France, que veux-tu pour ta jeunesse ? La politique de la jeunesse

Transcription

France, que veux-tu pour ta jeunesse ? La politique de la jeunesse
France, que veux-tu pour ta jeunesse ?
La politique de la jeunesse
Interview de Nicolas BOUZOU, directeur-fondateur d’Asterès,
par Léa BILLON, 25 ans, journaliste diplômée du CFPJ
et Morgan BOURVEN, 26 ans, journaliste diplômé du CFJ
Morgan BOURVEN
Vous êtes l’auteur, avec Luc Ferry, d’un ouvrage intitulé La Politique de la jeunesse. Vous
revenez sur les conditions faites aux jeunes et proposez des mesures concrètes pour leur
redonner confiance en l’avenir.
Le mois dernier, 10 000 jeunes ont rejoint les rangs des demandeurs d’emploi. Ils subissent la
crise de plein fouet. Dans un tel contexte, la jeunesse a-t-elle peur pour son futur ?
Nicolas BOUZOU
Vous avez employé le mot « crise ». Or aujourd’hui, l’économie ne s’est jamais aussi bien portée. Le revenu
moyen n’a jamais été aussi élevé et on n’a jamais comptabilisé aussi peu de pauvres dans le monde. De
nombreuses opportunités de croissance se présentent. L’horizon n’est pas bouché, comme dans les
années 30.
« L’économie ne s’est jamais aussi bien
portée »
Nicolas BOUZOU
Je me suis beaucoup appuyé sur l’étude de Dominique Reynié pour écrire, aux côtés de Luc Ferry, La
Politique de la jeunesse. Elle révèle que, si les jeunes français croient en eux-mêmes, ils ne sont pas du tout
confiants dans l’avenir de leur pays. La France se classe dernière des 17 pays sondés, très loin derrière les
pays d’Europe du Nord et les pays émergents.
Photos : copyright Vincent Colin
-1-
En réalité, ce n’est pas leur niveau de vie qui pose problème. Les conditions matérielles des jeunes Français
sont bien meilleures que celles des jeunes Chinois, mais les premiers se disent beaucoup plus malheureux. Qui
plus est, les jeunes Français vivent mieux que leurs parents au même âge, qui eux-mêmes vivaient mieux que
leurs parents. Pour autant, même s’ils sont riches, ils ont le sentiment de ne manquer de perspectives. Ils
bénéficient d’infrastructures, d’un système scolaire et de protection sociale mais la dynamique se situe du côté
de leurs camarades chinois. C’est cette impression qui, en réalité, plombe le moral de la jeunesse française.
Morgan BOURVEN
Pourtant, le chômage des jeunes s’élève à près de 22,5 %. La moitié des 18-29 ans vit encore chez ses parents
faute de pouvoir se payer un logement.
Nicolas BOUZOU
Vous avez identifié le cœur du problème. Quand vous comparez votre niveau de vie avec celui de vos parents,
le vôtre ressort plus élevé. En revanche, dans le même temps, les iniquités intergénérationnelles se sont
creusées. L’analyse de l’évolution des niveaux de vie par tranche d’âge est à cet égard éclairante. Si le niveau
de vie des jeunes ne diminue pas, il baisse de façon relative. Il évolue moins vite que celui des générations plus
âgées en raison du problème majeur du sous-emploi et des difficultés d’accès au logement.
« Les iniquités intergénérationnelles se sont
creusés »
Nicolas BOUZOU
A mon sens, l’économie souffre de mesures globales non adaptées. Prenons l’exemple du logement. Le
déséquilibre structurel entre l’offre et la demande fait monter les prix. Cette situation est le fruit d’une vision
malthusienne qui freine, notamment, la délivrance de permis de construire et qui pénalise les jeunes en premier
chef. L’immobilier augmente davantage pour les primo accédant que pour ceux qui sont déjà propriétaires.
L’Insee a publié, il y a quelques années, une étude peu remarquée mais qui livre une conclusion très frappante.
Le taux d’effort, c’est-à-dire la part de revenu consacrée au logement, s’est beaucoup accru au cours de ces
dernières années puisque les prix ont augmenté plus vite que les salaires. En réalité, cet indicateur n’a progressé
que pour une seule catégorie de population : les moins de 35 ans. L’intégralité de cette augmentation a été
supportée par les jeunes.
Léa BILLON
Pensez-vous que le blocage des loyers constitue une solution à ce problème ?
