Le cantonnement

Transcription

Le cantonnement
MAJ 23/04/12
Avec la collaboration du Cridon Nord-Est
LE CANTONNEMENT
Pour les successions ouvertes à compter du 1er janvier 2007, il est loisible au
légataire et à l’époux survivant de cantonner la libéralité que le défunt leur a
consentie. Ces deux personnes vont pouvoir, si elles le souhaitent, limiter la
libéralité à une quote-part, ou encore à certains droits de la succession.
Textes
• Article 769 du Code civil
• Article 1002-1 du Code civil
• Article 1094-1 du Code civil
SOMMAIRE
1. INTERET DU CANTONNEMENT
2. CONDITIONS
3. EXERCICE DU CANTONNEMENT
4. FISCALITE
LE CANTONNEMENT
1
1. INTERET DU CANTONNEMENT
Le cantonnement du legs ou de la donation entre époux va trouver son intérêt lorsque la
personne gratifiée voudra, en considération de sa situation personnelle (âge, état de
santé, situation familiale) ou encore pour des raisons fiscales, restreindre l’objet de la
libéralité à certains biens ou à certains droits. Par exemple, un légataire universel pourra
choisir de cantonner son émolument à une quote-part de la succession ou encore par
exemple à certains des immeubles successoraux. Le conjoint survivant bénéficiaire d’une
donation entre époux du quart en pleine propriété et des trois-quarts en usufruit pourra
quant à lui cantonner sa libéralité à l’usufruit universel ou encore, s’il le désire, à
l’usufruit de sa résidence principale et des liquidités. Le gratifié va pouvoir modeler la
libéralité et ainsi ne recevoir que ce à quoi il porte intérêt.
2. CONDITIONS
Absence de volonté contraire du testateur
Pour que le gratifié puisse cantonner sa libéralité, il est indispensable que le disposant ne
l’ait pas privé de cette faculté. En effet, celui-ci dispose d’une volonté souveraine et à ce
titre il peut choisir de ne pas permettre le cantonnement. Le disposant pourra en effet
décider que la libéralité devra être acceptée dans sa globalité.
La succession doit avoir été acceptée par un héritier légal
Cette condition est énoncée par l’article 1002-1 du Code civil qui prévoit que le légataire
peut cantonner son émolument « lorsque la succession a été acceptée par au moins un
héritier désigné par la loi ». Cette condition ne se retrouve pas dans l’article 1094-1 du
Code civil à propos du cantonnement de la donation entre époux mais c’est sans doute
parce que dans la situation visée par le texte (présence d’héritiers réservataires), on est
bien en présence d’héritiers acceptants. Cette condition préalable requise pour exercer le
cantonnement vise à empêcher la vacance d’une partie de la succession. On sait que si un
héritier légal accepte la succession, c’est ce dernier qui bénéficiera des biens ou des droits
objets du cantonnement.
3. EXERCICE DU CANTONNEMENT
Mise en œuvre
Bien évidemment, il est important que le cantonnement, notamment lorsqu’il est doublé
d’une vocation légale, intervienne le plus tôt possible après l’ouverture de la succession.
Aucun formalisme n’est imposé par les textes mais certaines précautions s’avèrent
indispensables. D’une part, il est nécessaire que les héritiers légaux ou colégataires qui
vont profiter du cantonnement sachent que celui-ci a été exercé. Ce dernier va en effet
modifier leurs parts successorales et doit donc faire l’objet d’une information précise.
Concernant les biens immobiliers, il y aura lieu d’accomplir les formalités inhérentes à la
publicité foncière auprès de la conservation des hypothèques.
D’autre part, l’objet du cantonnement devra être précisé avec grande précaution afin de
savoir sur quels biens ou droits précisément va porter l’émolument du légataire ou du
conjoint survivant donataire. Par exemple, lorsqu’un testateur aura institué un légataire
universel mais qu’il laissera un héritier réservataire, le légataire pourra choisir de
cantonner son émolument à la quotité disponible afin de ne pas devoir indemniser le
2
LE CANTONNEMENT
MAJ 23/04/12
réservataire. De même, si les légataires à titre universel des immeubles souhaitent ne
recevoir que l’un de ces derniers, il conviendra bien évidemment la désignation de celui-ci
et d’en tirer les conséquences sur le plan de la publicité foncière.
Une attention toute particulière doit être accordée à la situation dans laquelle le légataire
ou le conjoint survivant donataire cumule la qualité d’héritier légal. En effet, dans ce cas,
il conviendra d’être particulièrement vigilant sur l’étendue des droits légaux. En effet, en
application du principe de l’indivisibilité de l’option de l’article 769 du Code civil, il
serait en effet inutile pour un conjoint survivant ayant accepté sa vocation légale en
usufruit, de cantonner une libéralité de l’usufruit universel à certains biens. Dans cette
hypothèse (conjoint survivant usufruitier universel au titre de sa vocation légale et
donataire de l’universalité des biens en usufruit), il sera indispensable, si le conjoint
survivant ne souhaite recueillir l’usufruit que de certains biens, qu’il renonce au préalable
à sa vocation légale.
Rappelons à cette occasion que l’option successorale étant irrévocable s’il a déjà accepté
ses droits légaux en usufruit, le cantonnement de la libéralité sera inefficace puisqu’il ne
pourra revenir sur l’option qu’il aura exercée au titre de ses droits légaux.
Dans tous les cas, il faut se rappeler que l’acceptation de la libéralité (tout comme celle
des droits légaux) est irrévocable et que, par conséquent, le cantonnement doit être
simultané de l’exercice de celle-ci. Ce qui signifie que le cantonnement doit être
concomitant à l’acte d’option. On ne pourrait envisager une acceptation simple de la
libéralité suivie d’un cantonnement.
Effets du cantonnement
Le cantonnement va bien évidemment réduire l’émolument du gratifié mais va en
conséquence augmenter les droits des autres successibles. Il en découlera une modification
de la contribution au passif. L’article 870 du Code civil prévoit en effet que « les
cohéritiers contribuent entre eux au paiement des dettes et charges de la succession,
chacun dans la proportion de ce qu’il prend ». Toutefois, les créanciers de la succession
demeurent fondés à poursuivre chacun des gratifiés selon la qualité qu’il tient dans la
succession. Le cantonnement est en effet un arrangement entre successibles qui ne met
pas en cause le titre de chacun à l’égard des créanciers (F. Sauvage, La cantonnement
des libéralités : Defrénois 2010, art. 39110, n° 33). Par conséquent, si le légataire ou
l’époux donataire a dû payer au-delà de sa part contributive compte tenu du
cantonnement auquel il a consenti, il pourra agir contre les autres successibles qui ont
bénéficié du cantonnement.
4. FISCALITE
Les articles 1002-1 et 1094-1 du Code civil prévoient expressément que le cantonnement
« ne constitue pas une libéralité faite par le légataire aux autres successibles ». En
reprenant ce raisonnement, la loi de finances rectificative pour 2006, article 53, a
introduit l’article 788 bis du Code général des impôts selon lequel « les biens recueillis
par un héritier ou un légataire en application de l’article 1002-1 ou du deuxième
alinéa de l’article 1094-1 du Code civil sont réputés transmis à titre gratuit par le
défunt ». La part ou les biens que chacun reçoit finalement en tenant compte du
cantonnement relèvera exclusivement de la succession pour donner lieu à une liquidation
des droits de mutation à titre gratuit correspondante en tenant compte de la qualité du
légataire, des successibles à l’égard du défunt (abattement, barème applicable, etc…).
LE CANTONNEMENT
3

Documents pareils