l’influence de la Sécession Viennoise, les formes
ont tendance à se géométriser, les combinaisons de cercles et de carrés sont
fréquentes. On parlera d’un Art Nouveau plus géométrique
Paul Hankar s'affranchira de l'emprise de la nature pour créer une
architecture aux lignes épurées.
Les arts décoratifs ne sont pas en reste : l’affiche, l’orfèvrerie, le bijou, le
céramique et la verrerie ont leur place dans les salons artistiques.
Le sgraffite : redécouvert et réinterprété par les architectes et décorateurs de
l’Art Nouveau, le « sgraffite » est une technique de décoration murale
ancienne dont le nom italien signifie « griffé ». Cette technique s’est surtout
développée durant la Renaissance italienne avant d’être diffusée partout en
Europe et de devenir un art populaire.
Côté technique…
en atelier, le décorateur dessine ses motifs grandeur
nature sur un calque. Puis sur un mur, il pose un mélange de sable et de
chaux constituant un mortier. Ensuite il dépose le calque sur le mortier frais et
y pointille le contour des figures à l’aide d’un stylet. Enfin, avec une spatule
de sculpteur et un burin de graveur, il incise les contours en pointillé de
l’esquisse. Pour colorer son travail, l’artiste utilise le plus souvent 2 couches de
mortier. La première additionnée de charbon, est visible au fond des contours
gravés des motifs. La 2e en surface est propre à recevoir divers aplats de
couleurs.
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ISALT – 1 année – culture artistique
102
Le décorateur doit comme pour la peinture à fresque, exécuter son travail
rapidement dans la matière fraîche, directement sur le support architectural.
Il est conçu pour être regardé à distance grâce au tracé en creux sombre
qui souligne le dessin.
La flambée de l’Art Nouveau brillera une dizaine d’années avant d’être suivie
par l’Art Déco.
En résumé, l’Art Nouveau est nouveau par l’utilisation des nouveaux
matériaux (verre et fer) et par sa source d’inspiration, la nature mais l’Art
Nouveau n’appartient pas à la modernité car sa mise en œuvre reste
traditionnelle, artisanale.
Victor Horta (1861 Gand - 1947)
Architecte, principal initiateur de l'Art Nouveau en Belgique, il est également
créateur de nombreux aménagements intérieurs, de meubles et de tous les
éléments s'intégrant dans son architecture.
Sa carrière se divise en deux périodes : la 1e où il rompt avec l’inspiration des
styles passés et crée un langage original et un nouveau plan d’habitation
pour les maisons bourgeoise bruxelloises où il conjugue de façon unique les
matériaux industriels et les matériaux nobles, harmonisant architecture et
décors intérieurs ; la 2e où il se consacre à la réforme de l’enseignement de
l’architecture à l’Académie des Beaux-arts de Bruxelles où il a été formé.
Le Pavillon des Passions humaines (Parc du Cinquantenaire), monument
conçu par Horta lorsque, à ses débuts, il travaille chez l’architecte Balat
(auteur des serres du Palais Royal de Laeken et architecte classique) est un
édicule classique où l’on ressent déjà une expression plus épurée. Le
monument renferme la sculpture en marbre de Jeff Lambeaux qui illustre le
thème du bonheur et des péchés de l’humanité, dominés par la mort.
Premier édifice marquant de Victor Horta, la Maison Autrique (1893) - chée
de Haecht 266 – 1030 Bruxelles – www. autrique.be.
Ce bâtiment vient de faire l’objet d’une restauration exemplaire. Le projet,
conçu par François Schuiten et Benoît Peeters auteurs de bandes dessinées
(Les cités Obscures), est de mettre en scène l’univers intime de la maison, et
cela de la cave au grenier.
La construction de l'Hôtel Tassel à Bruxelles (rue P-E Janson 6) constitue un
véritable tournant dans son style.
Dès lors, les commandes vont s'enchaîner les unes aux autres avec entre
autres : l'Hôtel Solvay, (av Louise 224), l'Hôtel Van Eetvelde (av Palmerston 4),
sa maison personnelle et son atelier, aujourd’hui Musée Horta (rue américaine
25), la Maison du Peuple (place Vandervelde - démolie en 1965) et bien
d'autres hôtels de maître ainsi que plusieurs grands magasins dont l'
Innovation de la rue Neuve (détruit dans l'incendie de 1967), celui d'Anvers,...
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ISALT – 1 année – culture artistique
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Il travaille pour la bourgeoisie progressiste qui croit aux valeurs nouvelles de la
société industrielle.
Pourtant ce style ne devait couvrir qu'une partie de sa carrière,
principalement de 1893 à 1905, date à laquelle il réalise un de ses derniers
hôtels de maître importants, celui de Max Hallet (av Louise 346) construit entre
1902 et 1903.
La suite de sa carrière sera essentiellement centrée autour de commandes
officielles comme l'Hôpital Brugmann, le Palais des Beaux-Arts (1928) où Horta
opte pour un répertoire ornemental plus géométrique
Nous disposons de peu d'informations, de nombreux meubles ont disparus et
des archives précieuses ont été détruites, parfois de la propre main de
l'architecte.
Toutefois on peut affirmer qu'il a créé des éléments de mobilier de façon
ponctuelle, uniquement dans l'objectif de meubler ses intérieurs.