Nicolas BOUZOU
Absolument pas. Cela fait maintenant près de 300 ans que le blocage des prix a été abandonné. Quand un prix
baisse ou monte de façon structurelle, cela s’explique simplement par un déséquilibre de l’offre et de la
Photos : copyright Vincent Colin
-2-
demande. Les loyers flambent car très peu d’appartements sont à louer. Dès qu’un bien est disponible, les
files d’attente s’allongent.
Le blocage des loyers risque fort de les faire augmenter parce qu’il diminue le rendement de l’investissement
locatif. Le nombre de biens sur le marché sera ainsi réduit. La sous-location se développera. Cette politique
pourrait être présentée comme une solution transitoire en attendant qu’une stratégie de densification et de
construction ne porte ses fruits. Les emplois d’avenir pourraient d’ailleurs, eux aussi, être défendus de cette
façon. Ils ne seraient qu’une mesure destinée à accompagner les populations ciblées en attendant les premiers
résultats d’une politique économique ambitieuse.
« Le blocage des loyers risque fort de les faire
augmenter »
Nicolas BOUZOU
Je n’ai rien contre le fait de bâtir des logements sociaux, mais il faudrait en construire un million par an (au
lieu des 300 000 programmés). Privilégions la ville dense, qui ne s’érige pas au détriment des conditions de
vie de la population. Le maire de Vincennes a eu raison, par exemple, de densifier sa ville. Cette politique
n’a pas du tout affecté l’environnement des habitants.
Je n’étais pas opposé non plus à l’augmentation des droits à construire. Comme les mesures en faveur du
logement social, elle crée de l’activité et de la croissance. Elle offre l’avantage de ne pas grever les finances
publiques puisqu’elle procède d’une décision réglementaire. Pour tout vous dire, je n’ai pas compris le retrait
de cette mesure. Je l’explique par des considérations politiques dommageables.
Morgan BOURVEN
Un quart des emplois occupés par des jeunes sont subventionnés, en tout ou partie, par l’Etat. Le
gouvernement appelle de ses vœux la création de 150 000 emplois d’avenir d’ici quatre ans.
Nicolas BOUZOU
Ce chiffre n’a pas été choisi au hasard. Tous les ans, 150 000 jeunes sortent du système scolaire sans
qualification. Cette mesure est donc une bonne nouvelle pour ceux qui vont occuper ces emplois. Elle est
pertinente si elle est comprise comme un outil d’insertion de personnes en difficulté, qui n’auraient pas été
spontanément intégrées par le marché de l’emploi. Si, en revanche, elle est conçue comme une mesure pour
l’emploi au service des jeunes, elle n’a pas de sens.
Une étude de cohorte a révélé que la situation des jeunes ayant bénéficié d’un emploi jeune n’avait pas
différé de celle de la population globale, alors même que le gouvernement Jospin les avait présentés comme
une façon de « mettre le pied à l’étrier ». Il me semble que les emplois d’avenir, qui coûtent un peu cher il
faut bien le dire, auront le même destin. Ils ne peuvent en aucun cas se substituer à une véritable politique de
l’emploi. L’idée sous-jacente aux contrats de génération me paraît plus astucieuse, même si je n’en ai pas
encore compris tous les détails. L’allégement de charges est conditionné à l’embauche d’un jeune et au
maintien d’un senior dans l’entreprise.
« Les emplois d’avenir d’aujourd’hui auront
le même destin que les emplois jeunes
d’hier »
Nicolas BOUZOU
Photos : copyright Vincent Colin
-3-
Dans tous les pays du monde, le chômage des jeunes est deux fois supérieur à celui de la population totale. Il
est même encore plus élevé en France en raison de certaines spécificités. Il dépend étroitement de la situation
globale du marché du travail. Il n’est ainsi que de 4 % dans des territoires connaissant le plein emploi, comme
certaines régions de Suisse ou d’Allemagne ou au Luxembourg. Il affecte en premier lieu des jeunes en
difficulté, qui sont alors aidés par l’Etat – ce qui me semble du reste tout à fait normal.
Qu’est-ce qu’une bonne politique de l’emploi ? Le rapport Rueff-Armand en pose bien les bases, tout comme
le rapport Attali, qui en est largement inspiré. C’est une politique qui repose sur la croissance, mais aussi qui
agit sur de multiples facteurs puisque l’activité économique peut être plus ou moins porteuse d’emplois. En
somme, une bonne politique de l’emploi est une politique de l’emploi globale, qui va toucher à la fois le coût
unitaire du travail et l’innovation. Permettez-moi de le rappeler à ceux qui, pendant les débats électoraux, ont
opposé les deux. Il faut à la fois réduire les cotisations patronales, qui financent la moitié de notre protection
sociale, et augmenter la valeur ajoutée. L’Allemagne a mené ce type de politique créatrice d’emplois et donc
créatrice d’emplois pour les jeunes. C’est ce qui a aussi permis aux Etats-Unis de voir l’activité repartir.
La question du chômage est multifactorielle par nature alors que le débat public a tendance à l’expliquer
uniquement par le coût du travail ou l’absence de croissance. Pour le combattre, il faut actionner plusieurs
leviers, diminuant du même coup la visibilité des actions conduites. Dans ce domaine, comme dans d’autres,
une mauvaise politique entraîne une iniquité intergénérationnelle au détriment des jeunes. Quand des mesures
inadaptées sont mises en œuvre en matière de logement, ce sont eux qui en souffrent les premiers. En
revanche, ils seraient les premiers bénéficiaires d’une politique de construction massive.
Morgan BOURVEN
L’absence de représentation des jeunes au plus haut niveau explique-t-elle l’absence de solution à leurs
problèmes ?
Nicolas BOUZOU
Nous nous sommes beaucoup posé cette question avec Luc Ferry. Je tiens à affirmer que, contrairement à
certaines idées reçues, il n’y a pas de conflit intergénérationnel. Les parents n’ont jamais autant couvé leurs
enfants. Leurs problèmes d’accès au logement et à l’emploi ne sont pas intentionnels. Ils résultent des
mauvaises politiques qui ont été menées.
« Il n’y a pas de conflit intergénérationnel »
Nicolas BOUZOU
Les jeunes sont, il est vrai, peu représentés en politique, mais d’autres catégories ne le sont pas non plus. Les
dirigeants d’entreprise ne sont pas beaucoup présents à l’Assemblée nationale par exemple. Je suis pour ma
part persuadé que la fin du cumul des mandats, qui a induit la création d’un métier et d’une classe politique,
aurait un effet très positif sur l’économie. Elle a aussi formé une véritable gérontocratie. S’il y avait autant de
mandats que d’élus, les femmes, les jeunes ou les chefs d’entreprise seraient mieux représentés. Ce serait sain
pour notre démocratie.
Photos : copyright Vincent Colin
-4-
Léa BILLON
Comment qualifiez-vous la situation actuelle si nous ne vivons pas une période de crise ?
Nicolas BOUZOU
Les économistes distinguent des cycles d’activité très longs dits de Kondratieff. Il a mis au jour des périodes
de cinquante ans ponctuées par des crises successives, remettant en cause la perspective d’une grande crise
mettant à bas le capitalisme. Joseph Schumpeter a pour sa part remarqué qu’elles étaient aussi liées à des
vagues d’innovation. La crise que nous vivons n’est ni plus ni moins que le passage d’une économie à une
autre, comparable à l’introduction de l’imprimerie, de la machine à vapeur ou de l’électricité dans l’économie.
Tout le rôle du politique est précisément de veiller à ce que cette transition se passe bien.
Les NTIC entraînent des destructions créatrices – et pas des créations destructrices. Les plans sociaux actuels
en sont la marque. Ils illustrent la destruction progressive d’une ancienne économie, alors que la création de
nouvelles entreprises est moins visible. Les Chinois rendent compte de ce phénomène par un beau proverbe :
« on entend un arbre qui tombe et pas les forêts qui poussent ». Aujourd’hui, 10 000 emplois sont supprimés
tous les jours. Un ministre ne peut pas aller au chevet de tous ces nouveaux chômeurs.
« On entend un arbre qui tombe et pas les
forêts qui poussent »
Nicolas BOUZOU
Au risque de vous choquer, je suis persuadé qu’en France, l’économie ne détruit pas assez d’emplois. Le
progrès économique, c’est avant tout de nouveaux services ou de nouveaux procédés. C’est aussi des
entreprises qui en remplacent d’autres, qui ne sont pas parvenues à s’adapter à ce nouveau contexte.