Jamais la création de meubles n'a constitué chez lui un but en soi. De plus, la
période durant laquelle il a dessiné du mobilier est très limitée, probablement
entre 1894 et 1904.
La couleur est un élément capital de son architecture. Elle accentue
l'impression d'unité particulièrement quand elle est obtenue avec des
matériaux différents mais de teinte semblable.
Ses intérieurs sont dominés par les teintes naturelles des bois et par des
couleurs dorées, rouille, ocre,... l'unité chromatique est un caractère essentiel
dans son architecture.
Cette approche de la couleur est encore accentuée par l'art du vitrail
particulièrement utilisé par l'architecte. Horta recourait à ce que l'on appelait
le "verre américain" opalescent et coloré par des oxydes métalliques qui
présentait l'avantage de pouvoir être regardé des deux côtés, évitant ainsi
l'aspect grisâtre à l'extérieur du verre.
Pour son mobilier, Horta utilisait une grande variété de bois.
Parmi les formes privilégiées, propres à Horta, on trouve la spirale et la ligne
en coup de fouet qui participe à l'impression de dynamisme.
En effet la courbe, au lieu de se terminer par une crosse, s'ouvre en un
mouvement ininterrompu, suspendu dans l'espace, évitant ainsi toute
impression de statisme.
Les éléments de quincaillerie dessinent des lignes qui s'harmonisent à la forme
du mobilier tout en contrastant subtilement avec la teinte et la texture du
bois. Parfois elles sont en forme d'insectes ou de végétaux.
De nombreux meubles dessinés par Horta sont conçus
emplacements déterminés et intégrés dans l'architecture.
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pour
des
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L'union de différentes fonctions accentue l'unité du style; dans sa propre
maison, le buffet cache un passe-plat et intègre un radiateur au gaz qui
permet de les garder au chaud.
Les luminaires sont très souvent intégrés au mobilier.
Les sols sont la plupart du temps recouverts de tapis ou de mosaïques de
marbre.
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Chap. 14
Architecture : tendances de l'entre-deux-guerres :
Art Déco et Modernisme
___________________________________________________________________
1. l'Art Déco :
Après la première Guerre mondiale, les courbes de l'Art nouveau
appartiennent au passé.
Dans l'entre-deux-guerres, l'Art Déco et le Modernisme
privilégient la
géométrie et la stylisation des formes.
Le succès des Ballets russes de Serge de Diaghilev présenté en 1909 à Paris
ainsi que les recherches des mouvements d’avant-garde, comme par
exemple le cubisme de Braque et Picasso, influencent le domaine des arts
décoratifs.
Succédant à l'Art nouveau, l'Art Déco exprime parfaitement les aspirations
d'une génération qui veut rompre avec le passé.
La bourgeoisie des années vingt aspire à d'autres valeurs et à de nouveaux
modes de vie et de création.
Le style Art Déco est celui des « Années 1925 », des « Années folles », moment
de paix, d’insouciance et de défoulement après la Première Guerre
mondiale.
L'automobile, la moto, les trains, bientôt les avions de ligne, les
transatlantiques apportent l'ivresse du mouvement.
L'héliotropisme et la gymnastique sont à l'ordre du jour.
Les tenues 1900 font place à des vêtements courts adaptés aux sports.
Plus qu'un style, l'Art Déco est un esprit.
Il est caractérisé par la ligne brisée qui exprime les idées d'électricité, d'éclair,
de vitesse, de mouvement mécanique, de rayons solaires.
L'Art Déco connaît la consécration en 1925 avec l'Exposition des Arts
décoratifs et industries modernes à Paris.
Face aux modernistes, il affirme la nécessité de l'ornement. Ses nombreuses
sources d'inspiration - africaniste, hispanique ou régionaliste - font de lui un
style d'une étonnante fantaisie.
L'entre-deux-guerres est marqué par la pénurie de logements due aux
destructions massives durant la guerre. En outre la société change; la vie se
fait plus pratique.
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La mode est aux appartements, plus commodes, moins coûteux, plus
modernes. On entre dans la civilisation ménagère (vide-poubelles,
ascenseurs, ouvre-portes).
La mode est à la construction de nombreux immeubles à appartements.
Bruxelles qui connaît une nouvelle phase d'urbanisation réserve un grand
succès à l'Art Déco dans la construction d'hôtels, de cinémas et de salles de
spectacle.
2. le modernisme :
Né dans les années '20, le modernisme renonce aux ornements pour se
concentrer sur le jeu de volumes et des espaces, sur les surfaces planes des
façades et sur les tout nouveaux matériaux comme le béton.
Le modernisme donne lieu à une architecture épurée où "la forme suit la
fonction".
Les formes du machinisme moderne, navires, avions, automobiles ont une
incidence sur l'architecture. L'architecture navale séduit et se retrouve dans
l'architecture. Cette tendance est appelée "style paquebot".
Références bibliographiques :
CONSTANTINO, M.
1980
Art Nouveau, éd. Atlas, Paris
BEDEL, J.
1996
Le grand guide des styles, Hachette, Paris
TIETZ, J.
1999
Histoire de l’architecture du XXe siècle, Könemann
FERRIER, J-L.
1991
L’aventure de l’art au 19e siècle, éd du Chêne
DE PANGE, I.
Bruxelles
2003
400 façades étonnantes à Bruxelles, éd. Aparté,
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