Le rôle des politiques n’est pas d’enrayer ce phénomène en empêchant les suppressions d’emplois car cela
affecte la croissance. Ils doivent en revanche tenter de minimiser le coût social lié au passage d’une économie
à l’autre. Il faut aider les personnes mais pas les emplois, par exemple en soutenant la formation. Nous
n’assistons pas à une crise, mais à une mutation vers une économie qui, dans dix ou quinze ans, sera plus
prospère. Les problèmes que nous rencontrons aujourd’hui, qui touchent les banques, les finances publiques
ou l’organisation institutionnelle, se répètent toujours à la fin d’un cycle Kondratieff. Ils se sont produits au
Moyen-âge, à la fin du XVIIIème siècle et à la fin du XIXème siècle. L’invention de l’imprimerie a, en
particulier, complètement perturbé l’économie de l’époque.
Léa BILLON
Créons-nous assez d’emplois ?
Nicolas BOUZOU
Les récents chiffres du chômage ont traumatisé, à juste titre, beaucoup d’observateurs. Quand nous les
examinons attentivement, ils confirment que nous ne détruisons pas assez d’emplois. Les licenciements
économiques ne sont pas significatifs. Les sorties de Pôle emploi diminuent faute de créations d’emploi
suffisantes.
Photos : copyright Vincent Colin
-5-
Les jeunes, dont je suis encore, doivent être force de proposition pour inverser la tendance. D’une certaine
manière, la France vit une situation comparable à celle de l’Ancien régime. L’innovation y était freinée par
les corporatismes, le poids des charges et de la réglementation.
Morgan BOURVEN
Vous citez, dans votre ouvrage, une étude ayant relevé que de nombreux jeunes Français souhaitent devenir
fonctionnaires. A l’inverse, leurs camarades d’Outre-Rhin souhaitent majoritairement être chefs d’entreprise.
Est-ce propre à l’esprit français ?
Nicolas BOUZOU
Je dois bien avouer que oui, mais ce n’est pas très grave. La plupart de ces jeunes ne deviendront pas
fonctionnaires puisque l’on ne créera plus ces postes pendant longtemps. Ils ne travailleront pas non plus dans
les grandes entreprises. Ils devront créer leur propre structure et l’emploi se déplacera dans de plus petites
organisations. Globalement, la taille des entreprises se réduit même si la concentration à l’œuvre dans
quelques secteurs d’activité peut donner une image déformée de cette réalité. Les créations se multiplient.
Dans ce contexte, l’esprit d’entreprise se développera de lui-même. Il est d’ailleurs déjà bien ancré dans notre
pays. En France, beaucoup de jeunes créent leur entreprise en sortant de l’école. Citons Priceminister,
Dromadaire ou Sarenza. Ce n’est pas le cas partout.
Je regrette de ne pas avoir créé tout de suite mon entreprise. Je conseille d’ailleurs à tous les jeunes de
commencer à travailler dans de petites structures car cette organisation deviendra dominante dans les années
qui viennent. Ils s’habitueront à ce que deviendra leur quotidien.
« Je conseille à tous les jeunes de commencer
à travailler dans de petites structures car cette
organisation deviendra dominante dans les
années qui viennent »
Nicolas BOUZOU
Morgan BOURVEN
Les entreprises françaises sont-elles armées pour affronter la mondialisation ?
Nicolas BOUZOU
Plus vous êtes petit, plus vous êtes armé pour affronter la mondialisation. Darwin disait très justement que les
extinctions touchaient d’abord les grands animaux. Un lézard peut se faufiler quand une météorite tombe,
alors que le dinosaure ne le peut pas.
La survie économique est conditionnée par la capacité d’adaptation d’une entreprise, et non par sa taille. En
cela, ce message est très actuel. Toutes les entreprises qui connaissent des plans sociaux ne sont pas mal
gérées – bien au contraire. Elles peinent tout simplement à s’adapter. Prenons l’exemple d’Air France, qui
résiste mal à la concurrence du low-cost – à titre d’exemple, Easy jet compte deux fois plus de court et de
moyens courriers que la compagnie nationale ! Dans ce type d’entreprise, le coût du changement est très élevé
et il engage des milliers de salariés. Dans une petite structure, quand on se trompe, on recommence.
Photos : copyright Vincent Colin
-6-
Le principe de précaution « à la française » est particulièrement anti-jeunes
Fernand Braudel affirme, à juste titre, que l’économie-monde change de centre à chaque fois qu’une vague
d’innovation se produit. Ce phénomène naturel est historique. Après avoir été positionné dans les Flandres, à
Londres ou aux Etats-Unis, il se déplace aujourd’hui vers le Pacifique. Il existe, chez nous, des dispositifs
publics qui nous empêchent de profiter à plein de la mondialisation. Par exemple, la loi française interdit de
décoder un génome alors que l’essentiel de l’innovation a trait aux sciences du vivant, dans lesquelles un
géant de l’informatique comme Google a investi. Permettez-moi un parallèle : pendant un temps, la
fabrication de livres avait été interdite après l’invention de l’imprimerie.
Le principe de précaution « à la française » est, à cet égard, particulièrement anti-jeunes. S’il s’applique dans
tous les pays, il a été élevé en valeur constitutionnelle en France. Autrement dit, s’il existe un risque, il est
interdit d’investir. Prenons l’exemple très polémique du gaz de schiste. Précisons-le tout de suite : je suis
incompétent scientifiquement sur ce sujet. Mon propos ne se place pas sur ce plan. S’il s’avère que
l’exploitation du gaz de schiste ne présente aucun risque environnemental, nous aurions tort de ne pas avoir
exploré cette voie en amont. Nous nous priverions de ressources économiques majeures puisque nous en
avons sur notre sol. Bien sûr, si la dangerosité de cette technologie est confirmée, il faudra s’en retirer.
« Le principe de précaution « à la française »
est particulièrement antijeunes »
Nicolas BOUZOU
Morgan BOURVEN
Si ces rigidités persistent, que doivent faire les jeunes ? Faire la révolution ou partir à l’étranger ?
Nicolas BOUZOU
Je ne suis pas du tout révolutionnaire. Je déteste le conflit. Edgar Faure disait d’ailleurs qu’en France, nous
sommes toujours en avance d’une révolution parce que nous sommes toujours en retard d’une réforme.
Je privilégie la conviction et la pédagogie sur les vrais enjeux de l’économie. Abandonnez aussi le concept de
décroissance aux plus anciens. La solution aux problèmes de pauvreté, de santé publique ou d’environnement,
c’est la croissance. C’est elle qui apportera des réponses technologiques au problème du gaz à effet de serre,
pas la décroissance.
« Laissons le concept de décroissance aux
plus anciens »
Nicolas BOUZOU
Il ne faut pas non plus partir à l’étranger même s’il faut y être présent et y investir. C’est une condition de
survie. Il faut essayer de changer les choses ici et maintenant. Il s’agit d’un enjeu politique majeur, mais qui
n’engage pas la seule responsabilité des personnes à la tête du pays. La rigidification de la France n’est que la
traduction de l’état de son opinion publique.
Il faut – encore une fois – faire de la pédagogie et retrouver la foi dans le progrès. Jusqu’à la seconde guerre
mondiale, la société était mue par un objectif collectif. Elle souhaitait s’élever au-delà de la nature. Dans les
Photos : copyright Vincent Colin
-7-
années 70, des philosophes ont réhabilité la peur. Or quand elle devient un principe collectif, elle bloque toute
action et toute croissance. Elle ne peut être préférée que sur le plan individuel.
Les jeunes doivent aider la société à retrouver foi en elle-même. Je le répète : c’est le progrès, et lui seul, qui
va résoudre tous les problèmes de l’humanité.
« Les jeunes doivent aider la société à
retrouver foi en elle-même»
Nicolas BOUZOU
Léa BILLON
Comment aider les jeunes à se ré enchanter, à avoir envie de créer et d’innover ?
Nicolas BOUZOU
Il faut investir de façon prioritaire dans l’éducation, qui est l’un des domaines les plus innovants aujourd’hui.
J’ai travaillé sur le système indien. Face à un défi de taille, sortir 200 millions de personnes de la pauvreté, ils
investissent beaucoup dans la formation, et en particulier dans la formation à distance puisqu’il existe une
pénurie de professeurs. Il est ainsi possible d’apprendre les langues 24 heures sur 24. En France, le monde
enseignant n’est pas encore prêt à de tels bouleversements.
La jeunesse française ne croit pas dans la croissance et, en réalité, dans son pays. Ne vous demandez pas ce
que le pays peut faire pour vous. Demandez-vous ce que vous pouvez faire pour le pays.
Photos : copyright Vincent Colin
-8-

Documents pareils